----Notre village
était situé sur la route littorale RN 11, d'Oran à
Mostaganem. près de l'embouchure de la Macta, tout au fond du golfe
d'Arzew. Le petit port naturel, qui a fait la réputation de la station
balnéaire, était protégé par deux pointes rocheuses,
à 200 mètres l'une de l'autre. Profond de 150 mètres,
il était abrité des forts vents d'Ouest et de la grosse houle
du large, mais restait ouvert aux rafales du vent de Nord-Est sans trop
de dommages. La mer depuis la Stidia n'avait pas le temps de se former.
----Vers l'Est,
à environ 500 mètres de la deuxième pointe rocheuse,
que l'on appelait la pointe Radicich, coulait la Macta, lors des crues d'hiver.
Un cordon lagunaire, la plupart du temps, l'isolait de la mer, et l'on passait
d'une rive à l'autre à pied sec ou à peine mouillé.
Au delà commençait une immense plage de sable fin, sur trois
kilomètres, bordée de hautes dunes boisée, et qui s'achevait
à l'îlot rocheux au pied du marabout de Sidi Mansour.
----À
l'opposé, vers l'Ouest, après la crique Fernandez et le marabout
de Sidi Abdallah, protecteur du village arabe la côte était
rocheuse, basse et découpée, truffée de grottes et
de petites plages.
Tout cela, c'était le Petit Port, la Grande Plage, la Marine. Au
Sud-Sud-Est, à 400 mètres de la gare commençait le
village. Entre les deux, une zone de transition, plantée de pins
couchés à l'horizontale par les vents d'Ouest.
----Zone d'union,
de melting pot à l'américaine, où se rencontraient
ceux du Village et ceux de la Marine : la Mairie, l'Eglise de Mesdames Hugounenq
et Carasco, les tennis et le terrain de boules, le Monument aux Morts, et
surtout l'ABC de Madame Balaguer et les baraques foraines des mois d'été.
----Le village,
construit en 1883, selon un plan rectangulaire bien ordonné, avait
débordé de son cadre initial. La place Dixmude (1) en était
le centre, avec son kiosque à musique. On y dansait en juin et pour
la Saint-Antoine, patron du village on allait chez Jorge se faire couper
les cheveux ou acheter des ampoules électriques, faire le plein d'essence
au lampo Quero, boire une anisette au Bar Almendros, et le soir remplir
le pot au lait chez Munoz.
----Les premiers
documents officiels mentionnant Porto Paulo, retrouvés aux Archives
d'Aix-en-Provence, datent de septembre 1854. Ils font état de quelques
familles européennes installées dans la région. Port-aux-Poules
n' apparaît sur les cartes qu'en 1859. Auparavant il n'y avait rien.
Seul le pont de la Macta était mentionné, depuis 1835.
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Vue aérienne
Collection B.Venis
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Le site romain de Portus
Paulus
----Avant d'être
occupé par les Arabes, puis conquis par les Français, le
site de Port-aux-Poules avait été romain.
----Il est
peu probable que les peuplades primitives de Berbères, nomades
et pasteurs, y aient vécu, davantage attirés par les marais
humides que par la rocaille désertique. Il est en revanche fort
possible que Grecs et Carthaginois y aient trouvé refuge dans leur
course vers le couchant.
----Les érudits
attribuent la fondation de Port-aux-Poules à un jurisconsulte romain,
Paulius Julius, préfet du prétoire sous l'empereur .Septime
Sévère, vers l'an 200, ou légèrement plus
tard, en 225 sous le débonnaire Alexandre Sévère.
----Les Romains
avaient, pour construire un hameau, ouvert une carrière dans les
grès rouges et tendres de la petite pointe. Sur une butte rocheuse,
au bord de l'eau, ils avaient élevé un temple, des colonnes,
des portiques, bâti des villas, pavé des ruelles.
----Les vestiges
de la présence romaine étaient nombreux à Port-aux-Poules.
Les plus grosses pierres, taillées autrefois par les soldats de
la IIIè légion Auguste de la Maurétanie Césarienne,
étaient encore visibles dans les soubassements de nombreuses maisons
du Petit Port.
----Le Service
des Antiquités au début du siècle avait fouillé
le site, et transporté au Musée d'Oran ce qui pouvait l'être
des mosaïques, des débris de poteries, des fresques, des colonnes.
----On pouvait
encore voir à notre époque, entre la petite pointe et le
quai, des pierres brisées, des blocs rectangulaires et polis, des
marches de perron, des débris de briques rouges et dans des villas
deux colonnes à chapiteau corinthien. Par mer calme, parmi les
bancs d'algues, de part et d'autre de la carrière, on imaginait
SOUS l'eau une apparence de mur, l'angle d'une maison, le tracé
d'une voie. On devinait des bassins circulaires, comme ceux qui servent
encore chez les Berbères au tannage des peaux. Pour la conservation
des cuirs et les salaisons de viandes et de poissons, les Romains utilisaient
le sel des salines voisines.
----Les Vandales
de Genséric dans leur progression vers l'Est au cinquième
siècle, les Arabes de Sidi Okba dans leur marche vers l'Océan
au septième, et les hordes hilaliennes, dévastatrices, au
milieu du onzième, avaient détruit le petit port marchand
et prospère de Portus Paulus.
----Ce qu'ils
avaient oublié d'abattre, de disloquer et d'emporter avait été
achevé au XlVè siècle par des tribus berbères
islamisées et originaires du Maroc, les Bettioua, les Gharabas
et les Hamyans.
----Portus
Paulus prit alors le nom de Mers-el-Hadjdjedj (port aux pèlerins).
Peut-être qu'une erreur de la traduction française y vit
des poules (djedj) àla place des pèlerins (Hadjdjedj).
----Les Bettioua
s'étaient fixés un peu plus à l'Ouest, vers le plateau
de Saint Leu. Les Gharabas étaient demeurés autour des salines
d'Arzew et de la forêt de Moulay Ismaël. Les Hamyans avaient
occupé toute la région rocailleuse entre les autres tribus
depuis la mer jusqu'à la dépression d'El Mellaha. Leur territoire
surplombait les immenses marais herbeux de la Macta, ancien golfe marin
comblé par les alluvions de l'Oued Sig et de l'Oued Habra. Les
"Hamyans" étaient de petits éleveurs. Ils avaient
construit des douars, de taille modeste, dans la rocaille aride et sur
le pourtour de leurs hautes terres, en position dominante. Loin de la
mer, et là où l'accès aux rares puits et aux pacages
était facile, on trouvait El Araba, El Haouaoua, En Nekala, Chaoucha,
Hassasna
La France s'installe
----Après
la prise d'Oran le 4 janvier 1831, le général Desmichels
avait fait occuper les ports de la côte en juillet 1833,Arzew puis
Mostaganem.
----Le désastre
de la Macta, le 28 juin 1835, avait frappé l'opinion et rendu ce
nom tristement célèbre. Vainqueur d'Abd el Kader à
la bataille de la forêt de Moulay Ismaél, Trézel s'était
replié dans le plus grand désordre le long du territoire
des Hamyans, en bordure des marais, afin de rejoindre Arzew.
Perdus, dispersés, retardés, 800 blessés sur les
2.000 hommes de troupe avaient été sauvagement, égorgés.
----Le pont
de la Macta, depuis, était militairement gardé.
----À
cinq km de là, Port-aux-Poules était devenu un point de
passage obligé, un lieu d'étape et de bivouac, pour les
troupes de l'occupation restreinte. Les sapeurs du Génie avaient
creusé des puits à l'embouchure de la rivière, sur
la rive gauche, Ceux-ci donnaient une eau saumâtre, mais buvable.
Pour les chevaux et le " décrassage "il y avait l'oued.
----Le 19
septembre 1848, l'Assemblée nationale, à Paris, avait décrété
la création de colonies agricoles en Algérie. Lamoricière,
ministre de la Guerre, était chargé d'en assurer l'exécution.
----Le
convoi n°1 avait été destiné à Saint-Cloud.
Le convoi n°2 avait débarqué du Cacique à Arzew
le 2 novembre 1848. Il était acheminé sur le centre de Saint-Leu
et de ses annexes et commcnçait à défricher sous
les ordres du capitaine Ycrlès. La colonie de Saint-Leu s'étendait
dArzew an pont de la Macta, sur près de 16.000 hectares. Ces terres
appartenaient aux Domaines. Elles avaient été mises sous
séquestre après la fuite au Maroc, à diverses époques,
de leurs propriétaires. De Saint-Leu à Port-aux-Poules,
elles ne représentaient qu'une étroite bande de terre, le
long de la côte.
----En 1849
et à nouveau en 1851, une épidémie de choléra
emportait près de la moitié de la population de la colonie.
Des veuves non remariées et des orphelins étaient rapatriés
ou envoyés à Oran, des indésirables, des ivrognes
et des paresseux étaient expulsés.
----Ils étaient
remplaces par d' anciens militaires libérés, par des Espagnols,
ouvriers, maçons, terrassiers, parfois maraîchers, arrivés
depuis longtemps dans le sillage des troupes ; par les tacherons des "
cuadrillas" d'Alicante et de Valencia, venus pour une saison de défrichage
ou de moisson, et demeurés dans le pays.
----En 1853,
la colonie agricole de Saint-Leu passait sous le contrôle de l'Administration
Civile dont le chef-lieu était à Arzew. Port-aux-Poules
y était toujours rattaché.
----Le changement
de régime entraînait de profondes mutations foncières.
Des étrangers, des indigènes, sous certaines conditions,
pouvaient acquérir des concessions à titre onéreux,
parfois même à titre gratuit. Des familles espagnoles s'installaient
le long de la Macta, des Arabes fortunés en faisaient autant.
----En 1854,
le Préfet d'Oran prenait acte de la situation et décidait,
après avis du Gouvernement Général, d'étudier
l'implantation d'un centre de population au lieu-dit "Porto Paulo"
près du pont de la Macta.
Une population bigarrée
----Fin 1855, le
31 décembre, dans un rapport trimestriel, l'Inspecteur départemental
de la Colonisation signalait la présence de deux fermes isolées,
d'une maison de la douane occupée par quatre hommes, et d'une chapelle.
La première ferme était la concession Pérez de 25
hectares, la seconde, de 22 hectares, la concession Carasco. Elles étaient
situées de part et d'autre de la route, là où la
pierre était plus en profondeur, la terre moins calcaire et plus
sableuse. Les "colons" semaient du blé et de l'orge,
faisaient pousser des légumes, cultivaient un peu de vigne, des
figuiers, des jujubiers.
----La chapelle
avait une histoire. Quelques années plus tôt, un fils Pérez
gravement malade avait fait le vu d'offrir à la Sainte Vierge
une truie qu'il élevait. Une fois rétabli, il avait vendu
la truie, et plus tard ses porcelets et de portée en portée,
avec l'aide de compatriotes, le "sieur Pérez" avait amassé
1.500 francs et construit sa chapelle, après l'autorisation de
l'évêque d'Alger.
----La plantation
de pins d'Alep à proximité des puits et de la grande route,
où de plus en plus souvent bivouaquaient des soldats, la fréquentation
de la crique par des pêcheurs aventurés au large d'Arzew
et de Mostaganem, faisaient de Port-aux-Poules un centre commercial actif
et attractif.
----Des familles
espagnoles, françaises, indigènes continuaient d'arriver,
de défricher et de planter.
Depuis 1854, le projet de village piétinait en incessantes allées
et venues entre la Préfecture et le Gouvernement Général.
Il avait enfin été adopté en 1877 niais tardait à
se concrétiser sur le terrain. Seule la construction d'une gendarmerie,
avec un grand jardin pour subvenir à ses besoins, était
entreprise au bord de la route, face à la chapelle un cimetière,
il le fallait bien, était délimité et clôturé
au bord de la mer.
----En 1879,
Saint-Leu devenait une commune de plein exercice et récupérait
Port-aux-Poules. La municipalité s'était émue du
développement anarchique du futur village. Elle en avait délibéré
au mois de mai 1881, sous la présidence du maire M. Billard et
à l'initiative de M. Soler de Port-aux-Poules. Elle constatait
la présence d'une nombreuse population, dispersée, sans
règles collectives d'hygiène, sans contrôle, et avait
demandé la réalisation urgente du projet de lotissement.
La situation de Port-aux-Poules cependant évoluait favorablement.
Une nouvelle commission mandatée sur place l'avait constaté.
Une voie ferrée secondaire à voie étroite était
en construction. Elle reliait Arzew à Saïda avec un prolongement
prévu vers Ain-Séfra. Le douar Ben Grab y envoyait des manuvres
et s'agrandissait. Un arrêt était prévu à hauteur
du port, et les Chemins de Fer de l'Etat avaient construit une petite
maison pour le chef de gare.
----Le recensement
de la population présente à Port-aux-Poules mettait en évidence
la forte proportion d'étrangers non naturalisés et qui,
par conséquent, ne pouvaient prétendre à des concessions
gratuites. Sur les trente-neuf familles désireuses de s'installer,
deux seulement étaient françaises, une indigène,
une Autrichienne, une Allemande, trente-deux d'origine espagnole, et les
deux dernières domiciliées par ailleurs à Oran.
----Le cahier
des charges des futurs attributaires était précis et rigoureux.
Les maisons devaient être bâties dans les douze mois, en maçonnerie
et couvertes de tuiles ou en terrasses. L'utilisation de torchis, de terre
séchée, de canisses, la construction de baraques ou d'abris
en planches étaient interdites.
----En 1886,
les trois premiers attributaires prenaient enfin possession de leurs lots.
Ils s'appelaient Augustin Soler, Grégoire Pérez et Veuve
Soler.
Port-aux-Poules prend
vie
----Tout en bas,
près de la mer, l'ancien petit port romain s'était réveillé.
Des pêcheurs espagnols et italiens, installés à Arzew
et à la Salamandre après leur occupation par les troupes
françaises, y relâchaient de temps à autre. Pour se
mettre à l'abri quand ils se laissaient surprendre par le gros
temps, et de plus en plus souvent pour y faire une campagne de pêche,
généralement à l'automne. C'était la bonne
saison. Les périodes de beau temps étaient plus longues,
la chaleur moins intense. Les poissons pélagiques abondaient au
large, bacorètes, bonites, à la poursuite des bancs d'anchois
et de sardines D'autres migrateurs carnassiers se rapprochaient des côtes
: liches, golfars, poissons-limons. Parfois des bandes de thons rouges,
grands prédateurs, se laissaient prendre dans les filets.
----Les pêcheurs
avaient construit des baraques en planches au fond de la crique, face
aux ruines du port romain, sur les flancs de la barre rocheuse qui fermait
l'abri au Sud.
----Les hommes
calaient leurs filets le soir et les sortaient le matin, avant l'aube.
ils pêchaient les poissons bleus le jour en les encerclant, dès
que des vols de bacoreros dans le ciel signalaient leur présence.
la pêche était vendue sur place en petite partie. Des gens
"d'en haut", des fermiers, des douaniers, des militaires de
passage l'achetaient. La plus grosse part était séchée,
fumée et surtout salée. Elle partait ensuite pour les villes
et les villages les plus proches.
----Les femmes
gardaient des chèvres amenées pour le lait, et étaient
chargées de la corvée d'eau et de bois. Elles y allaient
avec des ânes, sur les bords de la Macta.
----En même
temps qu'elle implantait le village de Port-aux-Poules sur le plateau,
l'Administration avait régularisé la situation des pêcheurs
installés au bord de la mer... Ceux qui étaient Français
recevaient la propriété de trois ares de terre. Les autres
devaient acheter. Les pêcheurs étaient très pauvres,
ils n'avaient les moyens ni de bâtir, ni de s'étendre.
----Le Gouverneur
Général voulait empêcher que ne se passe à
Port-aux-Poules ce qui était arrivé à Mers-el-Kébir,
à Alger et à Bône : la mainmise des Espagnols et des
Italiens sur la pêche côtière. L'échec de la
tentative, en 1845, de la création d'un village de pêcheurs
à Guyotville, n'avait pas servi de leçon.
----En1894,
la nouvelle s'était vit répandue dans la région,
qu'un Anglais, du nom d'Armitage et prospecteur de pétrole, avait
obtenu un permis de recherche dans les marais de la Macta.
Il travaillait pour le compte d'une société britannique
et avait utilisé une puissante sonde canadienne pour forer à
Hammam Selama, à cinq km au Sud de Port-aux-Poules, au bord du
lac Mouila, des filets d'eau avaient attiré son attention. Ils
crevaient la terre, par cloques et bulles chaudes qui sentaient le soufre.
----Depuis
toujours les habitants du douar Hassasna venaient y soigner leurs plaies
et leurs furoncles.
Stephen Armitage avait creusé jusqu'à 240 mètres
de profondeur, et un jet puissant de 25 mètres de hauteur avait
jailli, à 38° de température. La renommée de
l'eau d'hammam Selama que l'on disait miraculeuse s'était vite
imposée à l'Est d'Oran. On prétendait qu'elle guérissait
les affections de la peau, les inflammationS des veux, qu'elle soulageait
ceux qui souffraient de rhumatismes. Des malades accouraient de tous les
villages, pour des piqûres d'insectes envenimées, des écorchures
qui ne cicatrisaient pas, pour des caries dentaires.
----Des blessés
pensaient, grâce au pouvoir réducteur du soufre, accélérer
la guérison de leurs luxations ou de leurs fractures.
----En homme
d'affaires avisé, Stephen Armitage avait aussitôt envisagé
d'exploiter une station thermale. Il avait tubé le forage, canalisé
l'eau vers des bâtiments de bois, et en 1896 installé des
baignoires. Il projetait de bâtir un hôtel. Tout l'y encourageait
l'affluence due à la saturation des autres stations thermales du
département, à Hammam-Bou-Hadjar et Bou-Hanifia; le nouveau
projet d'adduction d'eau, qui, partant de l'abondante source de Mazagran
devait alimenter Arzew et au passage Port-aux-Poules ; le recalibrage
de la voie ferrée vers Mostaganem qui améliorait le confort
et facilitait le déplacement des voyageurs.
----Pierre
Birebent de Saint-Cloud avait été parmi les premiers curistes
d'Hammam Selama. Il était venu en 1895 avec son break attelé,
peu avant les vendanges. Dans sa voiture il transportait sa baignoire
sabot et son couchage. il avait soixante ans et souffrait de rhumatismes
et d'arthrose. La cure, qui lui avait été conseillée
par son médecin, lui avait fait du bien. Il en avait parlé
autour de lui.
Il était revenu l'année suivante, sans sa baignoire, et
à nouveau l'année d'après. Comme il aimait la pêche,
il était allé au petit port de Port-aux-Poules et avait
sympathisé avec les pêcheurs.
----Michel
Sellés l'avait autorisé à monter sa tente sur la
parcelle de 300 m2 qui lui avait été attribuée, après
régularisation par les Domaines, et où il avait construit
sa maison.
Après l'été 1897, Michel Sellés était
reparti à la Salamamdre. Il avait proposé de vendre son
terrain, et Pierre Birebent l'avait acheté. La vente avait été
enregistrée chez le notaire de Saint-Cloud le 11juin 1898, pour
une somme globale de 180 francs.
----La famille
Birebent avait été la première à venir prendre
des bains de mer pendant la 'saison" .A sa suite était arrivé,
de Saint-Cloud également, Emile Aldebert. Il accompagnait son épouse
en cure thermale et s'était laissé tenter par le petit port.
Il avait acheté l'une des baraques en planches des premiers pêcheurs,
au fond de la crique, et s'y installait pendant ses séjours.
----Dans les
mois suivants d'autres familles avaient acquis les parcelles loties pour
le hameau maritime dont l'idée avait été abandonnée.
Les ventes se faisaient de gré à gré avec l'Administration.
Les prix montaient. Les nouveaux acquéreurs s'appelaient Androver,
Boino, Canto, Gimenez, Espinoza. un étranger à la région,
retraité de l'enseignement et descendu de Mascara, faisait de la
surenchère. Il portait le nom de Mardochée Chaloum.
----Pierre
Birebent avait six enfants. En 1899 il avait loué aux domaines
une partie restée libre du site romain, contiguë à
la maison du pêcheur. Il avait aussitôt entrepris la construction
de deux autres maisons à deux appartements, agrandi la sienne,
restauré la citerne et planté des figuiers dans une cour
commune.
----En 1900
les constructions étaient terminées.
----Deux ans
plus tôt, Stephen Armitage avait soumis à la municipalité
de Saint-Leu un projet de station balnéaire.
----Celle-ci
était nécessaire à la valorisation de l'hôtel
thermal qu'il se proposait de bâtir. Monsieur Duzan le nouveau maire
avait été séduit par l'idée et un plan de
lotissement de Port-aux-Poules avait été voté et
soumis aux autorités.
----Il entérinait,
en l'état, les acquisitions faites auprès des Domaines et
les maisons existantes, rectifiait certaines limites pour la voirie, en
bordure de mer. En 1904 les géomètres matérialisaient
sur le terrain les nouveaux lots, et en 1906 les premiers estivants arrivaient
à Port-aux-Poules. Emile Aidebert s'agrandissait.
----En 1922,
Port-aux-Poules devenait une commune de plein exercice. C'était
une décision de bon sens. La population stable s'élevait
à 1 750 habitants dont seulement 189 Européens. La population
flottante avoisinait, en saison d'été, les 10 000 habitants
et près de 200 villas, maisons, cabanons, et deux hôtels
étaient construits, ou en cours de construction l'Hôtel de
la Gare et le Petit Arcachon.
Le village, bien que peu gâté par la nature, avait prospéré.
Les colons des premières concessions et des premiers rachats de
terres s'étaient reconvertis dans les vignobles, ils s'appelaient
Lescombes, Martinez, Ramos, Valverdé, mais aussi Bachir Bousmat,
Amar et Chéraka Cerra, Ould Messaoud. Les superficies emblavées
avaient augmenté, les éleveurs comptaient davantage de têtes
de bétail, des artisans des commerçants avaient ouvert des
ateliers et des boutiques. Monsieur Mardochée Chaloum, homme de
lettres, ancien professeur et titulaire des palmes académiques,
était élu maire. Il devait le rester jusqu'en 1925.
----Devaient
lui succéder Manuel Martinez, Jean Antoine Valverdé et Joseph
Pérez.
Mais ceci est une autre histoire. La nôtre, que nous avons vécue
et longuement évoquée les 1er et 2 mai derniers.
----Nous en
reparlerons, si le bon Dieu nous prête vie, et si Saint-Antoine
veut bien nous aider à nous retrouver, au printemps de l'an 2001,
autour de " Marie Blanche", la cloche de notre église
rapatriée au Mas de Mingue à Nimes.
Paul BIREBENT
(1) Le square Dixmude et la rue Du Plessis de Grenadan:
Le Dixmude était un dirigeable allemand, un zeppelin, donné
à la France au titre des réparations de guerre. Le lieutenant
de vaisseau Jean du Plessis de Grenadan le commandait. Au mois de septembre
1923, il avait battu le record de durée en vol sans escale. Le
18 décembre il avait decollé de la base aéronavale
de Pïerrefeu, dans le Var. pour une mission surie Sahara.
Au retour il avait été atteint par la foudre au-dessus de
la Sicile et s'était abîmé en mer avec son équipage
et 50 passagers. Cela se passait dans la nuit du 20 au 21. La veille de
Noël, le 24, le corps du commandant avait été retrouvé,
seul, par des pécheurs. Tous les autres étaient perdus corps
et biens.
Note A la suite de notre réunion des 1 et 2 mai
1999, une plaque amateurs de récits et photographies d'époque
a été tirée, sur une vingtaine de pages.
Elle est disponible auprès de Marcel Bonfils, 1 chemin de la Tramontane
34560 Poussan
Paul Birebent 1145 bd Darbx Valescure 830OO Saint-raphaël
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