Alger, Algérie
: vos souvenirs
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Un concours d'événements incroyable Il y a quelques mois (début mars 2005), j'écoutais la radio 'France Inter' et tombe tout à coup sur une émission, prise en cours j'entends vaguement des propos (exécution, bourreau, guillotine ) le sujet m'intéresse, vous allez comprendre pourquoi cela devenait très troublant pour moi. Et lorsque l'animateur, a donné des détails sur l'invité de l'émission qui était l'auteur d'un livre 'Paroles de bourreau' aux éditions Imago, à l'énoncé du nom de l'auteur "Fernand MEYSSONNIER ", cela m'a renvoyé 44 ans en arrière (ce nom était enfoui au fin fond de ma mémoire) Je rappelle que dans les années 1961/62, mon père
était policier, il fut envoyé à Alger pour les événements.
Petite confusion au départ, je pensais que c'était le père qui parlait ! J'ai vite compris que cela n'était pas possible, vu l'âge et son état de santé, j'ai compris que c'était le fils. J'ai appris à la lecture de son livre, que Maurice Meyssonnier est décédé quelques temps après sa venue en France (en décembre 1963). Après diverses recherches auprès de son Editeur, j'ai pu écrire à Mr Fernand Meyssonnier, et sommes entrés en contact. Après quelques échanges téléphoniques j'ai pu rencontré Fernand Meyssonnier à Fontaine de Vaucluse le 9 mai 2005. Lors de notre rencontre, Fernand Meyssonnier, m'a gentiment dédicacé son livre. " Pour mon ami Aitelli Robert, sujet difficile sur la guerre d'Algérie. J'espère que vous saurez voir en moi l'homme juste. Meyssonnier le 9.05.2005 " Histoire d'autant plus incroyable il a reçu en plus de ma lettre un autre courrier d'un monsieur du Var, qui lui relate à l'identique les mêmes souvenirs que moi-même (même âge, 1 frère, père policier, le même appartement au dessus du bar, petite différence la période se situe de 1957 à 1961, alors que nous y étions en 1961, d'après mes calculs nous avons dû nous croiser ) Après des recherches, j'ai pu entrer en contact par courrier avec ce monsieur et suite à son appel téléphonique du 13 mai 2005, nous nous sommes promis de nous rencontrer . Après quelques jours passés, nous avons
finalement conclu d'un rendez-vous pour le Dimanche 5 juin 2005 sur Marseille,
et j'ai fait la connaissance de Serge Boué et son épouse
Fabienne. J'ai appris qu'il fréquenta la même école et nous avons eu le même instituteur Mr Mouchan (c'est lui-même qui me donna le nom). Notre instituteur avait une particularité il lui manquait les 2 mains plus tard nous fûmes témoin de l'attentat qui détruisit mon école. Je fus surpris de la curiosité que manifestait Fabienne l'épouse de Serge sur nos récits et souvenirs. Nous avons projeté d'allez voir tous ensembles Fernand Meyssonnier à Fontaine de Vaucluse (je vous rappelle que je l'ai déjà rencontré une première fois). Au téléphone j'avais relaté à
Fernand Meyssonnier, mon souvenir de l'instituteur Mr Mouchan, et il m'informa
avoir reçu voilà quelques années un courrier de Nice
de ce monsieur. Après quelques recherches, je suis tombé sur une dame, qui m'annonça qu'elle était la fille de Mr Mouchan (la petite fille que j'avais connue, voilà 44 ans...incroyable !) et m'apprit que son père était décédé en 1993. Comme convenu, nous sommes allés rencontrer Fernand Meyssonnier à Fontaine de Vaucluse le dimanche 19 juin 2005, nous avons passé une excellente journée à nous remémorer des tas de petits détails. Ma rencontre avec Fernand Meyssonnier, un personnage au parcours 'Hors du commun ' Ex EXECUTEUR de la République Bien que je sois contre la peine de mort, il faut se mettre dans le contexte de l'époque. Tout d'abord je vous le présente: Fernand Meyssonnier âgé de 73 ans, vit maintenant une paisible retraite, dans le sud de la France à Fontaine de Vaucluse (dans le Vaucluse) Il est le dernier ex exécuteur (plus communément
appelé Bourreau) de la République. En 1958, son père étant malade il le remplace en tant 'qu'exécuteur en chef', il actionna par 2 fois le couperet de la guillotine ! ! Il exécuta le dernier condamné en 1959, ensuite la France cessa les exécutions en Algérie. Il partit en juin 1961, un peu avant l'indépendance de l'Algérie, à Tahiti, les temps furent durs pour lui. Il rencontra une tahitienne 'Simone' qu'il épousa et eurent une petite fille. Après de nombreux petits boulots, il sus rebondir et créa diverses entreprises (restauration, société de repassage ) il fit de bonnes affaires. Ils rentrèrent en France et s'installèrent à Fontaine de Vaucluse en 1990, son projet fut de monter un Musée de la Justice. En 40 ans il pu se procurer de nombreuses pièces uniques. Suite à trop de tracasseries et quelques problèmes de santé, il ferma le musée en 2001. Bien qu'il se soit débarrassé de nombreuses
pièces, il possède toujours une vraie guillotine. br, br, br .. Lors de ma visite, j'ai revu la maquette de la guillotine (qui m'a tant marquée il y a 44 ans) et qu'il avait fabriquée à 16 ans, pour son père. Il est l'auteur d'un livre 'Paroles de Bourreau' aux Editions Imago (propos recueillis par Jean François Bessette). Il y livre ses pensées, ses réflexions, des témoignages saisissants, sur ces exécutions et cette période trouble de l'Algérie. Un livre que je vous recommande. J'ai appris qu'un différend l'opposait à Mr Bessette, la personne qui recueillit et mit en page ses témoignages. En effet Fernand Meyssonnier (en toute confiance) lui prêta des archives personnelles, des documents uniques sur son père auxquelles il tenait énormément, certains de ses originaux auraient été 'égarés' par Mr Bessette bizarre ! ! Il est le dernier ex-exécuteur vivant, puisque le dernier ayant exercé en France, Mr Marcel Chevalier est mort en 1995 (il fut en charge de la dernière exécution à Marseille d' Hamida Djandoubi le 10 septembre 1977) ensuite la peine de mort fut abolie. Le parcours de Fernand Meyssonnier, est loin d'être des plus banal, j'ai trouvé en cet homme, une personne juste, honnête et fidèle à ses convictions.
Il est vrai que je n'ai plus trop relaté ces années passées, c'était 'MON HISTOIRE PERSONNELLE' enfouie en moi. Il faut savoir que dans les années 1961/62 je ne
me souviens plus de la date exacte, mon père était policier,
il avait été envoyé à Alger pour les événements
d'Algérie. En effet il était 'le Bourreau d'Alger', oui l'exécuteur des sentences Il avait pratiquées plus de 340 exécutions, son fils Fernand 'travailla' avec lui (il fût son adjoint). Je me souviens très bien, au début j'étais très impressionné par ces récits sur les exécutions qu'il avait pratiqués. Il parlait d'une voix bizarre (en effet il avait été opéré, suite à un cancer de la gorge). Mes souvenirs portent sur la maquette d'une guillotine qu'il nous montrait, et qui trônait dans une pièce de la maison. Maquette construite par son fils Fernand à l'age de 16 ans. Nous étions à quelques mois de l'indépendance
et en pleine guerre, la vie devenant de plus en plus dure, Fernand son
fils avait déjà quitté Alger pour Tahiti en Juin
1961, un peu avant notre arrivée. Ensuite son épouse est
partie s'installer à Nice, en espérant qu'il vienne la rejoindre
par la suite. Après l'indépendance, à notre retour à Marseille, mes parents restèrent en contact avec Mme Meyssonnier. Quelques temps plus tard un courrier nous annonça le décès de Mr Meyssonnier ! Bien que je sois contre la peine de mort, je n'ai jamais jugé cet homme il faut se mettre dans le contexte de l'époque, j'ai le souvenir d'un monsieur juste et courageux, qui resta fidèle à ces convictions jusqu'à la fin
Je garde de terribles souvenirs: la guerre, les attentats, les bombes, les règlement de compte cette période fut l'une des plus dramatiques de ma vie, j'ai souvent pleuré le soir dans mon lit. Mon frère Alain, de retour en France, a commencé à avoir des problèmes de vue, petit à petit sa vue s'est considérablement détériorée, jusqu'à devenir presque aveugle, je pense que notre séjour et la grosse peur en est la cause Bien que je sois allé très peu à l'école la bas, j'ai le souvenir de mon instituteur monsieur Mouchan, qui était aussi le directeur de l'école il avait une particularité . En effet il lui manquait les deux mains, il avait des prothèses, cela faisait un claquement bizarre, lorsqu'il les changeait, c'était assez impressionnant ! Mon père était allé le voir, et lui avait expliqué notre histoire, pour savoir s'il pouvait nous prendre en cours d'année, il avait accepté. Sa fille était avec nous dans sa classe, il était sévère mais très juste. Il avait une belle écriture et faisait de belles lettres au tableau. J'ai le souvenir, qu'une après-midi, en rentrant de promenade, nous allions passés devant mon école, et avons vu deux hommes qui courraient dans notre direction, arrivés à notre hauteur, ils nous ont crié 'faites vite demi tour, ça va sauter' quelques secondes plus tard, mon école venait d'exploser . Un matin avec mon père, nous sommes allez chez le coiffeur, un convoi de soldat fut pris pour cible, nous étions au milieu de l'embuscade entre les deux feux, se fut horrible, des soldats gisaient dans les camions, les autres à l'affût prêt à tirer sur tout ce qui bougeait et nous criaient de nous mettre à l'abri, nous nous courrions dans la rue, c'était irréel Quel contraste, en dehors des moments dramatiques, j'ai de très bons souvenirs: Le bar de Mr Meyssonnier, les 2 petites gazelles dans la cour, avec mes frères nous jouions souvent avec elles, nous nous régalions à leur donner du pain, il fallait les surveiller, elles avaient tendance à donner des petits coups de cornes je n'oublie pas les grenadines que nous offrait Mr Meyssonnier. Je n'avais jamais vu autant d'orangers dans les jardins.
Nous étions amateurs de crevettes, et à Alger leurs prix
étaient dérisoires, ma mère en achetait souvent et
c'est avec régal que nous les dégustions. Avec mes frères et une petite amie de l'école, je pense à la fille (je n'en suis pas sur) de Mr Mouchan mon instituteur, nous organisions des petites kermesses dans la cour du bar de Mr Meyssonnier. |