| Le cadre juridiqueet le fonctionnement du Budget Algérien
 Produit d'une série de textes dont 
        les variations suivent l'élévation politique progressive 
        et l'évolution économique du pays, le régime financier 
        actuel de l'Algérie présente juridiquement un caractère 
        absolument original.
 En effet, si par son contenu et sa forme le budget de l'Algérie 
        s'apparente aux budgets de l'État et des départements métropolitains, 
        sa procédure d'établissement et d'exécution présente 
        des caractères particuliers voisins de ceux des budgets coloniaux.
 
 DROIT BUDGÉTAIRE ALGÉRIEN
 
 La dernière modification apportée au régime financier 
        algérien par l'ordonnance du 19 septembre 1945 est essentiellement 
        d'ordre politique puisqu'elle met fin au mandat des Délégations 
        Financières et du Conseil Supérieur du Gouvernement, par 
        la création d'une Assemblée financière issue des 
        conseils généraux. Administrativement cette ordonnance n'apporte 
        aucune modification essentielle au droit budgétaire de l'Algérie 
        et la charte des Franchises Algériennes reste toujours la loi du 
        19 décembre 1900 commentée par le décret du 16 janvier 
        1902.
 
 CONTENU DU BUDGET ALGÉRIEN
 
 Le budget de l'Algérie se présente, quant à son contenu, 
        comme un prolongement du budget d'État.
 
 Lorsqu'en 1901 en application de la loi du 19 décembre 1900 le 
        budget de l'Algérie a cessé d'être intégré 
        dans le budget de l'État, il a repris à son compte la quasi 
        totalité des recettes et des dépenses perçues ou 
        exécutées dans la Métropole pour le compte de l'État.
 
 Actuellement, l'Algérie encaisse la totalité des recettes 
        algériennes, la Métropole ne percevant à son profit 
        que les sommes provenant de la vente des monopoles (poudre, tabacs, alcool) 
        de l'aliénation des biens de son domaine ou de reversement de fonds.
 
 En matière de dépenses, l'Algérie a la charge exclusive 
        de la totalité des Services Civils fonctionnant sur son territoire 
        et placés sous l'autorité unique du Gouverneur Général 
        ainsi que des services de la gendarmerie. Les dépenses de l'armée, 
        de la marine et de l'aviation sont restées à la charge de 
        la Métropole en raison de leur caractère de dépenses 
        de souveraineté d'une part et aussi parce que les seules ressources 
        perçues en Algérie, eussent été insuffisantes 
        pour les couvrir. L'Algérie participe cependant à ces charges 
        par le versement d'une " contribution militaire " fixée 
        en, principe à 6 % du montant des recettes ordinaires. ,
 
 Cette contribution qui fut largement augmentée après le 
        débarquement allié pour atteindre 600 millions en 1944 et 
        1945 vient d'être rétrocédée à l'Algérie 
        par la Métropole afin de doter ainsi le " fonds d'équipement 
        et de réformes musulmanes.".
 
 FORME DU BUDGET ALGÉRIEN
 
 Si le contenu du budget de l'Algérie en fait un budget d'État, 
        sa forme le rapproche essentielles ment des budgets départementaux. 
        Comme dans ceux-ci, on distingue dans le budget deux parties : budget 
        ordinaire, budget extraordinaire.
 
 Ces deux mêmes divisions, ordinaire et extraordinaire se retrouvent 
        dans les budgets annexes destinés à grouper en un document 
        spécial les recettes et les dépenses de services à 
        caractère industriel autant qu'administratif, qu'il a paru utile 
        d'individualiser (postes, services de l'hydraulique, imprimerie officielle).
 
 Le budget ordinaire est divisé 
        en sections correspondant aux grands services administratifs du Gouvernement 
        Général, les sections en chapitres, le chapitre étant 
        l'unité budgétaire qui doit faire l'objet d'un vote distinct. 
        Ce budget alimenté par le produit des impôts et autres revenus 
        annuels comprend l'ensemble des dépenses normales et permanentes 
        de la Colonie ; ses excédents de recettes sont versés dans 
        une caisse de réserve.
 
 Les dépenses de ce budget sont groupées en dépenses 
        obligatoires et dépenses facultatives.
 
 Les dépenses obligatoires, (dépenses des services 
        civils qui relèvent de l'État, dépenses de la Gendarmerie, 
        traitements des fonctionnaires mis à la disposition de l'Algérie 
        par la Métropole) ne sont obligatoires que dans la limite des crédits 
        alloués au budget précédent. Au cas où l'Assemblée 
        Financière refuserait d'y procéder (le fait s'est rarement 
        produit du temps des Délégations Financières) l'inscription 
        des dépenses obligatoires peut être réalisée 
        d'office par décret en conseil d'État et les recettes nécessaires 
        à leur couverture instituées par le même texte.
 
 L'inscription des dépenses facultatives (relèvement de crédit, 
        dépenses de toutes natures autres que les dépenses obligatoires) 
        dépend entièrement de l'Assemblée Financière 
        qui a toute latitude pour les accorder, les réduire ou les refuser.
 
 Actuellement, en raison des nombreuses extensions ou réorganisations 
        des services et de l'importance prise par le budget de l'Algérie, 
        la distinction entre dépenses obligatoires et facultatives ne présente 
        plus un intérêt en rapport avec les complications qu'elle 
        entraîne.
 
 Le budget extraordinaire groupe les dépenses exceptionnelles et 
        non renouvelables et les programmes de grands travaux répartis 
        sur plusieurs années. Ses ressources sont essentiellement constituées 
        par le produit des emprunts. Les crédits de ce budget inutilisés 
        en fin d'année peuvent être reportés sur les années 
        suivantes afin d'assurer la continuité nécessaire à 
        l'exécution d'un plan d'équipement économique et 
        social.
 
 La forme générale du budget algérien s'adapte difficilement 
        à l'importance actuelle de celui-ci. Le maintien de certaines règles 
        applicables aux budgets départementaux (distinction entre dépenses 
        obligatoires et facultatives) marque la tutelle du Gouvernement suif le 
        budget algérien au même titre que l'intervention du Pouvoir 
        central dans l'établissement de ce budget.
 FORME DU BUDGET ALGÉRIEN ÉTABLISSEMENT 
        DU BUDGET
 L'Algérie étant une collectivité secondaire, l'établissement 
        de son budget fait l'objet d'une collaborationétroite entre l'administration 
        algérienne, l'Assemblée Financière et les autorités 
        de tutelle.
 
 Préparé par l'Administration Algérienne sous le contrôle 
        des Ministres de l'Intérieur et des Finances qui peuvent prescrire 
        au Gouverneur Général telle modification de ses propositions, 
        le budget de l'Algérie est voté par l'Assemblée Financière. 
        Les modalités de ce vote diffèrent suivant qu'il s'agit 
        de recettes ou de dépenses.
 
 En matière de recettes, les projets fiscaux font l'objet de " 
        décisions " de l'Assemblée, votées sur la proposition 
        du Gouverneur Général et sur le rapport de la Commission 
        des Finances. L'Assemblée en ce domaine parait ne disposer que 
        d'un droit d'amendement exclusif de toute initiative propre.
 En matière de dépenses l'action de l'Assemblée n'est 
        limitée que sur deux points : les dépenses obligatoires 
        ne peuvent être réduites, l'initiative des dépenses 
        de personnel inscrites dans chaque section à la 4" partie 
        du budget, appartient au Gouverneur Général, seul habilité 
        à en proposer l'augmentation.
 
 Pour tout ce qui concerne l'augmentation des dépenses obligatoires 
        autres que de personnel, la création, l'augmentation ou la diminution 
        des autres dépenses, l'Assemblée est pleinement souveraine.
 
 Toutefois, les amendements au projet du Gouverneur doivent émaner 
        de la Commission des Finances ou être présentés à 
        celle-ci avant la délibération en séance plénière 
        publique au moins par douze membres de l'Assemblée.
 
 PROCÉDURE D'APPROBATION DU BUDGET DE L'ALGÉRIE
 
 Le budget et les décisions fiscales issues des votes de l'Assemblée 
        sont transmis au Pouvoir central et ne deviennent exécutoires qu'après 
        leur approbation par décrets contresignés par les Ministres 
        de l'Intérieur et des Finances.
 
 Enfin, par une loi de finances annuelle, propre à l'Algérie, 
        le Parlement autorise la perception des impôts et revenus selon 
        les modalités fixées par les décisions de l'Assemblée 
        Algérienne et régulièrement homologuées par 
        décret.
 
 En principe, le Parlement n'a pas à connaître le budget voté 
        par l'Assemblée ; en fait, la loi de finances algérienne 
        lui offre l'occasion d'un débat sur l'Algérie et un droit 
        de regard sur l'emploi des recettes qu'il autorise.
 
 EXÉCUTION DU BUDGET
 
 Les modalités de l'exécution du budget sont tout à 
        fait propres à l'Algérie. La loi du 19 décembre 1900 
        n'a pas prévu la possibilité de modifier le budget en cours 
        d'année par l'apport d'un budget supplémentaire ou d'autorisations 
        spéciales ainsi que cela se pratique aux Conseils Généraux. 
        La rigidité d'un tel système étant incompatible avec 
        la rapidité des fluctuations économiques dès 1919 
        des autorisations d'avances ont été sollicitées du 
        Pouvoir Central. En outre, depuis 1939 une disposition de la loi de finances 
        annuellement prorogée autorise la rédaction en cours d'année 
        de budgets rectificatifs présentés à l'Assemblée 
        Financière au cours de sessions extraordinaires. Ces budgets rectificatifs 
        ne reprennent ni les crédits inutilisés au budget extraordinaire 
        dont le report est automatique, ni les excédents de recettes du 
        budget ordinaire qui sont versés dans une caisse de réserve.
 
 CAISSE DE RÉSERVE
 
 Institution spéciale à l'Algérie, cette caisse sert 
        de régulateur entre les bonnes et les mauvaises années, 
        précaution indispensable dans un pays essentiellement agricole 
        comme l'Algérie où le sort des budgets reste lié 
        aux résultats irréguliers des récoltes.
 
 La réglementation des prélèvements sur cette caisse 
        est très stricte. Si la caisse ne contient que 300 millions ou 
        moins, les prélèvements ne sont effectués que pour 
        le paiement des dettes exigibles, la couverture de déficits budgétaires, 
        ou la réparation urgente d'événements calamiteux. 
        Au-delà de 300 millions, les excédents de la Caisse de Réserve 
        peuvent être utilisés pour la dotation des programmes d'équipement 
        économique et social aux lieux et places de fond d'emprunts (budget 
        extraordinaire).
 
 En attendant leur emploi les fonds de cette Caisse peuvent être 
        investis en rentes ou en valeurs industrielles ou déposés 
        au Trésor Algérien.
 
 LE TRÉSOR ALGÉRIEN
 
 Les fonds propres de l'Algérie et ceux qui lui sont confiés 
        par les différentes sections administratives (départements, 
        communes) les collectivités publiques algériennes et mêmes 
        les particuliers à l'exclusion des dépôts des Caisses 
        d'Épargne) constituent depuis le 1er janvier 1943 un Trésor 
        Algérien distinct du Trésor public.
 
 Cette réforme récente dont la portée financière 
        a été considérable a parachevé la réforme 
        entreprise en 1900 pour doter l'Algérie d'un régime financier 
        cohérent digne de la maturité atteinte par la Colonie.
 
 Dans son ensemble le régime financier de l'Algérie, synthèse 
        lentement élaborée sous la tutelle de la Métropole 
        reste sous la dépendance étroite de celle-ci en ce qui concerne 
        sa forme, sa procédure d'Établissement et son contenu. L'initiative 
        de la colonie, conséquence directe de son évolution économique 
        et sociale particulièrement Sensible depuis 1939, apparaît 
        cependant très nettement dans les modalités de l'exécution 
        de son budget. La création du Trésor Algérien qui 
        allège les charges budgétaires de l'Algérie et lui 
        donne une plus grande liberté de manuvre en lui permettant 
        de créer et de doter des organismes économiques, a caractère 
        public, tels que les offices et les régies industrielles, a accru 
        en même temps ses responsabilités de gestion car les fluctuations 
        des disponibilités de ce Trésor traduisent fidèlement 
        les variations de la situation économique et financière 
        de la Colonie.
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