Alger, Algérie
: documents algériens
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-------------Dans
certaines oasis du Sahara Algérien, abondamment irriguées,
le paludisme a revêtu longtemps un caractère hyperendémique
net, malgré les mesures prises pour le combattre : parmi
celles-ci Ouargla a longtemps joui du triste privilège d'occuper
une place prépondérante.
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-------------Dans
certaines oasis du Sahara Algérien, abondamment irriguées,
le paludisme a revêtu longtemps un caractère hyperendémique
net, malgré les mesures prises pour le combattre : parmi celles-ci
Ouargla a longtemps joui du triste privilège d'occuper une place
prépondérante. L'OASIS D'OUARGLA -------------Ouargla, à 800 km au Sud-Est d'Alger, est la plus vaste oasis du Sahara Algérien et sa palmeraie, avec ses 700.000 palmiers, couvre plus de 14 km2. Dans cette palmeraie, outre le ksar d'Ouargla, se trouvent quatre autre ksour dont l'ensemble constitue l'oasis d'Ouargla. Ce sont Chott el Adjaja, à 5 km à l'Est ; Rouissat et Beni-Thour, à 5 et à 2 km au Sud-Est. Enfin, très à l'écart de la palmeraie, se trouvent les deux ksour de Sidi-Khouiled, à 10 km à l'Est et de N'goussa, à 19 km au Nord. -------------La
superficie globale de la commune est évaluée à 180.000
km2. La population est d'environ 28.000 habitants parmi lesquels on compte
6 à 700 Européens, militaires et leurs familles en majorité,
résidant pour la plupart dans l'agglomération construite
au cours de ces trente dernières années et qui s'étale
sur près de 2 km au Sud-Ouest du ksar. -------------L'oasis
est alimentée par deux nappes aquifères : la nappe phréatique,
située à une profondeur variant de 0 m, 60 à 3 mètres
qui fournit de l'eau salée ; la nappe artésienne, d'une
profondeur de 50 à 70 mètres, qui donne de l'eau douce.
Dans ces nappes ont été creusés plusieurs centaines
de puits dont l'installation et l'entretien sont fréquemment défectueux
(puits indigènes) : l'eau des puits de la nappe artésienne
est rarement jaillissante mais habituellement ascendante (pompage). LE PALUDISME A
OUARGLA jusqu'en 1949 -------------Il est aisé de comprendre qu'avec un système hydrographique de cette nature et de cette importance, les gîtes à moustiques aient pu, de tout temps, être innombrables. Et le souvenir est demeuré vivace, tout particulièrement chez les touristes ou les visiteurs étrangers, de ces nuées de moustiques qui attaquaient en plein jour et même en plein vent le promeneur dans la palmeraie et rendaient cette dernière pratiquement inaccessible durant la majeure partie de l'année. C'était le pays de " l'Anophèles multicolore", l'espèce prédominante des eaux salées. -------------L'endémie
palustre a toujours pesé lourdement sur la population. Dès
1882, lors de l'installation de la première infirmerie-ambulance,
les médecins signalaient que la palmeraie n'était qu'un
vaste marécage et que les habitants étaient décimés
par la fièvre. Plus tard, c'était encore de véritables
hécatombes que provoquait le paludisme parmi la population autochtone
et l'on peut encore lire dans les archives que, durant l'automne d'une
certaine année, " il n'y avait plus assez de femmes pour préparer
le couscous ". En 1942, un médecin écrivait "
qu'aucun enfant indigène n'échappait au paludisme "
et la population infantile représentait un réservoir de
virus important. -------------Pour
la seule année 1948 le paludisme se traduit par : LA LUTTE ANTIPALUDIQUE DE 1949 à 1953 -------------Dès
l'hiver 1949 la lutte fut entreprise sur des bases nouvelles, combinant
à la fois l'emploi des méthodes classiques et éprouvées
avec l'utilisation des produits les plus modernes, insecticides nouveaux
à base de D.D.T. ou d'H.C.H. et médicaments antimalariques
de synthèse. Cette lutte a été poursuivie sans interruption
durant quatre années : elle a été dirigée
à la fois contre le moustique vecteur de la maladie (lutte antianophélienne)
et contre le germe causal (lutte antiplasmodiale). -------------Elle
a été menée simultanément à l'origine
contre le moustique adulte (lutte imagocide) et contre sa larve aquatique
(lutte antilarvaire). |
-------------Ces opérations, malgré leurs résultats spectaculaires (destruction immédiate de tous les insectes) et l'action persistante de produit pendant plus de deux mois, ne furent pas renouvelées en raison de leur coût élevé. Et dans le courant de l'année et des années suivantes, ce mode de protection fut limité aux casernements, aux écoles et aux bâtiments administratifs. -------------2)Lutte
antilarvaire. -------------A dater du 1er décembre 1949, devant les conditions devenues très favorables, la médication cessa d'être appliquée aux adultes, mais continua à l'être sans interruption jusqu'au 30 novembre 1950 à tous les enfants de 1 à 15 ans. -------------En 1951 et 1952, le Chloriguane fut remplacé par la Nivaquine plus maniable : ce produit fut administré une fois par semaine à la totalité de la population infantile, soit plus de 2.000 enfants, du ler avril au 30 novembre 1951 et deux fois par mois du 1er mai au 30 novembre 1952. -------------Cette médication fut acceptée sans la moindre réticence par les populations, au demeurant très favorablement impressionnées par l'amélioration de la situation. RESU LTATS (voir graphique) -------------Les résultats tant en ce qui concerne le vecteur que la morbidité générale sont à la hauteur des puissants moyens mis en oeuvre. La situation se présente actuellement comme suit. -------------Les gîtes ont pratiquement disparu et il faut maintenant parcourir longuement les jardins de l'oasis pour avoir l'occasion de découvrir quelques larves. L'anophélisme est nul et la moustiquaire n'est plus utilisée par les dormeurs que pour se protéger contre les mouches à la sieste ou au lever du soleil. -------------L'indice
splénique, périodiquement établi chez les 2.000 enfants
sédentaires de moins de 15 ans, fait ressortir l'abaissement considérable
du réservoir de virus. Cet indice est tombé de 20 % en février
1949, avant les opérations, à -------------Corrélativement
les statistiques au dispensaire communal enregistrent une chute sensationnelle
du nombre des consultations pour paludisme, qui tombent de 5 à
6.000 par an, à : COUT DE LA LUTTE -------------Le
coût annuel de la lutte a été, par habitant protégé,
inférieur à une centaine de francs, pour les années
1949, 1950 et 1951. Pour l'année 1952, il a été de
60 francs et la dépense globale s'est élevée à
1.672.815 francs représentant le paiement de la main-d'oeuvre,
l'achat de produits insecticides et du matériel, l'approvisionnement
en Nivaquine. C O N C L U S I O N -------------Le but proposé à l'origine est atteint : autrefois la plus impaludée des oasis algériennes, Ouargla est maintenant assainie. Certes, il appartient à ceux qui ont la responsabilité sanitaire du pays d'éviter que les mesures de prévention, toujours indispensables, ne tombent dans l'oubli et qu'aucune faille ne se produise dans le système défensif actuellement bien au point : à ce prix et à ce prix seulement l'assainissement de la palmeraie sera maintenu.( R. MANDOUL et P. JACQUEMIN. - Assainissement de l'oasis d'Ouargla. Bulletin de la Société de Pathologie Exotique, N° 7-8, Juillet-Août 1951). Il n'en demeure pas moins que le rapport de cette campagne quadriennale est un bulletin de victoire. Libérés de la sujétion du paludisme, l'Administration et le service médical pourront se consacrer davantage dans l'avenir à d'autre tâches médico-sociales. Convaincue, une fois de plus, de l'efficacité de nos méthodes, la population autochtone, trop longtemps réticente, se confie dorénavant volontiers au médecin. Et le touriste, qui visite maintenant en toute quiétude les jardins de l'oasis, peut rendre hommage à ceux qui ont vaincu tant de difficultés pour faire véritablement d'Ouargla la " sultane des oasis " des légendes. Le Médecin-Colonel PASSAGER |