------Située à 76 km d'Oran, au pied
des derniers contreforts du massif montagneux des Beni Chougranes et à
l'entrée de l'immense plaine de l'Habra, la ville de Perregaux doit son
nom à un Général blessé au siège de Constantine
: Alexandre Charles de Perregaux, né à Neuchâtel (suisse),
le 21 Octobre 1791 et naturalisé français le 18 Décembre
1815. Il a mérité de donner son nom à cette jeune ville d'Algérie,
par sa manière de servir, sa valeur morale et le sacrifice suprême
de sa vie, puisqu'il mourût des suites de ses blessures à bord du
bateau qui le ramenait en France le 7 Novembre 1837. ------La
création de Perregaux remonte au 29 Juillet 1858 et son érection
en commune de plein exercice eut lieu le 30 Septembre 1870. Entre ces deux dates,
le nouveau village traînait une existence assez précaire et quiconque
lui aurait prédit une destinée brillante eût passé
pour un bâtisseur de châteaux en Espagne. L'unique monument était
d'abord le caravansérail, lieu de refuge des voyageurs allant de Mostaganem
à Mascara, situé près de la rivière Habra, plus tard
transformé en abattoir communal. Vers 1867-68 la culture du coton dont
les débouchés étaient faciles et qui se vendait à
des prix très élevés, donna au pays des ressources inattendues;
ce fut un pas décisif vers le progrès : l'élan était
donné. Il s'accentue davantage avec la construction des voies ferrées
du PLM et de la Compagnie Franco- Algérienne qui donnent à Perregaux
une situation privilégiée sur la ligne parallèle au littoral
d'Oran à Alger au point de croisement de la voie qui relie les hauts-plateaux
à la côte. ------En 1872,
la construction du barrage réservoir de l'Oued Fergoug va changer la face
de la région en apportant la fertilité dans une plaine brûlée
par le soleil. A dater de 1875, le pays prospère rapidement. Il traverse
une très heureuse période d'années favorables lorsqu'une
terrible catastrophe vient tout compromettre et menace de détruire toutes
les espérances. Le 15 décembre 1881, la rupture du barrage produit
une formidable inondation : on dénombre 250 victimes. De nombreuses maisons
sont détruites, les voies ferrées coupées et les ponts enlevés.
Un profond découragement s'empare des colons qui voient détruit
le fruit de longues années de travail. Grâce à Mrs LAURENT,
Maire de la ville et DUFOREST, conseiller général, les secours accordés
permettront la reconstruction du barrage qui fut achevée en 1883. Ce grand
barrage de l'Habra, le plus important de l'Algérie à l'époque,
est situé à 10 km de Perregaux à gauche de la route de Mascara
; il peut contenir 36 millions de m3 d'eau. La longueur totale d'une rive à
l'autre est de 500 mètres : c'est dire l'importance de ce moyen d'irrigation
pour la plaine. ------Depuis cette époque,
Perregaux progresse sans cesse, la ville s'embellit, les monuments publics et
les édifices privés dénotent un confort qui n"exclut
pas un brin de coquetterie.Le jardinpublic est tracé avec un véritable
goût artistique : ses allées plantées de caoutchoutiers, de
ficus et d'autres essences convergent vers le centre où s'élèvent
un bassin pourvu d'un jet d'eau et un kiosque à musique autour duquel des
générations danseront. Les trottoirs des boulevards et des rues
sont bordées d'arbres magnifiques qui transforment les chaussées
en allées ombragées sous d'épais feuillages. On sent qu'il
fait bon vivre dans cette charmante cité si hospitalière aux étrangers.
------Tout semble la favoriser : jusqu'à la
Compagnie CFA qui y transfère d'ARZEW ses ateliers autour desquels gravite
une petite armée d'ouvriers et d'employés, pressentant que ce nud
ferroviaire deviendrait le plus important d'Algérie. La population globale
de la commune atteint 8.560 habitants dont 1.558 français, 3.136 étrangers
et 3.866 indigènes. Le maire est secondé par deux adjoints, vingt
et un conseillers municipaux et trois, au titre d'indigènes. Le budget
très important dépasse en recettes 160.000 francs. Comme dans toutes
les communes algériennes le poste le plus dépensier est celui des
frais d'hospitalisation : 15.000 francs par an. Perregaux est doté de tous
les édifices communaux : mairie, groupe scolaire, justice de Paix, abattoirs,
ajoutons l'usine électrique et la station de monte. La ville est alimentée
en eau potable par une prise sur le grand canal issu du barrage de l'Oued Fergoug.
------La superficie du territoire de la commune
atteint près de 22.000 ha, dont 14.000 irrigables. L' étendue du
vignoble est de 600 ha produisant des vins de qualité moyenne, titrant
10 degrés. Les autres cultures comprennent : le blé, l'orge, l'avoine,
le maïs, les fèves, les cultures d'été et les fourrages.
Les plantations d'agrumes fournissent des oranges et des mandarines de qualité
supérieure, très précoces qui constituent avec les primeurs
une importante source de revenus. Les plantations d'oliviers se multiplient. La
région est le pays de l'élevage par excellence, les pâturages
de la plaine, notamment ceux de Debrousseville, permettent d'élever de
nombreux troupeaux de bufs et de moutons. Aussi le marché du Mercredi
est- il l'objet de grosses transactions sur les bestiaux. Tout ceci, sous la surveillance
et les conseils éclairés de la station agronomique de la Ferme Blanche.
------Le barrage se rompt une deuxième
fois en 1927. En 1929, les orangeries couvrent une superficie de 800 ha pour une
production de 35 à 40 millions de fruits. Plus tard, en 1940, à
la prise en charge du périmètre irrigable par le service de l'irrigation,
elles s'étendent sur 3.000 ha et atteindront 4.900 ha en 1954. Elles sont
constituées d'orangers, clémentiniers, mandariniers, citronniers
et pomélos. La production est exportée vers la Métropole,
l'Allemagne, les Pays-bas et l'Angleterre par les ports d'Oran et surtout de Mostaganem.
La récolte est traitée dans 25 stations de conditionnement et d'emballage
entièrement équipées. Par contre, le vignoble a disparu sous
les attaques du phylloxéra. ------La
ville n'a cessé de se développer puisque sa population est passée
en 1954 de 27.367 habitants (8.318 européens et 19.016 français-
musulmans) à 30.000 habitants(10.000 et 20.000 respectivement), à
la veille de l'indépendance de l'Algérie. Cet essor de la population
entraîne naturellement celui de l'enseignement, car aux deux classes de
garçons et filles situées à l'origine à la Mairie,
s'ajouteront, au fil des années et grâce aux municipalités
successives : l'école maternelle, qui deviendra le siège de la Sous-préfecture,
l'école des filles Jules Ferry, l'école des garçons Charles
Delavigne, puis les groupes scolaires Pasteur, Berthelot, Anatole France, Victor
Hugo et Marie Curie ; le stade omnisports Léo Lagrange. La ville possède
des équipements sportifs : piscine, tennis, stade de foot-ball où
évoluait la PGS (Perregauloise Gallia Sport), dernière équipe
vainqueur de la coupe d'Algérie Française en 1961. -----L'atmosphère
était parfumée par les orangers qui bordaient la plupart des rues,
la vie s'écoulait calme et heureuse, rythmée par la sirène
du dépôt des Chemins de Fer annonçant le début et la
fin des horaires de travail. Le soir, avant la nuit, la jeunesse se retrouvait
pour "faire le boulevard" pendant que les plus vieux devisaient attablés
aux terrasses des cafés. Le dimanche, nombreux étaient les Perrégaulois
qui se rendaient en voiture ou en train à la plage voisine de Port aux
Poules pour y passer une agréable journée avec parents ou amis à
"tchatcher" et manger selon la saison : un "gaspacho" une
"paella" ou la "mouna".
------Malheureusement,
le vent de l'histoire est venu mettre un terme à cette douceur de vivre,
séparant des communautés réunies depuis près de 130
ans, en en rejetant une partie sur le sol de France et d'ailleurs. Il nous a paru
important, pour resserrer les liens entre les perrégaulois, de créer
une amicale qui perrénisera le souvenir de notre ville auprès de
la génération nouvelle, afin que nul n'oublie.
Le Bureau de l'Amicale des Perrégaulois C/O
Antoine GARRIGOS Cité Le Vallon Bât D 34200 SETE
-----En
dehors de l'évocation de ce fameux et célèbre général
français d'origine suisse, Perrégaux, cette ville m'avait laissé
une image inconsciente mais enregistrée dans sa mémoire . -----Lors
d'un voyage dans l'Oranais, en 1958, j'avais remarqué sans plus, les armoiries
de la ville, gravées dans la pierre sur un joli bâtiment, à
l'entrée de la cité, à côté d'une station service
"Shell" où nous avions fait le ravitaillement en carburant.
-----Et lors de mes
recherches, car ces armes me trottaient dans la tête, impossible de retrouver
une représentation d'époque. -----Un
président de l'Association de Perrégaux est même allé
jusqu'à m'écrire, certainement de bonne foi, qu'il n'y avait jamais
eu d'armoiries à Perrégaux. Qu'ils n'avaient rien trouvé
aux Archives d'Aix...! -----Mais
le Dieu des chercheurs, qui fait bien les choses, par l'intermédiaire de
monsieur J.P Pérez de Toulon, me fit adresser une photocopie couleur des
armoiries de la ville. C'est la couverture de la "Revue municipale (de Perrégaux)",
3è année, n°9/10 juin 1957. (Avec le tampon "Archives nationales
- Aix-en-Provence"). Alors trêve de polémique, voyons les armes
de cette adorable petite ville. -----Qui
a élaboré ces armes, à quelle époque (après
1928 puisque le barrage a cédé en novembre 1927, mais avant 1957
puisque la revue date de juin 1957) ?. Alors amis perrégaulois ou érudits
de notre petite histoire à vos souvenirs et écrivez à l'auteur
de ces lignes, sous quelle municipalité ont-elles été adoptées
et y a-t'il eu des cérémonies à ce sujet ? Ces armes ont-elles
été déposées pour devenir officielles ? -----Maintenant
comment lire ces armoiries ? Avec beaucoup de modestie voilà ma lecture
puisque je n'ai pas trouvé la lecture officielle. - "Ecru français
moderne, à la filière d'or; tiercé en barre au 1, de gueules
à la locomotive à vapeur d'argent, fumante posée sur un élément
de voie ferrée de sable ; ------
au 2, d'argent liseré d'or (malgré la règle d'enquerre) à
l'artichaut de sinople ; une orange sanguine au naturel, tigée et feuillée
de sinople posée en chef ; en coeur un tourteau d'azur bordé
d'or, chargé d'un croissant d'or accompagné d'une main de fatma
de même ; ------
au 3, d'azur au barrage hydraulique de pierre, maçonné de sable,
éventré et laissant s'échapper le flot furieux de la retenue".
-----Ecu timbré
d'une couronne murale d'or, crénelée, maçonnée de
sable, à une tour centrale à 5 créneaux et portant en bandeau
inférieur l'inscription, de sable, "Castra Nova". Sous l'écu,
une banderole simple, de gueules, porte en devise le nom moderne de la cité.
Symbolique : de haut en bas La couronne murale rappelle qu'ici, à peu de
distance s'élevait un fort romain du Limes, appelé Castra Nova,
puis une redoute française qui précéda la création
de la ville de colonisation en 1858. -----Ensuite
au 1 de gueules qui est couleur héraldique de l'Afrique, et une machine
à vapeur pour rappeler l'importance du nud ferroviaire au croisement
de la rocade Arzew-Oran-Alger et de la voie étroite Arzew-Colomb Bechar,
cité en grande partie de cheminots, deux gares et ateliers CFA. Au
2, l'artichaut et l'orange sanguine de Perrégaux, tous deux célèbres
dans une grande partie de l'Algérie (La Thompson a acquis une renommée
internationale). Le croissant et la main de fatma rappellent que nous vivions
et travaillions en parfaite harmonie avec nos concitoyens musulmans, avant que
ne souffle le vent de l'histoire...! Tolérance des Français, jusque
dans leurs armoiries. -----Au
3, d'azur, ciel d'Algérie et barrage de l'Habra avec représentation
de la catastrophe du 26.XI.1927, deuxième rupture du barrage puisque déjà
en 1881... -----De
plus, le tiercé est tricolore : bleu, blanc, rouge pour rappeler notre
emblème national auquel était fort attaché notre peuple d'Algérie.
Voilà ce que je peux dire à propos de ces armes, très belles
dans leur graphisme naïf, mais tellement expressif. -----Fasse
le Dieu des Chercheurs que j'obtienne les renseignements que j'espère. Théo
BRUAND d'UZELLE Cercle Algérianiste Franche-Comté/Bourgogne
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