Opéra de mes jeunes années - Alger
Ce que sera notre nouvel opéra

A gauche : la maquette acceptée, oeuvre de M. Taphoureau, ( ou Taphonneau?)qui doit être exécutée et qui répète l'arrondi en grand honneur en 1883. A droite : le projet primé de M. Seller et M. Lathuillière, dont le fer à cheval assure une excellente visibilité selon les méthodes en honneur à notre époque.

La commission chargée d'examiner les projets présentés par de nombreux architectes en vue de la transformation de l'Opéra municipal a fixé son choix, ces jours derniers, sur la maquette portant comme devise le mot « Terpsichore » dont nous reproduisons le plan du premier balcon.
Cette maquette est l'oeuvre de M. Taphoureau.

Le second prix a été attribué à MM. Seller et Lathuillière à qui la commission a fait remettre, étant donné l'importance et le très grand intérêt de leurs travaux, une prime supplémentaire de 3.000 francs.

Nous reproduisons également une partie des plans de MM. Seller et Lathuillière. On se rendra compte que sur ce projet la visibilité aurait été parfaite de toutes les places du premier balcon.

Le projet « Guignol » a été classé n° 3 ; celui portant la devise « Avion trimoteur » de M. Christofe s'est vu attribuer le quatrième prix ; celui portant une lyre comme devise était classé cinquième.

En un mot, le jury dont la tâche était difficile, s'est rallié à une formule qui rappelait, en l'améliorant, la disposition actuelle.

Comme on peut s'en rendre compte d'après la décoration de la scène exposée dans le grand vestibule de la mairie, c'est une salle d'un art fort moderne que nous posséderons dans quelques mois. Il faut espérer que les travaux seront achevés pour la prochaine saison théâtrale afin que les Algérois ne soient pas privés d'un spectacle qu'ils ont beaucoup fréquenté cette année.


(suite dans l'article.)


Echo d'Alger du19-1-1936- Transmis par Francis Rambert

sur site : juin 2019

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Le sol de marbre sur lequel s'étalaient aux soirs de gala les traînes gracieuses et froufroutantes des robes de nos élégantes, est déjà souillé de gravats et, de décombres.
Quant à la salle, elle présente l'aspect désolant d'une bâtisse où aurait éclaté une bombe.
Plus un fauteuil d'orchestre sur le plancher, plus une stalle, plus une chaise dans les loges. La fosse d'orchestre a disparu, le plateau, que les entrechats des danseuses battirent si souvent — non sans en faire sortir des nuages de poussière — n'est plus. Un grand trou, entouré de barrières provisoires, s'ouvre là où se déroulèrent, avec des fortunes diverses, tous les opéras, toutes les opérettes du répertoire.
Le rideau somptueusement grenat et doré a disparu.
Par un fond de scène. qu'attaquent déjà le pic des démolisseurs, on aperçoit la grande salle mauresque, ou foyer de la danse. Les garnitures en stuc des balcons ont été « éprouvées » par les martelettes des maçons. Elles n'ont pas résisté... et elles ont bien fait.
Tout là-haut, à l'endroit où s'étalaient les splendeurs du grand lustre de cristal, qui a rejoint déjà dans quelque triste débarras les autres accessoires du luminaire théâtral, par un lanterneau d'où filtre une lumière grise, passe une tête de manoeuvre qui crie, en laissant glisser un sceau :
— Oh! Pèpète, tu le remplis de mortier et vite, hein ? que ça passe ici.
Dehors, devant la façade tarabiscotée, des échafaudages dressent leurs géométriques silhouettes.
Tout cela prouve qu'on est entré activement dans la période d'exécution.
Bien entendu, après les pics des démolisseurs entreront en jeu les truelles des constructeurs.
Souhaitons que tout comme le Phénix renaissait de ses cendres, notre opéra renaisse bien vite de ses décombres pour la plus grande joie des amateurs, toujours nombreux, du "bel canto » et de ceux qui se laissent émouvoir par les gracieux ébats des fraîches ballerines...

A.-L. B.