Alger, Algérie : documents algériens
Série économique

L'usine hydro-électrique du Hamiz
mise sur site le 22-1-2011
* Document n° 15 de la série : Économique - Paru le 10 juin 1946 - Rubrique ELECTRIFICATION

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L'usine hydro-électrique du Hamiz


Le 14 mai 1946, M. Yves Chataigneau, Gouverneur Général de l'Algérie, inaugurait l'usine hydroélectrique construite au pied du barrage du Hamiz.

En mettant en marche les deux groupes de turboalternateurs, le Gouverneur Général a souligné que cette inauguration marquait une date dans l'industrialisation de l'Algérie. C'est en effet l'une des premières réalisations du plan qui prévoit un double usage des importants barrages installés dans les trois départements algériens.

En 1938, sept centrales à vapeur fournissaient à l'Algérie 288 millions de kwh. Sur ce total, les quelques centrales hydrauliques, non régularisées et au fil de l'eau, ne produisaient en moyenne que 50 millions de kwh.

SITUATION ACTUELLE DES TRAVAUX

Afin de hâter l'exploitation des ressources hydro-électriques de l'Algérie, l'équipement des usines plantées au pied des barrages d'irrigation fut d'abord décidé. Leurs noms sont aujourd'hui familiers dans le pays et tout le monde connaît les barrages, déjà complétés d'usines ou qui le seront prochainement, du Ghrib, de l'Oued-Fodda, de Bakhadda, de Bou-Hanifia, de Beni-Bandel, du Hamiz, du Ksob et des Zardezas. Des établissements similaires, déjà en construction ou encore en projet, situés sur les réseaux d'irrigation ou sur des cours d'eau non régularisés, viendront accroître, les années prochaines, le potentiel économique de l'Algérie. Il s'agit respectivement de ceux de Perrégaux, Boghni-Aval, Michelet, Maillot-Aval, Chabet-Salad et Aïn-Témouchent.

L'ensemble de ces usines mettra à la disposition de la colonie 16 millions de kwh. hydrauliques par an.

Parmi les gros ouvrages de la nouvelle tranche de travaux d'après-guerre, les plus importants sont ceux de l'aménagement de l'Oued-Agrioun, près de Kerrata, et ceux de l'Oued-Djendjen, près de ZiamaMansouria. En voici les particularités :

Chute de l'Oued Agrioun
Chute de l'Oued D jendjen
Hauteur brute de chute : 380 m
Hauteur brute de chute : 670 m
Puissance en kwh. : 60.000
Puissance en kwh : 60.000
Production annuelle : 110.000 kwh.
Production annuelle : 140.000 kwh.

Reliés à Alger et à Constantine par des lignes à 150.000 volts, ces ouvrages auront permis d'établir la grande artère transversale à haute tension dont l'absence s'est avérée, au cours des dernières années, si préjudiciable à l'Algérie.

Parallèlement à cet équipement, les travaux d'électrification rurale actuellement en cours mettront la force motrice à la disposition des villages et des fermes.

Le tableau ci-après montre l'état actuel des réalisations prévues dans le vaste programme du rééquipement hydro-électrique :

programme hydro-electrique
programme hydro-electrique

La construction de ,l'ensemble de ces usines portera, vers 1950, à environ 750 millions de kW/h la production algérienne d'électricité, fournie pour 60 % environ par l'énergie hydraulique et pour 1/3 par l'énergie thermique, provenant de trois centrales sélectionnées.

L'USINE HYDROÉLECTRIQUE DU HAMIZ

L'édification de cette usine, au pied du barrage du Hamiz, en tête du réseau d'irrigation, fait partie du programme qui vient d'être esquissé. Elle fonctionne comme un ouvrage de rupture de charge entre le barrage et le réseau des conduites d'irrigation.

LE BARRAGE DU HAMIZ.

Barrage-poids en maçonnerie, il fut édifié en 1879, à 5 km. au Sud du village du Fondouk, pour irriguer la zone Sud-est de la Mitidja. Son profil étant insuffisant, l'expérience malheureuse du barrage de Perrégaux a montré l'impérieuse nécessité de le renforcer. Il a donc été surélevé de 7 mètres de manière à augmenter, tout en renforçant son profil, sa capacité et à développer son réseau d'irrigations.

Ces travaux de renforcement furent effectués en 1934 et 1936 sous la forme d'un élargissement en béton à l'amont du massif ancien en maçonnerie, élargissement qui avait l'avantage d'assurer plus sûrement que par l'aval la solidarité des anciennes et nouvelles maçonneries. Leur exécution n'alla pas toutefois sans de sérieuses difficultés, en raison de la nécessité absolue de ne pas interrompre les irrigations, ce qui ne permit de procéder aux travaux qu'entre le 15 octobre et le 15 février, période de vidange du barrage. Après les préparatifs entrepris durant l'hiver 1933-1934, les fondations et la mise en œuvre des 50.000 m3 du nouveau massif furent menées à bien grâce à de belles installations de bétonnage, au cours de l'hiver 1934-1935. Mais, comme il fallut commencer le remplissage avant l'achèvement du massif, ce fut une véritable course de vitesse entre la montée des bétons et le niveau de l'eau.

Le déversoir ancien ayant été ruiné par un éboulement de la montagne, il a fallu en refaire un autre en puits et galerie, d'un débit de 650 m3 à la seconde.

Dans son état actuel, le barrage, haut de 45 mètres, a une capacité de 23 millions de m3. Grâce à des conduites forcées empêchant toutes pertes et tous gaspillages, elle est suffisante pour irriguer effectivement environ 16.000 hectares, depuis Rivet jusqu'à Reghaïa et le Cap Matifou, dans un périmètre classé de 18.000 hectares.

PRÉCISONS D'ORDRE TECHNIQUE

La chute brute dont on dispose actuellement pour alimenter l'usine varie entre 41 et 16 mètres.

L'exploitation de l'usine est fonction des besoins de l'irrigation, le débit étant réglé d'après les demandes des irriguants. En dehors des périodes d'arrosage, elle est occupée à turbiner les eaux excédentaires.

Reliée au réseau distributeur d'énergie électrique à haute tension de la " Société Algérienne d'Éclairage et de Force ", elle est équipée de deux groupes turbo - alternateurs, dont chaque turbine développe 1.190 CV. La puissance apparente de chacun des alternateurs est de 1.350 kwh.
La production annuelle de l'usine sera en moyenne de 2.500.000 kwh., sous une puissance maxima de 1.650 kwh ; elle atteindra après une nouvelle surélévation du barrage, une moyenne de 3.500.000 kwh.

Produite pendant l'été, l'énergie de cette usine constitue un appoint d'autant plus précieux, qu'au cours de la même saison le rendement des usines de Kabylie, qui fonctionnent au fil de l'eau, va en décroissant jusqu'à devenir nul à partir de septembre. C'est autant d'énergie en moins à demander aux usines thermiques d'Alger, et l'économie annuelle ainsi réalisée sera de 1.800 tonnes de charbon environ.

Autre avantage. L'usine a été aménagée de manière à marcher automatiquement, ce qui permet de réduire à un seul le nombre des agents d'exploitation. D'où une économie appréciable de main- œuvre.

Notons à ce propos que les petites usines hydro-électriques sont bien plus onéreuses que les grandes : leur prix de construction est supérieur, puisque la surface couverte n'est pas à proportion de la puissance et que tous les relais, les instruments de sécurité et de mesure sont quasi indépendants de la puissance des machines ; d'autre part, les charges de personnel s'augmentent des capitaux investis dans des maisons d'habitation.

FONCTIONNEMENT AUTOMATIQUE.

Comment fonctionne cet automatisme ? La commande peut s'exercer de deux façons :

---- 1° Au fil des irrigations, c'est-à-dire en turbinant sans arrêté la quantité d'eau qui est strictement nécessaire pour les irrigations. Dans cette marche, les groupes sont asservis à des flotteurs installés dans la chambre de restitution.

---- 2° En marche prédéterminée. Le tableau de la Centrale comporte à cet effet un programmètre sur lequel s'inscrivent à l'avance les puissances que l'on désire atteindre aux différentes heures de la journée, le réglage de ces puissances se faisant d'une manière automatique suivant l'horaire du programme. Ce type de marche est adopté quand il y a excès d'eau, soit pendant les irrigations (et, dans ce cas, le débit lâché est toujours supérieur au débit nécessaire), soit lors de leur arrêt.

L'automatisme de la Centrale est poussé au point qu'il suffit d'appuyer sur un seul bouton pour mettre en marche toute l'usine. Si des incidents surviennent, les manœuvres de correction correspondantes se déclenchent d'elles-mêmes.

A u cas où le disjoncteur reliant les barres au réseau vient à rompre le contact, il réenclenche trois fois de suite, et, au troisième insuccès, reste ouvert. Les autres incidents provoquent soit la marche à vide de la Centrale, soit son blocage à l'arrêt. Automatiquement, chaque perturbation déclenche un puissant signal sonore, accompagné d'un signal lumineux sur le tableau principal de l'usine, ainsi que sur deux autres tableaux simplifiés dont l'un est placé dans le bureau du surveillant et l'autre dans son appartement.

Le montage d'une telle commande automatique est long et exige un réglage minutieux. Celui de la Centrale du Hamiz ne pourra être achevé, étant donné les difficultés actuelles d'approvisionnement et de transport, avant le mois de juillet prochain.

Afin de ne pas perdre l'eau de la campagne d'irrigation de 1946, il a été décidé de mettre dès maintenant en service, avec une commande provisoire manuelle, le premier groupe des turboalternateurs dont le montage vient d'être terminé.

C'est ce groupe que M. Yves Chataigneau, Gouverneur Général de l'Algérie, a, lors de la récente inauguration de l'usine du Hamiz, mis en marche et couplé sur le réseau.