La circulation et le stationnement des
voitures à Alger.
S'il est un problème
difficile à résoudre, c'est sans doute bien celui de la
circulation et du stationnement des voitures, à Alger. La Municipalité,
M. Billon du Plan en tête, a fait de gros efforts, parfaitement
louables, pour arriver à satisfaire aux nombreuses exigences
et des piétons, et des automobilistes. Malgré cela, il
reste encore beaucoup à faire et le plus triste de l'histoire
est de se trouver en face de complications telles qu'il paraît
difficile sinon de les supprimer totalement, du moins d'en amoindrir
les néfastes effets.
On peut se convaincre à chaque instant de la quantité
sans cesse croissante des véhicules à moteur. Autos, camions,
motos et tricycles sont innombrables à Alger. Et, qui plus est,
pendant les heures de travail, chacune de ces machines, au lieu de circuler,
reste le plus souvent rangée le long des trottoirs, obstruant
une partie considérable de la chaussée, jusqu'au moment
où elles seront remises en route pour provoquer des embouteillages
plus grands encore et faire blanchir les cheveux des agents préposés
à la circulation.
Pendant les heures de stationnement, il arrive fréquemment que
d'autres conducteurs s'arrêtent, pendant quelques instants, à
leur côté. C'est alors, surtout dans les rues étroites
(comme la rue Mogador où est autorisé l'arrêt indéfini),
un bruit effrayant de trompes et de klaxons. A ces voix, plus ou moins
musicales, mais toujours assourdissantes, se mêlent les hurlements
de chauffeurs, les cris et les injures, quand ne sont point échangés
des coups. Chaque jour, et plusieurs fois par jour, il nous est donné
d'assister à des scènes burlesques et indignes d'hommes
policés. Il n'est pas jusqu'aux conducteurs femmes qui ne s'irritent
et ne mêlent leurs voix cristallines à la cacophonie effarante
des avertisseurs. C'est un tohu-bohu absolument indescriptible, où
chacun dit la sienne. Les plus nerveux, oubliant toute prudence, font
des écarts dangereux, montent sur le trottoir, sans souci des
accidents qu'ils peuvent provoquer et filent en rasant les murs de façon
à ne laisser aucune place au malheureux piéton qui doit
se réfugier sous les porches.
En un mot l'encombrement occasionné par le stationnement des
voitures, est dangereux et cause d'une anarchie parfaitement inadmissible.
Je sais que " la critique est facile... " Et, sans doute,
des spécialistes ont déjà, à de nombreuses
reprises, essayé de réduire autant que possible les inconvénients
créés par cet état de chose. On à, à
certains endroits de la ville où les artères sont larges
et pas trop fréquentées, marqué l'emplacement réservé
aux voitures. Cette mesure, si elle démontre clairement que les
pouvoirs ne se désintéressent point de la question, se
montrent cependant parfaitement insuffisante.
Il fut question, à certain moment, de modifier l'aspect général
du boulevard Làferrière et de créer, au-dessous
du Monument aux Morts, un garage en sous-sol qui aurait contribué
à l'esthétique de cette splendide voie en même temps
qu'il eut rendu aux automobilistes et aux piétons de signalés
services.
C'était là semble-t-il une idée heureuse, mais,
de même que l'enfer est pavé de bonnes intentions, tout
s'est borné à une idée jamais suivie de réalisation.
C'est dommage, car, si cette mesure était incapable de solutionner
définitivement le problème, du moins aurait-elle été
un premier pas vers des temps meilleurs.
On a objecté qu'Alger était trop étendue dans le
sens de la longueur pour qu'il soit créé un tel garage.
Évidemment, les personnes dont les affaires les appellent vers
le haut de la rue Michelet n'auraient point été satisfaites
; même si cela n'avait dû n'être pour eux qu'un sujet
d'indifférence, il est certain que d'autres y auraient trouvé
leur compte.
Le quartier des affaires demeure encore dans ces bonnes vieilles rues
Bab-Azoun et Bab-el-Oued, et les voûtes de la place du Gouvernement
auraient encore pu servir à garer les voitures si encombrantes
de la rue Jules-Ferry par exemple.
Ce ne sont là que des idées qui valent, ce qu'elles valent
; cependant il faut absolument que soit mis à exécution
un projet donnant une plus grande sécurité à la
fois aux piétons et aux automobilistes.
Nombreuses sont les difficultés qui se dressent et semblent,
à première vue, insolubles. Dans l'aménagement
du nouveau quartier de la Marine, a-t-on prévu non seulement
des espaces suffisants pour que pénètrent à profusion
l'air et la lumière, mais aussi des aménagements spéciaux
pour que les voitures puissent à la fois être en sécurité
et n'être pas un sujet de gêne et d'accidents ? Partout
où quelque modification que ce soit doit être adoptée,
il est indispensable que l'on songe à cette question primordiale.
Alger est une très belle ville, tout le inonde le sait, tout
le monde s'en réjouit. Mais, combien plus belle serait notre
capitale, si elle était délivrée de ces dangereux
encombrements, si l'air bleu ne vibrait pas trop de ces mille hurlements
impitoyables à nos oreilles, à tout notre équilibre
physique et mental.
Nous savons qu'il est très difficile aujourd'hui d'effectuer
des réalisations immédiates. Cela coûterait trop
cher et nous avons déjà trop d'argent à donner
pour nous imposer de nouveaux sacrifices.
Mais, chaque fois qu'est annoncée une modification ou une création,
nous serions heureux qu'il soit fait une place à cette question
: la circulation et le stationnement. Plus nous allons, plus cela est
urgent, nécessaire, pour ne pas dire indispensable. Ce souci
doit primer tous les autres et rien ne doit être entrepris sans
qu'il soit discuté le premier. Il y va de la sécurité
de tous, piétons et automobilistes.