PRESENTATION GENERALE
GEOGRAPHIQUE
Pour une fois je commencerai par placer une photo en guise
d'introduction : celle d'un tableau de peinture
Ce tableau (amputé d'une partie
du ciel) est l'uvre de Joseph Reymann qui a tant travaillé
en Algérie, de 1891 à 1901, qu'il fut présenté
comme un " peintre de sujets algériens "
par le salon des artistes français dont il était
sociétaire. Au premier plan un bout de Sahel (vers
Kouba ??) sans trace d'Européens, au-delà, la
plaine avec sa verdure, ses bosquets d'arbres alignés
en parallèles et de modestes bâtiments. Le peintre
a volontairement évité une vue avec village
européen qui aurait nui à son désir d'orientalisme.
Au loin la silhouette bleutée des monts de l'Atlas
Tellien. Je ne peux rien affirmer, mais l'allure de la montagne
à droite de l'arbre ressemble beaucoup à celle
du djebel Zérouéla qui surplombe Rivet. |
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Le premier caractère à souligner, pour la
Mitidja, est son apparente platitude. Pour une plaine c'est bien normal,
même si, en vérité, elle est en pente du sud vers
le nord. Le second est un tapis végétal fermé, le
troisième est l'encadrement montagneux. C'est une plaine toute
en longueur avec un environnement de hauteurs. Des montagnes à
l'ouest (Chenoua, Zaccar) et au sud les premiers chaînons de l'Atlas
dont les noms et les altitudes sont sur le croquis. Les collines du Sahel
au nord, larges et élevées à l'ouest de l'estuaire
de l'Harrach (407m au fort de Bouzaréa), étroites et à
peine marquées à l'est, la séparent de la mer.
1° Une plaine sublittorale
en position de cuvette remplie d'alluvions
Sublittorale elle l'est assurément. A l'ouest de Maison-Carrée
cela se voit sur toutes les cartes. Mais à l'est ce n'est perceptible
que sur des cartes assez précises, telle la carte au 1/50 000.
De part et d'autre des marais de l'oued Réghaïa qui existent
encore, il y a deux dos de terrain, celui des Harraouas culminant à
65 m et celui du Draa ed dar culminant à 70 m. Un passant quelconque
peut ne pas s'apercevoir qu'il franchit un " sommet ", mais
pas un géographe attentif, surtout s'il vient du sud, car la pente
est douce vers la mer et forte vers la plaine. Au bas de ces hauteurs
la plaine est à 2 0m d'altitude. Le marais de l'embouchure de la
Réghaïa est barré par un cordon dunaire consolidé
par une digue de 600 m. Cet espace humide intact sert de gîte d'étape
pour les oiseaux migrateurs.
En
cliquant
sur la carte ci-dessous, vous
obtiendrez une image agrandie à promener sur votre écran,
où bon vous semble,
en la tirant par la barre de navigation.
Une plaine sublittorale en position
de cuvette remplie d'alluvions
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La Mitidja est dominée de tous côtés par des reliefs
plus élevés ; comme il convient à une cuvette.
Au nord, sauf à l'est de Maison-Carrée comme on vient de
le voir, le Sahel domine la plaine de 100 à 150m par un versant
en forte pente entaillé par des ravins où l'eau dévale
en torrents en cas de fortes pluies et inondent la plaine limitrophe.
Ailleurs ce sont des djebels ou des massifs qui forment une vraie barrière
que les routes et voies ferrées n'ont franchie qu'au prix de gros
travaux. Le croquis ci-dessous mentionne le nom des principaux djebels
et nomme les 3 principaux oueds qui ont servi de voie d'accès vers
le sud par la Chiffa vers Médéa et Djelfa ou par l'oued
Djemaâ vers Tablat et Bou-Saâda, et vers l'ouest par l'oued
Djer qui conduit à la vallée du Chéliff et, au-delà,
à Oran. Je n'ai pas indiqué le torrent de l'oued Keddara
car la route du col du Bou-Zegza qui l'emprunte sur quelques kilomètres
est une vraie route de montagne jamais utilisée pour les trafics
lourds ou à longue distance. L'Atlas mitidjien culmine près
de Blida, au koudia Sidi Abd-el-Kader (1629 m) qui domine donc la ville
de 1400 m environ. Il ne s'agit pas de sommets pointus, mais de croupes
arrondies : koudia signifie mamelon et non pic.
En
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où bon vous semble,
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La Mitidja est dominée de tous côtés
par des reliefs plus élevés ; comme il convient à
une cuvette.
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Le
débouché de l'oued Chiffa,
au lit majeur démesuré, dans la plaine de la Mitidja. |
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L'oued
Djer entre El-Affroun et Bou-Medfa.
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La Chiffa descend de gorges très étroites
; pas l'oued Djer. On a dû creuser 16
tunnels entre Blida et Médéa ; et un
seul entre El-Affroun et Affrevlle dans la vallée
du Chéliff. |
Au miocène et au pliocène la Mitidja était
un golfe marin. Au quaternaire le golfe a perdu son contact avec la mer
et la région est devenue lacustre. Le drainage de ces étendues
lacustres ou marécageuses a été tardif à cause
du bourrelet du Sahel. A l'ouest de l'Harrach, seul le Mazafran a réussi
à maintenir son embouchure, par antécédence sans
doute, en s'enfonçant sur près de 200m dans les collines
anticlinales du Sahel. En 1830, plus à l'ouest, le drainage était
inachevé. Ce sont les ingénieurs français qui ont
creusé le tunnel de 2900m, achevé en 1930 et qui a vidé
le lac Halloula résiduel.
Les dépôts empilés dans cet ancien
golfe ont toutes sortes de faciès, du limon argileux au cailloutis
grossier en passant par le sable. Les matériaux de comblement sont
pour l'essentiel descendus de l'Atlas : l'apport des courts ravins du
Sahel est marginal. C'est ainsi que s'expliquent les nombreuses différences
d'aspect entre le sud et le nord de la plaine.
Au
sud , de Marengo à Fondouk
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Au
nord, de Montebello à l'Alma |
Altitudes
plus élevées : 80m à Marengo, plus de 200m à
Blida et 70 à Fondouk. Blida est vraiment tout en haut du cône
de déjections des oueds qui descendent des d jebels Guerroumene
et Ferroukha, les plus hauts de l'Atlas mitidjien. |
Altitudes
plus basses, autour de 20m/25m le plus souvent, avec un minimum à
14m et de nombreux espaces à moins de 20m. |
Matériaux
grossiers : graviers, galets, sable. |
Alluvions
fines : argile, limons, vases. |
Sols
secs : les eaux s'infiltrent |
Sols humides
: les eaux stagnent dans les bas-fonds. Elles sont
amenées par les oueds venus du sud et un peu aussi par les
ravins du Sahel, et au-dessous de 20m par des résurgences,
parfois artésiennes, d'eaux infiltrées au pied de l'Atlas. |
2° Une plaine compartimentée
et anciennement marécageuse au nord
La plaine est en pente du sud au nord et compartimentée d'ouest
vers l'est. Les seuils sont si peu marqués qu'ils sont invisibles
au regard de qui les franchit, mais ils sont soulignés par le tracé
des cours d'eau et l'existence de la cuvette du lac Halloula. Il est classique
de distinguer 4 bassins.
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Le bassin du Nador ou de
Marengo qui est alimenté par les oueds et ravins
descendus du Zaccar à l'ouest, et par l'oued Bourkika à
l'est. L'oued Nador frôle Meurad et Marengo. En 1830 il y
avait un marais hivernal près de la forêt de Sidi Sliman
et de la confluence avec l'oued Bourkika. Il a été
drainé en 1849 à l'occasion de la fondation de Marengo.
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Le bassin de
l'ex-lac Halloula est tout petit. Il n'y coule que deux
oueds intermittents ; les oueds Kebira et Ameur-el-Aïn qui n'alimentaient
pas assez le lac pour que celui-ci déborde et se déverse
naturellement vers l'oued Djer. L'histoire de la vidange de ce lac
peu profond (7 m maximum) et aux rives changeantes selon les saisons,
mérite d'être contée.
De 1850 à 1857 on se contente
de cogiter. Le projet Rougemont
songe à creuser un canal de déversement vers l'oued
Djer : trop cher. Le projet Malglaive,
étrange, prévoit de détourner l'oued Bourkika
pour que ses dépôts comblent le lac : on nomme une commission
pour enliser le projet. Le projet du général Chabaud
de la Tour évoque pour la première fois un
tunnel : trop cher, trop compliqué. Un projet des Ponts et
Chaussées espère vider le lac en forant un trou jusqu'à
la strate perméable : impossible car trop profonde, au moins
90m.
En 1858/1859 les travaux commencent
par le creusement d'un fossé d'écrêtement qui
déverse vers l'oued Djer une partie des eaux : le lac perd
500 ha (sur plus de 3000). Ce léger progrès permet d'envisager
la création d'un village : ce fut Montebello dont les champs
étaient inondés en hiver et les maisons envahies par
les moustiques en été. Il faut trouver une autre solution
; peu à peu l'idée du tunnel s'impose, aidée
sans doute par les progrès des matériels de creusement.
Le tunnel est terminé en 1930 : il débouche un peu au-dessus
du niveau de la mer entre Bérard et Tipasa : on voit nettement
son déversoir depuis la route littorale.
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Le bassin du
Mazafran ou de Boufarik est le plus vaste. Le Mazafran
étant à une altitude très basse, il " attire
" d'autant mieux les oueds descendus de l'Atlas. Cette zone était
en 1830 très marécageuse, et elle le restait encore
en 1930 malgré de gros travaux d'assainissement dont les cartes
portent les traces sous forme d'innombrables traits bleus rectilignes.
Au nord d'une ligne Oued-el-Alleug, Boufarik et Chébli, il
existe des points très bas (14 près de l'oued Fatis)
qui expliquent la permanence de zones inondables. Il y a trop de marais
encore en 1930. pour que je puisse les cartographier sur un croquis.
Pourtant les premiers travaux d'assainissement avaient commencé
très tôt pour viabiliser la route de Blida par Douéra
et Boufarik ; dès 1833-1835. Ils sont devenus systématiques
après 1843, année qui voit la création du Service
d'Assèchement. Le travail fut considérable
bien qu'incomplet. La trace de ces travaux de près d'un siècle
subsiste dans le paysage, et sur la carte : fossés et canaux
de drainage rectilignes, oueds canalisés. Sur le croquis ci-dessous
c'est l'oued Bou Farik qui est canalisé. Remarquez les sources
artésiennes en limite nord de la carte et le canal de dessèchement
qui ne dessèche pas les marécages qui l'entourent. On
y voit cependant une ferme ! Nous sommes au nord d'Oued-el-Alleug,
une zone très basse : on aperçoit des altitudes de 14,
15 et 16m.
En
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Le
bassin du Mazafran ou de Boufarik est
le plus vaste
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Le nom de Mazafran ne désigne que la basse
vallée de l'oued Djer : donner plusieurs noms au même
cours d'eau est de tradition au Maghreb : inutile de chercher la
source du Mazafran.
Ce bassin possède avec Blida et Boufarik les deux plus grosses
agglomérations de la Mitidja. C'est aussi la plus riche zone
agricole.
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Le bassin de l'Harrach
ou de Sidi-Moussa ressemble à celui du Mazafran,
à quelques nuances près. Il est un peu moins étendu
; il était un peu moins marécageux en 1830. Et il
a été assaini plus tôt, dès 1833 près
du confluent Harrach-Kerma pour protéger les colons et la
garnison de la ferme-modèle ; et plus complètement,
les marais de l'oued Smar ayant été occupés
par l'extension industrielle de Maison-Carrée, vers Baraki.
En 1962 Maison-Carrée était devenue une banlieue d'Alger
tout en restant la porte de sortie de l'agglomération algéroise
: celle où passent toutes les grandes routes et les voies
ferrées vers le Constantinois, l'Oranie et le Sahara. C'est
aussi l'endroit où a été implanté l'aéroport
d'Alger-Maison-Blanche. Les terres agricoles avaient déjà
bien reculé en 1962 devant l'avancée des HLM, des
casernes et des écoles supérieures. Il y avait déjà
deux centres industriels dans ce bassin : Maison-Carrée au
nord, et à l'autre bout Rivet avec l'usine Lafarge de ciments,
chaux et plâtres.
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Plus loin vers l'est il n'est plus possible
de parler de " bassin ", tant pour les oueds Réghaïa
et Boudouaou que pour le Hamiz avec Fondouk. La Mitidja est alors
une plaine uniforme traversée par des cours d'eau littoraux
parallèles et proches, avec au nord un Sahel réduit
à presque rien et au sud un Atlas très difficile à
franchir. La voie ferrée de Constantine sort de la Mitidja
après la vallée du Boudouaou pour rejoindre la vallée
de l'Isser qui lui permet de remonter les gorges de Palestro. |
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