Ghardaïa : école musulmane de gravure
sur cuivre
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Le plan d'équipement et d'industrialisation, qui doit régir
l'économie algérienne dans les années à venir,
s'efforcera, par un accroissement et une valorisation des produits du
sol, du sous-sol et de la mer, d'améliorer le niveau de vie de
chaque habitant et d'assurer la subsistance d'une population de huit millions
d'âmes qui s'accroît chaque année
Le développement de ce plan posera les mêmes problèmes
en Algérie et dans la Métropole; celui des ressources financières,
celui des matières premières, celui de l'équipement
industriel, et enfin celui de la constitution de la main-d'oeuvre : recrutement,
qualification et formation progressive, suivant les besoins que fera apparaître
le développement même de l'industrialisation.
Si l'Algérie ne peut se passer de la Métropole pour la formation
des ingénieurs à qui appartiendra la conception et la direction
générale de l'effort à accomplir, elle devra, de
plus en plus, s'efforcer de trouver chez elle tous les techniciens qui
auront la charge des réalisations envisagées : ouvriers
qualifiés, contremaîtres, conducteurs de travaux et même,
dans une certaine mesure, ingénieurs d'exécution. Il suffit,
pour cela, de poursuivre l'oeuvre déjà accomplie dans le
domaine de l'enseignement technique et professionnel, en profitant de
l'expérience acquise et en s'inspirant de l'effort parallèle
qui se.développe, sur une vaste échelle, dans la Métropole.
L'orientation qui est naturellement donnée à l'enseignement
primaire algérien, dans les écoles destinées aux
Français-Musulmans, est, à ce point de vue, très
heureuse, puisque l'enseignement général va de pair avec
l'enseignement pratique, agricole ou manuel.
Le plan de scolarisation, dont l'exécution est en cours, a prévu
que toute école nouvelle comprendrait un ou plusieurs ateliers
pour les garçons, comme une ou plusieurs salles d'enseignement
ménager, pour les filles.
L'enseignement agricole, donné dans les écoles primaires
par des maîtres qui ont reçu une formation spéciale
dans les écoles normales d'instituteurs, est conçu d'une
manière essentiellement pratique. Tandis qu'il s'efforce de donner
une bonne formation agricole de base aux jeunes élèves auxquels
il est destiné, il touche les adultes par des cours théoriques
et pratiques et lutte à la fois contre la routine du cultivateur
et le dédain de certains intellectuels musulmans, à l'endroit
des travaux des champs.
L'apprentissage industriel se poursuit en Algérie dans les sections
de métiers annexées aux collèges techniques d'Alger
et de Constantine, à l'École d'apprentissage de Bône,
dans les sections techniques des Collèges Modernes de Batna et
d'Orléans- ville, dans les écoles autonomes d'apprentissage
qui fontionnent à Alger, Philippeville et Tébessa, dans
les cours de formation professionnelle et de perfectionnement du soir
organisés à Alger par la Société d'enseignement
professionnel, à Constantine, par le Comité de patronage
des apprentis, à Oran, par l'Association des cours industriels,
à Sidi-Bel-Abbès, enfin, par les Cours Industriels.
A cette énumération, il faut ajouter les cours complémentaires
d'enseignement professionnel des écoles de Français-Musulmans,
dont le plus important est celui de Tlemcen,
les centres d'apprentissage qui existent dans certains centres ruraux
et aussi le centre de formation du bâtiment à Alger et les
centres ruraux qui relèvent de la Direction des Réformes.
La diversité de ces cours montre que l'enseignement professionnel
algérien s'est développé dans une longue période,
sous l'impulsion de l'État, des collectivités locales, des
groupements industriels et même des particuliers. Une étroite
coordination de tous ces efforts doit assurer une utilisation toujours
plus complète des compétences, des moyens financiers et
de l'outillage.
Le groupement des organisations d'enseignement professionnel d'Oran, par
exemple, poursuivi par une entente de l'autorité académique,
de la Municipalité et de l'Association des Cours Professionnels,
organisme privé d'enseignement technique, répond à
ces nécessités d'une organisation rationnelle.
L'enseignement donné à l'Institut
Industriel de Maison-Carrée, à l'École
Coloniale d'Industrie de Dellys et dans les collèges
techniques d'Alger et de Constantine, forme des techniciens
instruits, susceptibles de devenir de bons agents de maîtrise. Il
faut ajouter à ces établissements la nouvelle Ecole
Nationale Professionnelle de l'Air, destinée à
former les apprentis industriels de l'Air.
A brève échéance, un collège technique à
Bône, provenant de la transformation de l'École d'apprentissage,
doit compléter cet ensemble ainsi qu'un collège technique
à Oran, pour répondre aux besoins de deux grands centres
industriels.
Institut industriel de Maison-Carrée, atelier
des métaux.
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Enfin, il est possible de créer à Alger,
avec le concours des professeurs de la Faculté des Sciences et
des ingénieurs du Corps des Mines et des Ponts et Chaussées
qui y résident, une école d'ingénieurs qul disposerait
des ateliers de l'Institut Industriel de Maison-Carrée
et du Laboratoire de physique industrielle de la Faculté des Sciences
La formation donnée aux futurs ingénieurs ne serait pas
trop étroitement spécialisée pour satisfaire aux
besoins d'une industrie jeune; cependant, la dernière année,
élèves pourraient être orientés vers la mécanique,
l'électricité ou les travaux publics.
Le développement de l'enseignement technique et professionnel en
Algérie, comme dans toute l'Afrique du Nord, n'est pas seulement
un problème d'organisation administrative, financière et
matérielle. C'est aussi, essentiellement, un problème psychologique.
Il faut vaincre la répugnance des Français-Musulmans, qui
ne diffèrent pas en celà de certains Français de
la Métropole, pour les études qui ne sont pas exclusivement
théoriques et abstraites.
La culture technique doit répondre à une certaine conception
de l'homme moderne, en qui la spéculation doit rejoindre l'action
et l'esprit, la matière. Mais c'est là tout le problème
qui se pose aujourd'hui à notre Université.
Charles BRUNOLD.
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