LI CHACAIL Y LA CIGOGNE
FABLE IMITÉE DE LA FONTAINE
Fables et contes en sabir par Kaddour Benitram-le Tunisois Martin,l'animateur bien connu de radio-tunis des années 50

sur site : janvier 2016

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LI CHACAIL Y LA CIGOGNE
FABLE MITÉE DE LA FONTAINE

On jor Sidi Chacail y fir l'anvitation,
Por qui ji viann mangi quiqu'soge dans son mison,
A madame Cigogne, qui cit on mazmazile
Qui mange pas beaucoup, ma qui son difficile,
Li couscous son pas bon ; y son migre akarbi !
Barc' qui Sidi Chacail y son plous qui youdi.
Y l'mittra sor la table, dans on pitit assiette,
Por qui la Cigogne y ni prendra pas miette.
Li Chacail, gran volor, boulottra tot d'on coup
Y lisse lo l'anvité, qui mang'ra rian di tout.
I,a Cigogne y maroun', y dit : — « Cit grann salti,
Y si fotra di moi I ma j'ti fir carotti
» A mon tour. »
Y son bassi quiqu'jours
Y trovi cit Chacail ; y Joui dit : — « Camarade,
» Fir blisir, ti viendra, por mangi afic moi ;
» Mon mison son to pri ; cit on promenade,
» Y ti mang'ra on pol smin (1), ixpri por toi. »
Li Chacail y l'accepte, y loui dit : — « Mon zamie
» Afic vous ji fir pas jami cérimonie »
Quand arrivi li jor, por ji mangi cit pol,
Li Chacail y viendra, il iti comme on fol,
Y fir salamalek : y senti li bollion,
Y pensi qui cit pol, por sûr il it tri bon.
La Cigogne y l'copra en tot pitit morceau ;
Apri y loui mitra en didans d'on boutille.
Por mangi, li Chacail, ji souis bian difficile.
Jami afic son boche, y po prendre cit fricot.
La Cigogne mang'ra tout. Li Chacail, coilloné,
Y torne à son mison, sans qui ji riann mangé.
Y traîn'ra son la queue, y baiss'ra son zoreille,
Plous coillon comme loui, ti trov' pas son bareil,
Y son, por ma parol, comme si ji souis frapi,
La mime soge si citte pol, por lui ji son trapi.

MORALE

Carottier cit por toi qui ji fir cit fable.
Ti voir por carotti, comme toi ji souis capable.

(1) Grasse,.

Le Renard et la Cigogne

Compère le Renard se mit un jour en frais,
et retint à dîner commère la Cigogne.
Le régal fût petit et sans beaucoup d'apprêts :
Le galant pour toute besogne,
Avait un brouet clair ; il vivait chichement.
Ce brouet fut par lui servi sur une assiette :
La Cigogne au long bec n'en put attraper miette ;
Et le drôle eut lapé le tout en un moment.
Pour se venger de cette tromperie,
A quelque temps de là, la Cigogne le prie.
"Volontiers, lui dit-il ; car avec mes amis
Je ne fais point cérémonie. "
A l'heure dite, il courut au logis
De la Cigogne son hôtesse ;
Loua très fort la politesse ;
Trouva le dîner cuit à point :
Bon appétit surtout ; Renards n'en manquent point.
Il se réjouissait à l'odeur de la viande
Mise en menus morceaux, et qu'il croyait friande.
On servit, pour l'embarrasser,
En un vase à long col et d'étroite embouchure.
Le bec de la Cigogne y pouvait bien passer ;
Mais le museau du sire était d'autre mesure.
Il lui fallut à jeun retourner au logis,
Honteux comme un Renard qu'une Poule aurait pris,
Serrant la queue, et portant bas l'oreille.
Trompeurs, c'est pour vous que j'écris :
Attendez-vous à la pareille.


Jean de LA FONTAINE (1621-1695)