-Un bal à la Lyre Algérienne
Paul Achard
pnha n°70, juillet 1996
sur site le 18/11/2002

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-----Un festival artistique a précédé la "sauterie". Le chef d'orchestre réservait une surprise aux invités. Il a relevé tous les morceaux
qui ont été exécutés au Bal du Gouverneur et il les jouera pendant toute une nuit : "Rose Mousse", "La Tsarine" et les "Saltimbanques" de Ganne, "Sobre las olas", et des nouveautés de Paris : "Fascination", "La Valse bleue"... Quel programme !
-----Les messieurs portent des fleurs à la boutonnière, les jeunes filles ont des robes couleur de ciel, de mer, de campagne et de soleil. Mais personne n'a de gants.
- Vous dansez pas, Mademoiselle ?
- Je vous connais pas, Monsieur.
- Permettez que je me présente : Tolédano. Mon père c'est le coiffeur de la rue Mahon.
- Enchantée. Seulement je suis fatiguée. J'ai mal au pied.
- Quittez le soulier et reposez-vous un peu les doigts de pied. Dans deux trois danses, je reviens. Vous avez un carnet de bal ?
-Non.
- Attendez, je connais un commissaire, le fils Garignello, je vais lui en demander un pour vous.
-----Quatre heures du matin.
- Oh ! M'sieur Matcho, vous êtes pas sérieux. Je suis une femme mariée, vous savez...
-C'est la faute à vot' parfum, parce que moi aussi je suis un père de famille... qué bon que vous sentez, alors !
- Oh ! du simple patchouli.
- Faisons quand même encore une polka.
- Oui, mais après je rentre. C'est un nazard que je sois venue seule avec une voisine, mon mari il fait les vingt-huit jours, le pôvre.
-----Cinq heures du matin. Beaucoup de femmes sont parties.
-Je dois rentrer à six heures chez ma patronne. Je suis placée chez le docteur Azoulay.
- Moi aussi, la blanchisserie elle ouvre à la demie.
- Et moi la cigarerie à sept heures. avant, il faut que je lui fasse le café à ma mère, qu'elle va en journée et que je fasse la soupe pour le petit... -----Au revoir, Messieurs...
-----Les hommes, restés seuls ou presque, dansent ensemble, en se prenant aux épaules. ce n'est pas encore la "martiale" des chiqueurs, mais cela lui ressemble...
-----Une dernière anisette rue de la Marine et en route pour le travail : le maçon, le peintre, l'employé du port et le garçon de café rejoignent leur "maison".

Paul Achard
"Salaouetches"chez Balland