RASSEMBLÉS A MILIANA DEPUIS MERCREDI
Des milliers de pèlerins invoquent la bienveillance de Sidi Ahmed
ben Youssef
le marabout qui éteint le feu et guérit la fièvre
Hérissée
de fusils et détendards, la troupe des pèlerins
marchait sur Miliana, dans le soleil et la poussière. Venus des
douars lointains de Duperré et de Cherchell, ils cheminaient
depuis deux jours, entraînant sur leurs pas, tout au long de la
route, des milliers dautres fidèles.
Comme eux enthousiastes, comme eux pressés dhonorer, dans
son sanctuaire, le grand marabout Sidi Ahmed ben Youssef.
On nétait pas loin de midi. On approchait du but. Les vagues
de pèlerins déferlaient maintenant, compactes, bruyantes,
extraordinairement animées. Cette armée pacifique avec
sa piétaille et ses cavaliers, ses armes et ses emblèmes,
présentait un aspect étrange. Et pour tout dire inattendu.
Taxis, voitures et camions, englués dans la foule, avançaient
au pas - en direction du mausolée. Dans un étourdissant
concert de yous-yous et de coups de feu qui rythmaient la bousculade.
A un détour du chemin, la troupe simmobilisa. Le silence
se fit, étrangement pesant. Et des milliers de fidèles
se prosternèrent, face à lEst, pour dire une fervente
prière. Une heure plus tard, le pèlerinage entrait à
Miliana. Comme y était entrée, voici plus de quatre siècles,
la monture du marabout défunt.
LA VIE ET LA MORT D'AHMED
BEN YOUSSEF
Le saint Ahmed ben Youssef était né vers 1500 à
Khaala, en Oranie. Il fait là ses premières études.
Puis part à la découverte de lAfrique.
Il se fixe quelque temps à Bougie et devient le disciple préféré
du cheikh Sidi Zerroukh. Après lui avoir transmis une part de
sa science. Sidi Zerroukh linvite à parcourir l'Afrique
en fondant des zaouïas.
Par sa sagesse et sa bonté, Sidi Ahmed ben Youssef fait partout
des adeptes. Il devient bien vite l'objet de la vénération
des fidèles. Portant de ville en ville la bonne parole, Sidi
Ahmed sillonne en tous sens le pays. Il passe à Miliana. Il passe
à Blida dont il dit un jour : « On tappelle Blida,
moi je tappelle petite rose ! » Après une existence
aussi pieuse quitinérante, il meurt près dOrléansville.
On avait pris soin de demander au saint homme où il désirait-
être enterré. Sa réponse avait été
nette... et imprécise. « Quand je serai mort, attachez-moi
sur ma mule. Là où elle sarrêtera, vous menterrerez
». On fit donc comme il avait voulu. La mule marcha Jusquà
Miliana où elle sarrêta sur un tas de fumier, se
refusant obstinément à repartir. Ainsi se trouvait vérifiée
la prédiction de Sidi Zerroukh qui avait dit un jour à
son disciple : « Tu seras enterré sur un tas de fumier.
Mais en ce lieu, la prospérité naîtra ». A
cet en droit on construisit une mosquée et les dévots
y viennent honorer le saint.
QUATRE SIÈCLES DE
PÈLERINAGE
Linvocation à Sidi Ahmed passe pour guérir la fièvre
et éteindre le feu. Cest ainsi quon ne va jamais
faire appel à lui avec des bijoux car on ne peut ensuite les
faire fondre. Depuis quatre siècles, les fidèles viennent
chaque année, en pèlerinage, sur la tombe de Sidi Ahmed.
Cette année la cérémonie a connu un éclat
exceptionnel. Les chefs du pèlerinage, en arrivant à Miliana,
sont allés saluer les autorités. Tandis que les prières
commençaient.
Depuis mercredi, groupés autour du tombeau du saint, les pèlerins
demandent à Sidi Ahmed de soulager leurs misères et de
combler leurs vux.