A Raïsville
Maison de l'enfance de la division grandissent des fils de soldats
Il avait cinq ans, six
peut-être, yeux bleus, un regard rieur.
J'avais à peine franchi le seuil.
L'enfant, sans gêne aucune, se dirigeait vers moi et me serrait
la main. " Comment vas-tu, Monsieur ". Il me souhaitait, a
sa manière, la plus cordiale des bienvenues.
Fils de soldat
Qui était-il ? d'où venait-il ? Son père était-il
mort en Indochine, traité dans un sana, en service dans une lointaine
colonie.
Qu'importe ? Son père était soldat, lui était malheureux,
l'armée l'a recueilli, lui a rendu le goût de vivre.
Il est un des 40 petits pensionnaires de la Maison de l'Enfance de la
division f'Alger, autrement dit, de " Raïsville ".
Raïsville, c`est un peu le paradis pour tous ces enfants qui, à
des titres divers, ont souffert de la guerre et des innombrables difficultés
qu'elle a partout engendrées.
Finie l'existence étriquée, asphyxiante, des chambres
d'hôtel exiguës, finis les déplacements incessants,
fini le " tourisme scolaire ", oublié en un mot le
cauchemar poignant des années de misère. Cesr une vie
nouvelle qui commence à Raïsville
Raïsville comment
on y vit
A deux pas du stade de Saint-Eugène face a la mer se dresse un
ancien fort turc qui servit, fort longtemps, de colombier militaire,
est installé le centre de Raïsville que dirige avec une
souriante autorité Mme Vrillon.
Ce qu'on y fait, comment l'on y vit, mon jeune ami de tout à
l'heure me l'a bien volontiers raconté.
D'abord, je vais en classe, m a-t-il déclaré avec un grand
sérieux, parce que moi. tu comprends, j'apprends à lire
et à écrire. Je travaille le matin et l'après-midi...
Et puis y a les jeux, l'éducation physique... Il y a aussi les
concours. Tu sais pas non plus ce que c'est ? Voilà, au réfectoire,
au dortoir, nous sommes divisés en équipes .
Il y a un classement des équipes et celle qui se distingue par
sa conduite et son travail reçoit un prix en fin d'année.
Le dimanche, maman vient me chercher et je passe la journée avec
elle... "
Une grande réalisation
L'enfant m'en avait dit beaucoup, mais il ne m'avait pas tout dit...Il
ne m'avait pas dit les trésors d'imagination prodigués
pour aménager décemment, une construction que rien ne
destinait à devenir un centre d'accueil.
Il ne m'avait pas dit l'extraordinaire dévouement de institutrice
et de ses assistantes qui se consacrent à une tache bien souvent
pénible : celle d''instruire des enfants en retard, parfois même
attardés.
Il ne m'avait pas dit les efforts déployés par la direction
de Raïsville et par la direction du Service
social de la division pour faire régner dans la maison gaîté
et bonheur.
Leurs études primaires terminées, les enfants quittent
le centre. Plusieurs déjà ont été reçus
au concours des bourses et au certificat d'études. Ils sont,
de préférence, orientés vers les écoles
techniques.
Demain, ces jeunes rempliront leur rôle - un rôle d'importance
- dans la vie du pays. Ils se souviendront alors qu'au moment où
tout leur semblait hostile, où toute espérance paraissait
vaine, l'armée leur a ouvert tout grands ses bras, l'armée
qui reste une grande famille...