-----Née en 1797 à Gaillac,
dans le Tarn, la petite Emilie est une enfant d'où transparaît
déjà une forte énergie. A cinq ans, elle sait résister
à la tentation de s'admirer dans une glace le jour où elle
porte une robe neuve. Adolescente qui cherche sa voie, à sa communion,
elle décide de se corriger de l'habitude de mentir et y parvient
si bien que, racontant ce souvenir longtemps après, elle ajoute
: "Depuis, je n'ai rien tant haï que le mensonge".
-----Elle perd sa mère alors qu'elle
a à peine quinze ans et doit se consacrer à la maison de
son père.
-----Cela ne l'empêche pas de se dévouer
au service des pauvres et des malades, ce qui irrite fortement son père,
veuf irascible et brutal qui n'hésitera pas dans la rue, à
renverser la marmite de soupe qu'Emilie apportait aux pauvres. Un jour,
à table, alors qu'il est question de vie religieuse, il jette une
carafe à la tête de sa fille.
-----En 1832, la mort de son grand-père
procure à Emilie une belle fortune et elle se lance dans la fondation
d'un institut religieux qui prendra le nom de Saint-Joseph-de-l'Apparition
(il s'agit de l'apparition de l'Ange du Seigneur à Saint-Joseph
qui lui dit "ne crains pas de prendre chez toi Marie, car ce qui
a été engendré en elle vient de l'EspritSaint).
-----L'habit de ces religieuses était
strict : une robe de laine noire, un grand tablier à bavette, la
coiffe de l'époque qu'on appelait capote (et sur laquelle, plus
tard seulement, on ajoutera un voile noir), une croix sur la poitrine,
au bout d'un cordon.
L'ALGÉRIE
-----Et, cette même année
1832, son frère Augustin, débarque en Algérie. D'un
tempérament ardent comme sa soeur, il y accomplit du bon travail
ayant compris la nécessité d'apporter à ce pays toute
l'aide nécessaire à son développement.
-----En 1835, il appelle sa soeur à
le rejoindre. Au mois d'août Emilie et trois autres religieuses
(elles viennent juste de faire leur profession religieuse) arrivent à
Alger
en pleine épidémie de choléra. Elles se
font aussitôt infirmières dans une villa transformée
en ambulance à Boufarik,
gros marché où viennent chaque semaine plus de 5 000 arabes
et où l'épidémie sévit presque continuellement.
Elle y rencontra un prêtre magnifique l'abbé Montera, qui
se dépense sans compter. Un même amour de Dieu et des âmes
unit les deux missionnaires.
-----En 1836, elles installent dans une maison
acquise à Alger une école et une infirmerie, suscitant une
affectueuse admiration des autochtones.
-----L'un d'entre-eux, montrant la croix
que la soeur portait sur son coeur, lui dit : "Celui-ci est bon qui
te fait faire ces choses".
D'autres soeurs arrivent. En 1837, quatorze religieuses oeuvrent à
l'hôpital civil, en 1838, sept autres à l'hôpital de
Bône et en 1839, elles sont à Constantine.
-----Mais bientôt un malheureux différend
s'élève entre Emilie de Vialar et Mgr Dupuch, provoquant
le départ des religieuses (Mgr Dupuch, premier évêque
d'Alger, autoritaire et fort brouillon voulut diriger la congrégation
religieuse et diviser entre elles les soeurs, cherchant à éliminer
Emilie qu'il trouvait trop indépendante et trop active à
son goût). Mgr Dupuch enverra même une lettre à Émilie
lui demandant de s'engager à lui obéir sans réserve
pour tout ce qu'il déciderait Elle ne put évidemment le
faire son Institut dépendant d'abord de l'archevêque d'Albi.
Il lu retira aussitôt son approbation et Émilie rentra en
France. De nombreux indigènes (dont le grand Mufti) signent une
lettre qui est envoyée au Pape pour supplier qu'elles ne les abandonnent
pas.
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-----Mgr Dupuch paiera très cher
son imcompétence et son entêtement. N'ayant pas su administrer
son diocèse, il devra bientôt s'enfuir, poursuivi par ses
créanciers. Traqué par la colère générale,
c'est par Augustin de Vialar qu'il sera sauvé. Belle revanche de
la charité chrétienne !
-----Mère Émilie s'inquiète,
pleine de pitié pour celui dont elle a eu tant à souffrir.
-----Revenu de ses erreurs, le malheureux
évêque en exil lui demanda de lui pardonner le mal qu'il
lui a fait. Elle brûla la lettre en disant : "Il ne convient
pas qu'un évêque s'humilie devant une religieuse". La
mère Emilie fit de grandes dépenses en Algérie et
elle partit presque ruinée. Malgré de multiples difficultés,
son Institut se développa. Infatigable missionnaire, Mère
de Vialar retourne bientôt en Tunisie et installe son Institut à
La Marsa.
LE TEMPS DES DIFFICULTÉS
ET DE L'EXTENSION
-----Bien des difficultés
surgiront encore dans la vie de Mère Émilie : Soeur Pauline,
une des premières, mettra l'Institut dans de très grandes
difficultés financières, la mort de l'abbé Mercier
qui l'avait tant aidé, sa fortune personnelle anéantie.
-----Ennuis ou peines, rien ne peut empêcher
Émilie de poursuivre son oeuvre. C'est maintenant l'apostolat des
filles dans les prisons, en Italie, qu'elle aimera, instruira et rééduquera
à la vie chrétienne. -----Puis
Chypre et encore la Tunisie puis la Grèce, le Liban, la Birmanie
et même Jérusalem réclament l'oeuvre. Le succès
est mondial aussi bien à Tripoli qu'à Marseille où
l'Institut s'est désormais installé pour être plus
proche de l'OutreMer. Puis Mère Émilie enverra des soeurs
en Syrie, en Arménie et à sa mort, en 1856, il comprenait
42 maisons de par le monde.
-----Elle mourra d'une banale hernie étranglée
qu'on n'a pas, à cette époque, les moyens de soigner comme
aujourd'hui. Elle lui vient d'un sac de blé beaucoup trop lourd,
qu'elle avait apporté aux pauvres, à vingt ans.
-----A vrai dire, elle en a souffert toute
sa vie, sans rien dire. Près de quarante ans après, c'est
de cela qu'elle va mourir en deux jours. Dans Marseille, on entend déjà
chuchoter partout : " La sainte est morte !"
-----Emilie de Vialar a été
béatifiée en 1939 et canonisée en 1951 par le même
Pape : Pie XII.
-----Actuellement, les sueurs de Saint-Joseph
de l'Apparition ont 130 maisons disséminées sur quatre continents,
Australie, Inde, Thaïlande, Argentine, Guatemala, Angleterre, Irlande...
-----Sa devise est magnifique : "Se
dévouer et mourir". Dans sa châsse, en l'Église
SaintPierre à Gaillac dans le Tarn, Mère Émilie de
Vialar est vénérée et sa fête est le 17 juin.
-----La Maison généralice de
la Congrégation missionnaire des Sceurs de Saint-Joseph de l'Apparition
est domiciliée 90 avenue Foch 94120 Fontenay-sous-Bois.
Paule BUSCAT
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