CHAPITRE I
LES DÉBUTS DU CHEMIN DE FER EN ALGÉRIE
- Le Second Empire
-----La première ligne de chemin de
fer en Algérie remonte à 1859. En effet, dès 1853,
la Société civile des Mines et Hauts-Fourneaux
des Karezas, qui deviendra en 1864 la Compagnie des Minerais de Fer magnétiques
de Mokta-el-Hadid, étudia un chemin de fer de 11 km de long, partant
des mines des Karezas pour aboutir à La Seybouse, faubourg de Bône.
La construction fut assez longue et le service, uniquement minier, débuta
le ler septembre 1859. C'était effectivement le premier chemin
de fer de l'Algérie et, soulignons le, il était à
voie métrique, c'est à dire à l'écartement
d'un mètre. La ligne fut prolongée en 1863 jusqu'aux mines
de Aïn-Mokra, et en 1867 jusqu'au port de Bône. Sa longueur
était alors de 32,5 km. Elle fut ouverte au service public en 1885
et prolongée en 1905 jusqu'à Saint-Charles (sur la ligne
Constantine - Philippeville). Sa longueur était ainsi portée
à 97 km. Elle fut rachetée par l'Etat en 1926 et rattachée
au réseau des Chemins de FerAlgériens de l'Etat, les CFAE.
De 1948 à 1952, la ligne fut mise à voie normale, tout en
étant assez largement reconstruite puisque seuls les 32,5 km de
l'ancienne ligne à voie métrique de Bône à
Ain-Mokra furent utilisés. La nouvelle ligne entra en service le
1erjanvier 1953. Or, en novembre 1957, le tronçon Oued Zenati -
Guelma de l'ancienne ligne directe Tunis - Constantine fut presque entièrement
détruit par des inondations et il ne fut jamais reconstruit. Par
suite, depuis cette date, la ligne de Bône à Saint-Charles
est devenue partie intégrante de la grande ligne du Maghreb Tunis
- Casablanca, donc presque un siècle après la création
de son premier tronçon.
-----Mettons à part cette ligne qui, initialement, était
uniquement minière. Alors, la première compagnie ferroviaire
proprement dite de l'Algérie fut la Compagnie des Chemins de Fer
Algériens (sans aucun rapport avec la société puis
l'office d'exploitation qui reprendront la même dénomination
successivement en 1898 et en 1939). Cette compagnie obtint en 1860 la
concession de trois lignes à voie normale : Alger - Blida, Oran
- SaintDenis-du-Sig et Constantine - Philippeville. La première
ouverte fut Alger - Blida le 8 septembre 1862, ceci pour une raison bien
simple. L'armée avait commencé les travaux dès 1859,
mais la compagnie n'ayant pu réunir la totalité des fonds
propres nécessaires, fut déchue quelques semaines plus tard
à la fin de 1862. Le gouvernement du Second Empire proposa alors
au PLM de prendre la suite, en lui faisant valoir que l'Algérie
était le prolongement naturel de son territoire métropolitain.
En fait, le gouvernement ayant tranché en faveur du PLM dans la
lutte qui l'avait opposé au Midi pour la célèbre
histoire de la ligne directe Sète - Marseille, il entendait bien
obtenir un gage en contrepartie. Aussi, le PLM, qui n'était pas
demandeur au départ, finit par accepter en faisant valoir à
ses actionnaires que les lignes d'Algérie, très probablement
déficitaires, ne pouvaientqu'apporter un supplément de trafic
fort substantiel à son réseau métropolitain. En conséquence,
dès 1863, le PLM reçut la concession de la ligne Alger -
Oran (et non plus seulement de ses deux extrémités à
partir d'Alger et d'Oran) et de la ligne Constantine - Philippeville.
Les travaux nécessaires furent très longs et, à la
chute du Second Empire le 4 septembre 1870, seule la deuxième ligne
venait d'être ouverte le 1 e, septembre. Sur la première,
il manquait encore un tronçon central de 29 km entre Bou-Medfa
etAffreville, section la plus montagneuse comportant entre autres le tunnel
dit de l'Atlas qui, avec ses 2312 m, est resté le plus long de
l'Algérie. La ligne fut finalement ouverte en totalité le
1 er mai 1871, en pleine Commune! En conclusion, au lendemain de la guerre
de 1870, (voir
carte) les chemins de fer en Algérie comportaient deux
lignes à voie normale exploitées par le PLM : Alger - Oran,
soit 421 km, et Constantine - Philippeville, soit 87 km, plus une ligne
minière à voie métrique Bône - Aïn-Mokra,
soit 32 km.
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- La Troisième
République
-----Pour la poursuite de la construction du
chemin de fer en Algérie, la Troisième République naissante
prend le temps de la réflexion, c'està-dire ne fait rien.
Mais le gouvernement général de l'Algérie ne l'entend
pas ainsi, car il veut continuer son réseau. Il va alors profiter
d'un décret du 7 mai 1874 qui étend aux départements
d'Algérie la possibilité qu'ont les départements métropolitains
de concéder des
chemins de fer d'intérêt local. C'est dans ces conditions que
le PLM se trouve évincé, le monopole de fait que lui avait
concédé le Second Empire tombant à l'eau. Ainsi, pendant
plus de 50 ans, le PLM ne va exploiter en Algérie que les deux lignes
qui lui avaient été concédées antérieurement
à 1870, ces deux lignes étant séparées par 453
km de Maison-Carrée à Constantine.
-----Très rapidement, trois compagnies
obtiennent des concessions au titre de l'intérêt local. Sommairement
et en première étape, ces trois compagnies vont construire
des réseaux à voie normale : de l'Ouest Algérien à
l'ouest d'Alger, l'Est Algérien entre
Alger et Constantine, et le Bône - Guelma, filiale de la
Société de Construction des Batignolles, à l'est de
Constantine, en liaison avec les concessions que cette dernière obtiendra
en Tunisie à partir de 1877. Mais, très curieusement, l'Etat
octroie en 1874 une concession d'intérêt général
à la Compagnie Franco-Algérienne pour une ligne allant d'Arzew
à Saïda et coupant ainsi à Perregaux la ligne du PLM
Oran - Alger. De plus, et nous l'avons dit en commençant, ce fut
longtemps une énigme historique, car l'écartement retenu pour
cette ligne à voie métrique était de 1,055 m. Les chapitres
suivants seront l'occasion de poursuivre l'histoire du chemin de fer en
Algérie après 1875
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