Algerie , Alger, la casbah
Petits métiers

" Caoucaou, caoucaou ! " - " Chand-d'habits " - " vitrier " - " Calentita " - " Faval'foul " - " tapis " - " la belle sepia " - et d'autres cris encore aux accents surprenants, donnent a la rue algéroise une belle note pittoresque.

Un vieux sac sur l'épaule, la main en porte-voix, le marchand d'habits lance son appel chevrotant vers les balcons d'où, parfois, il lui est fait un signe l'invitant à venir débarrasser de quelques vieilles hardes une garde-robe encombrée. Rarement il fait affaire, ne voulant payer ce qui lui est offert que de quelques centimes. Et, parcourant sans relâche les quartiers les plus éloignés de la ville, montant et descendant infatigablement des étages et des étages, il cherche l'occasion rare de réaliser un bénéfice honnête.

A la terrasse des cafés se présente le vieil indigène aux bras chargés de coffrets, de plateaux de cèdre sculpté, incrusté de cuivre. Le regard malicieux du marchand de tabletterie en quête d'acheteurs en dit assez sur la rouerie de ce commerçant ambulant. Un grand burnous au capuchon drôlement surmonté d'un pompon de laine ne laisse apparaître que son visage ridé, à la barbe hirsute. Avec un sang-froid et une ruse sans égale il fait part à ses clients éventuels des prix de sa marchandise. Évidemment c'est le prix fort qu'il donne le premier, mais, avec quelque peu de patience et de la diplomatie, il baisse tellement que l'on est, à la fin, persuadé d'avoir fait une bonne affaire.

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Afrique du nord illustrée du 13-2-1932- Transmis par Francis Rambert
mise sur site : mai 2021

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Petits métiers

Petits métiers..

" Cirer, M'siou ?, coup de brosse, M'siou ? " Quelle est la personne qui n'a point entendu cet appel des yaouleds ? On n'y prend même plus garde tant il est fréquent. Mais, en dehors de ces " travailleurs " du pavé il en est d'autres, fort nombreux, qui parfois attirent et captivent l'attention du passant. Leurs cris dissonants, n'ayant de sens que pour les initiés, emplissent l'espace étroit des rues.

Le matinal marchand de poissons, toujours courant, portant sur la tête le plateau de bois d'où s'écoule l'eau de la glace fondue, éveille les paresseux. A l'en croire, sa marchandise est toujours belle : " la belle sépia, la belle sardine !... ". Il va, sa balance ferraillant à ses côtés, par les rues les plus éloignées des marchés. Bientôt arrive le maraîcher, portant, de chaque côté de l'épaule, à la manière d'un havresac, doux corbeilles emplies de légumes. Il s'annonce par des cris dont la compréhension est souvent laborieuse. Toujours est-il qu'il fait suffisamment de bruit pour attirer l'attention des ménagères.

" Faval'foul ! " hurle un brave homme aux bras encombrés de cornets de papier journal ; ce sont les fèves cuites qui font les délices de certains. S'égosillant, un indigène chargé d'un vieux couffin répète sur un ton plaintif, avec une mine de chien battu : " Caoucaou ! caoucaou ! " ; c'est à lui que s'adressent les amateurs de cacahuètes.

Un vieux sac sur l'épaule, la main en porte-voix, le marchand d'habits lance son appel chevrotant vers les balcons d'où, parfois, il lui est fait un signe l'invitant à venir débarrasser de quelques vieilles hardes une garde-robe encombrée. Rarement il fait affaire, ne voulant payer ce qui lui est offert que de quelques centimes. Et, parcourant sans relâche les quartiers les plus éloignés de la ville, montant et descendant infatigablement des étages et des étages, il cherche l'occasion rare de réaliser un bénéfice honnête.

A la terrasse des cafés se présente le vieil indigène aux bras chargés de coffrets, de plateaux de cèdre sculpté, incrusté de cuivre. Le regard malicieux du marchand de tabletterie en quête d'acheteurs en dit assez sur la rouerie de ce commerçant ambulant. Un grand burnous au capuchon drôlement surmonté d'un pompon de laine ne laisse apparaître que son visage ridé, à la barbe hirsute. Avec un sang-froid et une ruse sans égale il fait part à ses clients éventuels des prix de sa marchandise. Évidemment c'est le prix fort qu'il donne le premier, mais, avec quelque peu de patience et de la diplomatie, il baisse tellement que l'on est, à la fin, persuadé d'avoir fait une bonne affaire.

Les porteurs d'eau, la cruche de cuivre rouge sur l'épaule, courent de la fontaine aux gourbis et cela sans relâche, du matin au soir. Ce sont peut-être les seuls qui gardent la bouche close pour travailler. On conçoit d'ailleurs très bien que leur marchandise se passe de publicité.

Dans un coin d'escalier se détache une masse sombre. Une main tenant une chéchia crasseuse, deux pointes de sandales et une matraque s'échappent d'un tas do guenilles informes et sales. Un mendiant est accroupi là, la tête soigneusement enfouie dans des chiffons, psalmodiant une plainte dont on ignore la cause mais non point le but. Il demeure parfaitement immobile et l'on a peine à croire que ce soit un être humain abîmé sous ces haillons, dans une attitude fort incommode. Il lui a certes fallu de la persévérance pour arriver à ce résultat et voilà sans aucun doute un métier difficile à apprendre.

Voulant épargner sa' voix, le rétameur se contente de frapper avec un boulon sur la queue d'un poêlon et le bruit qu'il produit ainsi est capable d'attirer l'attention de quiconque. Par contre, c'est à pleine gorge et sur un ton aigu que le vitrier annonce sa venue. Celui-ci a de la voix pour deux et, sur la hotte accrochée à ses épaules les vitres doivent en vibrer.

Le marchand de fleurs attend aux carrefours les couples amoureux auxquels il présente, sur une corbeille d'osier, ses jasmins, ses pâquerettes, ses violettes, ses roses et son mimosa suivant la saison.

Misérable dans ses vêtements éliminés, la barbe sale, les souliers qui baillent et le chef couvert d'une antique casquette, lo vieux marchand de " calentita " porte son plateau de fer suspendu à l'épaule par une courroie et appuyé sur la hanche. Du dos de la lame de son couteau, il frappe à petits coups précipités sur le rebord du plateau. Les enfants connaissent parfaitement cette musique et, bien vite, vont acheter pour quelques sous de la pâte gélatineuse qu'ils mordent à belles dents.

" Caoucaou, caoucaou ! " - " Chand-d'habits " - " vitrier " - " Calentita " - " Faval'foul " - " tapis " - " la belle sepia " - et d'autres cris encore aux accents surprenants, donnent a la rue algéroise une belle note pittoresque.