Port-aux-Poules du romain aux pèlerins, en passant par la poule-
Pieds-Noirs d'hier et d'aujourd'hui mai-juin 2000 n°112

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----Notre village était situé sur la route littorale RN 11, d'Oran à Mostaganem. près de l'embouchure de la Macta, tout au fond du golfe d'Arzew. Le petit port naturel, qui a fait la réputation de la station balnéaire, était protégé par deux pointes rocheuses, à 200 mètres l'une de l'autre. Profond de 150 mètres, il était abrité des forts vents d'Ouest et de la grosse houle du large, mais restait ouvert aux rafales du vent de Nord-Est sans trop de dommages. La mer depuis la Stidia n'avait pas le temps de se former.
----Vers l'Est, à environ 500 mètres de la deuxième pointe rocheuse, que l'on appelait la pointe Radicich, coulait la Macta, lors des crues d'hiver. Un cordon lagunaire, la plupart du temps, l'isolait de la mer, et l'on passait d'une rive à l'autre à pied sec ou à peine mouillé. Au delà commençait une immense plage de sable fin, sur trois kilomètres, bordée de hautes dunes boisée, et qui s'achevait à l'îlot rocheux au pied du marabout de Sidi Mansour.
----À l'opposé, vers l'Ouest, après la crique Fernandez et le marabout de Sidi Abdallah, protecteur du village arabe la côte était rocheuse, basse et découpée, truffée de grottes et de petites plages.
Tout cela, c'était le Petit Port, la Grande Plage, la Marine. Au Sud-Sud-Est, à 400 mètres de la gare commençait le village. Entre les deux, une zone de transition, plantée de pins couchés à l'horizontale par les vents d'Ouest.
----Zone d'union, de melting pot à l'américaine, où se rencontraient ceux du Village et ceux de la Marine : la Mairie, l'Eglise de Mesdames Hugounenq et Carasco, les tennis et le terrain de boules, le Monument aux Morts, et surtout l'ABC de Madame Balaguer et les baraques foraines des mois d'été.
----Le village, construit en 1883, selon un plan rectangulaire bien ordonné, avait débordé de son cadre initial. La place Dixmude (1) en était le centre, avec son kiosque à musique. On y dansait en juin et pour la Saint-Antoine, patron du village on allait chez Jorge se faire couper les cheveux ou acheter des ampoules électriques, faire le plein d'essence au lampo Quero, boire une anisette au Bar Almendros, et le soir remplir le pot au lait chez Munoz.

----Les premiers documents officiels mentionnant Porto Paulo, retrouvés aux Archives d'Aix-en-Provence, datent de septembre 1854. Ils font état de quelques familles européennes installées dans la région. Port-aux-Poules n' apparaît sur les cartes qu'en 1859. Auparavant il n'y avait rien. Seul le pont de la Macta était mentionné, depuis 1835.

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port aux poules
Vue aérienne
Collection B.Venis

Le site romain de Portus Paulus

----Avant d'être occupé par les Arabes, puis conquis par les Français, le site de Port-aux-Poules avait été romain.
----Il est peu probable que les peuplades primitives de Berbères, nomades et pasteurs, y aient vécu, davantage attirés par les marais humides que par la rocaille désertique. Il est en revanche fort possible que Grecs et Carthaginois y aient trouvé refuge dans leur course vers le couchant.
----Les érudits attribuent la fondation de Port-aux-Poules à un jurisconsulte romain, Paulius Julius, préfet du prétoire sous l'empereur .Septime Sévère, vers l'an 200, ou légèrement plus tard, en 225 sous le débonnaire Alexandre Sévère.
----Les Romains avaient, pour construire un hameau, ouvert une carrière dans les grès rouges et tendres de la petite pointe. Sur une butte rocheuse, au bord de l'eau, ils avaient élevé un temple, des colonnes, des portiques, bâti des villas, pavé des ruelles.
----Les vestiges de la présence romaine étaient nombreux à Port-aux-Poules. Les plus grosses pierres, taillées autrefois par les soldats de la IIIè légion Auguste de la Maurétanie Césarienne, étaient encore visibles dans les soubassements de nombreuses maisons du Petit Port.
----Le Service des Antiquités au début du siècle avait fouillé le site, et transporté au Musée d'Oran ce qui pouvait l'être des mosaïques, des débris de poteries, des fresques, des colonnes.
----On pouvait encore voir à notre époque, entre la petite pointe et le quai, des pierres brisées, des blocs rectangulaires et polis, des marches de perron, des débris de briques rouges et dans des villas deux colonnes à chapiteau corinthien. Par mer calme, parmi les bancs d'algues, de part et d'autre de la carrière, on imaginait SOUS l'eau une apparence de mur, l'angle d'une maison, le tracé d'une voie. On devinait des bassins circulaires, comme ceux qui servent encore chez les Berbères au tannage des peaux. Pour la conservation des cuirs et les salaisons de viandes et de poissons, les Romains utilisaient le sel des salines voisines.
----Les Vandales de Genséric dans leur progression vers l'Est au cinquième siècle, les Arabes de Sidi Okba dans leur marche vers l'Océan au septième, et les hordes hilaliennes, dévastatrices, au milieu du onzième, avaient détruit le petit port marchand et prospère de Portus Paulus.
----Ce qu'ils avaient oublié d'abattre, de disloquer et d'emporter avait été achevé au XlVè siècle par des tribus berbères islamisées et originaires du Maroc, les Bettioua, les Gharabas et les Hamyans.
----Portus Paulus prit alors le nom de Mers-el-Hadjdjedj (port aux pèlerins). Peut-être qu'une erreur de la traduction française y vit des poules (djedj) àla place des pèlerins (Hadjdjedj).
----Les Bettioua s'étaient fixés un peu plus à l'Ouest, vers le plateau de Saint Leu. Les Gharabas étaient demeurés autour des salines d'Arzew et de la forêt de Moulay Ismaël. Les Hamyans avaient occupé toute la région rocailleuse entre les autres tribus depuis la mer jusqu'à la dépression d'El Mellaha. Leur territoire surplombait les immenses marais herbeux de la Macta, ancien golfe marin comblé par les alluvions de l'Oued Sig et de l'Oued Habra. Les "Hamyans" étaient de petits éleveurs. Ils avaient construit des douars, de taille modeste, dans la rocaille aride et sur le pourtour de leurs hautes terres, en position dominante. Loin de la mer, et là où l'accès aux rares puits et aux pacages était facile, on trouvait El Araba, El Haouaoua, En Nekala, Chaoucha, Hassasna

La France s'installe

----Après la prise d'Oran le 4 janvier 1831, le général Desmichels avait fait occuper les ports de la côte en juillet 1833,Arzew puis Mostaganem.
----Le désastre de la Macta, le 28 juin 1835, avait frappé l'opinion et rendu ce nom tristement célèbre. Vainqueur d'Abd el Kader à la bataille de la forêt de Moulay Ismaél, Trézel s'était replié dans le plus grand désordre le long du territoire des Hamyans, en bordure des marais, afin de rejoindre Arzew.
Perdus, dispersés, retardés, 800 blessés sur les 2.000 hommes de troupe avaient été sauvagement, égorgés.
----Le pont de la Macta, depuis, était militairement gardé.
----À cinq km de là, Port-aux-Poules était devenu un point de passage obligé, un lieu d'étape et de bivouac, pour les troupes de l'occupation restreinte. Les sapeurs du Génie avaient creusé des puits à l'embouchure de la rivière, sur la rive gauche, Ceux-ci donnaient une eau saumâtre, mais buvable. Pour les chevaux et le " décrassage "il y avait l'oued.
----Le 19 septembre 1848, l'Assemblée nationale, à Paris, avait décrété la création de colonies agricoles en Algérie. Lamoricière, ministre de la Guerre, était chargé d'en assurer l'exécution.
----Le convoi n°1 avait été destiné à Saint-Cloud. Le convoi n°2 avait débarqué du Cacique à Arzew le 2 novembre 1848. Il était acheminé sur le centre de Saint-Leu et de ses annexes et commcnçait à défricher sous les ordres du capitaine Ycrlès. La colonie de Saint-Leu s'étendait dArzew an pont de la Macta, sur près de 16.000 hectares. Ces terres appartenaient aux Domaines. Elles avaient été mises sous séquestre après la fuite au Maroc, à diverses époques, de leurs propriétaires. De Saint-Leu à Port-aux-Poules, elles ne représentaient qu'une étroite bande de terre, le long de la côte.
----En 1849 et à nouveau en 1851, une épidémie de choléra emportait près de la moitié de la population de la colonie. Des veuves non remariées et des orphelins étaient rapatriés ou envoyés à Oran, des indésirables, des ivrognes et des paresseux étaient expulsés.
----Ils étaient remplaces par d' anciens militaires libérés, par des Espagnols, ouvriers, maçons, terrassiers, parfois maraîchers, arrivés depuis longtemps dans le sillage des troupes ; par les tacherons des " cuadrillas" d'Alicante et de Valencia, venus pour une saison de défrichage ou de moisson, et demeurés dans le pays.
----En 1853, la colonie agricole de Saint-Leu passait sous le contrôle de l'Administration Civile dont le chef-lieu était à Arzew. Port-aux-Poules y était toujours rattaché.
----Le changement de régime entraînait de profondes mutations foncières. Des étrangers, des indigènes, sous certaines conditions, pouvaient acquérir des concessions à titre onéreux, parfois même à titre gratuit. Des familles espagnoles s'installaient le long de la Macta, des Arabes fortunés en faisaient autant.
----En 1854, le Préfet d'Oran prenait acte de la situation et décidait, après avis du Gouvernement Général, d'étudier l'implantation d'un centre de population au lieu-dit "Porto Paulo" près du pont de la Macta.

Une population bigarrée

----Fin 1855, le 31 décembre, dans un rapport trimestriel, l'Inspecteur départemental de la Colonisation signalait la présence de deux fermes isolées, d'une maison de la douane occupée par quatre hommes, et d'une chapelle. La première ferme était la concession Pérez de 25 hectares, la seconde, de 22 hectares, la concession Carasco. Elles étaient situées de part et d'autre de la route, là où la pierre était plus en profondeur, la terre moins calcaire et plus sableuse. Les "colons" semaient du blé et de l'orge, faisaient pousser des légumes, cultivaient un peu de vigne, des figuiers, des jujubiers.
----La chapelle avait une histoire. Quelques années plus tôt, un fils Pérez gravement malade avait fait le vœu d'offrir à la Sainte Vierge une truie qu'il élevait. Une fois rétabli, il avait vendu la truie, et plus tard ses porcelets et de portée en portée, avec l'aide de compatriotes, le "sieur Pérez" avait amassé 1.500 francs et construit sa chapelle, après l'autorisation de l'évêque d'Alger.
----La plantation de pins d'Alep à proximité des puits et de la grande route, où de plus en plus souvent bivouaquaient des soldats, la fréquentation de la crique par des pêcheurs aventurés au large d'Arzew et de Mostaganem, faisaient de Port-aux-Poules un centre commercial actif et attractif.
----Des familles espagnoles, françaises, indigènes continuaient d'arriver, de défricher et de planter.
Depuis 1854, le projet de village piétinait en incessantes allées et venues entre la Préfecture et le Gouvernement Général. Il avait enfin été adopté en 1877 niais tardait à se concrétiser sur le terrain. Seule la construction d'une gendarmerie, avec un grand jardin pour subvenir à ses besoins, était entreprise au bord de la route, face à la chapelle un cimetière, il le fallait bien, était délimité et clôturé au bord de la mer.
----En 1879, Saint-Leu devenait une commune de plein exercice et récupérait Port-aux-Poules. La municipalité s'était émue du développement anarchique du futur village. Elle en avait délibéré au mois de mai 1881, sous la présidence du maire M. Billard et à l'initiative de M. Soler de Port-aux-Poules. Elle constatait la présence d'une nombreuse population, dispersée, sans règles collectives d'hygiène, sans contrôle, et avait demandé la réalisation urgente du projet de lotissement. La situation de Port-aux-Poules cependant évoluait favorablement. Une nouvelle commission mandatée sur place l'avait constaté. Une voie ferrée secondaire à voie étroite était en construction. Elle reliait Arzew à Saïda avec un prolongement prévu vers Ain-Séfra. Le douar Ben Grab y envoyait des manœuvres et s'agrandissait. Un arrêt était prévu à hauteur du port, et les Chemins de Fer de l'Etat avaient construit une petite maison pour le chef de gare.
----Le recensement de la population présente à Port-aux-Poules mettait en évidence la forte proportion d'étrangers non naturalisés et qui, par conséquent, ne pouvaient prétendre à des concessions gratuites. Sur les trente-neuf familles désireuses de s'installer, deux seulement étaient françaises, une indigène, une Autrichienne, une Allemande, trente-deux d'origine espagnole, et les deux dernières domiciliées par ailleurs à Oran.
----Le cahier des charges des futurs attributaires était précis et rigoureux. Les maisons devaient être bâties dans les douze mois, en maçonnerie et couvertes de tuiles ou en terrasses. L'utilisation de torchis, de terre séchée, de canisses, la construction de baraques ou d'abris en planches étaient interdites.
----En 1886, les trois premiers attributaires prenaient enfin possession de leurs lots. Ils s'appelaient Augustin Soler, Grégoire Pérez et Veuve Soler.

Port-aux-Poules prend vie

----Tout en bas, près de la mer, l'ancien petit port romain s'était réveillé. Des pêcheurs espagnols et italiens, installés à Arzew et à la Salamandre après leur occupation par les troupes françaises, y relâchaient de temps à autre. Pour se mettre à l'abri quand ils se laissaient surprendre par le gros temps, et de plus en plus souvent pour y faire une campagne de pêche, généralement à l'automne. C'était la bonne saison. Les périodes de beau temps étaient plus longues, la chaleur moins intense. Les poissons pélagiques abondaient au large, bacorètes, bonites, à la poursuite des bancs d'anchois et de sardines D'autres migrateurs carnassiers se rapprochaient des côtes : liches, golfars, poissons-limons. Parfois des bandes de thons rouges, grands prédateurs, se laissaient prendre dans les filets.
----Les pêcheurs avaient construit des baraques en planches au fond de la crique, face aux ruines du port romain, sur les flancs de la barre rocheuse qui fermait l'abri au Sud.
----Les hommes calaient leurs filets le soir et les sortaient le matin, avant l'aube. ils pêchaient les poissons bleus le jour en les encerclant, dès que des vols de bacoreros dans le ciel signalaient leur présence. la pêche était vendue sur place en petite partie. Des gens "d'en haut", des fermiers, des douaniers, des militaires de passage l'achetaient. La plus grosse part était séchée, fumée et surtout salée. Elle partait ensuite pour les villes et les villages les plus proches.
----Les femmes gardaient des chèvres amenées pour le lait, et étaient chargées de la corvée d'eau et de bois. Elles y allaient avec des ânes, sur les bords de la Macta.
----En même temps qu'elle implantait le village de Port-aux-Poules sur le plateau, l'Administration avait régularisé la situation des pêcheurs installés au bord de la mer... Ceux qui étaient Français recevaient la propriété de trois ares de terre. Les autres devaient acheter. Les pêcheurs étaient très pauvres, ils n'avaient les moyens ni de bâtir, ni de s'étendre.
----Le Gouverneur Général voulait empêcher que ne se passe à Port-aux-Poules ce qui était arrivé à Mers-el-Kébir, à Alger et à Bône : la mainmise des Espagnols et des Italiens sur la pêche côtière. L'échec de la tentative, en 1845, de la création d'un village de pêcheurs à Guyotville, n'avait pas servi de leçon.
----En1894, la nouvelle s'était vit répandue dans la région, qu'un Anglais, du nom d'Armitage et prospecteur de pétrole, avait obtenu un permis de recherche dans les marais de la Macta.
Il travaillait pour le compte d'une société britannique et avait utilisé une puissante sonde canadienne pour forer à Hammam Selama, à cinq km au Sud de Port-aux-Poules, au bord du lac Mouila, des filets d'eau avaient attiré son attention. Ils crevaient la terre, par cloques et bulles chaudes qui sentaient le soufre.
----Depuis toujours les habitants du douar Hassasna venaient y soigner leurs plaies et leurs furoncles.
Stephen Armitage avait creusé jusqu'à 240 mètres de profondeur, et un jet puissant de 25 mètres de hauteur avait jailli, à 38° de température. La renommée de l'eau d'hammam Selama que l'on disait miraculeuse s'était vite imposée à l'Est d'Oran. On prétendait qu'elle guérissait les affections de la peau, les inflammationS des veux, qu'elle soulageait ceux qui souffraient de rhumatismes. Des malades accouraient de tous les villages, pour des piqûres d'insectes envenimées, des écorchures qui ne cicatrisaient pas, pour des caries dentaires.
----Des blessés pensaient, grâce au pouvoir réducteur du soufre, accélérer la guérison de leurs luxations ou de leurs fractures.
----En homme d'affaires avisé, Stephen Armitage avait aussitôt envisagé d'exploiter une station thermale. Il avait tubé le forage, canalisé l'eau vers des bâtiments de bois, et en 1896 installé des baignoires. Il projetait de bâtir un hôtel. Tout l'y encourageait l'affluence due à la saturation des autres stations thermales du département, à Hammam-Bou-Hadjar et Bou-Hanifia; le nouveau projet d'adduction d'eau, qui, partant de l'abondante source de Mazagran devait alimenter Arzew et au passage Port-aux-Poules ; le recalibrage de la voie ferrée vers Mostaganem qui améliorait le confort et facilitait le déplacement des voyageurs.
----Pierre Birebent de Saint-Cloud avait été parmi les premiers curistes d'Hammam Selama. Il était venu en 1895 avec son break attelé, peu avant les vendanges. Dans sa voiture il transportait sa baignoire sabot et son couchage. il avait soixante ans et souffrait de rhumatismes et d'arthrose. La cure, qui lui avait été conseillée par son médecin, lui avait fait du bien. Il en avait parlé autour de lui.
Il était revenu l'année suivante, sans sa baignoire, et à nouveau l'année d'après. Comme il aimait la pêche, il était allé au petit port de Port-aux-Poules et avait sympathisé avec les pêcheurs.
----Michel Sellés l'avait autorisé à monter sa tente sur la parcelle de 300 m2 qui lui avait été attribuée, après régularisation par les Domaines, et où il avait construit sa maison.
Après l'été 1897, Michel Sellés était reparti à la Salamamdre. Il avait proposé de vendre son terrain, et Pierre Birebent l'avait acheté. La vente avait été enregistrée chez le notaire de Saint-Cloud le 11juin 1898, pour une somme globale de 180 francs.
----La famille Birebent avait été la première à venir prendre des bains de mer pendant la 'saison" .A sa suite était arrivé, de Saint-Cloud également, Emile Aldebert. Il accompagnait son épouse en cure thermale et s'était laissé tenter par le petit port. Il avait acheté l'une des baraques en planches des premiers pêcheurs, au fond de la crique, et s'y installait pendant ses séjours.
----Dans les mois suivants d'autres familles avaient acquis les parcelles loties pour le hameau maritime dont l'idée avait été abandonnée. Les ventes se faisaient de gré à gré avec l'Administration. Les prix montaient. Les nouveaux acquéreurs s'appelaient Androver, Boino, Canto, Gimenez, Espinoza. un étranger à la région, retraité de l'enseignement et descendu de Mascara, faisait de la surenchère. Il portait le nom de Mardochée Chaloum.
----Pierre Birebent avait six enfants. En 1899 il avait loué aux domaines une partie restée libre du site romain, contiguë à la maison du pêcheur. Il avait aussitôt entrepris la construction de deux autres maisons à deux appartements, agrandi la sienne, restauré la citerne et planté des figuiers dans une cour commune.
----En 1900 les constructions étaient terminées.
----Deux ans plus tôt, Stephen Armitage avait soumis à la municipalité de Saint-Leu un projet de station balnéaire.
----Celle-ci était nécessaire à la valorisation de l'hôtel thermal qu'il se proposait de bâtir. Monsieur Duzan le nouveau maire avait été séduit par l'idée et un plan de lotissement de Port-aux-Poules avait été voté et soumis aux autorités.
----Il entérinait, en l'état, les acquisitions faites auprès des Domaines et les maisons existantes, rectifiait certaines limites pour la voirie, en bordure de mer. En 1904 les géomètres matérialisaient sur le terrain les nouveaux lots, et en 1906 les premiers estivants arrivaient à Port-aux-Poules. Emile Aidebert s'agrandissait.
----En 1922, Port-aux-Poules devenait une commune de plein exercice. C'était une décision de bon sens. La population stable s'élevait à 1 750 habitants dont seulement 189 Européens. La population flottante avoisinait, en saison d'été, les 10 000 habitants et près de 200 villas, maisons, cabanons, et deux hôtels étaient construits, ou en cours de construction l'Hôtel de la Gare et le Petit Arcachon.
Le village, bien que peu gâté par la nature, avait prospéré. Les colons des premières concessions et des premiers rachats de terres s'étaient reconvertis dans les vignobles, ils s'appelaient Lescombes, Martinez, Ramos, Valverdé, mais aussi Bachir Bousmat, Amar et Chéraka Cerra, Ould Messaoud. Les superficies emblavées avaient augmenté, les éleveurs comptaient davantage de têtes de bétail, des artisans des commerçants avaient ouvert des ateliers et des boutiques. Monsieur Mardochée Chaloum, homme de lettres, ancien professeur et titulaire des palmes académiques, était élu maire. Il devait le rester jusqu'en 1925.
----Devaient lui succéder Manuel Martinez, Jean Antoine Valverdé et Joseph Pérez.
Mais ceci est une autre histoire. La nôtre, que nous avons vécue et longuement évoquée les 1er et 2 mai derniers.
----Nous en reparlerons, si le bon Dieu nous prête vie, et si Saint-Antoine veut bien nous aider à nous retrouver, au printemps de l'an 2001, autour de " Marie Blanche", la cloche de notre église rapatriée au Mas de Mingue à Nimes.

Paul BIREBENT


(1) Le square Dixmude et la rue Du Plessis de Grenadan:
Le Dixmude était un dirigeable allemand, un zeppelin, donné à la France au titre des réparations de guerre. Le lieutenant de vaisseau Jean du Plessis de Grenadan le commandait. Au mois de septembre 1923, il avait battu le record de durée en vol sans escale. Le 18 décembre il avait decollé de la base aéronavale de Pïerrefeu, dans le Var. pour une mission surie Sahara.
Au retour il avait été atteint par la foudre au-dessus de la Sicile et s'était abîmé en mer avec son équipage et 50 passagers. Cela se passait dans la nuit du 20 au 21. La veille de Noël, le 24, le corps du commandant avait été retrouvé, seul, par des pécheurs. Tous les autres étaient perdus corps et biens.

Note A la suite de notre réunion des 1 et 2 mai 1999, une plaque amateurs de récits et photographies d'époque a été tirée, sur une vingtaine de pages.
Elle est disponible auprès de Marcel Bonfils, 1 chemin de la Tramontane 34560 Poussan
Paul Birebent 1145 bd Darbx Valescure 830OO Saint-raphaël