ESSOR DE L'ALGÉRIE - 1947
6. Enseignement technique et professionnel
6. Enseignement technique et professionnel

Charles Brunhold

ici, mars 2016

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Ghardaïa : école musulmane de gravure sur cuivre
Ghardaïa : école musulmane de gravure sur cuivre
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Ghardaïa


Le plan d'équipement et d'industrialisation, qui doit régir l'économie algérienne dans les années à venir, s'efforcera, par un accroissement et une valorisation des produits du sol, du sous-sol et de la mer, d'améliorer le niveau de vie de chaque habitant et d'assurer la subsistance d'une population de huit millions d'âmes qui s'accroît chaque année

Le développement de ce plan posera les mêmes problèmes en Algérie et dans la Métropole; celui des ressources financières, celui des matières premières, celui de l'équipement industriel, et enfin celui de la constitution de la main-d'oeuvre : recrutement, qualification et formation progressive, suivant les besoins que fera apparaître le développement même de l'industrialisation.

Si l'Algérie ne peut se passer de la Métropole pour la formation des ingénieurs à qui appartiendra la conception et la direction générale de l'effort à accomplir, elle devra, de plus en plus, s'efforcer de trouver chez elle tous les techniciens qui auront la charge des réalisations envisagées : ouvriers qualifiés, contremaîtres, conducteurs de travaux et même, dans une certaine mesure, ingénieurs d'exécution. Il suffit, pour cela, de poursuivre l'oeuvre déjà accomplie dans le domaine de l'enseignement technique et professionnel, en profitant de l'expérience acquise et en s'inspirant de l'effort parallèle qui se.développe, sur une vaste échelle, dans la Métropole.

L'orientation qui est naturellement donnée à l'enseignement primaire algérien, dans les écoles destinées aux Français-Musulmans, est, à ce point de vue, très heureuse, puisque l'enseignement général va de pair avec l'enseignement pratique, agricole ou manuel.

Le plan de scolarisation, dont l'exécution est en cours, a prévu que toute école nouvelle comprendrait un ou plusieurs ateliers pour les garçons, comme une ou plusieurs salles d'enseignement ménager, pour les filles.

L'enseignement agricole, donné dans les écoles primaires par des maîtres qui ont reçu une formation spéciale dans les écoles normales d'instituteurs, est conçu d'une manière essentiellement pratique. Tandis qu'il s'efforce de donner une bonne formation agricole de base aux jeunes élèves auxquels il est destiné, il touche les adultes par des cours théoriques et pratiques et lutte à la fois contre la routine du cultivateur et le dédain de certains intellectuels musulmans, à l'endroit des travaux des champs.

L'apprentissage industriel se poursuit en Algérie dans les sections de métiers annexées aux collèges techniques d'Alger et de Constantine, à l'École d'apprentissage de Bône, dans les sections techniques des Collèges Modernes de Batna et d'Orléans- ville, dans les écoles autonomes d'apprentissage qui fontionnent à Alger, Philippeville et Tébessa, dans les cours de formation professionnelle et de perfectionnement du soir organisés à Alger par la Société d'enseignement professionnel, à Constantine, par le Comité de patronage des apprentis, à Oran, par l'Association des cours industriels, à Sidi-Bel-Abbès, enfin, par les Cours Industriels.

A cette énumération, il faut ajouter les cours complémentaires d'enseignement professionnel des écoles de Français-Musulmans, dont le plus important est celui de
Tlemcen, les centres d'apprentissage qui existent dans certains centres ruraux et aussi le centre de formation du bâtiment à Alger et les centres ruraux qui relèvent de la Direction des Réformes.

La diversité de ces cours montre que l'enseignement professionnel algérien s'est développé dans une longue période, sous l'impulsion de l'État, des collectivités locales, des groupements industriels et même des particuliers. Une étroite coordination de tous ces efforts doit assurer une utilisation toujours plus complète des compétences, des moyens financiers et de l'outillage.

Le groupement des organisations d'enseignement professionnel d'Oran, par exemple, poursuivi par une entente de l'autorité académique, de la Municipalité et de l'Association des Cours Professionnels, organisme privé d'enseignement technique, répond à ces nécessités d'une organisation rationnelle.

L'enseignement donné à l'Institut Industriel de Maison-Carrée, à l'École Coloniale d'Industrie de Dellys et dans les collèges techniques d'Alger et de Constantine, forme des techniciens instruits, susceptibles de devenir de bons agents de maîtrise. Il faut ajouter à ces établissements la nouvelle Ecole Nationale Professionnelle de l'Air, destinée à former les apprentis industriels de l'Air.

A brève échéance, un collège technique à Bône, provenant de la transformation de l'École d'apprentissage, doit compléter cet ensemble ainsi qu'un collège technique à Oran, pour répondre aux besoins de deux grands centres industriels.

Institut industriel de Maison-Carrée, atelier des métaux.
Institut industriel de Maison-Carrée, atelier des métaux.

Enfin, il est possible de créer à Alger, avec le concours des professeurs de la Faculté des Sciences et des ingénieurs du Corps des Mines et des Ponts et Chaussées qui y résident, une école d'ingénieurs qul disposerait des ateliers de l'Institut Industriel de Maison-Carrée et du Laboratoire de physique industrielle de la Faculté des Sciences La formation donnée aux futurs ingénieurs ne serait pas trop étroitement spécialisée pour satisfaire aux besoins d'une industrie jeune; cependant, la dernière année, élèves pourraient être orientés vers la mécanique, l'électricité ou les travaux publics.

Le développement de l'enseignement technique et professionnel en Algérie, comme dans toute l'Afrique du Nord, n'est pas seulement un problème d'organisation administrative, financière et matérielle. C'est aussi, essentiellement, un problème psychologique. Il faut vaincre la répugnance des Français-Musulmans, qui ne diffèrent pas en celà de certains Français de la Métropole, pour les études qui ne sont pas exclusivement théoriques et abstraites.

La culture technique doit répondre à une certaine conception de l'homme moderne, en qui la spéculation doit rejoindre l'action et l'esprit, la matière. Mais c'est là tout le problème qui se pose aujourd'hui à notre Université.

Charles BRUNOLD.