sur site le 7/03/2002
-Le club cyclo-touriste algérois ( C.C.T.A.)
Au début de l'année 1950 paraissait, dans la presse algéroise, un communiqué annonçant la création d'un club de cyclotourisme à Alger. I1 fallait prendre contact avec M. M. Loiseau et Maubert à la maison de l'Agriculture, boulevard Baudin.
pnha n° 50 octobre 1994

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-------Au début de l'année 1950 paraissait, dans la presse algéroise, un communiqué annonçant la création d'un club de cyclotourisme à Alger. Il fallait prendre contact avec M. M. Loiseau et Maubert à la maison de l'Agriculture, boulevard Baudin.
-------Mon frère et moi nous présentons à l'heure prévue et notre surprise est grande d'être mis en contact avec deux jeunes gens alors que nous nous attendions à rencontrer deux messieurs d'âge plus murs.
-------Qu'à cela ne tienne, nous faisons connaissance sur le trottoir, notre première salle de réunion. Aussitôt les idées fusent et le projet prend rapidement forme. La réunion constitutive a lieu un dimanche dans l'arrière salle du "Bar de la poste", rue Alfred Lelluch.
Nos deux fondateurs ont amené avec eux deux amis de travail, nettement plus âgés que nous, ce sont nos conseillers pour la création de l'association.
-------Les choses vont très vite et je me retrouve président, je dirais presque d'office car je suis le plus âgé, mis à part nos conseillers, mon frère devient trésorier. La déclaration officielle est rapidement faite et le club a une existence légale.
-------Communiqués de presse et "téléphone arabe" amènent une poignée de participants à notre première sortie : Alger, Mazafran et retour.
-------Je dois dire que si tout le monde a déjà un vélo plus ou moins de course, j'ai acheté le mien juste avant la sortie, ne pratiquant plus depuis longtemps.
-------Aussi, le démarrage est plutôt difficile, mais ce n'est pas l'important. L'important, c'est que se créé ce jour là une amitié qui ira en s'amplifiant au cours des quatre années que durera le club.
-------Nous n'avons jamais atteint un grand nombre d'adhérents mais, avec l'ambiance, l'amitié grandissait à chacune des sorties.
-------Qui composaient notre équipe
-------Là, les antiracistes de notre pays, l'actuel, la "métropole" comme nous disions en Algérie, ne vont pas me croire et pourtant je vais citer des noms.
Notre groupe était composé de toutes les confessions et races de la communauté, voyez plutôt
- Des Français catholiques : Maubert, Loiseau (+) (lui 50% maltais), Triay, Dumoulin ou Isselin (+)
- Astolfi, son père était facteur, corse obligé
-Bassoli, maçon italien, Longobardi ou Porco (+) également d'origine italienne
- Munoz, Torregrossa, Llorca ou Sintès d'origine espagnole certainement mélangés comme moi
- Ouari, catholique d'origine kabyle, un "MTourni" comme disaient les arabes (Tourné, musulman devenu catholique)
- Tenza et Akbal, élevés par les Pères Blancs
- Méziane Mohamed, musulman
-Yafil, Hadjadje et Lévy, israélites
- Sacha, un jeune polonais dont j'ai oublié le nom compliqué
- d'autres encore, dont les noms échappent quarante plus tard et même trois jeunes militaires de métropole qui faisaient leur temps de service et avec qui nous avons gardé un bon contact.
-------Après cela, on dira que nous étions racistes, faut pas chercher à comprendre.

Mais que faisions nous comme cyclotourisme ?
-------Tout d'abord, nous avions adhéré à la Fédération Française de Cyclo-Tourisme (FFCT) ce qui nous a permis d'organiser des brevets de 50 et 100 kms, de bénéficier de points d'accueil pour nos randonnées en France métropolitaine.
-------Nous organisons des sorties dominicales, soit en hiver, autour d'Alger, dans le Sahel en particulier, soit au printemps ou l'automne, des sorties plus longues vers l'Atlas ; par exemple Chréa, où, un jour d'octobre, nous avons passé une partie de la journée à nous sécher après une douche mémorable reçue pendant l'ascension ; ou le Bou Zegza, 28 kms de côte depuis l'Arba, jusqu'au col des deux bassins. En effet, nous aimions la montagne, non seulement les jeunes, mais aussi notre vétéran de l'époque, Charly Astolfi, malgré ses 40 ans et grâce à ses petits braquets.
-------Lors des grandes fêtes, comme Pâques ou la Pentecôte, nous organisions des sorties combinées avec le train, comme le voyage train jusqu'à Sétif et continuation à vélo vers les gorges de Kerrata, la corniche de Djidjelli avec visite de la grotte merveilleuse sur la corniche. Ce soir là, nous avions dormi à la caserne des parachutistes de Djidjelli. Le lendemain, retour sur Bougie pour terminer en train vers Alger.
-------D'autres sorties uniquement à vélo comme le circuit Alger/Tizi-Ouzou, le premier jour. Le deuxième jour, Tiz-Ouzou/Fort National, avec 20 kms de côte, Michelet-col de Tirourda, avec encore une vingtaine de kms de côte, parfois à 15%, le col de Tirourda traversé, vélo sur l'épaule, sur trois kilomètres dans la neige, puis descente vers Maillot par une route non bitumée et un "froid de canard", nous obligeant à marcher à pied un certain temps pour nous dégourdir les pieds gelés. Après un bref arrêt à Maillot pour nous restaurer, 40 kms contre un violent vent de face, pour rejoindre Bouira où nous avions dormi au bain maure, le seul hôtel étant complet pour Pâques. Nous avions roulé 140 kms ce jour-là. Troisième jour, encore 125 kms pour rentrer sur Alger, toujours vent debout et froid glacial.
-------L'été nous allions souvent vers les plages du littoral algérois : Sidi Ferruch, Zéralda ou Castiglione à l'ouest ; à l'est vers Cap Matifou, A'in Taya, Rocher noir et même Dellys où nous avions dormi sur la terrasse du sport nautique. En général, la journée se passait, outre le voyage aller et retour à vélo, en bains et jeux de ballon. Les jambes en avaient pour deux ou trois bons jours à s'en remettre.
-------En 1951, nous avions organisé, à la plage de Zéralda, une fête de propagande qui avait attiré beaucoup de curieux et deux ou trois adhésions.
-------On dit que les bonnes choses ont une fin et, comme disait la "mère Denis" dans une publicité bien connue : "c'est ben vrai". Le mariage de certains d'entre nous et "La guerre d'Algérie" vinrent mettre un terme à cette belle aventure de jeunesse. L'exode nous a dispersé au hasard de l'hexagone, certains ont quitté notre monde, par contre, pour les rescapés, l'amitié et nos souvenirs restent toujours vivaces, le mauvais vent de l'histoire ne pourra les effacer.

Yvon Ferrandis
3 rue Ludovic Massé
66200 Alenya
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