La basilique de Notre-Dame dAfrique
Si nous trouvons à
lorigine de la basilique de Notre-Dame dAfrique un pèlerinage
à la Sainte Vierge, comme tant de pèlerinages catholiques
anciens, encore convient-il, pour mieux comprendre le sens de cette
dévotion dans ce pays et la valeur historique de la colline de
Saint-Eugène, de remonter jusquà lÉglise
primitive dAfrique. Il faut donc relire les ouvrages - ou sen
souvenir - des grands docteurs que furent Tertullien, saint Cyprien,
saint Augustin et saint Fulgence, reprendre les récits des esclaves
chrétiens, méditer sur lexemple de saint Vincent
de Paul ou sarrêter un instant sur les rapports relatant
les faveurs, exceptionnelles obtenues depuis les temps les plus reculés
à lendroit même où sélève
aujourdhui la basilique.
Cest surtout à partir du moment où fut connue la
miraculeuse évasion de la famille Caggioli que lidée,
lancée par deux jeunes filles originaires de Lyon, de créer
un pèlerinage, se développa.
La « Notice sur le pèlerinage de Notre-Dame dAfrique
», publiée par le cardinal Lavigerie et complétée
par Mgr Leynaud, nous reporte à lépoque où
fut livrée la bataille de Lépante (octobre 1571). Cette
famille, composée de la mère, de sa fille et de ses deux
fils, fut capturée et séparée. La mère se
confia à Marie. Douze ans après, vendue à un autre
maître, elle retrouva là sa fille, puis - détenu
dans un bagne voisin - lun de ses fils. Ce dernier réussit
à senfuir et à gagner lItalie. Il revint avec
une embarcation. Au même moment, le maître, atteint dune
grave maladie, mourait dans sa riche villa de la Vallée des Consuls.
Sur le plateau de Notre-Dame dAfrique la famille se
retrouva et put atteindre Naples, après avoir échappé
aux poursuites dun corsaire. Elle fut reçue par le pape
Sixte V.
Les deux jeunes filles, inspiratrices du pèlerinage, furent Agarithe
Berger et Anna Cinquin. Elles décidèrent Mgr Pavy, alors
évêque dAlger. Les pèlerins furent nombreux
et il fallut bientôt songer à construire une chapelle.
Celle-ci fut inaugurée et bénite le 20 septembre 1857.
Devant la foula sans cesse croissante, un projet de basilique fut étudié.
Mgr Pavy ne reçut aucun secours des autorités civiles
; il sadressa aux chrétiens du monde entier et, en France
notamment, il fit une série de prédications pour obtenir
quelques subsides. Pour la construction de lédifice il
prit lui-même la pelle et la pioche. Avec ses séminaristes
et leurs maîtres, il ouvrit le chantier de la basilique, dont
le style byzantin a été choisi « comme pour
renouer la jeune Église à lÉglise primitive
».
Commencés le 3 février 1858, les travaux de fondations
furent terminés la 25 mai. De belles pierres de taille extraites
des carrières de Kouba vinrent saligner et le 31 mai 1866,
six mois avant sa mort, Mgr Pavy bénit la grande croix qui était
fixée au-dessus de la coupole. Le cardinal Lavigerie continua
luvre de son prédécesseur. Retenons entre
autres faits la consécration du sanctuaire qui eut lieu le 2
juillet 1872 et la cérémonie du 30 avril 1876, date à
laquelle léglise prit le titre de basilique. A lissue
de cette cérémonie, deux épées : celle du
maréchal Pélissier et celle du général Yusuf,
furent offertes par les veuves des deux illustres chefs militaires.
Au chapitre des souvenirs, ajoutons que la basilique possède
une cloche et une croix (celle du campanile) ramenées de Sébastopol,
dons du maréchal Pélissier ; la canne légendaire
du général Lamoricière, la médaille miraculeuse
que portait à son cou le maréchal Bugeaud, la statue de
bronze offerte par les élèves du pensionnat du Sacré-Cur
de Lyon à Mgr Dupuch, un bas-relief figurant la scène
de la Présentation aux Mages de lEnfant-Jésus (ouvrage
du IVe siècle découvert à Carthage), une magnifique
fresque qui domine la maître-autel et des milliers dex-voto
qui témoignent des grâces extraordinaires obtenues.
S.Ex. Mgr Leynaud continue dapporter tous ses soins à cette
basilique, qui nest pas complètement achevée et
dont la garde est confiée aux Pères Blancs (R.P. Cazaunau,
recteur ).
Précisons que le corps de Mgr Pavy et celui dAnna Cinquin
reposent dans la basilique. Agarithe Berger est enterrée dans
lancienne chapelle.
En terminant notre courte étude sur les sanctuaires de la ville
dAlger, nous voudrions écrire quelques mots sur cette chapelle
provisoire, située derrière la basilique et utilisée
actuellement pour les cérémonies à caractère
paroissial. Le mouvement religieux qui sest développé
autour de la basilique et les besoins du quartier ont décidé,
en effet, Mgr Leynaud à fonder, en 1931, la paroisse de Notre-Dame
dAfrique.
Lancienne chapelle, aux murs tapis sés dex-voto,
garde tout son cachet historique, car cest de là que partirent
les premiers apôtres de la Société des Missionnaires
dAfrique (Pères Blancs), fondée à Alger en
1868 par le cardinal Lavigerie, qui présida ces émouvantes
cérémonies.