PERREGAUX LE PAYS DES ORANGES-
source : «
PNHA 22 janvier 1992»
Blason : pnha, n°86, janvier 1998
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ecusson perregaux


------Située à 76 km d'Oran, au pied des derniers contreforts du massif montagneux des Beni Chougranes et à l'entrée de l'immense plaine de l'Habra, la ville de Perregaux doit son nom à un Général blessé au siège de Constantine : Alexandre Charles de Perregaux, né à Neuchâtel (suisse), le 21 Octobre 1791 et naturalisé français le 18 Décembre 1815. Il a mérité de donner son nom à cette jeune ville d'Algérie, par sa manière de servir, sa valeur morale et le sacrifice suprême de sa vie, puisqu'il mourût des suites de ses blessures à bord du bateau qui le ramenait en France le 7 Novembre 1837.

------La création de Perregaux remonte au 29 Juillet 1858 et son érection en commune de plein exercice eut lieu le 30 Septembre 1870. Entre ces deux dates, le nouveau village traînait une existence assez précaire et quiconque lui aurait prédit une destinée brillante eût passé pour un bâtisseur de châteaux en Espagne. L'unique monument était d'abord le caravansérail, lieu de refuge des voyageurs allant de Mostaganem à Mascara, situé près de la rivière Habra, plus tard transformé en abattoir communal. Vers 1867-68 la culture du coton dont les débouchés étaient faciles et qui se vendait à des prix très élevés, donna au pays des ressources inattendues; ce fut un pas décisif vers le progrès : l'élan était donné. Il s'accentue davantage avec la construction des voies ferrées du PLM et de la Compagnie Franco- Algérienne qui donnent à Perregaux une situation privilégiée sur la ligne parallèle au littoral d'Oran à Alger au point de croisement de la voie qui relie les hauts-plateaux à la côte.

------En 1872, la construction du barrage réservoir de l'Oued Fergoug va changer la face de la région en apportant la fertilité dans une plaine brûlée par le soleil. A dater de 1875, le pays prospère rapidement. Il traverse une très heureuse période d'années favorables lorsqu'une terrible catastrophe vient tout compromettre et menace de détruire toutes les espérances. Le 15 décembre 1881, la rupture du barrage produit une formidable inondation : on dénombre 250 victimes. De nombreuses maisons sont détruites, les voies ferrées coupées et les ponts enlevés. Un profond découragement s'empare des colons qui voient détruit le fruit de longues années de travail. Grâce à Mrs LAURENT, Maire de la ville et DUFOREST, conseiller général, les secours accordés permettront la reconstruction du barrage qui fut achevée en 1883. Ce grand barrage de l'Habra, le plus important de l'Algérie à l'époque, est situé à 10 km de Perregaux à gauche de la route de Mascara ; il peut contenir 36 millions de m3 d'eau. La longueur totale d'une rive à l'autre est de 500 mètres : c'est dire l'importance de ce moyen d'irrigation pour la plaine.

------Depuis cette époque, Perregaux progresse sans cesse, la ville s'embellit, les monuments publics et les édifices privés dénotent un confort qui n"exclut pas un brin de coquetterie.Le jardinpublic est tracé avec un véritable goût artistique : ses allées plantées de caoutchoutiers, de ficus et d'autres essences convergent vers le centre où s'élèvent un bassin pourvu d'un jet d'eau et un kiosque à musique autour duquel des générations danseront. Les trottoirs des boulevards et des rues sont bordées d'arbres magnifiques qui transforment les chaussées en allées ombragées sous d'épais feuillages. On sent qu'il fait bon vivre dans cette charmante cité si hospitalière aux étrangers.
------Tout semble la favoriser : jusqu'à la Compagnie CFA qui y transfère d'ARZEW ses ateliers autour desquels gravite une petite armée d'ouvriers et d'employés, pressentant que ce nœud ferroviaire deviendrait le plus important d'Algérie. La population globale de la commune atteint 8.560 habitants dont 1.558 français, 3.136 étrangers et 3.866 indigènes. Le maire est secondé par deux adjoints, vingt et un conseillers municipaux et trois, au titre d'indigènes. Le budget très important dépasse en recettes 160.000 francs. Comme dans toutes les communes algériennes le poste le plus dépensier est celui des frais d'hospitalisation : 15.000 francs par an. Perregaux est doté de tous les édifices communaux : mairie, groupe scolaire, justice de Paix, abattoirs, ajoutons l'usine électrique et la station de monte. La ville est alimentée en eau potable par une prise sur le grand canal issu du barrage de l'Oued Fergoug.
------La superficie du territoire de la commune atteint près de 22.000 ha, dont 14.000 irrigables. L' étendue du vignoble est de 600 ha produisant des vins de qualité moyenne, titrant 10 degrés. Les autres cultures comprennent : le blé, l'orge, l'avoine, le maïs, les fèves, les cultures d'été et les fourrages. Les plantations d'agrumes fournissent des oranges et des mandarines de qualité supérieure, très précoces qui constituent avec les primeurs une importante source de revenus. Les plantations d'oliviers se multiplient. La région est le pays de l'élevage par excellence, les pâturages de la plaine, notamment ceux de Debrousseville, permettent d'élever de nombreux troupeaux de bœufs et de moutons. Aussi le marché du Mercredi est- il l'objet de grosses transactions sur les bestiaux. Tout ceci, sous la surveillance et les conseils éclairés de la station agronomique de la Ferme Blanche.

------Le barrage se rompt une deuxième fois en 1927. En 1929, les orangeries couvrent une superficie de 800 ha pour une production de 35 à 40 millions de fruits. Plus tard, en 1940, à la prise en charge du périmètre irrigable par le service de l'irrigation, elles s'étendent sur 3.000 ha et atteindront 4.900 ha en 1954. Elles sont constituées d'orangers, clémentiniers, mandariniers, citronniers et pomélos. La production est exportée vers la Métropole, l'Allemagne, les Pays-bas et l'Angleterre par les ports d'Oran et surtout de Mostaganem. La récolte est traitée dans 25 stations de conditionnement et d'emballage entièrement équipées. Par contre, le vignoble a disparu sous les attaques du phylloxéra.


------La ville n'a cessé de se développer puisque sa population est passée en 1954 de 27.367 habitants (8.318 européens et 19.016 français- musulmans) à 30.000 habitants(10.000 et 20.000 respectivement), à la veille de l'indépendance de l'Algérie. Cet essor de la population entraîne naturellement celui de l'enseignement, car aux deux classes de garçons et filles situées à l'origine à la Mairie, s'ajouteront, au fil des années et grâce aux municipalités successives : l'école maternelle, qui deviendra le siège de la Sous-préfecture, l'école des filles Jules Ferry, l'école des garçons Charles Delavigne, puis les groupes scolaires Pasteur, Berthelot, Anatole France, Victor Hugo et Marie Curie ; le stade omnisports Léo Lagrange. La ville possède des équipements sportifs : piscine, tennis, stade de foot-ball où évoluait la PGS (Perregauloise Gallia Sport), dernière équipe vainqueur de la coupe d'Algérie Française en 1961.
-----L'atmosphère était parfumée par les orangers qui bordaient la plupart des rues, la vie s'écoulait calme et heureuse, rythmée par la sirène du dépôt des Chemins de Fer annonçant le début et la fin des horaires de travail. Le soir, avant la nuit, la jeunesse se retrouvait pour "faire le boulevard" pendant que les plus vieux devisaient attablés aux terrasses des cafés. Le dimanche, nombreux étaient les Perrégaulois qui se rendaient en voiture ou en train à la plage voisine de Port aux Poules pour y passer une agréable journée avec parents ou amis à "tchatcher" et manger selon la saison : un "gaspacho" une "paella" ou la "mouna".

------Malheureusement, le vent de l'histoire est venu mettre un terme à cette douceur de vivre, séparant des communautés réunies depuis près de 130 ans, en en rejetant une partie sur le sol de France et d'ailleurs. Il nous a paru important, pour resserrer les liens entre les perrégaulois, de créer une amicale qui perrénisera le souvenir de notre ville auprès de la génération nouvelle, afin que nul n'oublie.


Le Bureau de l'Amicale des Perrégaulois
C/O Antoine GARRIGOS
Cité Le Vallon Bât D
34200 SETE

-----En dehors de l'évocation de ce fameux et célèbre général français d'origine suisse, Perrégaux, cette ville m'avait laissé une image inconsciente mais enregistrée dans sa mémoire
.
-----Lors d'un voyage dans l'Oranais, en 1958, j'avais remarqué sans plus, les armoiries de la ville, gravées dans la pierre sur un joli bâtiment, à l'entrée de la cité, à côté d'une station service "Shell" où nous avions fait le ravitaillement en carburant.
-----Et lors de mes recherches, car ces armes me trottaient dans la tête, impossible de retrouver une représentation d'époque.
-----Un président de l'Association de Perrégaux est même allé jusqu'à m'écrire, certainement de bonne foi, qu'il n'y avait jamais eu d'armoiries à Perrégaux. Qu'ils n'avaient rien trouvé aux Archives d'Aix...!
-----Mais le Dieu des chercheurs, qui fait bien les choses, par l'intermédiaire de monsieur J.P Pérez de Toulon, me fit adresser une photocopie couleur des armoiries de la ville. C'est la couverture de la "Revue municipale (de Perrégaux)", 3è année, n°9/10 juin 1957. (Avec le tampon "Archives nationales - Aix-en-Provence"). Alors trêve de polémique, voyons les armes de cette adorable petite ville.
-----Qui a élaboré ces armes, à quelle époque (après 1928 puisque le barrage a cédé en novembre 1927, mais avant 1957 puisque la revue date de juin 1957) ?. Alors amis perrégaulois ou érudits de notre petite histoire à vos souvenirs et écrivez à l'auteur de ces lignes, sous quelle municipalité ont-elles été adoptées et y a-t'il eu des cérémonies à ce sujet ? Ces armes ont-elles été déposées pour devenir officielles ?
-----Maintenant comment lire ces armoiries ?
Avec beaucoup de modestie voilà ma lecture puisque je n'ai pas trouvé la lecture officielle. - "Ecru français moderne, à la filière d'or; tiercé en barre au 1, de gueules à la locomotive à vapeur d'argent, fumante posée sur un élément de voie ferrée de sable ;
------ au 2, d'argent liseré d'or (malgré la règle d'enquerre) à l'artichaut de sinople ; une orange sanguine au naturel, tigée et feuillée de sinople posée en chef ; en coeur un tourteau d'azur
bordé d'or, chargé d'un croissant d'or accompagné d'une main de fatma de même ;
------ au 3, d'azur au barrage hydraulique de pierre, maçonné de sable, éventré et laissant s'échapper le flot furieux de la retenue".
-----Ecu timbré d'une couronne murale d'or, crénelée, maçonnée de sable, à une tour centrale à 5 créneaux et portant en bandeau inférieur l'inscription, de sable, "Castra Nova". Sous l'écu, une banderole simple, de gueules, porte en devise le nom moderne de la cité. Symbolique : de haut en bas La couronne murale rappelle qu'ici, à peu de distance s'élevait un fort romain du Limes, appelé Castra Nova, puis une redoute française qui précéda la création de la ville de colonisation en 1858.
-----Ensuite au 1 de gueules qui est couleur héraldique de l'Afrique, et une machine à vapeur pour rappeler l'importance du nœud ferroviaire au croisement de la rocade Arzew-Oran-Alger et de la voie étroite Arzew-Colomb Bechar, cité en grande partie de cheminots, deux gares et ateliers CFA.
Au 2, l'artichaut et l'orange sanguine de Perrégaux, tous deux célèbres dans une grande partie de l'Algérie (La Thompson a acquis une renommée internationale). Le croissant et la main de fatma rappellent que nous vivions et travaillions en parfaite harmonie avec nos concitoyens musulmans, avant que ne souffle le vent de l'histoire...! Tolérance des Français, jusque dans leurs armoiries.
-----Au 3, d'azur, ciel d'Algérie et barrage de l'Habra avec représentation de la catastrophe du 26.XI.1927, deuxième rupture du barrage puisque déjà en 1881...
-----De plus, le tiercé est tricolore : bleu, blanc, rouge pour rappeler notre emblème national auquel était fort attaché notre peuple d'Algérie. Voilà ce que je peux dire à propos de ces armes, très belles dans leur graphisme naïf, mais tellement expressif.
-----Fasse le Dieu des Chercheurs que j'obtienne les renseignements que j'espère.

Théo BRUAND d'UZELLE
Cercle Algérianiste
Franche-Comté/Bourgogne