sur site le 12/10/2002
-Les politiques menées en direction des Harkis
-----La répartition de la population "harkie" sur le territoire français reflète l'histoire de leur installation et celle des institutions mises en place pour l'accueillir.
-----Les premiers rapatriements (19 mars 1962-été 1962) s'effectuent à l'initiative de quelques anciens responsables militaires des supplétifs, parfois épaulés par des officiers SAS, démissionnaires ou non, et des responsables militaires

pnha n°65, février 1996

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-----ASSISTANAT ET CONTRÔLE SOCIAL
-----La répartition de la population "harkie" sur le territoire français reflète l'histoire de leur installation et celle des institutions mises en place pour l'accueillir.
-----Les premiers rapatriements (19 mars 1962-été 1962) s'effectuent à l'initiative de quelques anciens responsables militaires des supplétifs, parfois épaulés par des officiers SAS, démissionnaires ou non, et des responsables militaires français. Les directives officielles restreignant, voire interdisant, les rapatriements, ces opérations passent par des filières clandestines qui perdureront après la mise en place d'un dispositif administratif d'accueil. Considérés comme des "isolés" parce qu'ils échappent à toute tutelle officielle, ces rapatriés clandestins (peut-être 42 500 personnes) forment en fait des communautés assez dispersées sur le territoire français et qui, souvent, regroupent des familles apparentées ou originaires du même douar. Outre les régions du SudEst, du Sud-Ouest et des bordures méridionales du Massif Central (Ardèche, Dordogne, Lozère, Tarn...) ; l'agglomération lyonnaise et le Nord deviennent des terres d'accueil pour les anciens supplétifs qui se concentrent notamment à Roubaix.
-----Après les massacres de l'été 1962 en effet, un dispositif officiel d'accueil et de reclassement des Harkis se met en place (décret du 8 août 1962). Les premiers points de chute sont des camps militaires, dotés de vieux bâtiments retapés, qui ont parfois déjà été utilisés pour d'autres populations (Espagnols catalans, militants suspects d'appartenir au FLN, Indochinois).
-----Ce sont d'abord les camps de transit du Larzac et de Bourg-Lastic (Puy -de-Dôme) ; puis celui de Rivesaltes (Pyrénées-Orientales), de Sainte-Livrade près de Villeneuve-sur-Lot, de Sain-MauriceL'Ardoise et Lascours, situés sur la commune de Saint-Laurent-des-Arbres (Gard), de La Rye (Vienne), de Bias (Lot-et-Garonne).
-----Deux d'entre-eux (Saint-Maurice et Bias), rebaptisés cités d'accueil, deviendront des centres pour invalides, handicapés ou inadaptés. D'une manière générale, les camps, par où transitent quelque 42 500 personnes entre 1962 et 1969, ont pour vocation d'éviter un déracinement brutal à des familles déjà très éprouvées, de les protéger contre d'éventuelles représailles du FLN, et d'organiser leur reclassement en fonction de leur capacité présumée d'enracinement et d'adaptation à la vie française. Ils sont essentiellement de deux types :
---Les hameaux forestiers du Midi (Languedoc-Roussillon et Provence-Côte d'Azur surtout, plus quelques-uns dans le Massif Central, le Jura et les Vosges), perdus en pleine campagne ; 42, puis 47 à 75 hameaux (qui ne sont pas tous simultanément en activité) constituent ainsi des isolats de 20 à 50 familles chacun, que la fermeture progressive des chantiers et le redéploiement des forestages par l'Office National des Forêts (ONF) à la fin des années 60 et dans la décennie 70 obligera à recaser (il n'y a plus, en 1982, que 23 hameaux de forestage) ;
--- 42 "cités urbaines" installées, dans le cadre d'un programme de constructions spécial, à la périphérie des villes (Amiens, Bourges, Dreux, Lodéve, Louviers, Montpellier...) dans quelque 2 000 logements Sonacotra, capables d'accueillir 10 000 personnes en tout, presque toujours loin des centre-ville.
-----Ce logement d'urgence et ce type de reclassement qui, dans la plupart des cas, fait coexister regroupement et isolement, sont d'abord conçus comme provisoires. Mais le provisoire se pérennise, favorisant la marginalisation de populations trop coupées du reste de la société et maintenues dans une position d'assistés par l'encadrement social et administratif des cités et hameaux. Un encadrement qui a donné l'habitude, voire le goût, d'un certain contrôle social et enfermé parfois les populations dans une logique identitaire que le clientélisme associatif et politique a pu renforcer ;
-----Des mesures d'action éducative et de promotion sociale, financées par le ministère de l'Intérieur, parfois relayé, en ce qui concerne les "isolés", par des associations habilitées à cet effet ("Comité Parodi", oeuvrant notamment à travers la Cimade ou le Secours catholique), sont mises en couvre sous l'impulsion du Comité national pour les Musulmans Français, créé en 1964.
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DISPOSITIFS SPÉCIFIQUES ET DISPERSION
-----L'été chaud de 1975, qui voit se révolter les résidents des camps de Bias et Saint-Maurice-l'Ardoise entre avril et août, révèle les fissures du dispositif mis en place en 1962 et les déficiences des actions menées. Déjà esquissée avec le redéploiement des forestages, la politique de dispersion et de mobilité géographique succède aux regroupements.
-----L'ensemble du dispositif d'accueil et de reclassement est remanié et une politique de déconcentration menée à partir de 1975 : camps et hameaux sont officiellement supprimés (mais leurs résidents restent souvent sur place) ; 17 bureaux d'information, d'aide administrative et de conseils (BIAC) sont créés dans les zones où les Français musulmans sont concentrés. Des mesures spécifiques sont prises en matière d'emploi et d'habitat (accès à la propriété) pour disséminer les communautés " harkies" et favoriser leur intégration.
-----L'échec des BIAS, qui ont pour effet d'étendre à toute la population francomusulmane rapatriée les interventions sociales jusque-là réservées aux seuls habitants des camps, hameaux et cités urbaines, avec les effets pervers que cela comporte, amène une nouvelle réorganisation des services dans les années 80, visant à casser l'engrenage de l'assistanat. En 1981, Raymond Courrière, Secrétaire d'Etat chargé des Rapatriés, supprime les BIAC et remplace les 17 chefs de BIAC par 19 délégués régionaux. Dépendant d'abord des préfets de région, ceux?ci sont rattachés à une Délégation nationale à l'action sociale, éducative et culturelle, créée en mai 1982. En juillet 1984, la Délégation est transformée en Office national à l'action sociale, éducative et culturelle (ONASEC). Inauguré officiellement en janvier 1985, celui-ci est à son tour supprimé en 1987 (décret du ler mars), en même temps que les délégués régionaux, par le nouveau Secrétaire d'Etat, André Santini, qui confie aux préfets la pleine compétence sur les Français musulmans dans leur circonscription géographique.

 

-----SPÉCIFIQUE OU DROIT COMMUN ?
-----Cette évolution, qui relativise la place accordée aux modes de traitement spécifiques des harkis, se poursuit en 1988 sous légide de Maurice Benassayag, nommé Délégué aux Rapatriés. Le discours politique souligne désormais que le spécifique doit accompagner, et non remplacer, le droit commun. Les raisons de cette inflexion sont multiples : outre qu'ils peuvent paraître contraires aux principes constitutionnels de l'égalité de tous devant la loi, les dispositifs spécifiques peuvent indifféremment favoriser des discriminations positives et des discriminations négatives ; légitimes s'ils visent à résoudre des problèmes économiques ou sociaux immédiats, ils sont plus contestables quand ils sont institués au nom d'un passé (1).
-----Constituée à l'automne 1990 par Michel Rocard, alors Premier Ministre, après les émeutes de Bias, la mission de réflexion sur la communauté rapatriée d'origine nord-africaine, co-présidée par Rémy Leveau et le colonel Meliani et composée de 15 membres, dont 13 issus de la communauté franco?musulmane, présente, en mai 1991, des propositions qui confirment le souci des pouvoirs publics de favoriser l'accès des catégories défavorisées de la population " harkie" au droit commun tout en répondant à la revendication identitaire.
-----L'actualité des années 90-91 a en effet relancé le débat en révélant les limites des actions spécifiques et des mesures de dispersion. Vingt-cinq ans de pratiques d'assistance et de clientélisme électoral, parfois relayées par un mouvement associatif très dense (on recense aujourd'hui plus de 400 associations), ont laissé des séquelles, concentrée dans le Midi et dans la périphérie des villes une population qui ne veut plus partir. Parce qu'elle a tissé sur place des solidarités ou pour des raisons financières, celle-ci résiste en effet à la dispersion, alors même que les chantiers forestiers n'assurent guère de débouchés aux seconde et troisième générations ou que l'évolution économique a fait disparaître les emplois (Lorraine). Au contraire, là où la dispersion a réussi, la population "harkie" a disparu des listes de demandeurs d'aides ou de prestations spécifiques et s'est fondue dans la population de souche française sans s'enfermer dans une revendication identitaire paralysante.
(1) Que veut dire l'auteur ?
-----On voit bien que son travail lui a été commandé par la Vème République et qu'elle doit respecter la ligne " politiquement correcte" de celle-ci.
-----Il convient de rappeler dans le 1er article (Mag n° 63) que l'auteur parlait de la "guerre Franco-Algérienne". Départements français, l'Algérie n'était pas une nation souveraine mais bien la France, aussi il vaut mieux, pour l'auteur, étant historienne, parler de "guerre civile franco-française"
-----Les dispositifs spécifiques sont au contraire légitimes parce qu'ils ont été institués au nom du Passé non moins spécifique des bénéficiaires car s'ils ont été parqués dans les camps de Bias, St Maurice etc... c'est bien en raison de leur passé patriotique.
-----Enfin, pour mettre un terme aux élucubrations et à l'imposture FLN-Gaulliste, rappelons que personne ne conteste que les Français de confession musulmane qui dans les unités les plus diverses (GMR, Harkas, Supplétifs...) qu'on désigne aujourd'hui sous le vocable de " Harkis" , étaient de l'ordre de 250 000 hommes.
-----150 000 seront torturés et assassinés grâce à leur livraison par les gaullistes au FLN.
-----100 000 trouveront refuge en Métropole, par le "rapatriement", grâce à des patriotes civils ou militaires.
-----Or, plus personne n'ignore en Métropole désormais, pour les cotoyer quotidiennement que pour un homme apte à porter les armes, dix personnes l'entouraient de l'enfant aux grands-parents, frères, sueurs, oncles, tantes et famille proche.
-----Soit en faisant un calcul simple que dans les écoles on n'enseigne plus, 250 000 x 10 = 2 500 000 personnes ayant choisies d'être Français.
-----La résistance à la dictature FLN (dans une SAS, une Harka, la présence d'un seul responsable d'origine métropolitaine est révélatrice du choix fait par les hommes qu'il commandait) était énorme.
-----Y a-t-il eu, pour respecter les chiffres pour les thuriféraires de De Gaulle, en Métropole 10 millions de résistants, armes à la main, de 1940 à 1944 ?

Catherine Wihtol de Wenden,
Avec l'aimable autorisation de la Documentation Française
"Regards sur l'actualité" novembre 91