L'océan de ma mémoire
Ce texte a été écrit par Lucienne Magalie P0NS en 2004 et mis au point en 2005 à Paris pour" Couscous et Paëlla"
sur site le 7-2-2006

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L'Océan de ma mémoire

Dans l'Océan de ma mémoire
parfois se dessine lentement
comme des reflets dans un miroir
l'Algérie de nos vingt ans
Dans la jeunesse et l'insouciance
le bleu des vagues nous berçait
avec tendresse sans expérience
nous laissions le temps passer

Sous le soleil généreux
sous un ciel d'azur enchanteur
nous allions confiants et heureux
en partageant notre bonheur
Nous étions amoureux de tout
du ciel, de la nature, des fleurs,
nous ne savions pas que des loups
dans l'ombre préparaient la terreur

Et puis soudain ce fût l'orage
qui devait broyer nos bonheurs
et les meutrir dans le naufrage
du beau pays de nos malheurs
En Algérie des hommes en armes
se battaient la nuit et le jour
Ce fût la guerre, le temps des larmes
mêlé au temps de l'amour

Dans le djebel les embuscades
entâchaient la terre de sang
par armes blanches ou fusillades
la mort frappait de innocents
leurs corps gisaient dans la poussière
horriblement mutilés
accompagnées de nos prières
leurs âmes au ciel s'envolaient

Le bruit des tam-tam en colère
appelaient des rebelles au combat
excités par les you-yous amers
des femmes voilées de la casbah,
dans les villes explosaient des bombes
qui faisaient tomber des maisons
et provoquaient des hécatombes
sans aucune valable raison

Hélas! c'est la loi de la guerre
il faut mourir ou gagner
la défense fût nécessaire
nous dûmes nous y résigner
en punition de leurs crimes
les rebelles furent châtiés
pas autant que nos victimes
au nom de notre humanité

Toujours animés d'espérance
aucune effroi ni nulle peur
dans notre pays de naissance
ne venait troubler nos coeurs
Ce furent l'espoir et la confiance
qui tissèrent la trame du temps
de ces longs jours de souffrances
qui devaient durer sept ans

Tous les civils désarmés
s'en remettaient aux militaires
avec honneur on proclamait
la légitimité de la guerre
Dans les grandes manifestations
on scandait "Algérie Française"
puis on chantait à l'unisson
notre hymne "La Marseillaise"

Des barricades s'érigeaient
nous protestions à juste raison
contre les crimes et les ratés
d'une politique d'abandon
Mais des traîtres à double façe
soutenaient l'indépendance
et voulaient effacer de l'espace
"les roumis venus de France"

De Paris, le Chef du pouvoir
qu'ils appelaient "maître de l'heure"
glossait sur "le vent de l'histoire"
les entraînant dans ses erreurs
Sous son ordre ses "hauts-placés"
soutenaient fort sa position,
ses politiciens négociaient
la honte d'une injuste partition

Encore confiants on espéraient
que la population de France
pour nous soutenir voterait
un refus de l'indépendance
Le FLN cria "Victoire"
pourtant battu sur le terrain
quand la France leur offrit la gloire
d'une Algérie sans lendemain

Ceux qui voulaient rester Français
prirent le chemin de l'exil
laissant derrière eux leur passé
pour affronter d'autres périls
Sous son soleil , sous sa lune
sous son ciel azur d'outre mer
nous avons connu l'infortune
de devoir quitter notre terre

Adieu ma ville, Alger-la-Blanche
Adieu printemps de nos jeunesses
Adieu nos douces maisons blanches
berceaux de joies et de détresses
Adieu, vieux arbres centenaires
vignes, moissons, jardins fruitiers
plaines, montagnes, fleuves et rivières
mer, plages, paysages côtiers.........

Notre belle France d'Algérie
nous ne pouvons pas t'oublier
condamnée par notre Patrie
tu vis dans nos coeurs d'exilés
tu fais partie de notre histoire
et faisais partie de la France,
et ta place dans nos mémoires
est amour bien plus que souffrance

La France tout autant notre terre
déjà dans le passé l'était
nos pères ont honoré ses guerres
sans jamais les déserter,
et pour que tous s'en souviennent
nous entonnons notre refrain
notre belle chanson ancienne
C'est nous les africains......!

Et pour marquer le temps qui passe
quarante trois ans se sont inscrits
dans ma mémoire bien en place
le mot "Liberté" est écrit
Puis tout s'apaise et vient mon soir
je suis la perdrix de retour(1)
et c'est ici mon territoire
Oh! belle France de mes amours

(1) (j'avais 12 ans en 1945 et déjà ma grand-mère Agathe Gornes, épouse PONS, me citait ce vieux proverbe français "La perdrix retourne toujours au nid"; à cette époque elle prévoyait déjà qu'un jour nous devrions partir, suite aux évènements de Sétif)

- Ce texte a été écrit par Lucienne Magalie P0NS en 2004 et mis au point en 2005 à Paris pour" Couscous et Paëlla"