LES PROPRIÉTAIRES MENACÉS
D'EXPROPRIATION PROTESTENT
CONTRE LE PLAN D'EXTENSION :
Est-il vraiment nécessaire de consacrer4.000 hectares
au futur aérodrome de Maison-Blanche?
Les propriétaires qui ne veulent pas être des sinistrés
demandent qu'avant de sacrifier des terres fertiles on utilise d'abord
entièrement la superficie actuelle...
...ET QUE L'ON PENSE AU CONTRIBUABLE
Le mieux est souvent l'ennemi du bien
et les meilleures intentions peuvent engendrer de regrettables erreurs.
On a déjà beaucoup parlé du projet d'extension
de l'aérodrome de Maison-Blanche. Et, sur le principe, tout le
monde est d'accord.
Doter Alger d'un grand aérodrome digne de sa position géographique
et de son rang de capitale, nous semble une excellente initiative. Mais
dans l'application d'un principe.
communément admis, il faut agir avec sagesse. Et prudence.
Or le projet administratif a déchaîné les controverses.
La houle des protestations est venue jusqu'à nous.
Des propriétaires qui ne veulent pas être " sinistrés
" se dressent contre le plan d'extension de l'aérodrome.
Il n'est ni sage ni prudent, affirment-ils, d'arracher à la culture
des terres particulièrement fertiles ; il n'est ni sage ni prudent,
dans la période de détresse financière que nous
traversons, d'imposer d'écrasants sacrifices au contribuable
algérien.
Est-il vraiment nécessaire de voir si grand ? La superficie du
" futur aérodrome " atteindra 4.000 ha ; l'aérodrome
La Guardia de New-York couvre 220 ha et l'actuel terrain de Maison-Blanche
415 ha.
Est-il logique de couper des routes, de détourner des oueds,
d'isoler des sanctuaires, par simple goût du colossal ?
L'humanité ne saurait, en toutes choses, se mettre en équations.
Si la technique a ses exigences. la logique a ses impératifs.
Il faut rester à l'échelle humaine et ne pas suivre aveuglément...
" ceux que leurs ailes de géants empêchent de voler
".
UTILISONS TOUTE LA SUPERFICIE DE L'AÉRODROME
"
Entouré de nombreux cultivateurs dont les terres sont incluses
dans le plan d'expropriation. M. le docteur Lasserre, ancien délégué
financier, propriétaire à, Rouïba. tenait hier, dans
les salons du Laferriere, une conférence de presse " pour
alerter l'opinion publique ". On connaît les principaux arguments
des protestataires :
Il est curieux. disent-ils, que l'on songe à. étendre
l'aérodrome de Maison-Blanche alors que les 415 ha, superficie
actuelle du terrain ne sont pas intégralement utilisés.
Il faut observer les normes imposées aux pistes d'atterrissage
et d'envol : trois mille trois cents mètres de longueur toutes
marges de sur-sécurité incluses. Tout le monde est d'accord
sur ce point. Mais deux pistes de cette dimension s'inscriraient avec
aisance dans un triangle de 4 à 500 ha de superficie. Il est
vrai que l'observateur le moins averti peut se convaincre de l'incohérence
des implantations successives de hangars et d'édifices provisoires
de toutes sortes, la plupart abandonnés et en ruines : près
de la moitié de l'emprise est encombrée, parmi les zones
de culture et des terrains de sport, de bâtiments vétustes
ou désaffectés opposant autant de
" bouchons " au tracé possible de pistes nouvelles.
Il convient donc de déblayer le terrain de ce chaotique éparpillement
de constructions hétérogènes pour le livrer tout
entier à sa destination et consacrer ses 415 ha aux seules activités
aéronautiques.
" Utilisons entièrement la superficie actuelle ; il sera
alors inutile de sacrifier les terres environnantes " tel est en
somme l'argument.
UNE EXTENSION QUI REVIENT CHER
Les adversaires du projet administratif mettent aussi l'accent sur le
" prix " de F l'agrandissement.
Ce qu'il coûtera ? On a parlé en 1948 de 11 milliards.
On peut aujourd'hui le chiffrer à 20 milliards. Qui peut dire,
en nos temps de monnaie fondante ce que sera devenu ce chiffre au terme
de la période d'exécution, quand auront été
déterminés les traditionnels " dépassements
imprévisibles " ?
Qui paiera ? Le contribuable algérien, bien sûr. Que le
projet soit ou non hors de proportions avec le chiffre de la population
imposable, avec le volume du " trafic passagers ", avec le
tonnage du fret aérien, le contribuable devra payer. Le ministre
des Travaux publics en a informé sans périphrases le Gouvernement
général de l'Algérie, rien ne sera fait qui ne
soit financé par des " ressources locales " !
Un aérodrome idéal : 4.000 ha., 20 à.25 milliards
d'investissements.
Au moins autant de milliards de destruction de biens productifs, d'anéantissement
de recettes budgétaires, de tarissement de sources de profit
pour l'ensemble du pays !
BOULEVERSEMENTS ET DESTRUCTIONS
Que de bouleversements ! Que de destructions ! La piste et ses approches
- tels qu'ils sont conçus dans le projet de l'Administration
- coupent sur quelque 300 mètres le
G.C. n° 16 de Maison-Blanche au Fondouk, à Maréchal-Foch,
et à Palestro.
Maison-Blanche est, du même coup, vouée à la position
d'un cul-de-sac butant contre les installations de l'aéroport.
La piste d'envol, ainsi envisagée doit, pour être réalisable,
couvrir sur une partie de son lit, le cours d'eau le plus important
et le plus tumultueux de la Mitidja orientale :
l'oued Hamiz. L'oued Hamiz devra être endigué dans un tunnel
pour permettre le franchissement de la rivière par la piste d'envol.
En imposant un cheminement souterrain àl'oued Hamiz, on s'exposerait
à subir de redoutables pressions de crue. La menace d'une catastrophe
planerait constamment sur la digue et l'aérodrome, sans parler
des débordements " naturels " si fréquents dans
la région.
Tels sont, dans leur essence, les arguments avancés par le docteur
Lasserre et les adversaires du projet de l'Administration.