Telemly
Ecole nationale des Beaux-Arts - juin 1959
Algéria et nAfrique du nord illustrée - Noel 1954- n°39
OFALAC
(collection perso.)

mise sur site : déc.

2020

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L'ALGERIE ne se contente pas de travailler sans relâche à son épanouissement économique, elle sait, au milieu de tous les problèmes d'ordre matériel qui se posent en ce pays et appellent des solutions urgentes, réserver à l'esprit la place qui lui revient et sans laquelle toute oeuvre de civilisation serait incomplète.


La façade principale de la nouvelle Ecole nationale des beaux-arts d'Alger.



Cette activité culturelle se manifeste sous maintes formes :

Patiemment poursuivies par des savants passionnés, les recherches archéologiques exhument chaque jour de nouveaux vestiges d'un passé riche de gloire et d'art ; les musées, dont certains peuvent rivaliser avec les meilleurs établissements similaires de la France et de l'Etranger, s'attachent à développer leurs collections ; de multiples expositions révèlent chaque année à un public de plus en plus averti des artistes de talent qui, pour beaucoup, ont non seulement trouvé leur inspiration en Algérie mais encore y ont été formés.

Enfin, en dehors de la Villa Abd-el-Tif qui accueille des artistes déjà reconnus en leur donnant les moyens d'oeuvrer sans souci des contingences matérielles, il est une institution qui joue un rôle de premier plan dans l'essor artistique de l'Algérie : c'est l'Ecole nationale des beaux-arts d'Alger.

La façade principale de la nouvelle Ecole nationale des beaux-arts d'Alger.
Cour d'honneur et façade nord



Cette école, devenue nationale par décret du 8 novembre 1881, succédait aux cours de beaux-arts qu'avait fondés, quelques années auparavant, la municipalité d'Alger, et comptait, dès 1887, deux cent quarante-six élèves. Au cours des ans, elle a formé des artistes de talent dont beaucoup ont accompli des carrières brillantes.


Vue sur Alger, depuis une galerie de la nouvelle Ecole nationale des beaux-arts.

Une aile du bâtiment, vue à travers la grille de clôture.
Une aile du bâtiment, vue à travers la grille de clôture.



Durant l'année scolaire 1952-1953, 308 élèves (132 filles et 176 garçons) ont suivi ses leçons (données par 11 professeurs titulaires et 6 chargés de cours) et plusieurs d'entre eux ont été admis à l'Ecole des beaux-arts de Paris 14 dans la section " d'architecture ", 20 dans la sec-tion " sculpture " et 91 dans la section " peinture ") .



A la page précédente, de haut en bas : le cours d'anatomie et de perspective (M. Fredouille), le cours de dessin d'ornement (M. Chevallier), le cours de dessin ronde-bosse (Mme du Pac).

A la page précédente, de haut en bas : le cours d'anatomie et de perspective (M. Fredouille), le cours de dessin d'ornement (M. Chevallier), le cours de dessin ronde-bosse (Mme du Pac).
A gauche, de haut en bas : le cours d'anatomie et de perspective (M. Fredouille***), le cours de dessin d'ornement (M. Chevallier), le cours de dessin ronde-bosse (Mme du Pac).

Ci-dessus, de haut en bas : l'atelier de peinture (M. Fernez), l'atelier de modelage et l'atelier de ronde-bosse et architecture (M. Greck).

Reportage photographique
d'André GARCIA

*** M.Fredouille, prof aussi au lycée Ben-Aknoun



Ces quelques chiffres témoignent du dynamisme de l'Ecole dont l'enseignement se développe constamment. A côté des ateliers de peinture et de sculpture, en plein essor depuis 1947, il existe, depuis 1948, une section de gravure et, de plus en plus, se manifeste l'intérêt que l'établissement porte aux arts décoratifs.

Enfin, la section d'architecture a pris une importance accrue depuis qu'elle constitue une " Ecole régionale d'architecture " dont l'enseignement, analogue à celui de Paris, forme des élèves qui ont d'ores et déjà obtenu d'excellents résultats, les projets de certains d'entre eux ayant été particulièrement appréciés par les jurys parisiens auxquels on les avait soumis.
Mais, au moment où son développement s'affirmait, l'Ecole ne disposait malheureusement que de locaux exigus et délabrés, dont la vétusté et la notoire insuffisance imposaient le remplacement.

Les événements s'y opposèrent longtemps mais l'on y pensait toujours. En 1946, était acquis au Télemly le terrain de la villa Séverin Houge, d'une surface de 10.572 m2. Des différents projets mis alors à l'étude pour la construction de l'Ecole des beaux-arts et d'un musée des Antiquités destiné à se substituer à l'actuel musée Gsell, ce fut celui de MM. Claro et Darbeda qui fut retenu. L'édification du musée n'est pas encore commencée ; par contre, l'Ecole des beaux-arts, dont les travaux débutèrent fin 1950, est ouverte depuis la rentrée d'octobre et reçoit ses élèves dans de vastes salles claires s'ouvrant sur le grandiose panorama de la ville, du port et de la baie d'Alger.

Le site dans lequel elle s'implante est fort heureusement placé à flanc de coteau : partout, de la cour d'honneur à la terrasse solarium, on découvre, en une vue quasi aérienne, au-dessus des massifs et des frondaisons du parc de Galland, les maisons d'Alger s'échelonnant sur le port et sur la mer ; partout de larges baies vitrées laissent pénétrer la lumière à flots.

De sobre facture, la façade de l'Ecole intègre harmonieusement ses lignes nettes dans le décor de verdure qui l'entoure.

Les bâtiments, essentiellement répartis en deux ailes longitudinales et une aile transversale, forment un U vertical.

Un grand escalier conduit à a cour d'honneur en terrasse : encadrée de l'avancée des deux ailes, elle est de belles proportions et précède une élégante galerie s'ouvrant de l'autre côté sur deux petites cours (impluvium latin), que limite la colonnade classique d'un cryptoportique. L'ensemble n'est pas sans rappeler l'atrium de quelque riche maison de l'Antiquité.

L'aile transversale ne renferme qu'une salle de moulages et une salle d'exposition, les ateliers et salles de travail étant tous distribués dans deux ailes longitudinales.

Dans l'aile nord, on trouve au rez-de-chaussée, un atelier de sculpture très haut de plafond et comportant une soupente où prennent place les modèles vivants ; un atelier de céramique et ses fours ; au premier au second et au troisième étages, deux vastes ateliers de dessin " ronde bosse ", un atelier de décoration et un atelier de gravure sur métal. C'est également dans ce corps de bâtiment que sont installés le bureau du directeur et les services administratifs qui donnent sur la façade ouest dans une courette agrémentée de deux parterres de fleurs.

L'aile sud fait pendant à l'aile nord. Elle abrite, au rez-de-chaussée, un vaste atelier à soupente affecté au cours de dessin d'architecture, mais qui, un jour, sera peut-être destiné à recevoir un cours d'art monumental ; un atelier de gravure sur bois et un autre de reliure. Les ateliers d'architecture se partagent le premier et le second étages où sont également amé-nagées, au premier, deux salles de cours théoriques (mathématiques, physique, chimie, anatomie, perspective, histoire de l'art), au second, cinq loges dans lesquelles les candidats peuvent être isolés au moment des examens et concours. Enfin, au troisième, l'atelier de peinture (modèle vivant) a été logé dans une salle très haute, plus large (1 3 m.) que les autres (9 m.).

Chaque aile dispose d'un ascenseur et, à chaque étage, de deux blocs sanitaires. Les sous-sols comportent de grands débarras et remises.

Dans sa sécheresse et sa brièveté, cette énumération permet peut-être de se faire une idée de la judicieuse répartition des locaux que l'on a mis à la disposition des professeurs et des élèves ; mais elle n'évoque sans doute qu'imparfaitement l'agrément que les uns et les autres éprouvent sûrement à y travailler.

Dans tous ces ateliers, peuplés de blocs de glaise déjà entamés par l'ébauchoir, de chevalets couverts d'esquisses, de paysages, de portraits, de tables à dessins jonchées d'épures, d'études et de maquettes, la lumière règne en maîtresse cependant que par-tout, à travers les fenêtres et les colonnes des portiques, s'inscrit la beauté d'un décor aux larges horizons.

Un tel lieu paraît propice à la méditation et au travail désintéressé. Souhaitons qu'il inspire les jeunes gens qui demain viendront y acquérir les rudiments de l'un de ces beaux-arts pour lesquels ils se sentent vocation.

R. O