Alger : le square Guynemer ex-Bab-Azoun ou Laferrière.
le monument Guynemer
La stèle est à l'emplacement du futur monument aux Morts.Voir. On peut distinguer les bancs de part et d'autre de la stèle.
Ce monument est maintenant à Mérignac
.
sur site le 10-1-2004...+ déc. 2014
2.-
Hommage à Guynemer
Inauguration officielle du square et du monument élevé à la mémoire de l'héroïque aviateur
Echo du 12-9-1919 - Transmis par Francis Rambert
mars 2021

3.- A PROPOS D'UN MONUMENT GEORGES GUYNEMER
Afrique illustrée du 15-9-1919 - Transmis par Francis Rambert
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mars 2021

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le monument Guynemer
" Face au ciel, droit à l'ennemi, dans une apothéose, il mourut pour la France "


A LA GLOIRE DES AVIATEURS
Hommage à Guynemer
Inauguration officielle du square et du monument élevé
à la mémoire de l'héroïque aviateur

Conformément aux ordres du Gouvernement central, et pour donner plus d'éclat à cette cérémonie, le Maire et la Municipalité d'Alger avaient décidé, pour rendre hommage à la mémoire de l'héroïque aviateur, d'inaugurer officiellement le monument élevé à Georges Guynemer et le square portant son nom, situé au haut du boulevard Laferrière.
Cette cérémonie émouvante et patriotique a eu lieu, hier, jeudi, à cinq heures de l'après-midi.

Dans le square Guynemer, orné de drapeaux tricolores, dans ce jardin en gradins, formant un magnifique décor, la foule a pris place. Près du monument, qui se dresse dans un fond de verdure et de ciel, près de cette stèle d'où se détachent le médaillon de l'intrépide capitaine et cette phrase : " Face au ciel, droit à l'ennemi, dans une apothéose il mourut pour la France! " les autorités et les délégations ont pris place; nous remarquons :

M. de Galland, maire d'Alger, ayant à ses côtés ses adjoints et les membres du Conseil Municipal ; M. le capitaine de corvette Ferrat, représentant M. le Gouverneur Général ; Basset, secrétaire général de la Préfecture. avec M. Babillot, chef de cabinet de M. Lefébure, représentant le Préfet d`Alger ; l'amiral Eng et ses officiers d'ordonnance ; le commandant Rolland, commandant l'Aéronautique de l'Afrique du Nord ; le lieutenant Molet, représentant le général Nivelle ; les représentants du corps consulaire ; M. de Redon. conseiller municipal et délégué financier ; l'intendant général Peltier ; M. Maris, directeur au Gouvernement général ; Mme Arthur ; M. Darbéda, délégué de l'Union des Femmes de France ; les délégués des Mutilés : MM. Privat, Ascione, Haro, Riquelme, Maurice Van Ghèle, Tauzin, Alberti, etc., etc... ; des délégations, avec leur drapeau et leur Conseil d'administration, des Alsaciens-Lorrains, de l'Union Fraternelle des Anciens Zouaves, des Anciens Zouaves et Tirailleurs, des officiers anglais, de nombreux officiers de l'aviation et de toutes les armes ; la clique des sapeurs-pompiers d'Alger ; l'excellente musique d'Alger-Tourist, etc., etc...

Mme la comtesse d'Aubigny, tante du brave capitaine Guynemer. s'était excusée télégraphiquement auprès de M. de Galland de ne pouvoir assister à la cérémonie.
Dans le grand ciel bleu, des avions viennent survoler le monument et porter le suprême hommage au jeune héros, mort dans l'azur, en pleine gloire.

C'est d'une voix forte, que M. de Galland, maire d*Alger, prononce l'émouvant discours
suivant :

DISCOURS DU MAIRE D'ALGER
A la mémoire de Georges Guynemer,
Dans le grand drame devant lequel pâlissent les conceptions tragiques des plus nobles génies, l'esprit de sacrifice et le mépris de la mort apparaissent comme les marques d'une humanité régénérée et plus forte capable de s'avancer, la tête haute et le cœur résolu, dans la voie lumineuse du véritable progrès social, vers un avenir meilleur.
Dans cette guerre gigantesque, les héros sont partout, dans les tranchées boueuses, sur les monts et sur les mers, dans les airs où les missions furent si périlleuses et les duels si émouvants.

Aujourd'hui 11 Septembre, jour anniversaire de la mort de Georges Guynemer, nous avons le devoir de rappeler le souvenir de l'intrépide aviateur et de glorifier en lui tous les aviateurs de la France et des pays alliés.

Tous ont bien mérité de la Patrie. Tous ces hommes, de ferme volonté et de caractère inébranlable, ont accompli et continuent à accomplir tous les jours de véritables prodiges. A tous, rendons un solennel hommage.

Ce devoir, dans la ville d'Alger, s'impose d'autant plus à nous que Guynemer est d'origine alsacienne : en effet, son grand-père, au lendemain de la guerre de 70-71 , est venu a Alger, avec le comte d'Haussonville, pour procéder à l'installation de nos frères alsaciens chassés de cette partie du sol national aujourd'hui reconquise. La fille de ce grand-père, ardent patriote, la tante de Georges Guynemer, la comtesse d'Aubigny, a voué un véritable culte à notre terre d'Algérie où elle revient chaque année.
C"est dire que des liens si étroits existent entre cette famille et nous, que nous ne pouvons faillir aux obligations imposées par notre reconnaissance. et notre admiration.
Je m'efforce de faire revivre, en une synthèse, peut-être incomplète, une physionomie singulièrement impressionnante, telle qu'elle m'a été révélée par des portraits, des documents et des récits : sous une enveloppe d'apparence frêle, une âme indomptable, l'âme qui domine et dompte la chair frémissante et fragile, qui maîtrise les nerfs trop tendus, l'âme enfin qui ignore le danger et méprise la mort. Dans les yeux étrangement dilatés, scrutateurs de l'horizon et de l'infini, une fixité et une résolution sans défaillances. C"était à travers les airs, l'envol vers le mystère, au-devant des duels implacables, vers la mort, presque certaine.

Par contraste, de l'ensemble de cette personnalité unique et géniale se dégageait une impression de juvénilité, de bonté et d'exquise modestie.
En un simple raccourci. redisons ses états de service. Ceci vaudra mieux que toute amplification oratoire.

Georges Guynemer est né à Paris le 24 décembre 1894. Engagé volontaire pour la durée de la guerre, le 23 novembre 1914, à l'âge de 20 ans, breveté pilote militaire le 25 avril 1915, il ne tarda pas à franchir toutes les étapes de la hiérarchie militaire jusqu'au grade de capitaine après avoir glorieusement obtenu, par des exploits inouïs, 21 citations à l'ordre de l'armée, la médaille militaire et la croix d'officier de la Légion d'Honneur. Ses prouesses dépassent amplement tout ce que l'imagination peut concevoir, toutes les limites des forces humaines.

Les citations dont il est l'objet sont laconiques, d"un laconisme évocateur d'une grande figure.

Je reproduis le fragment de l'une d'elles :
" Insouciant du danger, est devenu, pour l'ennemi, par la sûreté de ses méthodes et la précision de ses manœuvres, l'adversaire redoutable entre tous. A accompli, le 25 mai 1917, un de ses plus brillants exploits, en abattant en une seule minute deux avions ennemis, et en remportant, dans la même journée, deux nouvelles victoires... "
Georges Guynemer compte 54 victoires en combats aériens.
Il appartenait à l'équipe des " Cigognes " des oiseaux symboliques et sacrés, qui, tous les ans et à la même époque. se dirigent vers les villes d'Alsace, et se campent si fièrement sur les hautes tours de la cathédrale de Strasbourg. Espoir et symbole devenus une réalité !

Hélas ! une note officielle annonça un jour que c'était la fin, la fin glorieuse, dans une apothéose.... -
" Dans la matinée du 11 septembre 1917, le capitaine Guynemer parti en reconnaissance dans la région des Flandres, s'est trouvé, au cours des péripéties d'une poursuite d'avion ennemi, séparé de son camarade de patrouille et n'a pas reparu depuis... "
Permettez-moi de vous rappeler la séance de la Chambre du 17 octobre 1917, qui, sous la présidence de M.Paul Deschanel, s'est ouverte par une manifestation grandiose en l'honneur de Guynemer. L'hommage qui lui fut rendu devant tous les députés émus et enthousiastes a retenti dans toute la France. Sur la proposition de M. Lasies et M. Henri Paté, rapporteur, les députés, debout et à l'unanimité, votèrent cet article unique :
" La Chambre invite le Gouvernement à faire mettre au Panthéon une inscription destinée à perpétuer la mémoire du capitaine Guynemer, symbole des aspirations et des enthousiasmes de l'armée et de la Nation... "

Et maintenant, au nom de tous nos concitoyens de la municipalité, et des membres de l'assemblée communale j'ai l'honneur d'inaugurer ce monument à la mémoire du capitaine aviateur Guynemer. Œuvre du statuaire Fourquet, deuxième Grand Prix de Rome, et de l'architecte Fenech, lauréat de l'École des Beaux-Arts, mort à la suite de sa blessure.

Il perpétuera, parmi nos enfants, le souvenir du héros, le vol des " Cigognes " vers Strasbourg ; et l'inscription lapidaire, gravée sur cette pierre. résumera notre commune pensée :
" Face au ciel, droit à l'ennemi, dans une apothéose, il mourut pour la France "
Ces éloquentes paroles du maire d'Alger sont longuement applaudies par l'assistance entière. La musique d' " Alger-Tourist " exécute, avec brio, la " Marseillaise › et la marche " Vous n'aurez pas l'Alsace et la Lorraine ".

Au nom des Alsaciens-Lorrains, M. Keller, président de la Société, remercie le maire et la municipalité d'Alger; M. de Galland est également remercié par le commandant Rolland, de l'aéronautique de l'Afrique du Nord, au nom de tous les aviateurs.
De brillants morceaux de musique sont exécutés par " Alger-Tourist ", puis l'assistance se sépare, impressionnée par cette belle et patriotique cérémonie qui était terminée à six heures.



A PROPOS D'UN MONUMENT
A PROPOS D'UN MONUMENT
GEORGES GUYNEMER

De toutes les figures de cette guerre où l'héroïsme a empreint sa marque, ineffaçable, celle de Georges Guynemer apparaît comme la plus noble et la plus significative.

Cette courte vie, révélatrice de volonté, d'ardeur patriotique et de fougue raisonnée, illustre d'un magnifique exemple notre Histoire et perpétue les grandes traditions françaises de courage et de sacrifice.

Comme Jeanne d'Arc, comme Geneviève, comme Marceau, Bara, Viala, elle représente à nos yeux, résume et synthétise ce qu'il y a de jeune, de pur et de sacré dans notre Victoire.

Et je ne serai pas surpris que cette ligure entrât, un jour, dans la légende par la porte sanglante et glorieuse de l'Histoire, comme celle de Roland, d'Assas ou de Bayard.

On en connaît aujourd'hui les traits les plus intimes. Et l'un des plus beaux est sans conteste l'acharnement, l'entêtement, l'obstination de cet enfant qui, pareil à l'enfant grec réclamant de la poudre et des balles, s'enfonçait farouchement dans sa volonté de se battre.
" Dussé-je me coucher au fond d'un camion automobile, je veux aller au front, j'irai ! "
Il ne sait pas au juste ce qu'il y fera, ce qu'il y sera.
Peu lui importe. Fantassin, chasseur, canonnier, hussard, ces différences de couleurs ne lui apparaissent que comme des variations rouge garance ou bleu de roi autour d'un même thème qui est l'éternel soldat. Servir! voilà ce qu'il s'acharne à vouloir.
Mais lorsque descend sur cette petite plage d'Anglet, près de Biarritz, où il habite auprès des siens, un avion forcé d'atterrir, le jeune Georges sent battre étrangement son cœur à l'apparition de ces ailes.

Le voici déterminé.

Un dialogue s'engage entre le pilote et lui,
- Comment peut-on s'engager dans l'aviation ?
- Arrangez-vous avec le capitaine. Allez à Pau. Vous verrez bien si l'on veut, de vous. Mais je ne vous cache pas que ça sera terriblement difficile.
Et Georges Guynemer va vers son destin.

Deux fois, il est repoussé. Frêle d'aspect, le torse étroit, la poitrine peu solide, il n'en impose pas aux chefs qu'il affronte et n'arrive pas, tout d'abord, à obtenir leur agrément.

Le capitaine Bernard Thierry refuse.

L'adolescent insiste, supplie, implore.
- Employez-moi, mon capitaine. Employez-moi à n'importe quoi, à nettoyer ces avions. Je ferai ce que vous voudrez. Vous êtes mon dernier recours. Que par vous, je fasse enfin quelque chose dans la guerre.

Et le capitaine Thierry, après une minute de réflexion, dit oui.

Sans doute fut-il frappé par ces yeux dont, Henry Bordeaux a dit, qu'ils " traversaient les objets " et. une telle volonté devait, à cette minute, en aiguiser le regard que le capitaine dut en être obscurément, impressionné.

Et alors ce gamin commence son apprentissage de héros. Et cet apprentissage débute par une corvée de neige.
" Jeunes gens passionnés, écrit Bordeaux, qui dans tous les domaines guignez les trophées d'un Guynemer, n'oubliez pas que le chemin de la gloire s'ouvre par la corvée de neige. "

Puis, son nom surgit, apparaît, rayonne.

A une liste déjà longue et brillante il vient s'ajouter, avec l'éclat, et la splendeur d'un astre nouveau.

Il remporte victoire sur victoire.

Son audace, sa promptitude d'action, sa résolution, son sang-froid deviennent rapidement populaires. Et la France entière sait bientôt tout ce que signifie le nom de Georges Guynemer.

Et cependant, écrira Louis Madelin, pas la moindre prétention à l'héroïsme : à l'ordinaire, un gamin rieur qui annonce ses victoires en faisant chanter à son moteur, tandis qu'il redescend, l'air des Lampions, un collégien lâché en plein épopée qui ne cache pas sa joie.

Il a vingt ans, il est capitaine, officier de la Légion d'honneur, il a tant de croix et de médailles qu'il pourrait en couvrir comme d'une cuirasse d'émail et d'or cette étroite poitrine de chevalier.

" La terre a vu jadis passer les paladins "

Tant d'héroïsme, hélas, devait trouver dans la mort sa consécration suprême, et pour accentuer encore la beauté de cette courte et splendide carrière, la fin qui la couronna est demeurée entourée de mystère.

A de telles figures, l'Histoire ne suffit pas et nul n'éprouverait de surprise à voir, avec le prestige des siècles, celle de cet enfant héroïque entrer dans les régions sacrées de la légende, où rayonne, grandi et magnifié par l'admiration populaire, le clair visage des héros.