---------Voici
venir la dix-septième année de notre exode (note
du site: la brochure est de mai 1980) et la quatrième réunion
de notre amicale, pour la Pentecôte. Emouvante assemblée
de ce qui fut un village français et qui n'est que lambeaux épars
cherchant désespérément, une fois l'an, à
se retrouver. Nous voudrions au moins connaître la cause profonde
d'un tel malheur ; y avait-il un remède ?
---------J'ai
partout retrouvé les mêmes arguments : c'est le "vent
de l'histoire" obéissant à l'inéluctable principe
du " droit des peuples à disposer d'eux-mêmes ",
c'est-à-dire à voir éclore en eux les germes inévitables
de l'éveil nationaliste, comme une sorte de génération
spontanée, et qui doit provoquer la libération du joug du
colonialisme. ---------C'est
ce principe idéaliste qui a conduit un homme de gauche, MendèsFrance,
à abandonner, après Dien-Bien-Phu, l'Indochine, tout comme
un homme de "droite", De Gaulle, aux accords d'Evian, mais ici,
après la victoire de nos armes.
---------Ce
principe se révèle en réalité être un
principe révolutionnaire, non une espèce de génération
spontanée, mais une émanation voulue de l'idéologie
marxiste, savamment distillée. En fait, nous assistons non à
l'éclosion harmonieuse des peuples " libérés
", mais à leur déchéance et à la misère,
à la guerre qui se poursuit, à l'anarchie ou au totalitarisme,
de toute façon à une nouvelle colonisation idéologique
et économique qui profite aux deux grands empires rivaux marxiste
et capitaliste...
---------Y
avait-il un remède ? Je livre à votre méditation
ces quelques lignes, retrouvées dans la correspondance du Père
de Foucault, qui connaissait si bien notre terre et y a laissé
la vie. Avec une troublante prémonition, il écrivait le
12 décembre 1912 au Duc de Fitz-James, 50 ans avant notre exode
---------"
Quel bel empire, à condition de le civiliser,
de le franciser et non de se contenter de le maintenir soumis et de l'exploiter.
Cet empire africain sera, dans un demi-siècle, un admirable prolongement
de la France. Si, oublieux de l'amour du prochain commandé par
Dieu, nous traitons ces peuples, non en enfants, mais en matière
d'exploitation, l'union que nous leur aurons donnée se retournera
contre nous et ils nous jetterons à la mer à la première
difficulté européenne".
---------Il
précisait encore dans une lettre du 16 juillet 1916 à René
Bazin : " Ma pensée est que si petit
à petit, doucement, les musulmans de notre empire colonial du Nord
de l'Afrique ne se convertissent pas, il se produira un mouvement nationaliste
analogue à celui de la Turquie : une élite intellectuelle
se formera dans les grandes villes, instruite à la française,
sans avoir le coeur et l'esprit français, élite qui aura
perdu toute foi islamique, mais qui en gardera l'étiquette pour
pouvoir par elle, influencer les masses... elle se servira de l'islam
comme levier pour soulever la masse ignorante et cherchera à créer
un empire africain musulman indépendant ".
Docteur Georges Pélissier.
|