INSTITUT AGRICOLE DE MA1SON-CARRÉE
II semble qu'un revirement
se produise en faveur de la terre. Si peu encore de citadins y retournent,
le nombre de ceux qui la quittent, après avoir été
stationnaire, tend à diminuer. C'est qu'on s'est aperçu
quie seule elle donnait à l'homme une juste et abondante rémunération
de son travail en lui assurant des conditions d'existence qui, pour ne
pas être aussi agréables et riches en plaisirs que celles
de la ville, ne manquent pas cependant de charme.
En Algérie, les fils de colons entendent rester colons. Ils ne
veulent pas que les efforts de ceux qui les ont précédés
et ont usé leurs forces à mettre en valeur un sol souvent
ingrat, soient perdus pour leur famille et profitent à d'autres...
Toutefois, la culture n'est plus ce qu'elle était autrefois II
faut suivre la marche du progrès, " spécialiser "
les terres en vue de la production qu'on entend leur assigner, profiter
des découvertes des ingénieurs et des chimistes, connaître
les débouchés des fruits récoltés, faire en
un mot, de l'agriculture, une science et un art.
Dans un pays comme l'Algérie, la création d'un organisme
destiné à préparer les futurs colons à leur
rôle s'imposait. Il convenait d'adapter à la nature particulière
de nos terres et de notre climat les méthodes, les engrais, les
appareils reconnus les meilleurs dans les autres parties du monde.
Il faut admettre que le Gouvernement général de l'Algérie
a atteint ce but désirable en élevant l'ancienne École
d'Agriculture de Maison-Carrée au rang d'Institut.
L'Institut agricole d'Algérie donne à ses élèves
les connaissances théoriques et pratiques nécessaires pour
l'exploitation et la direction raisonnées d'un domaine rural ou
d'une industrie agricole dans l'Afrique du Nord, ainsi que dans les autres
pays du bassin méditerranéen ; il les prépare également
à s'installer dans nos possessions éloignées.
Il s'adresse tout spécialement aux jeunes gens de l'Algérie
et de la Métropole qui, soit pour leur compte, soit pour celui
d'autrui, désirent se consacrer à l'agriculture en Algérie
ou dans les protectorats voisins.
Il est également tout indiqué ceux qui auront à pratiquer
la culture dans les régions de climat analogue à celui de
l'Afrique du Nord.
Son enseignement très étendu en fait, en outre, une véritable
école de colonisation générale. Installé sur
le plateau qui domine la ville de Maison-Carrée (12.000 habitants),
à 11 kilomètres d'Alger et à 2 kilomètres
de la mer, l'Institut est situé dans des conditions hygiéniques
exceptionnelles au débouché de la riche plaine de la Mitidja
et à proximité d'importants domaines et d'usines ayant pour
la plupart d'étroits rapports avec l'agriculture. Les élèves
ont, d'autre part, à leur disposition, les immenses ressources
réunies dans la capitale intellectuelle de l'Afrique du Nord ;
avantage précieux, notamment pour ceux d'entre eux qui, parallèlement
à leurs études professionnelles, désirent poursuivre
des études supérieures (licence es sciences, etc.).
L'internat, pouvant recevoir 100 élèves, est doté
des aménagements et locaux en harmonie avec les dernières
exigences de l'hygiène moderne. L'Institut dispose, en outre, pour
l'enseignement qui est donné, réparti en 29 chaires, des
installations les plus complètes.
En dehors des salles d'éludés et de trois amphithéâtres
(dont l'un pouvant recevoir 300 auditeurs, est pourvu d'un cinéma
destiné à rendre l'enseignement plus vivant), il possède,
en effet, d'importantes bibliothèques, des laboratoires de chimie
et d'nologie, de physique et technologie, de géologie, de
minéralogie et de chimie agricole, de botanique cl de pathologie
végétale, d'agriculture, d'essais et de contrôle de
.semences, de viticulture, de zoologie agricole, de zootechnie.
Tous ces laboratoires sont pourvus de collections variées, du matériel
nécessaire aux travaux d'analyse et de micrographie, ainsi que
des cabinets de photographie.
La station de météorologie de l'établissement va
servir de base àl'organisation d'un service d'avertissement agricole.
Une importance spéciale, due à l'extension toujours plus
grande que prend la culture mécanique, y est attribué à
l'enseignement du génie rural qui comporte quatre chaires : Mécanique
générale, arpentage, nivellement, dessin ; électrotechnique
; moteurs et machines agricoles ; hydraulique agricole et constructions
rurales. A ces chaires est annexée une très importante station
de génie rural réalisée par l'adjonction aux laboratoires
se rapportant à cette spécialité, d'un vaste hall
d'exposition permanente d'outillage agricole, recevant en dépôt
des instruments que les constructeurs veulent bien confier à la
station, et d'importants ateliers pour le travail du bois et du fer où
les élèves sont exercés aux réparations courantes
du matériel agricole par un chef de travaux et des mécaniciens-instructeurs.
Enfin, les élèves de l'Institut sont familiarisés
avec tous les travaux agricoles, auxquels ils prennent part effectivement,
sur les trois domaines d'une superficie totale de 600 hectares que possède
l'établissement : 80 hectares à Maison-Carrée (vignes,
fourrages, culture maraîchère, station botanique) ; 10 hectares
à Rouïba (vignoble expérimental, orangerie) ; enfin
125 hectares à Berteaux, sur les hauts plateaux du département
de Constantine (grande culture céréalière et fourragère,
dry-farming, élevage, motoculture).
En rapportant leur somme de travail à la culture de l'annexe de
Berteaux lors des grand travaux, les élèves y vivent la
vie du colon et y reçoivent la plus profitable des leçons
de choses. Ils apprennent, par l'usage, sur de grandes surfaces, le maniement
des instruments et machines, des appareils de motoculture notamment, la
conduite des attelages et les soins à donner aux différentes
espèces d'animaux ; ils s'initient à la tenue de la comptabilité
d'un domaine rural, au prix de revient des produits et des travaux, à
la gestion d'une exploitation ; en un mot, ils se rendent compte, par
eux-mêmes, des difficultés que l'agriculture rencontre dans
la pratique.
Des examens périodiques, particuliers et généraux,
oraux et écrits, permettent de suivre de très près
le travail et les progrès des élèves.
A sa rentrée en deuxième, chacun d'eux est tenu de remettre
un travail original sur un sujet agricole soumis à l'approbation
préalable du Directeur.
Les élèves qui ont satisfait à toutes les épreuves
imposées par le règlement reçoivent :
1" Ceux qui, au classement de sortie, obtiennent une moyenne au moins
égale à 13, le Diplôme de l'Institut agricole d'Algérie
;
2" Ceux qui obtiennent une moyenne au moins égale à
15, sans aucune note inférieure à 13 pour les épreuves
de fin d'études, le Diplôme d'ingénieur de ce même
Institut.
Les six premiers élèves de chaque promotion peuvent être
admis à effectuer une troisième année d'études
dans les laboratoires de l'établissement ou à l'École
coloniale des Arts-et-Métiers à Dellys pour s'y initier
à l'application des arts industriels à l'agriculture. Ce
stage gratuit peut être aussi accompli, au gré des bénéficiaires,
sur les stations expérimentales de la Colonie.
Grâce à la forte préparation professionnelle de ces
jeunes gens, l'Afrique du Nord française, dont on a dit : "
qu'elle est, pour notre race, ce qu'est le Far-West pour l'Amérique,
c'est-à-dire le champ par excellence de l'énergie, du rajeunissement
et de la fécondité ", leur uvre a des débouchés
presque illimités.
C'est ainsi qu'en Algérie et dans le protectorat voisin du Maroc,
en particulier, les anciens élèves de l'Institut sont tous
qualifiés pour créer et diriger des exploitations, occuper
des emplois de gérants et chefs de culture ainsi que des situations
diverses dans les industries agricoles (nologie, distillation, extraction
d'huiles et d'essences à parfums, conservation des denrées
alimentaires, production et transformation du lait, etc..) et dans les
nombreuses branches commerciales susceptibles d'utiliser les connaissances
acquises à l'établissement.
Les diplômes de l'Institut constituent, par ailleurs, pour l'attribution
des concessions gratuites de terres de colonisation, un titre supplémentaire
dont l'Administration algérienne tient le plus grand compte.
Bien que l'Institut s'attache à orienter ses élèves
vers les entreprises dues à l'initiative privée, un certain
nombre d'entre eux peuvent également être admis dans différents
services publics de l'Algérie et du Maroc.
Enfin, l'admission des anciens élèves de l'Institut agricole
d'Algérie à l'Institut national d'Agronomie coloniale de
Nogent-sur-Marne (Seine) facilite, à ceux d'entre eux qui le désirent,
leur installation dans nos possessions lointaines.
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