LE
TEMPS DES TRANSPORTS COMMERCIAUX
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Eléments de bibliographie.
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Si Citroën n’avait pas échoué ici aussi,
le premier service régulier d’autocars entre Colomb-Béchar et Bourem au
Soudan français aurait été inauguré le premier novembre 1924. André Citroën
avait pourtant bien préparé son affaire : il avait fait bâtir 5 hôtels,
aménagé 7 campements et fait construire 35 voitures ad hoc. Il avait même
invité le couple royal belge à la cérémonie d’inauguration. Hélas, trois
fois hélas ! Rien ne s’est déroulé comme attendu. Les confins marocains
se révèlent peu sûrs : une caravane est pillée près d’Abadla, le
Gouverneur de l’AOF prévient qu’il ne pourra pas assurer la sécurité des
convois, des inondations exceptionnelles retardent les travaux au Soudan
et font même fondre un stock de briques crues. Et pour couronner ces trois
hélas, le roi des Belges Albert 1er se décommande. C’en est
trop : André Citroën annonce l’abandon de son projet. Sa CITRACIT
(Compagnie Transafricaine Citroën) est mort-née.
A/ Services pour les voyageurs et le courrier · 1927 : la CGT crée le premier service commercial régulier en novembre. Par CGT il faut comprendre Compagnie Générale Transsaharienne. Cette société est dirigée par Georges Estienne et ses débuts en 1927 sont des plus modestes. Il s’agit d’un unique aller-retour mensuel entre Colomb-Béchar et Beni-Abbès (237km), subventionné et sous protection militaire. Il est bon de préciser que l’un des frères Estienne avait été assassiné le 18 mai par un djich (bande de pillards) venu de Mauritanie. Le vrai décollage se produit en 1930 avec une quarantaine de véhicules Renault, cars-couchettes et limousines destinés à une clientèle fortunée attirée par la chasse au gros gibier ; on ne disait pas encore safari. La CGT est alors en mesure de proposer chaque année, 30 voyages AR de Colomb-Béchar à Reggan et 6 voyages AR de Colomb-Béchar à Gao sur le Niger.
Les pistes sont considérées comme excellentes de Colomb-Béchar à Beni-Abbès et comme améliorées de Laghouat à Tamanrasset et de Touggourt à Fort-Flatters. Toutes les pistes sont alors jalonnées de balises métalliques en forme de pyramide triangulaire tronquée. Il n’y a rien au sud du Maroc car la pacification du sud marocain n’est pas terminée et parce que les confins hispano-mauritaniens ne sont pas sûrs. Berguent est au Maroc oriental et Le Kreider est l’une des gares de la voie ferrée Oran-Arzew-Perrégaux-Colomb-Béchar terminée en 1906. Biskra est le terminus de la voie ferrée à écartement normal. Laghouat n’a pas été atteint par la voie ferrée qui s’arrête à Djelfa. Gafsa est en Tunisie. ·1933 : Création de la SATT : Société Algérienne des Transports Tropicaux. Le
choix de l’adjectif « tropical » souligne l’intention d’établir
des liaisons avec l’AOF. La SATT a été créée par le Gouvernement Général
de l’Algérie avec mission d’ouvrir une ligne de cars sur l’axe central
Alger-Tamanrasset et au-delà. Il est entendu qu’il n’y aura pas de rivalité
ou de concurrence avec la CGT qui travaille sur un autre axe ; ce
qui rend possible la nomination de Georges Estienne –encore lui – comme
Directeur. Il choisit ici comme là-bas, de s’équiper de véhicules Renault.
En 1937 la SATT commande des véhicules plus confortables avec des aménagements
spéciaux : ce sont les Pullman à l’allure aérodynamique.
Sur
12 jours de voyage, il y a 3 jours d’arrêt, à El Goléa, Tamanrasset et
Agadès ; et 2 départs très tardifs, à In Salah et Zinder. Le touriste
pas trop fatigué peut jeter un coup d’œil aux oasis et aux ksars. Le
touriste qui aurait visité Kano au Nigeria, en attendant le bus du retour,
aurait en 27 jours parcouru 7745km : un beau périple. · En
marge de ces deux sociétés majeures, il existait de nombreuses sociétés
qui assuraient localement des services de cars réguliers, ou des transports
de touristes à la demande. Les cars de ces sociétés franchissaient parfois
la frontière tunisienne entre Touggourt et Tozeur, mais aucune autre.
Leurs bases de départ étaient Djelfa, Biskra et Touggourt. Leurs destinations
étaient les bourgs ou oasis des environs non desservis par la CGT et La
SATT ; mais aussi Laghouat et Ghardaïa d’un côté et Ouargla de l’autre. Les
principales sociétés étaient les firmes Delaunay
à Djelfa, Boukamel à Ghardaïa et Devicq à Biskra et Touggourt dès les
années 1920. Seule la Société des Auto-Circuits Nord-Africains, filiale
de la Transat, organisait des circuits touristiques du M’Zab aux oasis
du Djérid tunisien. Auparavant il y avait des services réguliers de diligence
dont les villes de départ changeaient en même temps que les voies ferrées
de pénétration progressaient vers le sud. En
1939 la guerre entraîne logiquement un tarissement du modeste
flot touristique, le rationnement de l'essence et la pénurie
de pneumatiques. Estienne réussit à maintenir cependant
une activité réduite sur l'axe Alger-Zinder avec des moteurs
alimentés à l'alcool.
Les réseaux Estienne, à force de rachats,
se sont retrouvés en situation de quasi monopole sur les trajets
sahariens réguliers. Aux itinéraires anciennement reconnus
elle ajoute les 840km de la piste Colomb-Béchar- Tindouf. Cette
oasis en pays Régueïbat n'avait été intégrée
à l'Algérie qu'en 1934 grâce à l'achèvement
de la pacification du grand sud marocain ; et il fallut attendre 1935,
c'est-à-dire l'occupation effective par l'Espagne du territoire
de la Seguiet-el-Hamra au nord de son Rio de Oro, pour que soit établie
la liaison entre notre protectorat marocain et notre colonie de Mauritanie
à travers l'Algérie. N.B. Si l'oasis de Ghât qui est en Libye, est
alors une escale du réseau Estienne c'est que, quand la carte
a été dessinée, le Fezzan, région de Libye
où se trouve Ghât, est administré par la France.
La France n'évacuera la région qu'en 1955 B/
Services pour le transport de matériels et d'équipements
A
partir de 1954 on assiste à une évolution divergente : les
transports de personnes, et de touristes tout particulièrement,
sont sinistrés par la montée de l'insécurité
alors que les transports de marchandises sont dopés par la recherche,
puis par la mise en exploitation des hydrocarbures.
Les grandes sociétés ne furent pas les seules à profiter de ce trafic : bien des transporteurs modestes, comme les Tixidor de Birkhadem, ont ajouté à leurs camions-citerne traditionnels pour le vin, de gros camions pour la route du sud qui fut goudronnée et élargie jusqu'à Hassi-Messaoud, par Ghardaïa et non par Touggourt. Il y eut la phase des transports liés à
la prospection, puis à partir de 1956 les phases de mise en exploitation
; à commencer par le transport des tubes du premier oléoduc,
environ 4000 tonnes, pour atteindre la gare de Touggourt à partir
d'Hassi-Messaoud. Le tout premier oléoduc achevé fut en
effet celui d'Hassi-Messaoud ou plus précisément d'Haoud
el Hamra, centre de regroupement des tuyaux venant de chacun des points
d'extraction du champ pétrolier. Mais on commença à
poser aussi dès 1957 les gros oléoducs d'Haoud el Hamra
à Bougie (660km), d'In Amenas ou Edjeléh à La Skhirra
(775km) ainsi que le gazoduc Hassi R'Mel à Arzew (510km). Tous
les trois furent mis en service en 1960 ou en 1961. Les échelles des 2 cartes ne sont pas les mêmes.
J'ai situé le gisement de gaz inexploité du djebel Berga
pour en donner une illustration.
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