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L'église protestante en Algérie Française ( 1830 - 1832 )


PNHA n°35, avril 1993

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(suite de PNHA n° 28

Outre les pasteurs de paroisses, il y avait aussi des "Aumôniers", chargés d'assurer le ministère pastoral auprès des militaires. Ils étaient parfois invités à présider le culte dans les temples, mais cela se faisait à titre exceptionnel, vu que le ministère de l'Aumônier était "itinérant". Cependant certains aumôniers ont été chargés de paroisses mixtes, c'est-à-dire mi-civils mi-militaires, comme à Colomb-Béchar. En 1962, il y avait 9 postes d'aumôniers, sans compter les étudiants en théologie qui faisaient leur service militaire dans l'aumônerie. D'autre part, au moment des fêtes de Noël et de Pâques, une dizaine de pasteurs de Métropole, ou des aumôniers de réserve, étaient envoyés en renfort
pour une quinzaine de jours.

L'œuvre missionnaire protestante en Algérie
------Au moment de la conquête de l'Algérie, deux voies semb laient s'ouvrir à la présence de l'Église Protestante
-- d'une part, l'installation des protestants dans les villes et le bled.
-- d'autre part, la fondation de postes missionnaires.
------En effet, dès les premiers jours, les protestants français ont estimé que le Seigneur, en accordant à la France la Conquête de l'Algérie, avait ménagé aux chrétiens de grandes facilités pour entreprendre une mission évangélique auprès des musulmans.
------Le 4 Août 1830, le Comité de la "Société des Missions Évangéliques de Paris" (créée en 1824) désigne deux pasteurs, MM. Arbuusset et Casalis, comme devant être les premiers missionnaires protestants français en Algérie. Ils apprennent la langue arabe, en vue de cette "Mission". Mais les dispositions des Autorités françaises ont fait avorter ce projet.
------En effet, le Gouvernement n'était pas favorable à une telle vision missionnaire, de peur qu'elle ne suscite l'hostilité des musulmans, que le Pouvoir tenait à se concilier. D'ailleurs la sauvegarde et le respect de la religion et des coutumes islamiques avaient été inclus dans les clauses de l'Acte de Capitulation intervenue entre le Dey d'Alger et le Maréchal de Bourmont. Cependant la Société des Missions Évangéliques de Paris, qui avait, dès le début du XIX° siècle, envoyé de nombreux missionnaires en Afrique Noire, en Afrique du Sud, dans l'Océan Indien et jusqu'aux Iles du Pacifique. n'a pas renoncé à prendre sa part dans l'oeuvre missionnaire en Algérie.
------C'est ainsi qu'en 1852, elle charge un de ses missionnaires, le Pasteur Pfrimmer, d'effectuer un voyage d'étude en Algérie, pour y installer éventuellement un champ de mission.
------Malheureusement, les conclusions du rapport ont été négatives, estimant que le moment n'était pas venu d'entreprendre une telle oeuvre.
------Ce sont donc des protestants étrangers, notamment des Anglais. qui ont entrepris l' ouvre missionnaire en Algérie.

Les Missions étrangères
------En 1831, la "Mission auprès des Juifs" envoie à Alger un missionnaire, qui visite la familles juives, vend des Bibles. I1 s'intéresse aussi à la population protestante, vendant des Bibles et des Nouveaux Testaments, en français, allemand. espagnol et italien. Des musulmans achètent aussi des Bibles en arabe. L'œuvre progressait, mais les Autorités françaises l'ont stoppée, et le missionnaire a dû quitter l'Algérie.
------D'autres tentatives sont faites par des missionnaires anglais. Elles échouent aussi. C'est cinquante ans plus tard, en 1881, que s'organise la "Mission en Kabylie".
Ses promoteurs pensaient que les, Berbères seraient plus sensibles à l'œuvre de l'Évangile que les Arabes.
------Elle est la première Mission protestante en Algérie. Elle a pris le nom de "North Africa Mission".
------La même année de la fondation de cette mission en 188 1, apparaît également en Algérie "La Société Biblique Britannique et Étrangère", dont les colporteurs vont aller partout, offrant l'Écriture sainte aux européens et aux autochtones.

 

------Une clientèle toute spéciale s'est manifestée, celle des soldats de la "Légion Étrangère", et la Société Biblique fournissait des Bibles en quatorze langues étrangères.
------Des protestants Méthodistes français s'intéressent aussi à la fondation d'une "Mission" en Afrique du Nord. En Avril 1888. une mission est installée à El-Mattes. Mais dix ans plus tard, en 1909, elle est transmise à l'Église Méthodiste Épiscopale qui commençait son ouvre en Algérie.
------En 1886. la Société des Missions de Paris se décide à financer une mission indépendante, fondée à Moknéa (en Kabylie). Mais cette aide a été stoppée huit ans après, en 1894.
------En 1909, l' Eglise Méthodiste Épiscopale commence son oeuvre missionnaire, travaillant à la fois parmi les européens ainsi que parmi les musulmans.
------Elle inscrit à son actif des écoles primaires, des écoles ménagères, des foyers pour jeunes gens et d'autres pour jeunes filles, des dispensaires. Cela montre l'importance des moyens en hommes et en argent que l'Église Méthodiste a mis en oeuvre, apportant aux différentes populations une assistance sociale remarquable.
------Une autre oeuvre mérite d'être mentionnée. En 1888, une missionnaire anglaise, Miss Trotter, fonde une "Mission" qui groupe une trentaine de missionnaires, oeuvrant dans dix localités.Après 19 ans d'activité, elle reçoit le nom de "Algiers Mission Band".
------En 1928, année de la mort de Miss Trotter, la Mission comptait 13 stations et une trentaine de missionnaires.
------Dans le développement de l'oeuvre missionnaire en Algérie, le Protestantisme français était presque absent. Mais il a fini par trouver un peu d'existence, grâce à une petite mission indépendante, la "Mission Rolland" qui a assuré le ministère d'évangélisation des musulmans en Kabylie
.
Une oeuvre française La "Mission Rolland"

------Cette "Mission" a été fondée par Émile Rolland qui était ouvrier à l'Usine Peugeot, au pays de Montbéliard.
------Appelé en 1896 à collaborer avec la "North Africa Mission", il accepte avec empressement. II apprend le kabyle. Organise la station missionnaire à Djemaa-saharidj.
------II prêche l'Évangile, organise des réunions pour lire la Bible, chanter des cantiques, prier et discuter. Des Kabyles se convertissent.
------En 1908, il fonde la station de Tizi-Ouzou. Il poursuit ses tournées d'évangélisation, voyageant à bicyclette, allant jusque dans le Sud, visitant les marchés, les termes isolées, pour y
annoncer l'Évangile. De son côté, Mme Rolland et des demoiselles missionnaires visitaient les femmes chez elles.
Pour leur donner du travail, un ouvroir est créé : vannerie, tissage de couvertures, confection de tapis. Les femmes recevaient un salaire, et elles entendaient l'Évangile chaque matin.
------Un "foyer" est aménagé. Les jeunes gens des différents douars y trouvent un gîte et un climat favorable à leur formation intellectuelle et au développement de leur personnalité.
------Un petit dispensaire est ouvert, assurant les soins aux malades, surtout aux enfants.
Un "Refuge" est créé pour accueillir les femmes fautives abandonnées. Enceintes, elles se réfugiaient à la "Mission", où elles trouvaient asile et protection. Les nouveaux - nés étaient adoptés par le missionnaire Rolland. Plus de 30 enfants ont été ainsi sauvés, adoptés et élevés par M. et Mme Rolland.
------Cette "Mission" s'est poursuivie à Tizi-Ouzou (en Kabylie) jusqu'à 1976, date à laquelle l'oeuvre a pris fin, les Autorités algériennes ayant confisqué les biens de la "Mission", et ordonné le départ du Missionnaire Alfred Rolland, et l' oeuvre a pris fin.
------ Ainsi s'est terminé la mission---d'évangélisation sur la terre islamique d'Afrique du Nord, et cela est attristant et navrant. Je voudrais ajouter quelques mots sur l'oeuvre personnelle à laquelle je me suis consacré en Algérie et que je poursuis actuellement en France.

 

L'oeuvre du Pasteur Tartar
------En 1955, j'ai été appelé à assurer le ministère pastoral dans La Paroisse de Boufarik-Cherchell, qui s'étendait sur la Mitidja et le Sahel jusqu'à Francis-Carnier.
------Arabisant et islamologuc, il m'a paru justifié de contribuer à la fraternisation et à la paix en Algérie, par une meilleure compréhension religieuse entre Musulmans et Chrétiens.
------En 1959, j'ai fondé l'Association "Union des Croyants", et je publiais un Bulletin trimestriel en français et en arabe, adressé à plus de 2.000 Imans, responsables des mosquées, qui lisaient ce bulletin avec intérêt.
------Des "Ouvroirs" pour jeunes filles musulmanes ont été créés à Boufarik et à Blida, grâce au concours bénévole de plusieurs darnes protestantes.
------Mais la solution qui a prévalu en Algérie n'a pas été celle que j'espérais. Les protestants de ma Paroisse sont rentrés en France, et je pouvais faire de même.
------Cependant il m'a paru nécessaire de poursuivre le dialogue islamo-chrétien, et d'assurer aussi une présence protestante sur une terre islamique.-
------
Pour poursuivre mon ministère et l'oeuvre à laquelle je m'étais consacré, je me suis engagé comme professeur d'arabe, à l' Office Universitaire et Culturel pour l'Algérie, et j'ai enseigné aux lycées français à Alger.
------J'ai poursuivi la publication du Bulletin "Union des Croyants". J'ai créé un "Foyer Culturel" pour les lycéens de Boufarik ik, et ma femme dirigeait un "Ouvroir" pour les jeunes filles musulmanes.
------J'ai mis à la disposition des jeunes de Boufarik une salle de réunion et de lecture, avec bibliothèque et un cinéclub. Plus d'une centaine de jeunes profitaient de cette "ouvre" culturelle.
------Les Autorités algériennes m'ont laissé faire. Mais en 1970, la Police m'a donné trois jours pour quitter l'Algérie.

Pasteur 'l'artar
( suite de l'article paru dans le magazine n° 28)