-Alger
Vue par les voyageurs, les écrivains et les peintres
:
Louis Bertrand, Charles Brouty, Alphonse Daudet, Ernest Feydeau, Eugène Fromentin, Jules de Gongourt,Guy de Maupassant, Montherlant, Jean Pomier, C.M.Robert,...

2ème série , pages 22 à 41.
mise sur site le 17-12-2003

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LA MOSQUÉE DE LA PÊCHERIE

-------CONSTRUITE en 1070 (1660 de J.C.) par ordre de la milice. " Que Dieu, dit une inscription, arrête ses regards sur les soldats victorieux et donne à chacun mille récompenses. " Ainsi, ces janissaires à moustaches bourrues, terreur des citadins, pensaient au salut de leur âme. C'est ici l'un des très rares exemples de la fondation d'une mosquée par une collectivité.
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-------Sur son ogive : " Louange à Dieu unique. Que Dieu répande ses grâces sur notre Seigneur Mohammed. Ensuite, que Dieu vous accorde sa miséricorde. Celui qui s'est occupé, avec zèle et assiduité, de la construction de cette mosquée, l'adorateur de Dieu, qui espère l'indulgence de son Maître et qui se consacre à la guerre sainte pour l'Amour de Dieu, c'est El-Hadj Habib, que Dieu lui soit en aide."

A. BERQUE.

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-------ALGER n'est pas seulement une "grande ville " européenne au bord d'un golfe africain, c'est une ville moderne, mêlée et fondue avec une vieille ville barbaresque, de sorte que, sans transition, vous passez d'une civilisation à l'autre, que le contraste est immédiat et continuel, que, sans sortir de chez vous, vous avez la sensation de participer aux derniers raffinements de la civilisation occidentale comme dans les métropoles européennes et, en même temps, de plonger dans les couches profondes de civilisations périmées ou de barbarie. On domine les siècles, on se meut dans un décor qu'on a l'illusion de faire naître ou de dissiper au gré de sa fantaisie. Cet exotisme à discrétion, ce contraste perçu à tous les instants, ont été une de mes plus vives jouissances et un de mes plus féconds enseignements. C'est ce que j'ai aimé tout particulièrement à Alger et que je n'ai retrouvé nulle part ailleurs, du moins au même degré.

Louis BERTRAND.
" D'Alger la Romantique à Fez la Mystérieuse

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-------SI elle demeure, pour les artistes épris d'évocations anciennes,, la romantique cité des raïs, Alger est devenue la grande ville moderne, la belle capitale dont peut s'enorgueillir toute l'Afrique. Son charme étrange n'a rien perdu de sa subtilité et tout un peuple, presque indistinct, fraternel, y vit quotidiennement côte à côte, dans la paix bienfaisante qu'une pléïade d'hommes de bonne volonté a construite pour lui, patiemment.

EL-BOUDALI SAFIR.
" Alger, vue par Fromentin "

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-------AVEC ses larges boulevards, ses immeubles modernes, son université célèbre dans le monde entier, ses grands magasins, Alger s'est européanisée ou, plus exactement, elle s'est si complètement " francisée) que, dépouillée de son aspect original, elle est devenue une véritable capitale plus occidentale qu'africaine.

Professeur M.'SOUALAH et Commandant LEHURAUX.
"De la Djénina au Dar-et-Askri

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-------MAIS voici la ville nouvelle. Partant de la Place du Gouvernement et de Bab-Azoun, elle a crevé les vieilles murailles de Kheir-ed-Dinn, s'est élancée par paliers vers le sud et les hauteurs, élargissant à chaque bond ses artères, se musclant de rapides moyens de transport, de somptueux monuments, d'immeubles trop hauts peutêtre et trop parisiens. Au delà de ces rues neuves, sur le plateau de Mustapha, velouté de pins et de cyprès, elle doit chercher désormais à sauver ses poumons de verdure, ses jardins, le charme de ses hôtels-belvédères, ses villas indigènes - parmi lesquelles le Palais d'Eté du Gouverneur Général, cette splendeur, et le Bardo, ce joyau - et à protéger ses incomparables vues sur la mer et le Djurd jura.

Georges ROZET.
" L'Algérie"

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IL y a Bougie... Il y a Bône... et il y a aussi le cap
Matifou et la pointe Pescade qui délimitent Alger. Mais Alger n'existerait pas si l'on n'y avait pas bâti des jetées qui sont parmi les plus extraordinaires du monde. Au temps jadis, quand ces jetées n' existaient pas et que les corsaires rentraient dans Alger, par mauvais temps, après des prises fructueuses, il fallait que les corsaires fussent de rudes gens pour ne pas naufrager au port.
Claude FARRÈRE.
" Mes Voyages en Méditerranée "

gouvernement général, par Bouchaud

 

-------ALORS les étoiles s'allument au-dessus de la campagne blêmissante et de ce grand pays devenu vague. D'abord on les compte ; bientôt le ciel en est illuminé. La nuit s'éclaire à mesure que toute trace du soleil disparaît, et le jour tout à fait clos est remplacé seulement par des demi-ténèbres. Cependant la mer dort, comme jamais je ne l'avais vue dormir, d'un sommeil que depuis un mois rien n'a troublé, toujours limpide et plate, assoupie, à peine rayée par le rare passage des navires, avec la transparence, l'éclat et l'immobilité d'un miroir.
Eugène FROMENTIN.
" Une année dans le Sahel

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-------SOUDAIN, me voici sous les voûtes humides et sonores de l'Amirauté, transporté en plein Alger du XVIè siècle. Cette darse colorée, ce sont les îlots de l'El-Djezaïr du pirate Bologhine et des frères Barberousse. Ce fortin surmonté d un minaret octogonal, c'est le Perron de Pedro Navarro. Cet hôtel de l'Amirauté tout paré de faïences vénitiennes au-dessus des arcades que bat la mer, est un authentique palais de raïs, maîtres corsaires.

René JANON."
Hommes de peine, Filles de joie

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-------UN grand bassin bleu lessive, une tour baguée de faïence, un vieux fort couleur d'abricot, un palais blanc sur voûtes vénitiennes, des barques alignées sur l'eau comme sardines en boîte, six palmiers, les premiers d'Afrique, et sur tout cela, claquant sec, le pavillon de France.
-------Telle est l'Amirauté.
-------Mais en réalité c'est plus qu'une tour, qu'un palais, qu'une darse. C'est plus qu'une image, plus qu'un décor.
-------C'est le reliquaire qui recouvre les causes géographiques de la présence française sur ce point de l'Afrique.

A.- L. BREUGNOT.
"Images d'Alger"

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À notre gauche, au pied du Perron séculaire, la darse de l'Amirauté, exquise à toute heure en son apparent abandon, retirée hors de la fièvre du grand port pourtant si proche, et qui a su garder un peu de son aspect d'autrefois, un peu du reflet des choses barbaresques et l'ultime souvenir des vieux maîtres espagnols.
Charles HANIN.

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-------FÉERIE inespérée et qui ravit l'esprit ! Alger a passé mes attentes. Qu'elle est jolie, la ville de neige sous l'éblouissante lumière ! Une immense terrasse longe le port, soutenue par des arcades élégantes. Au-dessus s'élèvent de grands hôtels européens et le quartier français, au-dessus encore s'échelonne la ville arabe, amoncellement de petites maisons blanches, bizarres, enchevêtrées les unes dans les autres, séparées par des rues qui ressemblent à des souterrains clairs.

Guy de MAUPASSANT.
" Au Soleil "

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-------IL faut vivre sur les bords méditerranéens pour goûter le charme des poètes latins et grecs, pour comprendre l'influence de cette mer sur les destinées du monde entier.
-------Du haut de ces boulevards, nous admirions les voiles blanches des barques revenant de la pêche, - les mêmes voiles blanches des nefs d Ulysse ou bien d'Enée, - mais nous admirions aussi les escadres, les grands bateaux amarrés dans le port ; d'un seul regard nous vivions tous les temps.

Jean MELIA.
" La Ville blanche "

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-------ALGER-LA-BLANCHE avec ses petites maisons d'un blanc mat qui descendent vers la mer, serrées les unes contre les autres. Un étalage de blanchisseuse sur le coteau de Meudon. Par là-dessus, un grand ciel de satin bleu, oh ! mais si bleu !...

Alphonse DAUDET.
" Tartarin de Tarascon "
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vue de la jetée sud, par Bouchaud

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AMOUR d'Alger, amour de l'Algérie, chaque fois que je le puis, autant que je le puis, je déclare cet amour et je tâche à le faire partager.
Gabriel AUDISIO.
"Amour d'Alger "

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-------ALGER, tout de même, quand on y arrive, sort de la mer comme elle sortait autrefois : d'un seul coup. Elle est une gigantesque cité toute bâtie en gradins, entre le cap Matifou et la pointe Pescade. Et, cependant, les gradins n'arrivent pas jusqû à la mer. Alger jouit de ce privilège qu'elle fut, de tout temps, posée sur un piédestal. Et ce piédestal, à l'heure qu'il est, repose au-dessus de la mer sur une centaine de formidables piliers, soutenant autant d'arcades, sur lesquelles sont posés les boulevards de la ville. Rien au monde ne donne une plus solide impression de capitale, de ville qui commande. Au-dessus des boulevards, la ville s'étale, par grandes avenues concentriques. Et quant à l'ancienne Casbah, elle est devenue si petite qu'il vous faudra la chercher.

Claude FARRERE
Mes Voyages

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---CHAQUE matin, éveillé avant le soleil, de mon lit j'assiste à son assomption sur la mer, le port, la ville. A peine a-t-il émergé, déjà il éblouit. Les deux môles, les vapeurs à l'ancre, les barcasses surchargées de dockers noirs, semblables à des barques du Styx, les petits bateaux-pilotes, affairés et importants comme des roquets, se détachent en grisaille confuse sur la surface miroitante, et comme martelée, de l'eau parcourue de courants incompréhensibles. Ainsi vus de haut, à six cents mètres, j'aime ce port aux lents mouvements, si calme, si vivant pourtant de la plus forte vie, mais atténuée et ralentie par la distance, et cette mer humaine.

Henry de MONTHERLANT.
"Il y a encore des Paradis"

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-------AUTRE charme d'Alger : son paysage maritime. La mer y est omniprésente. Dans les rues les plus étroites de la haute ville, tout à coup, entre deux pans de murs éblouissants de blancheur, on la voit luire immensément. L'envergure du golfe, la courbe parfaite des rivages, la grandeur un peu théâtrale de cette ville en amphithéâtre, comme en parade devant son miroir d'eaux, tout cela compose un ensemble que je crois unique.

Louis BERTRAND.
" D'Alger la Romantique à Fez la Mystérieuse "

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-------NOUS grimpons à travers les escaliers étroits. Nous émergeons dans le plein soleil. Des pièces de linge flottent comme des pavillons, bleus, incarnats, vert pistache, rose indien. Les collines nous cernent, chargées de verdure et la mer fume dans sa cuve, entre les longs caps violets. La rumeur d'Alger monte vers nous comme le roulement d'un lointain orage...

Emmanuel ROBLÈS.
" Un certain Alger "

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-------...AU bas, par-delà les maisons du faubourg Bab-Azoun et de Mustapha-Inférieur, apparaît la nappe bleue de la mer, ourlant d'une mince frange argentée la courbe gracieuse du rivage.
-------Quel admirable horizon que la mer vue de haut

Théophile GAUTIER.

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Et toujours, grise ou bleue, opalescente ou verte, Houleuse ou radieuse, immensément offerte,
La mer, toute la mer, par ma fenêtre ouverte !
Claude-Maurice ROBERT.
" Alger ma bien-aimée "

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-------HEUREUSEMENT, la vigilance de certains esprits distingués a permis de soustraire, çà et là, à la pioche des démolisseurs, quelques beaux vestiges du passé. Des écrivains ont fait revivre, dans leurs livres, l'histoire souvent tragique de ces mystérieuses demeures, qui rappelle par certains côtés celle des palais de Venise, et ce n'est pas sans un serrement de coeur que le visiteur de ces chefs-d'oeuvre de l'architecture mauresque, au courant de l'histoire, se représente les drames affreux qui se sont déroulés, jadis, dans le mystère des patios ou parmi les arabesques dorées des salles richement revêtues de faïences rares.

Professeur M. SOUALAH et Commandant LEHURAUX
" De la Djénina au Dar-El-Askri "

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-------LES meilleures oeuvres de l'époque sont les palais citadins et les villas des champs.
-------Le charme d'Alger, la douceur de son rivage, la grâce onduleuse du Sahel enchantent les raïs qui, entre deux expéditions, goûtent en hâte l'heure fuyante et légère.
-------Et leur premier soin est de se ménager un palais tranquille, avec des faïences aux couleurs joyeuses et la fraîche mélopée d'un jet d'eau.

A. BERQUE.

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palais d'hiver, par Bouchaud

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-------CONSTRUIT à la fin du XVIème siècle, dans le prolongement de la mosquée Ketchaoua, le palais du dey Hassan Pacha, connu sous l'appellation de Palais d'Hiver, a vu passer successivement de nombreux souverains.

Professeur M. SOUALAH et Commandant LEHURAUX
"De la Djénina au Dar-El-Askri "

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-------ENTRE onze heures et midi, j'arrivais au carrefour de Si-Mohammed-El-Schérif. Ce carrefour est le dernier refuge de la vie arabe, et je ne connais pas de lieu de conversation plus retiré, ni plus frais, ni mieux disposé. A l'angle, un grainetier, un peu partout des bancs garnis de nattes où des gens fumaient et jouaient aux dames... Le seul bruit véritable et continu qu'on entendît de seconde en seconde, c'était la voix du marchand crieur public qui répétait une éternelle arithmétique : tleta douro, arba douro, khamsa douro.

Eugène FROMENTIN.

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-------LES marches et les dalles paraissaient toutes gondolées, tant les babouches et les pieds nus des femmes y avaient tracé de sillons ; le marbre des colonnes torses avait pris cette teinte jaunie et ce poli particulier que donnent les frôlements des mains humaines quand ils ont duré des siècles et qui est une des manifestations de la vétusté.
-------Seules, les fleurs imaginaires peintes sur les carreaux de faïence plaqués aux murs avaient gardé sous leurs vernis, à travers l'évolution des temps, leurs fraîches couleurs bleues.
-------Tout cela s'était immobilisé, comme les rues de la vieille Kasbah, sous le ciel de l'Algérie, et les moindres détails des choses ramenaient l'esprit bien loin, dans le passé mort, dans les époques ensevelies des anciens jours de l'Islam.

Pierre LOTI.

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le carrefour Fromentin, par Bouchaud

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-------POUR les peintres, elle [la Casbah] est une sorte de témoignage, permanent de l'infini pouvoir de la lumière.

Lucienne FAVRE.