Les Algérois qui empruntent l'avenue
Maréchal de Bourmont ou l'avenue Maréchal De Lattre de Tassigny,
n'ont pas manqué de remarquer, près du carrefour correspondant,
un important chantier d'où a surgi très rapidement, s'élevant
au-dessus des hauts d'Alger, une grande carcasse de béton armé
à la finition de laquelle s'affairent de nombreuses équipes
; c'est la deuxième tronche de bâtiments - la tranche B -
de l'Institut d'Études Nucléaires de l'Université
d'Alger. Peut-être, poussés par la curiosité, ont-ils
alors découvert, au bas de ces constructions, et comme caché
dans un repli de terrain dont il épouse les formes, un bâtiment
en forme de V, ayant encore la blancheur du neuf, mais déjà
plein de vie, comme le nombre de personnes qui s'y rendent et l'importance
de son parking suffisent à le montrer. Ce dernier bâtiment
qui constitue la première tranche - la tranche A - de l'Institut
d'Études Nucléaires - est en service depuis le 1er janvier
1960.
La création de cet Institut marque la décision de l'Université
d'Alger d'assurer à ses étudiants et à ses chercheurs
une solide formation et de puissants moyens d'investigations originales
dans le domaine nucléaire et dans l'ensemble si riche des disciplines
voisines, par exemple : l'Électronique - la Physique du solide
- la Physique théorique etc... Elle apporte la preuve concrète
de la volonté de notre Université de fournir une importante
contribution à l'avancement de toutes ces branches de la science,
tant en ce qui concerne la recherche fondamentale que la recherche appliquée
; enfin, elle témoigne de son souci de constituer en Algérie,
un foyer vivant autour duquel viendront se fortifier toutes les initiatives
relatives aux applications pratiques de ces disciplines. La nécessité
de former rapidement, ici, sur place, des physiciens, des ingénieurs
et des techniciens est évidemment particulièrement impérative
à cause des besoins suscités par l'industrialisation de
l'Algérie.
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sur l'image et , pouf, l'image grandit.
Voici le remarquable
ensemble " SAMES accélérateur principalement
utilisé pour produire des neutrons de haute énergie
(14 MeV)
|
L'importance de ces objectifs explique que,
dès le début, les plus hautes autorités gouvernementales
et scientifiques et la Municipalité d'Alger, aient porté
un grand intérêt à la création d'un Institut
d'Études Nucléaires dons notre ville. En tant qu'Algérois
nous devons nous réjouir de cette décision qui a reconnu
à notre Université la " vocation nucléaire "
comme elle est reconnue à un certain nombre d'Universités
métropolitaines soit, pour l'essentiel : Paris, Bordeaux, Grenoble,
Lyon et Strasbourg.
Ceci dit, examinons de façon plus détaillée, les
objectifs propres de notre Institut et les moyens dont il dispose. Une
remarque préliminaire s'impose c'est l'imbrication inévitable
de la recherche et de l'enseignement. La recherche dans une direction
donnée implique une forte infrastructure d'enseignement de même
orientation et, réciproquement, il est difficile de pousser jusqu'à
un niveau élevé un enseignement spécialisé
si cours et travaux pratiques ne sont pas le prélude des séminaires
et travaux d'investigation d'un centre de recherche actif.
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sur l'image et , pouf, l'image grandit.
Salle de l'accélérateur,
niveau supérieur
|
Commençons par la recherche. Le programme
de l'Institut d'Études Nucléaires, pour ses premières
années, a tenu compte d'un souci de continuité avec les
travaux effectués antérieurementà la Faculté
des Sciences et notamment au Laboratoire de Physique Théorique
et de Physique Nucléaire.
Ce laboratoire possédait, en plus de spécialistes de physique
théorique et de physique mathématique, des groupes de chercheurs
expérimentés en électronique, en technique du vide,
en physique du solide... Ces techniques sont à la base des méthodes
d'investigation en Physique Nucléaire. Nous avons continué
à les développer tant pour leur intérêt propre
que pour celui qu'elles présentent pour la physique nucléaire
proprement dite. Compte tenu de ces " conditions initiales ",
le programme de recherches retenu pour les premières années
prévoit essentiellement trois domaines :
-- Un domaine strictement Nucléaire. - Recherches
sur les réactions nucléaires, transmutations par ions positifs
ou par neutrons, expériences de polarisation, de diffusion. II
s'agit de recherches effectuées dans le domaine dit des "
basses énergies " qui utilise, comme projectiles, des corpuscules
d'énergie inférieure à 15 ou 20 millions d'électron-volts.
Ces chiffres peuvent paraître faibles devant ceux qui correspondent
aux très grandes machines de la physique Nucléaire (30 milliards
d'électron-volts pour la grande machine du C.E.R.N. à Genève,
quelques milliards pour " Saturne " à Saclay) construites
pour le domaine dit des hautes énergies.
L'énergie de nos projectiles est assez importante pour perturber
les édifices nucléaires sons toutefois être suffisante
pour rendre négligeables les liaisons entre les nucléons
(ou constituants) du noyau. Elle permet donc une intervention assez nuancée
pour l'étude d'une structure nucléaire considérée
dans son ensemble. Au contraire, pour des projectiles de plusieurs milliards
d'électron-volts, les énergies de liaison des nucléons
sont négligeables vis-à-vis de l'énergie du projectile.
Tout se passe donc comme si ce dernier entrait en interaction directement
avec un nucléon libéré par rapport à la structure
du noyau, l'énorme excédent d'énergie permettant
de plus la création, par matérialisation, de nouvelles particules
fondamentales (mésons, hypérons) dont l'étude est
essentielle à la compréhension des champs de forces nucléaires.
En d'autres termes, le champ de recherches des basses et moyennes énergies
est essentiellement celui de l'étude des structures nucléaires
; au contraire, celui des hautes énergies est plutôt l'étude
des particules fondamentales.
A côté de ce domaine strictement nucléaire nous développons
deux domaines frontières :
1. - Celui de l'Electronique. - Il
s'agit là d'une technique de base pour la physique nucléaire
dont les ensembles de mesure contiennent des multiplicités de dispositifs
de nature électronique. A titre d'exemples, un sélecteur
qui est un appareil d'usage courant en physique nucléaire contient
environ 300 tubes ; une des premières expériences qui vient
d'être faite avec notre accélérateur Von de Graaff
a conduit à utiliser simultanément 1.200 tubes, plus d'un
kilomètre de câbles coaxiaux pour la transmission des informations
et plus de 3 kilomètres de câbles pour asservissements et
télécommandes. Ainsi que cela a été dit, nous
continuons d'ailleurs à développer nos recherches d'électronique
non seulement pour les liens qu'elles ont avec la physique nucléaire
mais aussi pour leur intérêt propre : techniques d'amplification
des courants faibles, détection de signaux peu intenses ou milieu
de parasites...
2. - La physique des solides et, plus spécialement,
des semi-conducteurs. - Les semi-conducteurs, qui, depuis l'invasion
du marché radio par les postes à transistors, ont largement
attiré l'attention du public, sont étudiés par un
groupe de chercheurs de notre Institut. Là aussi, il s'agit d'un
ensemble de recherches qui s'harmonise très bien avec nos objectifs
nucléaires, puisque, d'une part, les possibilités d'irradiation
que nous offrent nos accélérateurs permettent l'étude
de certains éléments semi-conducteurs et que, d'autre part,
ces mêmes semi-conducteurs constituent maintenant d'excellents détecteurs
de rayonnements nucléaires.
Naturellement, toutes les recherches rapidement évoquées
ci-dessus, impliquent, à côté de développements
expérimentaux importants, des efforts théoriques sérieux.
C'est pourquoi un groupe de physique théorique et de physique mathématique
existe dans notre Institut. II travaille dons les domaines de la mécanique
quantique, de la mécanique statistique et du calcul des probabilités.
Faisons encore la remarque suivante : nos préoccupations dont ce
qui précède indique les tendances, ne sont pas seulement
orientées vers la recherche fondamentale mais aussi vers la recherche
appliquée comme en témoignent les contrats d'études
passés avec notre Institut par les organismes les plus divers :
réalisation de dispositifs électroniques utiles aux techniques
nucléaires, dosimétrie de rayonnements, problèmes
concernant le bruit de fond, problèmes relatifs à l'obtention
de couches monocristalines...
Cet ensemble de recherches implique un équipement important et
un personnel nombreux et spécialisé. Disons quelques mots
de l'un et de l'autre. Nous ne détaillerons pas ici l'ensemble
des équipements classiques tels que : appareils de mesure, oscillographes,
générateurs étalonnés, groupes à vide,
machines-outils qui sont monnaie courante dans tout organisme de recherche
ayant l'orientation du nôtre. Notons cependant que la nature des
recherches entreprises et les délais de livraison à Alger
obligent à prévoir une masse importante de matériel
courant. A côté de ce dernier, notre Institut possède
des installations spécialisées ; citons en particulier :
- Un accélérateur d'ions ou d'électrons de 600 kev.
à courant de faisceau intense construit par la Société
S.A.M.E.S. de Grenoble.
- Un accélérateur Van de Graaff de trois millions d'électron-volts
fourni par la Société High Voltage Engineering Corporation
de Burlington (près de Boston U.S.A.).
On clique
sur l'image et , pouf, l'image grandit.
L'accélérateur
Van de Graaff
|
- Un spectromètre à protons.
- Un liquéfacteur d'hydrogène et d'hélium, construit
par la Société T.B.T. à Grenoble.
- Tout un ensemble d'installations indispensables notamment pour l'étude
des solides : microscope électronique, deux diffractographes électroniques,
une installation de rayons X...
Naturellement, à côté de l'équipement, il ne
faut pas oublier les problèmes vitaux posés par la constitution
et l'implantation des équipes. Disons que le personnel à
plein temps de l ' I n s t i t u t dépasse actuellement 110 personnes
comprenant :
L'état-major
de l'Institut d'Etudes Nucléaires au cours d'une réunion
de travail (professeurs et chefs de services).
De g. à dr.: MM. J. Schmouker, A. Sarazin, R. Galiana, C.
Rivière. A. Blanc-Lapierre, P. Dumontet. R. Barjon, M. Savelli.
|
- 50 chercheurs; parmi ces derniers, il y
a 8 professeurs ou maîtres de conférences. Les soixante autres
personnes correspondent à des techniciens, à du personnel
administratif ou aux services généraux. Pour donner une
idée du volume de recherches disons que, au cours des cinq dernières
années, les travaux effectués à
l'Institut d'Études Nucléaires, ont donné lieu à
environ 100 publications, communications ou conférences, et que
ses physiciens ont participé à une vingtaine de congrès
ou conférences internationales, (notamment à Paris, Londres,
Sydney, Montréal, Boston, La Haye, Amsterdam, Florence, Bruxelles,
Manchester, Berkeley, Boulder, Prague et Kingston). Indiquons aussi que,
durant l'année universitaire actuelle, cinq thèses de Doctorat
d'Etat auront été soutenues dans notre Institut.
L'enseignement donné par l'Institut d'Études Nucléaires,
va, évidemment, dans le sens des recherches qu'il abrite. Dans
le cadre de la licence, notre Institut prépare aux certificats
d'études supérieures d'Électronique et de Physique
corpusculaire. De plus, il possède deux centres d'études
de 3è cycle : un centre de physique théorique et un centre
de physique nucléaire. Il s'agit là de cycles de deux ans
d'enseignement post-licence, constituant un véritable apprentissage
du métier de chercheur. A la fin de leurs études de troisième
cycle, les étudiants soutiennent une thèse de doctorat de
spécialité sur les résultats qu'ils ont obtenus au
cours de recherches originales.
A côté d'un centre de recherches et d'un centre d'enseignement,
notre Institut veut aussi être le centre des techniques nucléaires
mises à la disposition de tous à Alger.
A ce titre, il a mission dans le domaine de la documentation et dans celui
de l'implantation des moyens propres à faciliter la diffusion et
l'exploitation des techniques nucléaires. En liaison avec la Société
algérienne de documentation atomique (ALDOCATOM). présidée
par M. S. Bouakouir, secrétaire général adjoint de
l'Administration à la Délégation Générale,
l'Institut d'Études nucléaires met à la disposition
des personnes ou des organismes intéressés un centre de
documentation sur toutes les questions nucléaires. Par ailleurs
il met sur pied des stages et sessions d'études sur les applications
possibles et, tout récemment, un stage sur l'utilisation des radioéléments
organisé avec l'aide de l'Institut national des Sciences et Techniques
nucléaires de Saclay a rassemblé pendant deux semaines 40
spécialistes des questions liées à la biologie.
II ne suffit pas de documenter ; il faut aussi implanter les moyens qui
permettront la diffusion des applications. Dans cet esprit, un centre
de datage par le carbone 14 sera mis en fonctionnement vers la fin de
l'année. Enfin, l'étude de l'implantation d'un réacteur
qui rendra possible à Alger l'utilisation des radioéléments
artificiels à vie courte est activement poussée.
Ce qui précède donne une vue d'en-semble des services que
doit rendre notre Institut. Déjà, on peut considérer
que certains objectifs sont atteints, d'autres ne le seront que lorsque
l'ensemble des constructions et des moyens correspondants auront été
mis en service. Actuellement, seule la tronche A est terminée.
Elle fournit 3.500 m2 de surface utile. La tranche B dont la mise en service
est prévue pour l'été 1962, permettra d'ajouter à
cette superficie, en plus de locaux pour les services généraux
près de 2.000 m- pour les services d'enseignement et près
de 5.000 m pour ceux de fa recherche. ll s'agit là de
bâtiments d'aspect plus traditionnel que ceux de la tranche A, auxquels
les exigences imposées par la présence des accélérateurs
donnent plutôt les caractéristiques d'une usine que celles
d'un laboratoire classique. C'est M. Michel Luyckx, architecte D.P.L.G.,
qui est maître de uvre. Le Bureau d'Études est l'Omnium-Technique
de l'Habitation (O.T.H.A.L.) dirigé à Alger par M. Lions.
Enfin, les travaux de construction sont effectués, compte tenu
des directives de l'Ingénieur en chef du Service des travaux d'architecture
de la Délégation Générale.
En résumé et pour conclure on peut, employant un langage
que la physique des réacteurs a rendu courant, dire que l'Institut
d'Études Nucléaires de l'Université d'Alger a maintenant
très largement dépassé la " taille critique
" la " divergence " étant bien assurée, il
y a toute raison qu'il justifie tous les espoirs qui ont été
mis en lui en assurant un solide rendement aux moyens qui lui ont été
confiés.
A. BLANC-LAPIERRE,
Professeur à la Faculté des Sciences,
Directeur de l'Institut d'Étules Nucléaires de l'Université
d'Alger.
************************
Recherches de physique nucléaire dans le domaine des basses
énergies,
par le professeur Sarazin, directeur-adjoint
(l ) Depuis que cet article a été écrit, M. le Professeur
Sarazin a été nommé Directeur de l'Institut de Physique
Nucléaire de Lyon. II est remplacé à Alger, comme
Directeur-adjoint, par le Professeur Suzor.
(Nota:je n'ai pas vérifié
cette suite.L'OCR rechignant sur la forme des polices)
La connaissance profonde des mécanismes
et des lois régissant les phénomènes nucléaires,
c'est-à-dire se rapportant au noyau, nécessite la mise en
oeuvre de moyens de plus en plus puissants. Les multiples travaux qui
ont lieu dons de nombreux laboratoires depuis plusieurs années
n'ont pas encore réussi à permettre l'interprétation
de tous les phénomènes intranucléaires. Certes, depuis
que Bohr a proposé son modèle d'atome en 1913 et que Chadwick
a découvert le neutron en 1932, ce qui a permis de préciser
la composition du noyau, des progrès considérables ont été
faits. Le nombre de plus en plus grand de chercheurs qui s'intéressent
à cos problèmes montre bien la complexité des phénomènes
étudiés.
Si l'on devait résumer en quelques mots et en toute généralité
le but des recherches de physique nucléaire, on pourrait dire que
celles-ci consistent en l'étude des interactions des nucléons,
protons et neutrons à l'intérieur des noyaux des atomes
afin de préciser en particulier la nature et le mécanisme
des forces qui en assurent la cohésion. De précieux renseignements
peuvent être tirés de l'étude des noyaux clans un
état excité, c'est-à-dire ayant une énergie
interne supérieure à celle correspondant à l'état
normal ou fondamental. Cette énergie supplémentaire sera
la cause d'un réarragement des nucléons à l'intérieur
du noyau sur lequel il sera possible d'obtenir d'intéressantes
informations par l'étude du processus qui lui permettra de retourner
à l'état fonda-mental. Des recherches de ce type ont déjà
été effectuées à l'Institut d'Etudes Nucléaires.
Ces études peuvent être effectuées à partir
des produits de décompositions de radioisotopes que l'on fabrique
généralement dans des piles atomiques.
Dans d'autres cas, on obtient le noyau dans un état excité
à partir d'une réaction nucléaire produite au moyen
de particules (protons, deutons, particules alpha) accélérées
dans un accélérateur de particules. Il est nécessaire
que ces particules chargées aient une certaine énergie pour
franchir la barrière de potentiel d aux forces répulsives
des protons du noyau. noyau ainsi formé par capture d'un ou de
pl sieurs nucléons supplémentaires est en gén rat
dans un état excité. On aura encore, cor me précédemment,
différents schémas possibles dont l'étude complète
sera extrêmeme fructueuse.
ces particules chargées aient une certaine énergie pour
franchir Io barrière de potentiel due aux forces répulsives
des protons du noyau. Le noyau ainsi formé par capture d'un ou
de plu-sieurs nucléons supplémentaires est en gêné-roi
dans un état excité. On aura encore, comme précédemment,
différents schémas possibles dont l'étude complète
sera extrêmement fructueuse.
Les appareils nécessaires pour réaliser des recherches dans
ce domaine, si l'on exclut les installations annexes, sont de deux types
: les sources de porticules accélérées appelées
accélérateurs et l'ensemble des appareillages de détection.
L'Institut d'Etudes Nucléaires d'Alger dispose de deux accélérateurs
de particules. Le premier désigné par le nom du savant qui
en conçu le principe : l'accélérateur Van de Graaff
per-met d'obtenir des courants de 100 ou 200 microompères de particules
(protons, deutons, particules alpha ou électrons) ayant une énergie
de 3 millions d'électron-volts. Cet appareil fabriqué aux
Etats-Unis a été installé à Alger en juin
1959. L'autre est de conception française et o été
construit à Grenoble par la Société Anonyme des Machines
Electrostatiques (SAMESI. II permet d'obtenir des courants de particules
du même type que le précédent, mais ayant des énergies
maximum de 600 kilo-électronvolts.
Pour la détection, l'Institut dispose d'ensembles de mPSres dont
une grande partie a été conçue et réalisée,
malgré leur complexité, dans ses laboratoires et ateliers,
et qui permettent les mesures de durées de vie d'états excités,
la mesure des énergies des divers rayonnements (rayons gamma, bêta,
neutrons, particules chargées), la mesure de distributions angulaires,
c'est-à-dire la détermination de la direction d'émission
des rayonnements au cours d'une réaction nucléaire.
Ces appareillages permettent à l'Institut d'aborder les principales
études classiques. Mais il était intéressant de disposer
d'appareils encore plus perfectionnés permettant d'obtenir des
informations sur des réactions dont la connaissance n'est encore
que fragmentaire. C'est ainsi que les chercheurs de l'Institut ont installé
à la suite de l'accélérateur Van de Graaff un dispositif
de pulsation fournissant des "paquets" de protons pendant des
temps inférieurs au milliardième de seconde, tout spécialement
destiné à permettre des mesures de durée de vie d'états
excités.
L'accélérateur SAMES a été complété
par différents dispositifs afin d'être tout spécialement
adapté aux mesures de diffusion de neutrons sur divers noyaux lourds.
Les neutrons sont pro-duits en bombardant du Tritium au moyen de deutérons.
L'énergie des neutrons diffusés est mesurée par une
méthode dite de temps de vol. Elle consiste à déterminer
le temps que met chacun d'eux pour parcourir une distance de deux mètres.
Celui-ci étant fonction de leur vitesse, donc de leur énergie,
il est asi possible de déterminer à partir d'une mesure
du temps le spectre d'énergie des neutrons diffusés dont
l'interprétation est extrêmement fructueuse. A la suite des
mesures, il faut naturellement faire l'interprétation des résultats
obtenus, ce qui nécessite des études théoriques extrêmement
complexes qui sont facilitées par l'existence à l'Institut
d'un groupe de recherches spécialement orienté vers les
études de physique nucléaire théorique.
L'Institut d'Etudes Nucléaires d'Alger est parfaitement équipé
pour atteindre les buts qu'il s'est fixés. Le dynamisme des groupes
de recherches qui l'animent et les premiers résultats obtenus font
bien augurer de son avenir.
************************
La physique théorique,
par le Professeur P. Dumontet..
La physique de l'infiniment petit a fait
ou cours de ces trente dernières années des progrès
considérables. Si les physiciens du début du siècle,
qui exploraient les molécules et les atomes, pouvaient taire des
expériences qui te-noient sur a la table à l'heure actuelle,
les physiciens qui fouillent la structure nucléaire utilisent des
techniques de plus en plus complexes, impliquant un matériel énorme
et nécessitant la collaboration de plusieurs équipes de
techniciens et de chercheurs
L'accroissement considérable des moyens matériels à
mettre en oeuvre pour effectuer une expérience de physique nucléaire
a été simultanément suivi d'un développement
important des théories nécessaires pour expliquer les phénomènes
physiques correspondants. Les pro-grès rapides des techniques et
de la théorie ont fait nature respectivement deux genres bien distincts
de physiciens : les expérimentateurs et les théoriciens.
Le développement de la physique théorique, bien que moins
spectaculaire pour le grand public, est aussi important et nécessaire
que celui de la physique expérimentale- Les théoriciens
ont une lourde tache : celle de modeler, à partir des résultats
expérimentaux et des lois fondamentales, des schémas permettent
de comprendre la structure microscopique de la matière. Naturellement
est nécessaire qu'expérimentateurs et théoriciens
aient des contacts permanents pour permettre de faire la synthèse
de leurs connaissances.
L'Institut d'Etudes Nucléaires d'Alger n'a pas négligé
cet aspect théorique de la physique nucléaire actuellement
un groupe de physique théorique comprenant une dizaine de chercheurs
y travaille activement.
Ce groupe s'occupe plus particulièrement de l'étude des
modèles nucléaires proprement dits et de la théorie
des réactions nucléaires produisant des particules polarisées.
A côté de cet effort d'ordre théorique spécialement
orienté vers l'exploitation et l'interprétation des résultats
expérimentaux de la physique nucléaire, nous continuons
à étudier des questions relevant de domaines qui taisaient
déjà l'objet d'investigations dans nos laboratoires avant
l'apparition des accélérateurs. Notamment des chercheurs
étudient les problèmes théoriques liés aux
propriétés des semi-conducteurset aussi diverses questions
de physique mathématique relevant du domaine de la mécanique
statistique ou de celui du calcul des probabilités. En particulier,
des études sont consacrées aux phénomènes
de fluctuations en physique et spécialement aux fluctuations connues
en radioélectricité sous le nom de " bruit de fond
". On sait que le bruit de fond limite la sensibilité des
récepteurs radioélectriques : l'intérêt de
la réduction des effets perturbateurs du bruit apposait aujourd'hui
de façon encore plus spectaculaire si l'on songe aux énormes
portées radioélectri ques, de l'ordre de dizaines de millions
de kilomètres qui sont requises pour les problèmes de communication
avec les satellites !
************************
Les recherches sur les semi-conducteurs,
par M. Savelli, maître de Conférences.
Dans l'ensemble des diverses formes possibles
de l'état solide, les semi-conducteurs sont actuellement l'objet
de nombreuses études; une des raisons de l'intérêt
qui leur est porté est que les recherches auxquelles ils donnent
lieu s'étalent depuis des problèmes touchant à des
questions de physique très générale, telles que l'étude
des structures ordonnées périodiques liées à
l'état cristallin jusqu'à la construction et la mise ou
point de dispositifs qui envahis-sent la technique et les applications
comme, par exemple, les transistors.
L'existence des transistors montre que l'on peut, avec des dispositifs
semi-conducteurs, avec un très grand nombre des fonctions qui,
jusqu'à ce jour, étaient confiées à des tubes
à vide ; mais on a, avec les transistors, la possibilité
d'utiliser des dispositifs bien plus petits fonctionnant sous des tensions
bien plus faibles et, en général, plus robustes. Les cellules
photoélectriques à vide peuvent elles aussi être,
dans une large mesure, remplacées par des jonctions semi-conductrices
qui sont sensibles à divers rayonnements et en particulier aux
rayonnements photoniques, c'est-à-dire de même nature que
la lumière. Ces jonctions semi-conductrices pourront servir capter
l'énergie solaire et rentrer dans la constitution de photopiles.
Elles pourront aussi, si l'on met à profit leur capacité
pour détecter des rayonnements nucléaires divers, servir
de détecteurs dans un laboratoire de physique nucléaire.
En particulier un très gros intérêt s'attache actuellement
à cet emploi des jonctions semi-conductrices qui permettent d'avoir
des détecteurs, d'une part très petits, d'où une
bonne localisation spatiale du rayonnement et, d'autre part, sans inertie,
c'est-à-dire permet-tant de localiser dans le temps le passage
d'une particule avec une précision considérable de l'ordre
d'une fraction de milliardième de seconde.
Les recherches actuellement en cours à l'Institut d'Etudes Nucléaires
sur les semi-conducteurs sont essentiellement orientées dans quatre
directions :
1°/Obtention et étude de couches minces semi-conductrices,
qui sont appelées à jouer un très grand rôle
dans diverses applications photo-piles solaires et détecteur de
particules nucléaires ayant une meilleure résolution que
les chambres à ionisation,
2°/Etudes du bruit de fond dans les dispositifs électriques
semi-conducteurs. - Connaître les raisons profondes du bruit
de fond limitant la sensibilité des jonctions et des transistors
qui tendent à remplacer de plus en plus les tubes à vide,
est un problème fondamental, dont la solution permettra d'augmenter
encore les performances de ces dispositifs.
3" Etude de l'effet de surface présenté par les
semi-conducteurs. - A cause des dimensions finies des cristaux semi-conducteurs,
leurs propriétés sont perturbées plus ou moins par
des phénomènes superficiels dépendant fortement des
traitements mécaniques, chimiques, électrolytiques que la
surface a subis et aussi, de l'ambiance gazeuse dans laquelle est plongé
le semi-conducteur. II est essentiel de connoitre la corrélation
existant entre ces perturbations et l'état de surface, dans le
but soit de l'utiliser (par exemple détection de rayonnements nucléaires
à barrière de surface), soit au con-traire de le rendre
négligeable.
4" Etude des défauts créés par les rayonnements
nucléaires sur les solides. - Ce domaine de recherches s'est
rapidement développé ces dernières années
pour de nombreuses raisons pratiques ou théoriques :
--a) Nécessité de connaitre les transformations subies par
les matériaux entrant dans la construction des réacteurs
nucléaires.
--b) Importance de plus en plus grande du problème de la détection
des rayonnements nucléaires et de celui de la transformation directe
de leur énergie en énergie électrique.
--c) Possibilités de modifier par bombardement nucléaire
les propriétés électriques des solides.
--d) Possibilités de créer par irradiation des défauts
dans les réseaux cristallins et par conséquent intérêt
indéniable pour l'étude théorique et expérimentale
des défauts de réseau dans les solides.
Le personnel travaillant dans le domaine de I'Etat solide, à l'Institut
d'Etudes Nucléaires, comprend environ 25 personnes dont, une douzaine
de chercheurs. Il dispose d'appareils de base, tels que : diffractogrophes
électroniques, microscope électronique, appareil de rayons
X. avec diffractomètre, spectrophotomètre d'absorption,
et utilise les techniques du vide poussé (pression de l'ordre du
milliardième de millimètre de mercure) et, de l'électronique.
ALDOCATOM
Société Algérienne de documentation Atomique
La société ALDOCATOM a été
fondée en 1956. Dès cette époque, il était
évident que les applications de la science nucléaire allaient
se développer largement, qu'il s'agisse des problèmes directement
liés à l'énergie nucléaire elle-même
ou, par exemple, de ceux, extrêmement nombreux, qui découlent
des multiples utilisations possibles des radioéléments.
Il était visible que toute cette évolution devait retentir,
à plus ou moins brève échéance, sur les programmes
industriels et sur les plans de financement.
C'est pourquoi, le Gouvernement Général de l'Algérie
et les principaux organismes industriels ou bancaires de ce pays, ont
désiré se grouper pour créer une Société
chargée de rassembler et de tenir à jour une documentation
sur l'évolution des perspectives industrielles ouvertes par le
développement de l'énergie atomique ou bien encore de résoudre
certains problèmes techniques d'ordre très pratique et intéressant
tout un secteur de l'économie.
C'est la raison qui a conduit à la création de la Société
ALDOCATOM. A peu près simultanément fut décidée
la mise sur pied de l'Institut d'Etudes Nucléaires de l'Université
d'Alger et il est apparu qu'il y avait intérêt à organiser
le Centre de documentation d'ALDOCATOM en liaison avec cet organisme.
C'est pour celà qu'ALDOCATOM a été domiciliée
d'abord à la Faculté des Sciences d'Alger puis à
l'Institut d'Etudes Nucléaires dès que celui-ci a possédé
ses bâtiments propres, c'est-à-dire à partir du 1-1-1960.
L'article 3 des statuts définit claire-ment l'objet de la Société:
elle a pour but l'étude des problèmes posés par le
développement d e s connaissances scientifiques dans le domaine
d e l'Energie nucléaire, la constitution de toute documentation
s'y rapportant et Io recherche de ses possibilités d'utilisation
à des fins industrielles, agricoles, comme=iales, médicales,
pharmaceutiques et de tous ordres, etc...
Ce sont évidemment les problèmes de documentation qui se
sont imposés les premiers. Comme cela a été dit,
un Centre de Documentation a, dès la création d'ALDOCATOM,
été mis sur pied en liaison étroite avec celui de
l'Institut d'Etudes Nucléaires. Sa mi-se sur pied et son fonctionnement
ont été grondement aidés par les facilités
que le Commissariat à l'Energie Atomique a bien voulu lui accorder.
Ce Centre de Documentation possède une assise suffisante pour être
capable de fournir, soit les éléments d'information qui
sont demandés par les adhérents, soit les bases d'enquêtes
spécialisées. Il reçoit plus de 80 périodiques
et possède environ 1.500 ouvrages. Un très grand nombre
de rapports ou d'articles divers ont été ras-semblés.
Afin de rendre l'utilisation des documents et l'extraction des in-formations
plus aisées, de nombreux fichiers ont été mis sur
pied. Leurs gammes s'étendent depuis certains domaines touchant
aux connaissances fondamentales jusqu'à d'autres relevant de la
documentation technique ou commerciale.
L'utilisation et la diffusion des informations font intervenir les moyens
d'action suivants :
a/ une salle de lecture permet la consultation directe des différents
documents.
b/ALDOCATOM publie un bulletin trimestriel qui informe ses membres de
l'évolution des applications de la physique nucléaire, de
l'activité du centre, des nouvelles publications reçues
et des cours, congrès, conférences, etc... En plus d'articles
généraux ou d'une sorte de revue de l'actualité nucléaire,
ce bulletin publie les résultats d'enquêtes sur des sujets
très di-vers tels que l'utilisation des bétons spéciaux
pour la protection des piles atomiques, le traitement des fruits par les
radiations ionisantes, l'action des rayonnements sur les solides, les
possibilités offertes par les accélérateurs à
électrons pour la stérilisation industrielle, le datage
par le carbone 14, le problème de l'assurance contre les risques
atomiques, etc...
et
C/ Enfin des séances de discussion et d'information ont été
organisées. Je tiens à marquer que les possibilités
de documentation rassemblées par ALDOCATOM sont largement ouvertes
et qu'il faut noter l'esprit de coopérotion dans un but non lucratif
qui anime l'ensemble des actionnaires de la Société. II
y a là une réunion de bonnes-volontés publiques et
privées qui mérite d'être signalée.
Les Sociétés ou Collectivités qui font partie d'ALDOCATOM
sont les suivantes :
Délégation Générale de l'Algérie, Banque
Industrielle de l'Afrique du Nord, Bureau de Recherches Minières
de l'Algérie, Société Algérienne des Ets G.
Bompard, Ciments artificiels d'Oranie, Société N.A. des
ciments Lafarge, Crédit Lyonnais, Laminoir et Tréfilerie
d'Afrique, Région économique de l'Algérie, SOGEI,
Société métallurgique d'El Aria, Société
française Radio-électrique Afrique, Société
d'études et de réalisations industrielles en Algérie,
Télécommunications radioélectriques et téléphoniques,
Télécommunications radioélectriques et téléphoniques
africaines, Union industrielle africaine, Worms et Cie, Banque de Paris
et des Pays-Bas, Neyrpic-Afrique.
S. BOUAKOUIR,
Secrétaire Général adjoint de l'Administration,
Président-Directeur Général de la Sté ALDOCATOM.
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