Monuments aux Morts au Plateau des Glières

Le monument est terminé

Le monument élevé à la memblre des enfants de la ville d'Alger morts pour la Patrie, dû à l'habile ciseau des sculpteurs Landowski et Bigonnet, est désormais terminé. Les échaffaudages qui le cachaient à notre vue ont .élé enlevés. Sa silhouette élégante et blanche s'élève, imposante, au haut du boulevard Laferrière, où nous avons pu le photograohier avant que ne le recouvre le voile symbolique qui doit être enlevé le jour de son inauguration, fixée au 1.1 novembre prochain.

Echo d'Alger du 19-10-1928 - Transmis par Francis Rambert

ici, en déc.2017
2.-
Le monument est terminé
Vu par Afrique du nord illustrée du 20-10-1928 Transmis par Francis Rambert
janvier 2021

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Le monument est terminé


TEXTE COMPLET SOUS L'IMAGE.
Le monument aux morts de la guerre
A Alger
Le monument aux morts de la guerre

Combien de fois déjà, accédant au chantier dit square Laferrière, n'ai-je pas assisté à la rude bataille que de nombreux praticiens, ciseau et masse en main, livraient à la matière. Guidés, conseillés par M. Landowski et M. Bigonnet, ces artisans s'occupaient à donner de la vie à un bloc de pierre dans un fouillis de lignes, de gestes, d'expressions, ils réalisaient un peu plus chaque jour ce qui demain sera le monument aux morts de la guerre.

Ce matin, dégagé de ses échafaudages, éclatant de blancheur, son formidable ensemble se détache, s'élance, inscrivant sur le roc et dans l'azur: léger du ciel nord-africain l'héroïsme de toute une cité.. Car c'est lui en effet qui a le privilège de résumer pour la postérité les espoirs et les luttes épiques, les communes souffrances, la gloire incontestée des combattants de la grande épopée.

Aux abords du parvis où viendra communier, prier, se recueillir, la foule des grands jours, voici les noms des morts inoubliables qui, sur les bas-côtés de l'édifice altier sont gravés dans des entablements ornés de lauriers. Plus haut des bas-reliefs, véritable livre sculpté, nous content la guerre. Au départ enthousiaste des zouaves, des turcos, des spahis marchant vers la frontière, a succédé la vie dans les tranchées. Le retour au foyer rappelle l'accueil attendri des enfants, des épouses, des mères, la joie grave des hommes après le devoir accompli.

Plus haut encore, cependant que l'infirmière s'efforce d'apaiser la douleur d'une veuve éplorée entourée du vieillard kabyle et du colon français, les vertus légendaires des poilus algérois s'exaltent dans une apothéose. Encadrant la victoire, deux frères d'armes dressés sur leurs chevaux de pierre élèvent au pavois le héros inconnu de la Ville d'Alger.

A part le terre-plein qui laisse l'impression d'être un peu étriqué, surtout si l'on, songe aux jours de commémoration, tel quel, le monument de MM. Landowski et Bigonnet a vraiment belle allure. Il nous change d'avec toutes ces productions affadies et médiocres encombrant, déshonorant parfois, l'emplacement qu'elles devaient embellir.

Au jour de l'inauguration le spectateur profane qui contemplera cette grande masse cernée d'une bague très ornée sera frappé par son impérieuse beauté. Il subira, je pense, le charme invincible du rythme souverain. Les yeux mouillés, s'il comprend le symbole, peut-être ne pourra-t-il pas analyser d'emblée les innombrables accords qui sont là orchestrés, par deux maîtres, dans cette symphonie de lignes, de profils, de volumes, de plans. Mais sans doute l'homme averti s'émerveillera-t-il davantage en constatant comment MM. Landowski et Bigonnet maintiennent énergiquement dans la pleine lumière de leur conscience leur idée d'ensemble, pour y ramener sans cesse et y relier étroitement les moindres détails de leur œuvre ; comment aussi s'épousent, se suivent sans solution de continuité apparente les différents bas-reliefs ; comment enfin se juxtaposent ou s'opposent les figures grandes et petites, les accessoires nécessaires, à l'action, les saillants et les rentrants, les arêtes et les rondes bosses de ce monument d'où la vie, subissant une impulsion intérieure, surgit, fleurit, s'épanouit du dedans au dehors.

Et certes, le technicien sera bien plus étonné encore car MM. Landowski et Bigonnet ont défié la difficulté tant ils se sont efforcés à mettre d'accord, avec pleine réussite, les éléments destinés de prime abord à s'exclure. Le carré joue avec le cercle et le pentagone, les surfaces rentrantes avec les masses débordantes, les lignes de vie avec celles de la géométrie, le style avec la fantaisie, le calcul avec le lyrisme frémissant, à un tel point que tout le monde y trouvera son compte : l'artiste en quête d'émotion devant l'accord parfait de la pensée et de la matière qu'elle anime, l'intellectuel avide d'un symbole parlant à son cerveau, le passant qui veut simplement, pour achever le boulevard, une statue qui plaise à son regard.

Commencé il y a tout au plus onze mois, le monument entièrement aménagé sera inauguré le 11 novembre prochain, par un ministre assure-t-on. La pierre qui le compose est identique à celle qui servit aux Romains pour la Maison carrée de Nîmes, surtout qu'on ne s'offusque pas de sa blancheur présente. Avec le temps elle se patinera admirablement et deviendra aussi dure que du marbre.

Des parterres entoureront le monument, immense tapis fleuri sur lequel il semblera reposer.

Les jardiniers bêchent, remuent la terre, plantent...

Ils travaillent avec fièvre, faisant appel, à toute leur imagination, tendant, tous leurs efforts à " faire beau "

Ils s'ingénient à trouver les dispositions les plus diverses, les teintes les plus heureuses.

C'est ainsi qu'une énorme croix de guerre entièrement composée en fleurs naturelles, attirera particulièrement l'attention du public.

Le coléus de Verschaffelt donnera un vermeil saisissant, reproduisant fidèlement le rouge du petit ruban porté par plus d'un ancien poilu.

Pour terminer, signalons que l'exécution du plus important monument de France (en tant que groupes de sculpture) n'a rencontré aucune difficulté. Le mérite en revient non seulement aux deux statuaires et à leurs excellents praticiens, mais encore à M. Christofle, architecte chargé de la direction des travaux qui, possédant en main toutes les maquettes, n'a ménagé ni son temps, ni sa peine.

Aux noms déjà cités il convient d'associer celui de M. Marcelin Grégori, le sympathique entrepreneur algérois chargé de réaliser la partie construite de l'œuvre consacrée aux morts de la guerre.