Pieds-Noirs d'hier et d'aujourd'hui janvier 2000 n°108
"Les crimes du colonialisme"
vus par Le Courrier International
Monsieur le Rédacteur en Chef Le Courrier International
Monsieur,
Vous avez publié dans votre numéro 463, rubrique "Mémoire",
un texte d'un certain Amine Lofti, qui semble être quelque chose
au quotidien algérien El Watan, intitulé : "les crimes
du colonialisme ". C'est un parallèle entre les épisodes
les plus sombres, etc... et d'autres crimes contre l'humanité qui,
selon lui, resteraient occultés. Il ne parait d'ailleurs pas vraiment
au courant, puisqu'il qualifie de sujet tabou celui de la collaboration
sans paraître s'apercevoir qu'on lui a consacré quelques
dizaines de milliers de pages depuis 50 ans. Mais là n'est pas
l'essentiel...
Notre homme se croit obligé de dénoncer, en toute originalité,
les "crimes du colonialisme "dans les mêmes termes qui
ont servi il y a 40 ans à la propagande, de diffusion mondiale,
qui visait avec d'énormes moyens, à éliminer la France
d'Afrique du Nord. C'était de bonne guerre, mais une fois le problème
liquidé avec la brutalité que l'on sait, peut-on sérieusement
ressortir ces arguments?
A l'heure où l'on entend des écrivains algériens
déclarer que 80% des Algériens regrettent la France... et
que le plus grand malheur pour eux est le départ des Pieds-Noirs
(déclarations récentes au Figaro), il serait peut-être
temps de passer enfin de la langue de bois à la réalité
historique...
Monsieur Amine Lofti parle de génocide des Algériens, par
la France évidemment miracle de la providence, qui a fait qu'un
peuple génocidé se multiplie par 5 pendant 132 ans de présence
française... Il est question aussi de politique de rapine et de
pillage systématiques sans doute était-il question des terres
incultes que la France a eu l'audace de mettre en culture, et du pétrole
saharien qu'elle a eu le front d'explorer et de découvrir, avant
de le remettre, tous investissements faits à ces malheureuses victimes
du colonialisme... Il nous parle aussi de l'appropriation de la force
de travail des peuples sans avoir le mauvais goût d'épiloguer
sur la qualité de cette "force de travail", remarquons
que depuis l'indépendance, elle se précipite chez nous en
flots serrés sans qu'on la sollicite vraiment, et sans que l'horreur
colonialiste puisse en être tenue pour responsable...
Monsieur Lofti pose une bonne question qui pourra évaluer l'étendue
des dommages peut-être irréparables subis par les peuples
d'Afrique ? qui pourra en effet évaluer le crime d'avoir couvert
de routes un pays où il ne s'en était pas construit une
seule depuis les Romains, d'avoir donné une administration toute
constituée à un peuple qui n'avait connu que l'anarchie
tribale, d'avoir donné une langue véhiculaire à des
peuplades cloisonnées dans leurs dialectes depuis la nuit des temps,
dont pas un habitant sur mille ne savait écrire en 1830, bref d'avoir
fait, en 132 ans, d'un des pays les plus arriérés de la
planète, un état moderne supérieurement équipé.
L'auteur du papier évoque imprudemment, pour finir, " une
épaisse amnésie "... C'est, en effet, l'expression
qui semble la plus adaptée à son cas.
Ce qui est le plus choquant dans cette publication, ce n'est pas la dialectique
de son auteur, qui n'est que la Voix de son Maître FLN. lequel ne
rigole pas avec la légende officielle qui fonde son pouvoir
,
non, le plus choquant est qu'une revue comme la vôtre dont le titre
suggère quelque chose de plutôt sérieux, publie sans
commentaires de pareilles balivernes.
Je représente par ce courrier l'opinion des Français d'Algérie.
vulgairement et inexactement appelés "Rapatriés ",
dont je ne crains pas de dire qu'ils sont absolument unanimes sur ce point.
Leur point de vue valant bien, vous me l'accorderez, celui du Lofti sus-nommé,
vous aurez à cur nous en sommes persuadés, de publier
cette lettre dans vos colonnes comme vous le commande l'honnêteté.
Croyez, monsieur le rédacteur en chef, à mes sentiments
distingués.
Le responsable du C.V.R
M. LAGROT
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