Le Général LAMORICIERE écrivait en
mai 1846 "Vous savez notre histoire depuis 16 ans. Le résultat
le plus clair de nos combats, de nos travaux, de nos peines, est d'avoir
un territoire où la guerre ne pénètre plus... et
cependant. CES VASTES TERRITOIRES NE SE COLONISENT POINT ! ".
Et pourtant... ce sont des centaines de villages qui ont été
édifiés par de courageux COLONS (à cette époque
ce terme n'est pas péjoratif). Ils ont dû affronter la soif,
les sècheresses, les inondations, le typhus, la malaria, la peste
et autres épidémies, les bêtes sauvages, les sauterelles,
les famines, la mortalité infantile élevée, l'hécatombe
dans les marais pestilentiels de la MITIDJA, les HADJOUTES, l'insécurité
permanente... le plus souvent sur des terres où abondaient cailloux,
palmiers nains ou marécages.
L'année 1848 va accélérer l'implantation de Centres
de Colonisation. Un peu d'histoire :
La fermeture soudaine des Ateliers Nationaux provoqua l'insurrection de
juin et 11 000 personnes furent arrêtées. 3 à 4 000
furent aussitôt déportées en Afrique et envoyées
au pénitencier de LAMBESE (ceux qui restèrent en tant que
colons se sont installés pour la plupart dans le département
de CONSTANTINE). Il n'y a AUCUN RAPPORT entre ces condamnés politiques
des journées révolutionnaires et les OUVRIERS PARISIENS
à qui le Gouvernement fit appel 3 mois plus tard, après
le décret du 19 décembre 1848 qui débloquait un crédit
de 50 millions de francs pour l'établissement de COLONIES AGRICOLES
dans les Provinces d'ALGERIE et pour les travaux d'utilité publique.
Une anecdote : à l'annonce de la parution de ce décret,
les Etablissements Publics et un grand nombre de maisons particulières
ont été illuminées toute la soirée.
Chiffre des Colons prévus : 12 000, porté à 13 500
en novembre 1848. En fait, il en est venu 20 000 environ.
Les " COLONIES AGRICOLES " de 1848
:
ALGEROIS :
BOU-ROUMI, CASTIGLIONE, DAMIETTE, EL-AFFROUN. LODI, MARENGO. MONTENOTTE,
NOVI, La FERME, PONTEBA, ZURICH
ORANAIS :
ABOUKIR, AÏN-NOUISY (NOISY-les-BAINS), AIN-TEDELES, ASSI-AMEUR, ASS1-BEN-FEREAH,
ASSI-BEN-OKBA, ASSI-BOU-NIE DAMESME, FLEURUS. KLEBER, MANGIN. MEFFESSOUR
(RENAN), SAINT-CLOUD, SAINT-LEU, SAINT-LOUIS, SOUK-EL-MITOU (BELLEVUE),
RIVOLI, TOUNIN.
CONSTANTINOIS
: BARRAL, HELIOPOL1S, JEMMAPES, GASTONV1LLE, MILLESIMO, MONDOVI. PETIT,
ROBERTVILLE.
Il y aura 17 CONVOIS VOLONTAIRES.
Le 1er convoi démarre de Paris, le 8 octobre 1848 à destination
de SAINT-CLOUD (Oranie) via ARZEW.
Le 2ème convoi démarre de Paris le 15 octobre 1848 à
destination de SAINT-LEU (Oranie) via ARZEW.
Le 3ème convoi démarre de Paris, le 19 octobre 1848 pour
RIVOLI (Oranie) via MOSTAGANEM.
Ce fut un grand évènement parisien. Les Autorités
Militaires et Religieuses étaient sur les quais de la Seine, parmi
la foule enthousiaste. Discours de Monsieur TRELAT, Président de
la Commission de la Colonisation de la Chambre. LAMORICIERE harangua les
futurs COLONS et Monseigneur MORLOT, Archevêque de Paris, les bénit.
Le convoi était constitué de 4 bateaux de 30 mètres
de long sur 6 de large, avec à leur bord 865 COLONS (330 familles),
sous la responsabilité du commandant RASTOUIL, assisté du
chirurgien du Val de Grâce TRUDEAU, et accompagné de l'abbé
DURAND -DIDIER.
Départ du quai Saint-Bernard. Le convoi s'ébranla aux accents
de la MARSEILLAISE et du chant des GIRONDINS (qui de temps à autres
subissait des variantes comme celle- ci: " NOURRIS PAR LA PATRIE,
C'EST LE SORT LE PLUS BEAU ".
Le périple :
Trajet de Paris à Marseille : 3 semaines
- la Seine jusqu'à Montereaux,
- puis les canaux de Briare, de la Loire et du Centre,
- puis la Saône de Châlon à Lyon
" TOUJOURS AUX PAS LENTS DES CHEVAUX DE HALAGE "
- puis de Lyon à Arles par bateau à vapeur,
- puis d'Arles à Marseille en chemin de fer,
Tout au long du parcours, les émigrants furent salués et
acclamés. Ils reçurent à Marseille comme à
Paris, la visite des Autorités. Gaston DEFFERRE n'était
pas là pour nous dire d'aller nous réadapter ailleurs I!!
- puis embarquement pour l'Afrique sur la frégate MAGELLAN jusqu'à
MOSTAGANEM, où elle jeta l'ancre à 1 heure du matin après
8 jours de mer...
A l'arrivée, le Général BOSQUET décide de
faire choisir entre 3 lettres A- B et C ( A correspondait à RIVOLI,
B à PONTDU-CHELIF et C à AIN-TEDELES). Tirage au sort...
Ceux de RIVOLI étaient les moins nombreux :
- 71 hommes
- 44 femmes
- 61 enfants de plus de 12 ans
- 21 enfants de moins de 12 ans
Ils furent confiés au Capitaine MAGNIN au camp d'HASSIMAMECH (MAMECH
paraît avoir été le personnage de la tribu des DRADEB
qui a donné son nom à un puits (pas entretenu, zone insalubre...).
Les COLONS ont d'abord été logés dans des baraquements.
Ils devaient être nourris jusqu'au 31 décembre 1850.
Ration journalière
:
- 200 grammes de pain pour soupe,
- 200 grammes de biscuits,
- 200 grammes de viande fraîche,
- 28 grammes de chandelles,
- 180 grammes de semoule,
- 200 centilitres de vin,
- 0,10 franc d'indemnité
Enfant de 2 à 12 : - 1 demi ration
Enfant de moins de 2 ans : - néant
Périodiquement, distribution de souliers, chapeaux, chemises et
autres vêtements.
Il y eut bientôt au village un boulanger et quelques commerçants
et 2 cabarets.
Tous les hommes devaient être présents, matin et soir, à
l'appel du travail. Ceux qui ne respectaient pas ces consignes étaient
punis (on relève dans les archives une demande de privation de
8 jours de vivres pour 7 COLONS qui ne s'étaient pas présentés
à cet appel). Chaque soir, extinction des feux!
Il y eut quelques familles supplémentaires pour RIVOLI avec le
17ème convoi. Celui-ci, parti de Paris le 17 mars 1849, prit la
frégate l'INFERNAL à Marseille pour MERS-ELKEBIR. S'étant
trompée de route, elle s'échoue dans la baie de STORA. Rassemblés
à PHILIPPEVILLE, les COLONS furent embarqués sur le VAUTOUR
pour ALGER (6 jours de voyage). Nouvel embarquement sur le DAUPHIN qui
parvint à MOSTAGANEM le 18 avril 1849 !
Pose de la lère pierre le 10 janvier 1849
(lettre du Capitaine MAGNIN au Général Commandant
de la Subdivision).
Une bouteille renfermant un écrit signé par tous les COLONS
a été scellée et recouverte dans les fondations.
A mesure que les maisons étaient prêtes, elles étaient
tirées au sort et livrées aux COLONS. Le 25 novembre 1848,
souscription des Oranais destinée à aider les COLONS de
RIVOLI à débarrasser les terrains encombrés de palmiers
nains (6 Espagnols pour le défrichement).
Les concessions : dès mise
en valeur de la totalité des terres arables de leur concession,
les titres provisoires de propriété étaient convertis
en titres définitifs. Dans le cas contraire, le Ministre pouvait
prononcer la déchéance des concessionnaires et la reprise
de possession des biens par l'Etat. Il y avait 3 mois de carence pour
pouvoir aliéner ses terres et maison après la délivrance
de l'acte de propriété définitive. Avant ce délai,
les COLONS devaient rembourser à l'Etat le montant des dépenses
effectuées pour leur installation.
Les métiers des COLONS à leur arrivée
à RIVOLI:
12 seulement étaient paysans, le reste boulangers, menuisiers,
maçons, forgerons, carriers, un scieur de long, un maître
d'hôtel, un peintre doreur, un ouatier, un fumiste, d'anciens militaires
et autres spécialités... Un " moniteur agricole "
a été choisi parmi les COLONS, Monsieur ROUILLON. Le premier
Maître d'école fut le curé, l'abbé COULON.
La première salle de classe était l'église aménagée
dans une simple maison de colonie. Le premier instituteur a été
Monsieur BEUR VILLE, " première institutrice Mademoiselle
LEROUX. L'école de Se9.5- filles, complétée par l'école
maternelle, sera confiée en août
1853 à des religieuses Trinitaires.
La remise des pouvoirs militaires à l'autorité civile est
effectuée le 1er juillet 1852 :
François Léon MONTALANT est nommé
Maire par le GOUVERNEUR GENERAL.
RIVOLI est devenu un vrai village !
Avez-vous un ancêtre parmi les concessionnaires installés
à RIVOLI et dans la vallée du NADOUR entre 1848 et 1865
? Voici leurs noms : Aux, ARNAULD, BARNABE, BARTHELEMY, B.EllRY).2.1E,
13ED2-
80070, BORDAS Marc, BORDAS Martial, CARTlGNOLE, CHABUEL. CHARPENTIER,
CHATELAIN, CHAVET, CHERADAME, CLAUSTRES. COHEN, CORNU, CRASTE, CROLBOIS,
DARRICARERE, DAUB, DEBOUCHE, DECOLOGNE, DESJARDINS Jacques. DESJARDINS
Pierre, DEJEAN, DEVIN, DONADIEU, DURAND de NAILLAC, ESPEUTEVRARD. FAUQUE.
FAYON, FUGET, GAUDETGELIS. GILLOT, GONTHIER,GRAILLAT.GRIVAUX, GUILBERT,
GUILLOU, GUYOT. HAMELIN, HAUDRICOURT. HAREL, HEMENOT JAILLAT, JAMBERT,
JEAN-MARIE, LASIGNAT. LE CIGNE, LEMEY MAGNIN, MARCHAND. MARY, MASSOUTIER,
MAUSSANG, MENETRIER, MOLITOR, MONTALANT. MORICE, PAPELDUCI. PEZOLD, PLATEL.
POCQUET, POINTU. POUGET, POURTALET, PUJOL. RAMOND, RECORD. REMY. REPELIN,
RIGAUD, ROBIN, ROGER. ROTTE, ROUSSELLE. SAINT-UPERY,SAMUEL. SANDRE, SAURAT,SCHVVEITZER,
SIMON. SUILHARD. TAILLADE. THOMAS, TIREL, TRUCY, TUFFIERE, ULRICH, UNTEREINER.
VALLEE Amédée, VALLEE Louis, VIGNAU.
(Références : " Une Colonie Agricole en 1848: RIVOLI
" de V. DEJARDINS, parue dans le bulletin de la Société
Géographique d'ORAN 1934 " - Voir l'article de Madame Geneviève
DE TERNANT paru dans l'Echo de l'Oranie n°188 de janvier/ février
1987).
(Armand Bonhommet - 66 avenue Saint Exupéry - 13800
ISTRES)
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