Reconnaissance
d'itinéraires
|
292 Ko |
Au départ de l’Algérie de 1901 à 1962
Les automobiles n’existaient pas lorsque les Français
ont entamé la conquête du Sahara. Elles n’ont donc pas accompagné ses
débuts ; mais elles ont profité de son achèvement et sans doute aidé
à la consolidation de la souveraineté française.
Cette carte imprécise n’est là que pour aider les lecteurs fâchés avec la géographie A / Par les militaires Si l’on en croit le Bulletin du Comité de l’Afrique française,
la guerre a favorisé le remplacement du dromadaire par l’automobile là
où c’était possible. Dès 1915 le Gouverneur général Lutaud obtient
quelques véhicules militaires Rochet-Schneider et Fiat pour le Territoire
des Oasis. Ils ont des roues jumelées et sont essayés avec succès sur
le trajet Touggourt-Ouargla. Et en 1916 est inauguré un service
bi-hebdomadaire pour le courrier sur ce trajet. Mais un essai semblable
sur le parcours Ouargla-In Salah s’avère trop difficile ( il a fallu 20
jours ) et les essais cessent. De surcroît au sud d’In Salah les Touaregs
redeviennent menaçants. Dès la fin 1918 sont ainsi lancés des raids de reconnaissance
mi-aérienne, mi-automobile. Les véhicules du train préparent l’arrivée
des avions. Le plus souvent le matériel et les véhicules sont acheminés
par voie ferrée le plus loin possible. En fait il n’y a que deux lignes
possibles : Oran-Colomb Béchar inaugurée le 21 avril 1906, et Philippeville-Touggourt
achevée le premier juin 1914. Les deux autres lignes de pénétration ne
seront ouvertes que plus tard : Blida-Djelfa en 1921 et Oujda-Colomb-Béchar
en 1941 Sont acheminées
jusqu’à Touggourt 23 camionnettes, 40 tonnes de chargement et 70 personnes.
L’expédition se dirige vers Tamanrasset par Ouargla et In Salah. Elle
parvient à In Salah en 15 jours. Deux jours sont consacrés au repos des
hommes, du moins de ceux qui n’ont pas à réparer ou entretenir les véhicules.
Tamanrasset est atteint en 11 jours. Au passage le convoi a équipé les
postes de Tiguelmine, Arak, Tesnou et In Ekker ( dépôts divers, atelier
de réparation et poste de TSF). Il ne reste plus qu’à attendre les 3 premiers
avions qui atterrissent le 14 février 1920. L’initiative en revient au
Gouverneur du Niger, Brévié, et elle se dirige du sud vers le nord dans
le but de mesurer la possibilité de créer une artère centrale vers l’Algérie
au départ de Zinder ou de Niamey par Agadès et Tamanrasset. Le Commandant
Rottier s’arrête à In Gall ; mais les tronçons de piste ainsi reconnus
seront bientôt intégrés à la piste impériale Alger-Zinder C’est une mission conjointe camion et avion. Wauthier s’occupe d’un avion et Bréard de deux camions Latil d’une charge utile de 4,2 tonnes chacun (essence, eau, vivres, pièces de rechange et armement léger). Bréard a aussi un poste radio lui permettant de communiquer avec l’avion et les stations au sol. Les camions et l’avion, à partir de Tamanrasset, jouent alternativement leurs rôles respectifs d’éclaireurs :lorsque les camions découvrent un site possible d’atterrissage ils transmettent leur position à l’avion qui les y rejoint. A son tour ce dernier survole la piste que les camions auront à parcourir le lendemain. En mars 1933 cette mission
relie Tamanrasset à Bilma, distants de 1190 km par In Azaoua. Cette piste
restera quasi inutilisée, sauf un peu en 1942 pour aider Leclerc au Tchad Citroën crut que la solution serait la chenille. Renault préféra équiper ses voitures de six roues, toutes jumelées avec deux essieux moteurs à l’arrière. Citroën sut sûrement communiquer mieux que Renault car, malgré son échec final, la mémoire collective a retenu ses exploits et oublié ceux de Renault. Les autos-chenilles de Citroën. Avec Georges-Marie Haardt elles réussissent en 1922-1923 la première traversée automobile du Sahara de Touggourt à Tombouctou par Tamanrasset.
En janvier-février 1924 la mission Audouin-Dubreuil reconnaît un deuxième itinéraire à partir de Colomb-Béchar. Elle quitte Colomb-Béchar le 24 janvier et parvient à Tombouctou, par Bidon V et Tessalit le 6 février. Mais, à Adrar, Audouin-Dubreuil a subi le désagrément de se voir doubler par les Renault six-roues de la mission Gradis. Le Sahara est assurément un lieu très médiatisé de la compétition entre Citroën et Renault, c’est-à-dire entre la chenille et le pneumatique. En octobre 1924 une nouvelle expédition Citroën, la mission Centre-Afrique, quitte Colomb-Béchar. L’idée d’AndréCitroën, encouragé par le Président de la république Gaston Doumergue, est de montrer la supériorité de la chenille en terrains très difficiles grâce à une traversée de toute l’Afrique jusqu’au Cap, avec prolongation à Madagascar. Pour cette traversée on a ajouté aux voitures, une remorque. Il y a 8 voitures réparties en 4 groupes destinés à rallier 4 ports d’embarquement pour Madagascar. Mais le parcours est commun jusqu’à Kampala en Ouganda. Cette première partie de ce qu’on appellera plus tard, à cause d’un film, la Croisière noire, se déroule sans encombre. Les équipages arrivent à Fort-Lamy, juste à temps pour réveillonner le 24 décembre. Ils se retrouveront à Tananarive le 26 juin 1925. André Citroën peut croire avoir gagné son pari ; il n’en est rien.
La ligne orange suit le tracé suivi par les voitures de la mission Haardt qui a contourné par l’est le plateau de l’Adrar des Ifoghas, par Kidal. La ligne noire suit le tracé suivi par les deux autres expéditions : il commence par suivre la vallée de la Saoura et offre de très longs parcours rectilignes et plats dans la région du Tanezrouft. Là les chenilles sont handicapées par rapport aux pneus. Les deux itinéraires se rejoignent à Tabankort au Soudan français (Mali depuis 1959) et parcourent ensuite la vallée du Tilemsi, en évitant Kidal, pour atteindre le fleuve Niger à Bourem. Le six-roues jumelées de Renault En novembre 1923 la mission Gradis-Estienne utilise encore, comme Citroën, des autos-chenilles pour parcourir l’itinéraire Adrar-Tessalit à travers le Tanezrouft encore inconnu et entouré d’une réputation de super désert. Elle part de Beni-Ounif-de-Figuig (au nord de Colomb-Béchar) avec 4 voitures à remorque et atteint Tessalit le 30. « Ce voyage a permis de reconnaître un itinéraire quasiment rectiligne et plat qui fait gagner 300km sur la voie centrale par El-Goléa » dit un compte rendu. Cette piste Gradis devint l’itinéraire de référence des années 1920. Mais le général Estienne n’est pas convaincu que la chenille soit la bonne solution et il persuade Renault de fabriquer une voiture équipée de 6 roues jumelées avec des pneus basse pression. L’engin est essayé sur une plage marocaine.
En janvier 1924 la mission Schwob avec des voitures six-roues connaît un plein succès : c’est elle qui a doublé les Citroën à Adrar. « La suprématie de la roue sur la chenille s’impose à l’évidence ». Les Renault ont parcouru en 5 jours les 2000km de Colomb-Béchar à Bourem que les Citroën ont parcouru en 71/2 jours. Schwob et son équipe commencent à croire possible la création d’un service régulier de transport de personnes et de courrier entre l’Algérie et l’A.O.F. Dès février 1926 une nouvelle mission Estienne prépare l’ouverture d’un service Algérie-Soudan en jalonnant la piste de fûts d’eau et d’essence enterrés dans le sable, tous les 50 km et repérés au sol par des bidons numérotés. La star du bidon fut le bidon numéro cinq, Bidon V appelé à un avenir quasi mythique en tant qu’étape à la porte du Tanezrouft. Bien sûr d’autres constructeurs que Renault ont participé à ces voyages de reconnaissance. Mais ils s’y sont lancés plus tard et ont eu moins d’importance. Pour ne vexer personne citons : En décembre 1929-janvier 1930 la mission Proust conduit 4 Peugeot d’Alger à Dakar.
Il s’agit de véhicules de série dont on a allongé le coffre pour permettre aux chauffeur et au mécanicien de dormir confortablement. Les 4 voitures parcourent sans panne, ni avarie, les 16000km aller et retour par la piste de Bidon V rejointe à Timimoun. En novembre 1930 une mission Laffly, à prétention scientifique, part d’Alger pour un périple de 3 mois : aller par Bidon V, retour par Tamanrasset et Fort Flatters ; un itinéraire difficile.
Les 3 camions Laffly ont des moteurs Diesel. L’un des conducteurs, l’ingénieur Lumet, un peu en avance sur son temps, écrit ceci dans son carnet « Les huiles d’arachide, de palme, de ricin, paraissent devoir donner toute satisfaction dans les moteurs de ce genre, tant au point de vue fonctionnement qu’au point de vue économique : il y a là une importante perspective pour l’avenir de l’agriculture et de la traction automobile, dans nos colonies africaines ». En 1933 les mêmes véhicules, dotés de pneus Michelin très larges et d’une autonomie de carburant de 2000km, effectuent une liaison directe Alger-Fort-Lamy par Djanet et Bilma. Ce tracé permet d’éviter d’avoir à passer par Kano au Nigéria, ou d’avoir à contourner les marais du lac Tchad par le nord à partir de N’Guigmi. Mais c’est un itinéraire trop difficile et trop excentré pour espérer un trafic régulier, même modeste.En février-mars 1932 8 camions de 4 marques ( 2 Laffly, 2 Renault, 2 Saurer et 2 Berliet) s’engagent, dans un concours organisé par le Gouvernement Général d’Algérie, pour tester la capacité de transport de fret utile ( hors pièces de rechange et ravitaillements divers) ; seuls les camions Berliet réussiront l’épreuve en transportant chacun 3,5 tonnes de fret utile entre Alger et Gao. Le plus gros des 2 camions, un 5 tonnes, avait 6 roues dont 4 motrices à l’arrière. Le temps des reconnaissances s’achève ; celui des services réguliers de transport transsahariens peut être envisagé. |