Ferry
( les Salines )
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Pour situer Ferry, les Salines |
------Quand
Gaspard Monge devient Ministre de la Marine il entreprend une purge au sein
de la Royale. Il va la priver de ses cadres et l'affaiblir au point que
celle-ci, qui venait d'atteindre des sommets avec la guerre d'indépendance
américaine, ne sera plus en mesure d'assurer le harcèlement
des barbaresques au large d'Alger. ------Garpard Monge retarda-t-il, par la même, la colonisation de l'Algérie ?... nul n'est en mesure de l'affirmer aujourd'hui. Ce qui est sûr c'est, qu'un peu plus tard, le déclin de la sériciculture dans les Cévennes, accentué par la maladie de Pébrine, va pousser un de ses petits cousins, Auguste Monge - il alors 28 ans-à quitter Saint Jean de Ceyrargues (Gard) pour l'Algérie. ------D'abord employé comme ouvrier, affecté aux travaux de défrichement, de plantation d'arbres, d'entretien des routes de la "petite Cayenne d'Algérie", Relizane. C'est là qu'il va faire la connaissance de Mathieu Allégre, un déporté politique transporté en Algérie à la suite du coup d'état de 1851. Une décision du 1er octobre 1852 a commué sa peine en surveillance et décider de son retour à Ganges. ------Mathieu a "le virus" de l'Algérie et, deux ans plus tard, sollicite un passage gratuit, pour rejoindre son beau-frère Justin Foucard, employé aux salines d'Arzew ; il obtient satisfaction. Plus tard il figurera sur "la liste générale des citoyens victimes d'un coup d'état faisant partie de la catégorie visée par l'Article 6 de la loi du 30 juillet 1881, proscrits ou victimes frappés par des décrets ou arrêtés de transportation", sous le n°23 - Profession : fermier des salines - Domicile : Relizane (Oran). ------Entre temps, en effet, les deux beaux frères ont obtenu la concession des salines proches de Relizane. Les affaires sont florissantes. Devenu propriétaire à Relizane, Mathieu siège à la Commission des Centres de colonisation qui va décider, les 24 et 25 février 1876, la création d'un Centre de colonisation, à 13 kilomètres de Relizane, sur la route d'Inkermann et, au delà, Alger. Cette région a été pacifiée par les généraux Bourjolly et Lamoricière, on prête à ce dernier d'avoir ainsi rapporté au Gouverneur ..."le combat de Zemmorah a causé dans toute la population un tel découragement qu'il a puissamment contribué à sa soumission, l'impression risque d'en être durable"... Le site d'Oued-Djemâa ------Le site de ce nouveau Centre de colonisation, Oued-Djemâa, fut, probablement, choisi parce qu'il était à la croisée de la route Oran-Alger et de la route du sel des Bédoins et des targuis se rendant aux salines, mais également par la présence d'un barrage érigé, par les romains, sur l'oued qui va donner son nom au village. ------Nous sommes là sur le territoire des tribus des Harartsa et de la tribu des Maghzen, dominée par la famille Madani dont on disait qu'elle était l'une des rares descendantes directes de Mahomet. Auguste Monge, Benjamin Olive, Fuleran Béniquet, Jean Villaret furent les premiers à s'y installer bientôt rejoints par Adolphe Bayet, JeanFrançois Mounier, plus tard Olive Bellident. ------Pour la majorité ils débarquaient là avec leur seul courage, le coeur rempli d'espoir de retrouver, un jour, une vie meilleure. Comme l'a écrit, dans les années 50, celui qui est aujourd'hui le président de notre Association *, Julien Jacquet: "quand on débarque à Oran avec un franc cinquante en poche, une femme et un enfant et, pour tout bagage, un baluchon avec quelques vêtements, il faut être armé d'une sacrée dose d'enthousiasme"... Comme ses amis d'infortune, l'ancêtre des Jacquet dut défricher sa concession sur laquelle foisonnait le jujubier. ------Le Centre de Oued-Djemâa s'étendra sur 1431 hectares, dépendant de la Commune Mixte de l'Hillil, avant de dépendre de celle de Zemmorah à la création de celle-ci le 14 avril 1888. ------Le 14 juillet 1876 l'ingénieur ordinaire remet son rapport concernant la création du Centre Captage de la fontaine d 'El-Beida Fouille et pose 38 500 F captage---------------------------------------------------------3oooF Nivellement et plantations --------------------------------2 000 F Ecole et chapelle --------------------------------------------16500 F Routes, chemins d'accès Chemin des Salines -------16 500 F Total-----------------------------------------------------------76 850 F ---------Le plan du village était à l'image de la majorité des autres, un rectangle limité à l'est d'un de ses côtés par l'Oued-Djemâa. Sur les pourtours les "Boulevards" appelés à recevoir les plantations d'arbres (caroubiers, mûriers, faux-poivriers). La rue centrale, large avenue, passage de la RN4 Oran-Alger. --------Au centre du bourg, trois grandes places, deux au nord de la RN 4, séparées par la route de la gare et des Salines, au sud de la RN4, une place (de la superficie des deux précédentes) constituées des lots 154 et 155 réservés à recevoir l'ensemble Eglise-Mairie-Ecole. --------Cet ensemble Eglise-Mairie-Ecole sera donné en adjudication à un ouvrier d'art, Jean-André Lacotte installé depuis peu à Relizane, entrepreneur en maçonnerie. Né à Mascara, ses parents sont des pionniers de la première heure. Il va travailler pour différents colons avant de décider d'abandonner son métier et de solliciter une concession, ce qu'il obtiendra au titre de (article 3 du décret de l'Assemblée nationale du 19 septembre 1848, il épousera Eléonore Gantes, auront deux enfants, Pierre et Louis Jean. Les Lacotte eurent une descendance nombreuse et formaient, avec les Monge et les Allègre la majorité du village. --------Fuleran Béniquet assure la correspondance et a les fonctions d'Officier de l'état civil quand naîtra le premier "ferrien" : Jean Chrisostome Villaret. La première 'Terrienne" verra le jour le 22 mars 1882 ; Germaine Suc. --------Si le premier-né appartient à une famille qui s'est implantée au village lors de sa création, la seconde appartient à la "seconde génération", celle venue s'implanter avec l'extension de Oued-Djemâa. Oued-Djemâa devient Ferry --------Conformément à l'article 7 du décret de l'Assemblée nationale du 19 septembre 1848, le village doit, bientôt être assimilé au régime municipal des communes des territoires civils, ses concitoyens désignent Auguste Monge comme premier Adjoint spécial, Oued-Djemâa dépendant de la Commune mixte de l'Hillil, puis Zemmorah. --------C'est là le début d'une longue histoire d'amour des Monge pour l'administration du village, vont se succéder tour à tour 1 - Auguste Monge (1878-1894) 2- Auguste Monge (fils) (1894-1932) 3- Henri Monge (frère du ler) (1937-1940) 4- Clovis Monge (neveu du 2è) (1844-1947) 5 -Albert Monge (fils du 3è) (1847-1962) M. Fabry assurant un intérim (1932-1937) --------Alexandre Jacquet pendant la période de Vichy 40-44. A cette liste des administrateurs nous ajouterons Camille Allégre devenu Maire de la nouvelle commune de Kiaby Ouled Addi, autrement dit les Salines, devenue commune du territoire de Clinchant (1959). --------L'un des premiers actes d'Auguste sera de demander l'agrandissement du Centre, ils multipliera les démarches après une première demande officielle enregistrée le 23 mars 1883, "il ne sera pas possible de statuer sur l'agrandissement du Centre colonial d'Oued-Djemâa tant que l'approbation du programme général actuellement soumis au Gouvernement n'aura pas été approuvé". --------Bientôt, effectivement, il ne restera plus aucun lot de cultures disponible, les plus anciens accueillent les nouveaux arrivants, les familles Labrot, Cambon, Vincent, Beaudet, Simon et une femme courageuse la veuve Challier, mais, dans cette plaine du Chellif où il est difficile de savoir ce que nos ancêtres ont éprouvé de difficultés faisant face à la maladie, à une chaleur torride, où le manque d'eau pour les hommes, les bêtes et les cultures accroit leur misère, au point qu'un rapport de la Commune mixte signale au Gouverneur général, le 6 août 1880, son manque et l'absence de récolte au point qu'il est accordé aux plus déshérités un secours global de 500 francs et que certains ont même été autorisés à "s'absenter" de leurs terres 6 mois (d'avril à novembre) pour aller travailler ailleurs. Pour Auguste Monge ce Ailleurs sera Assi Ameur où Auguste junior sera berger. --------Avant de se réinstaller à Oued-Djemâa Auguste a fini par convaincre son épouse, Eugénie Loubat, et ses deux autres fils, Clovis et Henri à quitter Saint Jean de Ceyrargues. --------Déjà se dessine cet agrandissement du Centre quand une minute de lettre du Gouverneur Général à Monsieur le Préfet d'Oran du 19 avril 1893 dit "J'ai l'honneur de vous faire connaître qu'il m'a paru convenable de profiter de l'occasion de l'agrandissement du Centre de l'Oued-Djemâa pour donner à ce village un vocable français. J'ai décidé, en conséquence, qu'il serait désigné à l'avenir sous le nom de Ferry, en mémoire de l'illustre homme d'état qui portait à l'Algérie un si grand intêret et lui avait voué un si grand attachement. je vous prie de vouloir donner des instructions pour qu'à l'avenir et jusqu'à ce qu'un décret l'ai sanctionné, ce nom soit substitué, dans la correspondance officielle, à celui d'Oued-Djemâa". ------Le Gouverneur
dit Ferry là où le Préfet écrira "Jules
Ferry"... c'est le refus des gens du village qui, bien que reconnaissant
tout l'intérêt qu'a porté l'ancien ministre à
l'Algérie, lui "reprochent" d'avoir été
franc-maçon, eux qui sont tous catholiques. Ce sera le dernier
combat, inachevé, d'Auguste qui va disparaître, à
54 ans, le 15 janvier 1894. Pour lui succéder ses concitoyens désignent
son fils aîné, Auguste. Gérald
Fleury |