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sur site le 17-12-2003
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--------AUSSI bien est-il inutile d'établir un itinéraire précis. Le mieux est d'errer au hasard après s être fixé quelques points de repère, car l'intérêt de ce vieux quartier, dont la topographie a des caprices déconcertants pour des occidentaux, est moins dans ses monuments que dans les surprises que réservent les perspectives, les éclairages. les spectacles de la rue. Cette ambiance changeante, on la trouvera par exemple dans les rues Kléber, Sidi-Abdallah, N'Fissa, Sidi-Ramdan et leurs alentours. G. ESQUER. -------RIEN qui ne soir significatif, manifestant certains besoins, habitudes de l'esprit et des yeux, en même temps que l'ordre, les proportions, les rythmes généralement imposés aux choses. Par exemple, de chaque côté de la ruelle grimpante, ces rangs d'échoppes, à l'échelle du commerce, et l'on peut dire de la vie arabe, les minusculs étals, leur richesse multicolore dans l'ombre dense des auvents. Il y a ceux des fruitiers : oranges, pastèques, verdures, grenades, chapelets écarlates de piments ; il y a ceux des grainetiers, des épiciers : sacs d'herbes sèches, de rouge henné en poudre, paquets de petits cierges enluminés ; et ceux des bouchers : chairs saignantes, tripes, affreuses dépouilles ; - et, là-bas, les assortiments de beignets dorés, les brochettes de viandes, les poissons frits, les mystérieux fruits laqués de rouge. Comme les narines s'ouvrent à retrouver l'ancienne odeur de tout cela, la douce, l'âpre, l'indéfinissable odeur d'un souk arabe ! André CHEVRILLON.
-------MAIS de tous les endroits, celui qu'il [Fromentin] préférait pour y flâner, c'était un carrefour tellement resserré que les rues adjacentes empiétaient sur son pavé... Chaque matin, toute une agitation bigarrée et violente affluait là. Des femmes voilées passaient, allant aux provisions... Louis BERTRAND. -------AURAIT-ON le pouvoir de s'implanter anonymement dans la Casbah, fût-on doué au surplus d'un génie balzacien et sans autre occupation ni désir que de témoigner sans cesse, de son mieux, d'une tragi-comédie quotidienne qui utilise une figuration d'une variété inouïe, puisée dans toutes les races, qu'on parviendrait encore à peine à transmettre une infime partie de tout le prodigieux que la vieille ville contient. Lucienne FAVRE. --------POUR ma part, je ne connais rien, dans toute l'Afrique du Nord, de plus original ni de plus pittoresque que le vieil Alger pis dans son ensemble. Louis BERTRAND.
--------DÉdales de ruelles où, discrètement, pénètre la lumière qui se diffuse et se colore en bleu pâle, reflet des murailles peintes en bleu ; saillies d'un premier étage soutenu par des rondelles de thuya ; escaliers rapides à l'extrémité desquels on aperçoit la tache bleue du ciel où se profile un minaret ; un cyprès aux tons veloutés, s'érigeant à côté d'une blanche coupole ; dans une lucarne, comme dans un cadre ovale, la figure rieuse d'une fille dont la tête est joliment coiffée d'un foulard lamé d'or. Charles de GALLAND. --------ELLE est mal bâtie, elle est mal tenue, elle n'est pas toujours aimable ! Oui, mais quel sex-appel ! Il suffit soudain d'une touche lumineuse sur son visage, d'un chant éclatant dans sa gorge, d'un lambeau d'étoffe traînant sur sa hanche, pour que les passants en deviennent fous. Ils seront alors capables de subir autant qu'il le faudra ses mauvais jours maussades, sales et froids, pour attendre que revienne frémir sur sa face cette lueur divine qui s'apparente à ce qu'il y a de plus beau et surtout de plus vibrant sous le ciel. Lucienne FAVRE. --------Et
partout, les portes, portes innombrables, doses sur ces seuils fermés.
Quel immense couvent, cette Kasbah impénétrable'... Les
poutres millénaires se croisent sur ma tête, épaulant
d'un élan fraternel les maisons confidentiellement embrassées. Edmond GOJON.
--------UN
poème d'ombre et de pierre, avant tout : l'être humain y
compte peu. Un poème farouche, où miroitent d'inquietantes
lueurs. On y pénètre, et aussitôt on est saisi de
crainte, et l'on y avance avec précaution. Le silence et la solitude
y semblent redoutables. Camille MAUCLAIR. --------LA
Kasbah demeure identique à elle-même, figée dans son
passé. Vue de la mer, un bloc de gypse, laiteux, compact. Faines-en
la roide ascension : un fantastique lacis de ruelles tortes, d'escaliers,
de voûtes. Des maisons comprimées comme des grains de grenade,
vétustes, sordides, dont les encorbellements, soutenus en porte-à-faux
par des rondins de thuya, débordent sur l'étroitesse de
la rue jusqu'à se rejoindre et à s'étayer entre eux,
supprimant le ciel. Des additions baroques : portes italiennes, à
la décoration florale, violemment fardées, à coups
de balai, d'un bleu méditerranéen et s'ouvrant furtivement,
si minuscule qu'il soit, sur l'inévitable patio roman-hispano-africain,
qui ne reçoit de lumière que d'en haut. Georges ROZET --------LE matin, à l'aube, cette kasbah voilée et silencieuse a des ébats de vie joyeuse, des carrefours et des placettes, où les marchands de fleurs et de légumes étalent les trésors éclatants de leurs éventaires. Et, comme des torrents qui dévalent entre de sombres roches, elle a deux ou trois longues rues toutes vibrantes de lumière, toutes fourmillantes de haillons multicolores, toutes pleines de cris et d'odeurs. Louis BERTRAND. --------CETTE mélodie que nous entendons au coin d'une ruelle de la Casbah, c'est sans doute celle qii AbenHamet, le dernier des Abencérages, jouait aux pieds de Dona Blanca. Tout l'Orient musulman est dans cette mélodie plaintive et traînante à la fois ; cet exotisme étonne, attire, intéresse les oreilles profanes. Jean MELIA. A plupart des rues [de la Casbah] ont un
tracé tor
---------MARABOUT
et Cimetière Ben-Ali (des Princesses), rue N'Fissa. - Petit cimetière,
ombragé de vieux figuiers et situé en pleine ville ; renferme
les tombeaux ornés de marbre de deux princesses, filles de deys,
N'Fissa et Fatmah, retraite silencieuse où semblent passer des
ombres Charles de GALLAND. ---------IL
n'est pas en Afrique de ville plus provocante que celle-là. Dans
cette gigantesque termitière blanche, René JANON. ---------ALGER est la plus capricieuse ville du monde par la mobilité de son visage où les souvenirs s'effacent et ne laissent pas de rides. D'une année à l'autre, elle modifie sa façade et se farde de nouveaux plâtres. Elle se sectionne, se particularise par quartiers, chante tous les airs à la fois, trépide comme une projection de films et soudain se retrouve vieille et lassée, désaffectée au fond d'un petit cimetière intérieur où dorment des princesses Victor BARRUCAND.
-------ON
les enterra côte à côte sous le figuier du jardin et
1 histoire de leur vie passa de bouche en bouche pour l'émerveillement
des filles au cceur tendre. A. - L. BREUGNOT. ---------AUTOUR d'Alger, des jardins étincelants comme des ceintures de perles et de pierres précieuses enserrent des villas divines. Là, des lianes toutes violettes décorent des murs blancs, encadrés de faïences bleues ; tous les arbres et tous les arbustes du monde y jettent ensemble L'éclat de leur jeunesse. Les roses les plus délicates y poussent en buissons ; les géraniums rouges y sont hauts comme des hommes ; des bourrelets de violettes de Parme enveloppent des parterres d'iris ; autour des nappes limpides qui tombent des vasques débordantes, des arums aux conques laiteuses se mêlent à des plantes étranges dont les longues fleurs orangées ont des langues bleuâtres, et ressemblent à des têtes d'oiseaux. Emile MASQUERAY. ---------SUR
ces fragments de marbre, les rosiers, les plantes grimpantes ont mis leurs
coloris et leur parure vivante. La roseraie, les dahlias, les fougères
sous bois, un sabal entouré de quincias, d'élégants
cocos, de vieux cyprès, des sycas, des conifères, offrent
un heureux ensemble des variétés florales et arborescentes.
---------NULLE
part en Afrique du Nord je n'ai rencontré de si nobles frondaisons,
si souveraines, cette puissance végétale éloquente,
presque menaçante. Et cela aux portes mêmes d'une grande
ville, ce qui en double le prix. Henry de MONTHERLANT.
---------LA gloire de ce jardin, ce sont les grandes avenues parallèles des arbres géants, coupées par la perspective fuyante d'une allée de bambous démesurés. Avenue royale des platanes, avenue des palmiers aux troncs rocailleux, avenue des dattiers qui érigent d'un jet l'éventail de leurs feuilles, avenue des ficus géants qui évoquent l'Inde des pagodes, colosses sacrés aux troncs lisses et fendus, aux racines tentaculaires, aux branches secondaires qui retombent en filaments. On avance sous des voûtes de cathédrale, ouvertes là-bas sur la mer. Nature luxuriante et ordonnée, dont Renoir a rendu la féerie. Saint-Saëns y recueillit le murmure des vagues qu'il a placé dans sa Phryné. " Le regret de ce jardin, s'écrie André Gide, ah comment le supporterai-je 1 G. ESQUER. ---------LE
jardin ! Combien j'en sais le charme solitaire durant l'abandon des jours
de semaine, autour des bassins plaqués de nénuphars et fourmillants
des papyrus, ce jardin qui exulte de tant de verdure et de fleurs exotiques,
par les allées aux ombres profondes sous les taillis et les sentiers
égarés vers quelque pépinière que jaspe la
lumière diffuse sous les arbres. Charles HANIN. ---------DES
lianes prodigieuses montent à l'assaut des bâtiments et des
grands arbres ; la liane aurore, les bougainvilliers, dont une espèce
à floraison rouge brique presque permanente. Le philodendron, aux
larges feuilles bizarrement perforées, s'attache aux arbres voisins
jusqu'à de grandes hauteurs et reprend contact avec le sol par
des racines adventives. Charles de GALLAND. ---------TOUTES les plantes d'Europe, d'Afrique et d'Asie y poussent en liberté. Le jardin d'Essai, d'Alger, est une merveille qu'on vient voir d'outre-Atlantique. Et vous vous promènerez, dans l'allée des Palmiers, dans l'allée des Bambous, et dans l'allée des Yuccas, sans savoir choisir entre les trois et sans décider laquelle vous aimeriez mieux pour vous y reposer. Claude FARRÈRE ---------CE majestueux jardin d'Essai où les plantes tropicales se prêtent à la discipline française et descendent - Versailles algérien - jusqu'à la mer, en fourrés de parc, en parterres à la Le Nôtre. Georges ROZET 1830 !
Alger,, refuge d'audacieux corsaires, jusque-là inviolable, et
que n'avaient pu vaincre ni l'Armada de Charles-Quint, ni les galères
de l'amiral Duquesne, est à la fin réduite ! Son prestige
d'invincibilité s'écroule et, aux yeux du voyageur d'Europe,
égaré sur la mer, elle n'a plus cet aspect de bête
fauve à la blanche crinière, accroupie au flanc de la colline;
prête à bondir sur sa proie au moindre geste, malgré
les vagues, malgré le vent. El-Boudali SAFIR.
---------VISITER Alger, le voir sous ses aspects variés, chercher à le comprendre et à en saisir la grandeur et les destinées, c'est se préparer à l'aimer et à y reconnaître en toute justice une des plus surprenantes et des plus séduisantes créations du génie latin. René LESPÈS. ---------AU bouquet des provinces françaises, elle [l'Algérie] est une fleur nouvelle dont la pureté latine s'avive de la pourpre de l'Orient. Isabelle EBERHARDT.
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