Ci-dessous un document qui ne se trouve pas sur le net :
Ce document est extrait dun petit livret écrit par
un pied-noir, Pierre GRIFFE capitaine au long cours qui relate ses
souvenirs qui sont des témoignages dune période
révolue couvrant un demi-siècle dhistoire de
la Marine Marchande Française (1918-1972). Il ma été
aimablement prêté par un autre CLC Pierre ROVERE, Président
de lassociation des anciens élève de
lécole de Navigation dAlger, dont je fais partie.
Le livre se nomme : « Sur les routes du large 1918-1972 ».
Trois autres écrits avant :
-La Ballade des Galets : récit dun voyage mémorable
à lile de la Réunion
(1925-1927)
- Histoire maritime de lAéropostale (1927-1934)
- Le long calvaire de lOptimiste, vapeur de sauvetage (1942-1946)
Que lon peut trouver sur le net (jai vérifié).
(Guy Simon-Laborde)
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ANNEXE
A cette suite de récits succincts de voyages que je viens d'évoquer,
je voudrais citer, pour clôturer ce petit livre, un autre bateau
à bord duquel j'ai eu, également, mon sac (Durant
trois années (1952-1955), à la fois comme capitaine et professeur.).
Il est insignifiant, peut-être, mais je crois qu'il mérite
d'être mentionné ici pour plusieurs raisons. D'abord par
sa durée en service vraiment exceptionnelle : 72 années
! qui en avaient fait le 'doyen" de toute la flotte de mer française
; ensuite, en qualité de pionnier d'une petite navigation originale,
non-conformiste, laquelle, en disparaissant, lui permit de devenir bâtiment-école
d'établissements d'apprentissage maritime.
Il s'agit du petit cargo la Notre-Dame-d'Afrique - la "vraie",
car il y en eut d'autres - familièrement connue en Méditerranée
sous l'appellation de "la Vieille Basilique", comme je l'ai
déjà présentée par ailleurs.
Construite à Bowling, près de Glasgow, en 1891, elle avait
été offerte à Monsieur Charles Schiaffino lors de
son mariage avec Mademoiselle Rose Achaque, par son beau-père,
lui-même armateur. Ce fut le point de départ, pourrait-on
dire, de l'Armement Schiaffino, du port d'Alger, lequel confiné
d'abord en Méditerranée, devait, à partir de 1920
sous la direction de Monsieur Laurent Schiaffino, à la mort de
son père, prendre une importance qui en fit, avec sa flotte de
cargos modernes et particulièrement bien compris, l'une des plus
belles dans son genre de notre Marine Marchande.
Mais la Notre-Daine-d'Afrique, quant à elle, dès sa mise
en service, fut au travail sur tout le littoral algérien, ravitaillant
les villages de la côte, où, connue comme le "bateau-épicerie",
elle rendait les plus grands services aux populations, y compris les services
de "paquebot-poste".
Une navigation exemplaire fut la sienne, jamais on n'entendit parler à
son sujet d'avaries ou même d'incidents, jusqu'à la guerre
de 1914. C'est en 1916 qu'elle faillit mourir. En chargement de bidons
d'essence, au môle de l'Agha, destinés à l'Aviation
maritime à Oran, un incendie se déclara à son bord
qui prit tout de suite des proportions alarmantes ; par chance, et c'est
ce qui la sauva, la Herse, dragueur de mines, la coula à coups
de canon. La coque fut ainsi sauvée, le navire fut rapidement renfloué,
réparé et remis en service.
Plus tard, vers 1935, Monsieur Schiaffino remplaça la machine à
vapeur de 172 chevaux par un moteur, ce qui modifia un peu sa silhouette.
Armée d'un 75 mm à l'avant, comme patrouilleur, lors de
la Seconde Guerre Mondiale, elle partit en Corse, dès 1943 à
la libération de l'île, qu'elle ravitailla
au cours de ses nombreux voyages sur le continent, jusqu'en 1946, époque
où les compagnies de navigation reprirent leurs activités
normales.
C'est à son retour à Alger, après sa remise en état
- le cabotage algérien, remplacé par les camions, ayant
disparu -, que Monsieur Schiaffino mit la Notre-Darne-d'Afrique, tout
en l'armant et la gérant à son compte, à la disposition
de l'Administration générale des Affaires maritimes en Algérie
Le navire-amiral Charles-Schiallino, construit en 1930 au Chantier du
Trait, sur les bords de a Seine, et démoli à Bilbao en 1973
après 43 ans de service pour l'instruction théorique et
pratique des cinq écoles du pays (Alger,
Oran, Nemours, Bougie et Bône).
Désormais, sa frêle silhouette était rencontrée
sur tout le littoral de l'Algérie, de la frontière du Maroc
à celle de la Tunisie, avec toujours l'une des écoles à
son bord, qui en assurait l'armement. Bien connue des nombreux paquebots
et cargos français qui la rencontraient à la mer, elle était
toujours saluée, bien respectueusement, du pavillon !
Le ler juillet 1962, ce fut le commencement de la fin ! Quoique toujours
en excellent état, elle resta dans l'expectative et un an plus
tard, Monsieur Zacharie, adjoint au capitaine d'armement de la Compagnie
Schiaffino, la conduisit directement à La Spezia où, après
avoir descendu le pavillon qui y flottait depuis 72 ans, la remit aux
ferrailleurs italiens qui entamèrent aussitôt sa démolition.
Elle n'avait pas pu survivre à l'abandon de l'Algérie !
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