Été - automne 1997 Harkis en
grève de la faim!
" La France Grande et Généreuse! "
"La France vous protégera... "
La France NOUS a laissés tomber...
Voici 35 ans maintenant, la France a ramené son drapeau sur un
des derniers territoires français pour satisfaire une légitime
aspiration des peuples à accéder à l'indépendance..."
" Hors d'Algérie, les affreux COLONIALISTES "" Il
n'y a plus de place pour vous, les Pieds-Noirs! "" Et vous Harkis,
collaborateurs honteux d'une puissance coloniale, vous devrez payer ces
forfaits que vous avez commis contre vos frères! "
Telle fut la litanie macabre des années 1954-1962 et après...
Combien de personnes n'ont-elles pas payé de leur vie cette confiance
aux représentants de la France?
L'actualité sinistre nous renvoie comme un écho lointain,
35 ans après, les cris de haine, les cris de rage, les cris de
teneur de ce que furent ces massacres organisés avec la complicité
passive ou active de certains de nos concitoyens.
- contre les Pieds-Noirs qui voulaient s'accrocher à leurs racines
centenaires.
- contre tous ces Algériens restés fidèles à
la France et dont le seul crime fut d'avoir cru aux belles paroles de
nos hommes politiques.
- contre les représentants de "l'état colonialiste
français ". Malheur aux vaincus!
Vous serez chargés de tous les péchés et accablés
de l'opprobre de certains intellectuels " bien pensants
entraînant dans leurs sillages la masse d'un peuple manipulé
et désinformé...
Dans cinquante ans, nous saurons certaines vérités!
Le vent de l'histoire a soufflé en violence sur
tous les peuples d'Afrique et beaucoup d'autres peuples de notre planète
semant la désolation morale, la désolation physique, la
désolation matérielle.., et nous voyons 35 ans après,
les conséquences désastreuses dans ces pays en ruines, des
pays exsangues. Ce souffle du vent de l'Histoire, après avoir effleuré
notre pays la France, s'enfle... Deviendra-t-il une tempête qui
attisera les cendres que l'on croyait restes de brasiers anciens.., pour
rallumer des feux de passions assoupies pendant des décennies.
Décidément le drapeau français sera encore longtemps
entaché de ses erreurs colonisatrices et post-décolonisation.
Je suis Pied-Noir et je crois qu'il est de mon devoir moral d'apporter
mon soutien, certes modeste, à ces fils de Harkis en grève
de la faim pour réveiller de leur indifférence nos concitoyens
dont beaucoup de jeunes en particulier ignorent ce problème enfoui
" au fond des poubelles de l'Histoire " par certains responsables
politiques. Il ne faut pas oublier que beaucoup de ces Harkis ont été
des combattants de la guerre 39-45 (et dont les pères ont aussi
fait VERDUN, la MARNE...) qui ont été enrôlés
pour libérer la FRANCE, l'EUROPE et pour faire barrage aux forces
obscures des nazis ou des fascistes. In memoriam!
Certains de nos concitoyens. ont eu du mal à accepter ces "
réfugiés " abusés par des représentants
de la FRANCE " Grande et Généreuse ", sincères
dans leurs engagements pour la protection des territoires français
mais souvent peu au courant des bas intérêts financiers ou
mercantiles à préserver. Oui! La France a abusé de
ces personnes, paysans pour la plupart que l'on a abandonnés à
un sort cruel, puisqu'on les a reçus et parqués "en
attendant des jours meilleurs " mais dont on a oublié beaucoup
de membres dans les camps. Une chape de plomb a été posée
sur leur destin oh! combien cruel en ALGERJE indépendante. Rejetés
par leurs frères algériens, ils ne sont pas pour autant
acceptés dans la communauté " fraternelle (?) française
", fraternité parfois sélective, semble-t-il.
Ils ne sont plus rien!
Et pourtant, ils ont des droits, eux!
Leurs parents ont choisi la France. La communauté doit les aider.
Il est temps que nos concitoyens ouvrent les yeux pour redonner leur place
à ces frères que l'on a cachés si longtemps en les
rejetant dans un amalgame confus et discuté de " ces personnes
différentes ".
Nous avons les sans-papiers.
Les Harkis, les fils et petits-fils de Harkis sont des sans identité.
Fils et petits-fils de Harkis ont des droits et je rappellerai les propos
amers, mais sans haine (... jusqu'à quand?) de deux d'entre eux:
" Lorsqu 'il y a eu les affaires des sans-papiers, beaucoup de français
se sont mobilisés! Nos parents ont fait le choix de rester français
et on nous rejette! On se désintéresse de nous! Que faudra
-t-i lfaire ?... "
" La France a été plus prompte à donner des
fusils à nos pères et nos grands-pères qu'elle se
préoccupe de nous donner un tournevis pour travailler! "
Fils et petits-fils de Harkis de cette fin de siècle, serons-nous
donc encore longtemps des parias de l'Histoire? Fils et petits-fils de
Harkis encore plus touchés que nous, les Pieds-Noirs : sachez que
pour renouveler une carte d'identité, j'ai du fournir un certificat
de nationalité parce que j'étais né en Algérie.
J'ai 55 ans, je suis enseignant depuis l'âge de 18 ans quand en
1960, j'ai fait le choix d'apporter la culture aux enfants de notre peuple...
En Algérie pendant deux ans, avant de fuir comme beaucoup d'expatriés
de 1962 la folie meurtrière (dont les médias nous rapportent
des exemples hebdomadaires) de ces fins de guerres ou de révolutions,
eussent-elles été d'une noble cause.
Ce soutien moral que je vous apporterai sera bien peu
de chose peut-être, mais vos parents et nos parents ont lutté
côte à côte pour tenter de maintenir cet esprit humanitaire
et humaniste dont la France ne peut que s'enorgueillir.
Mais souvent dans ce monde, les forces du mal sont plus fortes que les
forces de sagesse et de fraternité.
Nous avions tort aux yeux de beaucoup dans ces années de braises
et de décolonisation. Deux mots assassins.
Nous étions Pieds-Noirs...
Vous étiez Harkis au service des colonisateurs.
Mais actuellement, la terreur journalière dans cette Algérie
martyrisée justifie, trop tard malheureusement, le combat qui a
été mené une centaine de morts chaque semaine, sacrifices
offerts en holocauste à je ne sais quel Dieu du mal "El Chitane
"
Dans les années 1950-1960, on massacrait au nom de l'Indépendance
et du combat légitime pour toutes les indépendances, mot
magique qui devait résoudre tous les problèmes d'injustices
(sans oublier que les deux premiers morts de cette guerre d'Indépendance
furent deux jeunes d'une vingtaine d'années qui avaient choisi
d'enseigner dans les campagnes reculées de l'Algérie, égorgés
comme le furent des fellahs qui les accompagnaient dans ce bus maudit
de Kenchela, je crois !). Aujourd'hui, les habitants de ce pays martyrisé
sont massacrés au nom d'Allah ! Tristes réalités
de l'histoire!
Je vous chargerai, vous les représentants des Rapatriés
d'Afrique du Nord et d'Outre-mer, Pieds-Noirs et Algériens ayant
choisi la France, je vous chargerai de transmettre mon salut amical et
fraternel. Je vous demanderai de les assurer, Harkis et fils ou petits-fils
de Harkis que je saurai être, de façon humble et modeste,
peut-être, mais viscéral, un porte-parole pour leur cause
que j'ai déjà explicitée autour de moi pendant ces
trente cinq années d'exil et que je tenterai d'expliquer de façon
encore plus convaincante autour de moi dans mon entourage social et professionnel.
Tous unis sous les plis du drapeau français, nous devrons continuer
les idées humanistes qui ont fait et qui devront toujours faire
la grandeur de la France. Il faut espérer que notre gouvernement
dont la force d'action et de conviction est la défense des droits
de l'homme, saura mieux que par le passé répondre à
vos attentes pour enfin reconnaître en vous des dignes et vrais
fils de la France.
Allons enfants de la Patrie... Harkis, vous n'êtes pas seuls!
Pour finir, je voudrais faire référence et révérence,
au Bachaga BOUALEM (député d'Orléansville réélu
quatre fois à ce poste de confiance vice-président de l'Assemblée
Nationale) en citant certains extraits de son livre
Mon pays la France, dont la jaquette est tricolore avec en fond, la silhouette
de cet homme courageux;
" Pour ceux qui se sont tus et qui se taisent.., je les plains, moi
qui sais que chaque soir l'oued qui coule près de ma maison charrie
de l'eau rougeoyante et que ce n est pas dû aux reflets du soleil.
(Mas Thibert, 9septembre 1962).
Des exemples de la bravoure et du dévouement des Harkis et de leurs
familles sont innombrables...
Ce poste commandé par le garde-champêtre du village: Akermi,
avec dix-huit hommes armés contre toute une Katiba... un petit
bonhomme pas plus haut qu'un enfant, maigre et squelettique sa femme,
énorme matrone... accourue au bruit de la fusillade (elle aurai
tpu le cacher dans ses bras sans qu 'on le découvre...). Elle partit
en courant jusqu 'à sa maison et revint un cabas à la main.
Elle avait enfourné pêle-mêle des chargeurs, des cartouches
et des grenades. Elle se mit alors, au mépris des balles qui sifflaient,
à parcourir les rangs des Harkis, à les ravitailler en munitions,
à les exhorte r au combat. Elle dégoupillait les grenades
avant de les passer à son mari pour qu'il neperde pas de temps...
Au plus dur de la bataille, elle jetait elle-même les grenades...
bande de salauds, allez-h vous foutre le camp!
" Ils ont repoussé l'attaque.»
Jean DOMAS
Photos tirées du " Livre des Harki'. de Taouès TITRAOUI
et Bernard. COLL, préface d'Ali BOUALAM et de Jacques SOUSTELLE
- Jeune Pieds-Noirs - BP 4 - ~ 15 -BIÈVRES
|