Les Amis du Vieil Alger au Palais
d'Hiver.
La visite d'un palais mauresque est toujours un charme pour les
sociétaires du Vieil Alger. Le mois de janvier leur avait
valu l'agrément de connaître en détail celui
qu'habite le général du Génie Lagardc. En février,
ce fut le Palais d'Hiver, où l'amabilité de M. Carde
leur permit d'évoquer l'Histoire. Dans la cour d'honneur,
que pare une merveilleuse céramique de Delft, leur président,
M. Klein, les documenta sur les origines de ce palais qui, construit
en 1791, fut la propriété du Dey Hassan, d'où
sa dénomination de " Dar-Hassan-Pacha ". Conformément
à l'usage, le Consul de France, lors de son inauguration,
offrit au Dey de magnifiques présents qui concoururent à
sa décoration intérieure. Après la conquête,
l'État ne s'empara pas de cette résidence, dont il
paya la location aux petits enfants de ce Dey, enfants eux-mêmes
du Pacha Hussein.
Ce devint l'Hôtel des nouveaux chefs de la Colonie. Combien
de fêtes, combien de solennités s'y déroulèrent
depuis 1858 ! Aussi, peut-on dire, que toute l'histoire du moderne
Alger s'y trouve concentrée.
A l'évocation de son passé, on vit s'y animer l'ancienne
société algérienne du temps de Clauzel, de
Bugeaud, de Pélissier, de Mac-Mahon, réapparue dans
l'originalité des anciennes modes, dans le prestige de la
belle étiquette d'alors. Ainsi furent rappelées, dans
leur tout premier pittoresque, les soirées données
au lendemain de la conquête, où Juives somptueuses
apparaissaient, les pieds nus, en des chaussures de perles. Celles
qui suivirent, à l'étonnement d'un Nodier, d'un Dumas,
où frustes chefs de l'intérieur, encore frémissants
d'une ardente lutte soutenue, ne le cédaient en rien, pour
la noblesse de l'attitude, à un Lamoricière, à
un Yusuf.
Le souvenir fut aussi rappelé de maintes fêtes célèbres
auxquelles assistèrent les fils de Louis-Philippe, des réceptions
de l'Empereur, de l'Impératrice, du Président Loubet.
Des luxueuses et fructueuses fêtes de bienfaisance dont l'ultime
fut celle donnée, en 1921, sous les auspices de M. Ardaillon.
Mais la conférence eut un terme et l'on visita maintes salles,
toutes ennoblies de revêtements de porcelaine rare, de plafonds
ouvragés, de coupoles s'ajourant dans la polychromie d'harmonieux
vitraux, d'artistiques pièces d'ameublement de style oriental,
mauresque ou berbère.
On vit, à l'étage supérieur, l'ancienne salle
en laquelle, suppose-t-on, le Dey recevait ses- intimes; d'autres
salles destinées au repos du Pacha, celle encore qu'une tradition
veut attribuer à l'inévitable favorite. L'obligeance
du capitaine Pansard permit de voir, en outre, bien qu'habitée
par lui, la partie supérieure où résidèrent,
en 1800, l'Empereur et Eugénie.
On termina par la visite, au premier étage, du superbe salon
de Mme Carde, de qui fut associé le souvenir au charme de
la réception récente dont, par elle, fut favorisée
la société algéroise.
La visite prit fin à onze heures et demie.
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