MUSÉE AUGERIAS
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LES LIONS EN ALGÉRIE
Le dernier fauve fut abattu en 1893, près de Batna...
...ET SON SQUELETTE A ÉTÉ CONSERVÉ PRÉCIEUSEMENT
Le colonel en retraite Augiéras,
ancien inspecteur général des chasses en Afrique, qui
réside à quatre kilomètres dEl-Goléa
dans son musée de « Buffalo-Bordj » nous a adressé
une note documentaire sur les « lionsons en Algérie
». L'intérêt pittoresque qu'elle présente
nous incite a la publier.
Les chasseurs algériens, qui veulent autre chose que du menu
gibier, ne sont plus très favorisés. Ils
doivent se contenter de sangliers, accidentellement dune hyène.
Dans le Sud, il y a encore des mouflons dans les montagnes, des gazelles
dans les plaines ou les dunes ; mais les antilopes de grandes espèces
(bubales,oryx et addax) ont disparu, de même que les autruches.
Les fauves ? Voilà la grande affaire. Il y a bien encore en Afrique
du Nord quelques panthères, dailleurs beaucoup plus grandes
que celles du Soudan, mais si rares. Le temps du chasseur Bonbonnel
nest plus...
Et les lions ? Le lion de lAtlas... et le lion du désert,
qui na jamais existé que dans limagination des fantaisistes
?
Voici quelques renseignements qui intéresseront certainement
les chasseurs et qui sont sans doute bien ignorés maintenant.
Dans les années qui suivirent larrivée des Français
en Algérie et sur tout leur entrée dans la région
de Constantine, on en parla beaucoup.
Le lion dAlgérie était un animal de forêt
et non de brousse comme celui du Soudan. Il était très
redouté des Indigènes, alors que les noirs de lAfrique
tropicale craignent assez peu les lions, peut-être parce que la
faune sauvage de lAlgérie était pauvre, les grands
fauves s'attaquaient aux troupeaux domestiques, pénétrant
hardiment, la nuit, dans les douars arabes, peut-être aussi, parce
quils étaient réellement plus redoutables. Le spahi
Jules Gérard chasseur de fauves
Quoi quil en soit, le spahi français Jules Gérard
se lança courageusement à leur poursuite et, le
8 juillet 1844, tua son premier lion, la nuit, dans la région
de Guelma, et le second, à la Mahouna, peu après. En 1860,
devenu officier, il avait déjà tué une trentaine
de lions, tous dans la province de
Constantine. A ce moment, comme les lions se raréfiaient (les
indigènes en avaient tué un certain nombre, généralement
en battues et au prix de quelques vies humaines), Jules Gérard
partit pour le pays même des lions, Sierra-Leone, en Afrique occidentale.
Mais, en 1864, il disparut. noyé dans une rivière, ou,
plus vraisemblablement, assassiné par un ancien spahi algérien
à son service (dapres les Anglais). Ce fut un grand chasseur,
mais un narrateur fantaisiste qui dramatisait un peu
trop. Quand on a chassé soi-même les récits de Jules
Gérard font parfois sourire, quoique la chasse au lion soit réellement
très dangereuse.
Je nen veux comme preuve que le nombre des victimes, dont jai
connu plusieurs ; la dernière est
Vincent, chasseur expérimenté, tué par un lion
au Tchad en 1950.
On ne connaît pas le chiffre exact des lions qui furent tués
en Algérie, soit par des Européens, soit par des indigènes,
au fusil, au piège ou au poison, mais on sait quon sattacha
à la destruction du grand fauve et quon réussit.
Voici cependant quelques précisions :
Daprès une statistique on en supprima 174 en sept ans,
de 1873 à 1879 (une moyenne de vingt-cinq par année),
puis cela diminua rapidement : seize en 1880, six en1881, quatre en
1882, deux en 1883, aucun pendant six ans, de 1884 à 1889. On
crut les lions exterminés, mais, en 1890, une lionne fut tuée
près de Bône et, lannée suivante (1891), ce
fut un lion à Babouck, dans la Kroumirie de Tunisie tout près
de la frontière. Était-ce la fin ?
Pas encore, car deux ans plus tard (1893), une lionne fut encore abattue
au nord de lAurès, pas loin de Batna (sauf erreur, son
squelette est conservé au laboratoire de géologie de la
Faculté des sciences dAlger).
Depuis lors, plus rien. Le lion dAlgérie nexiste
plus. Les sportifs le regretteront. Et le lion n'était
pas sans utilité : cétait le meilleur des gardes
forestiers. Lui disparu, on dévasta les forêts...
Voilà, ce que je sais du lion dAlgérie et, plus
généralement, de lAfrique du Nord. Il était
cantonné
dans les régions forestières de lEst, descendant
dans les plaines la nuit pour attaquer les douars. En existait-il au
Maroc ? Je lignore, quoiquon me lait affirmé
assez récemment.