Oued Smar -
Rivet
(carte Michelin, 172)
Les câbles téléphoniques
Sur la route.
Les milliers d'automobilistes qui sillonnent journellement la route
nationale d'Alger à Oran, par Blida, ont été intrigués
par des véhicules aux formes inusitées transportant ou
déroulant quelquefois d'immenses bobines. Ces véhicules
circulent le long d'une tranchée creusée au bord de la
route, et bordée de petits drapeaux rouges.
De distances en distances une petite tente. Près de cette dernière,
un avertisseur de nuit à feu rouge d'un côté, vert
de l'autre, monte sur un socle peint de bandes blanches et rouges.
Beaucoup de voyageurs nous ont demandé quels étaient ces
travaux. C'est à leur intention et à celle de nos lecteurs
que nous donnons ci-après des renseignements.
Il s'agit de la pose du fameux câble téléphonique
devant relier Oran, Alger et Constantine avec prolongation et liaison
de part et d'autre sur le Maroc et la Tunisie.
Ce câble améliorera et facilitera considérablement
nos communications téléphoniques interdépartementales.
Les câbles téléphoniques modernes.
A ce sujet, nous croyons utile de donner quelques explications sur les
avantages des câbles qui tendent, en Europe, à remplacer
les lignes aériennes pour les communications téléphoniques
à grande distance.
C'est vers 1890 que furent construits en France et installés
à Lyon les premiers câbles sous plomb armé pour
canalisation électrique souterraine. Ce n'est que vers 1907 que
furent réellement utilisés les premiers câbles téléphoniques
souterrains à grande distance et ce grâce à l'invention
du professeur Pupin qui rendit possible la transmission téléphonique
à grande distance au moyen de bobines de self-induction disposées
en des points déterminés.
L'année dernière ont été inaugurés
les grands câbles Paris-Bordeaux, Paris-Marseille, Tours-Angers-Nantes,
Angoulême-Limoges, Bordeaux-Toulouse, etc.
Leur supériorité sur l'aérien.
Jusqu'à ce jour, les câbles souterrains ont confirmé
leur supériorité sur les lignes aériennes.
Sur ces dernières, il ne peut, en l'état actuel des montages,
y avoir plus d'une centaine de fils par ligne, formant cinquante circuits,
qui sont plus ou moins bien isolés suivant l'état du temps.
Dans un câble téléphonique moderne, on atteint quatre
cents conducteurs avec lesquels on peut réaliser trois cents
circuits, grâce à l'emploi de circuits fantômes;
Ces circuits fantômes sont formés par l'utilisation de
deux circuits réels se fermant sur des transformateurs. Une prise
connectée exactement au milieu de l'un de ces enroulements réunis
à la ligne permet d'établir le troisième circuit
qui est donc formé de deux paires de câbles. D'autre part,
l'isolement d'un câble est tel qu'il ne varie pas avec les conditions
atmosphériques et reste insensible au mauvais temps.
Leur fabrication à Oued-Smar, près Alger.
La construction des câbles souterrains exige une grande minutie
et des appareils d'une grande précision. Une visite à
l'usine de fabrication des câbles algériens, usine édifiée
pour la Société des Lignes Télégraphiques
et Téléphoniques da l'Afrique du Nord, à Oued-Smar,
près de Maison-Carrée, donne, même au profane, une
idée, de la délicatesse des opérations.
Les matières composant le câble doivent être de tout
premier choix et d'une qualité rigoureusement constante.
Chaque fil de cuivre, de haute conductibilité, doit avoir un
diamètre et une résistivité identiques dans toute
sa longueur.
L'isolant de chaque fil est uniquement constitué par du papier
sec.
Après avoir assisté au premier isolement d'une âme
de cuivre à la réparation et â la soudure électrique
d'une rupture accidentelle de ce fil, nous avons suivi les opérations
de doublage, de quartage et d'assemblage. Ces opérations, entièrement
faites par des machines, doivent être précises et sont
très surveillées afin de maintenir constantes les caractéristiques
imposées.
L'habillage du câble proprement dit, qui comporte, outre les isolants
papier, deux couches de rubans d'aluminium, deux couches de toile et
six couches de papier, est également et impeccablement réalisé
par des machines. Ensuite, ce câble subit l'étuvage et
le séchage pour enlever toute trace d'humidité avant de
le mettre sous plomb.
La mise sous plomb et sous armature.
Au fond et â droite du hall, la presse de 1.800 tonnes qui effectue
cette mise sous plomb qui tient de la magie. En effet, le plomb est
en pleine fusion lorsqu'il enrobe le câble d'une armature de trois
millimètres d'épaisseur.
Au sortir de la presse, le câble s'enroule sur la bobine que l'on
voit au dernier plan. Après cette opération a lieu, àdroite
de notre photo, le goudronnage, l'enveloppement par deux feuilles d'acier
de 2 millimètres et la pose du jute goudronné.
Conclusions.
Aux portes d'Alger, dans une région où jadis il n'y avait
que brousses et marais, s'érige une des plus belles et plus modernes
usines de France ! Le mérite de cette création en revient
à la Société des Lignes Téléphoniques
et Télégraphiques de l'Afrique du Nord qui est sous l'heureuse
direction de M. Viard, ingénieur. Elle contribue ainsi et puissamment
au développement et à la prospérité industrielle
de l'Algérie.