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Chalet de nécessité
Depuis hier, les palissades qui entouraient le nouveau
chalet de nécessité du square Aristide-Briand ont été
enlevées et le public, non sans maintes boutades et plaisanteries
anodines qui n'excluent pas cependant des remarques élogieuses
à l'adresse de la municipalité visite, si l'on peut
dire, ce petit édicule dont il ne connaissait jusqu'alors que le
toit en forme de pergola peint en outremer clair, pour s'harmoniser sans
doute avec la mer si proche.
Mais comme les grilles à glissières qui ferment les deux
escaliers donnant accès au sous-sol sont tirées, la visite
est vite terminée et l'on s'extasie sur la joliesse des corbeilles
de fleurs et .de plantes disposées autour des colonnes.
L'intérieur de ce chalet est divisé en deux parties par
une loge réservée à l'exploitant.
Le côté destiné aux dames comporte quatre cabines
ayant chacune leur lavabo.
Il existe aussi, dans cette partie, un local destiné à la
consigne des bagages à main et cette innovation, à proximité
de la gare, sera certainement très appréciée des
voyageurs.
Le côté homme comporte également quatre cabines mais
un seul lavabo commun disposé dans l'entrée.
Une vaste salle a été prévue pour remiser les nombreuses
chaises du square.
L'installation est des plus modernes. Les revêtements de marbre
et de faïencesont faciles à, entretenir et la lumière
tamisée de hublots électriques vient s'ajouter à
celle qui peut filtrer par les rondelles de verre du plafond de béton
translucide.
Ce petit monument, dont la grâce de pergola ne dépare nullement
ce coin charmant qu'est le square Aristide- Briand, était indispensable
dans un endroit aussi passant.
Kiosque à musique
Mais après avoir dit tout le bien que nous pensons de cett.e réalisation,
nous formulerons une toute petite critique quant à l'esthétique
d'ensemble du square Aristide-Briand.
Voici un mois les vieilles grilles qui clôturaient ce jardin étaient
abattues. Nous applaudissions à cet essai de rajeunissement. Les
plates-bandes de fleurs sont bien plus gracieuses que l'ancienne clôture.
Les statues, débarrassées de leur gaine de verdure touffue,
sont bien mieux en valeur et le square lui-même parait plus gai,
plus vaste et l'on peut admirer, assis sur ses bancs, le splendide horizon
marin.
Maintenant on nous offre un chalet de nécessité-pergola
du meilleur goût.
C'est parfait.
Mais combien le vieux kiosque à musique qui occupe le centre du
square peut paraitre ridicule et encombrant avec son toit en forme de
chapeau de mandarin !
Il évoque, à lui seul, toute la vieille et noire province
française, le cours vide en semaine et où le dimanche seulement
les nourrices, les soldats désoeuvrés et les bons bourgeois
viennent se promener au ralenti en attendant que l'harmonie locale disperse
sous le feuillage des platanes les airs rococo d'une polka pour piston
solo ou petite flûte, ou les harmonies fatiguées de «
Poète et paysan ».
Eh bien ! Alger mérite mieux que ça !
Puisque la municipalité a commence à moderniser ce square
aimé des Algérois, il faut qu'elle supprime ce champignon.
Et les concerts ! direz-vous.
Les concerts ? Mais il existe d'autres moyens pour abriter un orchestre
et répercuter les sons et nous pensons, en écrivant ces
lignes, à maints théâtres de verdure comme celui des
Tuileries ou celui de Mme Vianda Landowska à Saint-Leu-la-Forêt,
ou à l'admirable vérandah du Grand casino de, Vichy ou encore
aux voûtes sonores dont s'enorgueillissent les villes nordiques.
Ceci n'est «une suggestion et nous sommes assurés que la
municipalité trouvera la solution élégante pour achever
de donner au vieux square Bresson une physionomie entièrement moderne,
en rapport avec sa nouvelle appellation de square Aristide-Briand.
A.-L. BitEUGNOT.
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