---------Revenant
d'une expédition militaire en 1845, le capitaine Wimpffen estimait
que par la force on ne pourrait jamais obtenir " qu'une
obéissance forcée, qu'une paix éphémère
" et, de Blida, il écrivait au général de
Castellane
" Ce à quoi on ne pense pas assez,
c'est au bien-être de cette population qu'il faut absolument incorporer
à nous. On fait tant de sacrifices pour installer ici des hommes
venant de tous les coins du monde, pourquoi n'en fait-on pas quelques-uns
pour les sujets appartenant au sol ? Il faut faire construire des habitations
commodes et appropriées aux moeurs de ces habitants de villages
déjà établis au milieu de nous, il faut leur limiter
leurs propriétés pour les mettre à l'abri des tracas
que peuvent leur causer des envahisseurs rapaces, donner aussi des boeufs,
des moutons, des charrues et des terres aux pauvres. Toutes ces choses
peuvent se faire en intéressant à leur réussite
les officiers chargés des affaires arabes. "
---------Et
effectivement toutes ces choses se firent ou tout au moins furent tentées
sous la direction des Bureaux arabes que venait d'organiser l'arrêté
ministériel du ler février 1844.
LES BUREAUX ARABES
DEVANT LA SOCIÉTÉ INDIGÈNE.
---------On
sait quelle fut, après quatorze ans de tâtonnements, l'organisation
donnée à l'administration des indigènes. Des bureaux
arabes étaient institués dans les principales localités,
les uns dits de première classe et se trouvant auprès
des généraux commandant les subdivisions, les autres de
deuxième classe et assistant les officiers supérieurs
placés à la tête des cercles : au total 41 bureaux
et 5 annexes à la fin du Second Empire, soit moins de 200 officiers
pour administrer la majeure partie de l'Algérie. Les bureaux
dépendaient de la Direction des affaires arabes de leur province,
laquelle était sous l'autorité du général
commandant la Division. La Direction d'Alger assurait la centralisation
avec le titre de Direction centrale des affaires arabes en attendant
de céder la place à un Bureau politique.
---------Contrairement
à ce qu'écrivent leurs adversaires, les officiers qui
optèrent pour les affaires arabes ne furent pas les médiocres,
mais l'élite de l'armée. Au début surtout il leur
fallait surmonter l'hostilité à peu près générale
des autres corps qui leur reprochaient de délaisser le métier
des armes pour devenir des administrateurs, des comptables, de petits
diplomates. En fait, ils demeurèrent des soldats, chargés
parfois des coups de main les plus aventureux, et ils durent en outre
faire face aux tâches les plus diverses, tour à tour hommes
de guerre, négociateurs, administrateurs, conseillers agricoles,
juges... Il est évident que des fonctions aussi complexes devaient
tenter surtout des hommes de caractère, aux aptitudes diverses,
poussés sans doute par l'amour du pouvoir, mais aussi, chez certains,
par un véritable idéal et le désir de servir une
grande cause.
---------Il
faut tenir compte également du climat politique et social de
l'époque. Parmi les officiers ayant fait la conquête de
l'Algérie, on comptait nombre de jeunes hommes qui avaient subi
l'influence du grand mouvement d'idées humanitaires qui s'épanouira
en 1848 et dont les deux courants essentiels étaient celui du
catholicisme libéral et social de Lamennais et celui, plus complexe,
du socialisme où dominaient les théories de Fourier et
celles de Saint-Simon. On imagine mal la force d'expansion de ces idées
qui atteignit Bugeaud lui-même et Bussière rapporte, en
le désapprouvant, qu'il vit le Maréchal " pour
l'anniversaire de la naissance de Fourier, assister à un grand
banquet phalanstérien, où il se chargea de porter le toast
traditionnel à l'abolition des armées destructives et
à leur transformation en armées industrielles et productives
" ! Si c'était là, chez le Maréchal, une attitude
passagère, il n'en était pas de même pour les Richard
et les Lapasset qui virent dans l'Algérie un champ idéal
pour des essais de transformation sociale dont l'aboutissement devait
être l'établissement de la sécurité par le
succès de l'assimilation. Ils crurent possible, en effet, de
modifier le genre de vie de ces semi-nomades et ils révèrent
d'une paysannerie à la manière française dont les
intérêts se mêleraient à ceux des immigrants
européens et qui ne pouvant prospérer que dans la sécurité
serait du côté de l'ordre et non de la rébellion.
---------C'était
rejoindre les préoccupations politiques des chefs les plus éminents
de l'armée, en particulier Bugeaud et Randon. Bugeaud, servi
par Daumas, avait toujours songé à lier les indigènes
à notre cause par les liens de l'intérêt. Quant
à Randon, voulant développer le parti français
dans les tribus, il écrivait en date du 18 janvier 1852:
---------"
A mesure que la colonisation indigène
se développera, ce parti prendra de l'extension et ne tardera
pas à former un contrepoids efficace à la turbulence du
parti religieux dont l'influence doit diminuer devant l'augmentation
du bien-être d'une population laborieuse.
---------"
C'est en favorisant aussi largement que possible
le développement de ce bien-être que je chercherai à
modifier à notre avantage l'opinion publique des tribus.
"
---------Ainsi,
disposant d'une autorité pratiquement illimitée et obéissant
à des impératifs politiques et sociaux, les Bureaux arabes
pensèrent assurer la domination française et résoudre
le problème algérien en élevant la condition matérielle
des indigènes, ce qui, pour eux, signifiait : substitution d'un
genre de vie sédentaire au genre de vie semi-nomade par la délimitation
des propriétés, la construction de maisons et de villages,
l'extension et l'amélioration des cultures, la pratique rationnelle
de l'élevage, la rénovation de l'activité industrielle.
Essai grandiose de transformation qui, s'il avait réussi, aurait
créé une Algérie nouvelle à l'image de la
métropole.
LES ESSAIS DE TRANSFORMATION
ÉCONOMIQUE ET SOCIALE.
---------A la
base de la vie paysanne, il y a la propriété privée
nettement délimitée et qu'il faut constituer là
où elle n'existe pas car " elle
ouvrira les voies à toutes les améliorations sociales
et agricoles ; elle sera le plus sûr point d'appui de l'assimilation
des deux peuples. " C'est la doctrine des Bureaux arabes
énoncée par le Maréchal Vaillant, ministre de la
guerre, dans un rapport du 17 mai 1854 où il réclamait
le cantonnement des tribus établies sur terres collectives. Ce
cantonnement lui apparaît comme une " équitable
transaction " car s'il enlève aux tribus considérées
comme usufruitières, une partie de leur territoire, "
il substitue à leur simple droit de jouissance un droit de propriété
incommutable sur la part territoriale qui leur est assignée,
et la compensation est d'autant plus réelle, que le territoire
nouveau .est toujours soigneusement proportionné à l'importance
de la population cantonnée et aux besoins de sa subsistance et
de son agriculture pastorale. "
---------Mais
outre que l'appréciation de ces besoins n'était pas chose
facile, l'administration militaire s'aperçut rapidement, en pratiquant
le cantonnement de diverses tribus, que les résultats n'étaient
pas ceux qu'elle escomptait. En délivrant des titres à
la manière française, elle permettait au fellah de se
dessaisir facilement de son bien. Devant ce danger de l'émiettement
de la propriété indigène, les Bureaux arabes condamnèrent
le cantonnement, que réclamait maintenant la colonisation, et,
avant même le sénatus-consulte de 1863, ils obtinrent l'arrêt
de toutes les opérations entreprises. Il y a dans ce revirement
une logique incontestable car on ne peut à la fois préconiser
la création d'un paysannat et établir une législation
qui chasse le paysan.
---------La
construction de maisons et de villages paraissait soulever moins
de difficultés et beaucoup pensaient
comme Azéma de Montgravier que " la substitution de la maison
à la tente était le premier milliaire de la voie de la
civilisation. " Encouragés par les chefs des
bureaux arabes et craignant aussi d'être menacés par l'extension
de la colonisation, les notables indigènes cherchèrent
à devenir concessionnaires au même titre que les Européens
et partout où la propriété du sol leur était
acquise ils s'empressèrent de faire acte de possesseurs en construisant.
On vit alors surgir nombre de maisons particulières, en général
peu importantes (de une ou deux pièces), mais dont certaines
étaient imposantes et d'un grand luxe, telle la demeure du bach-agha
des Djendel (dans la région de Lavigerie) où Robert-Houdin
fut reçu par le " Rothschild africain " dans
un salon de réception dont " les
murailles étaient couvertes d'arabesques rouges rehaussées
d'or, et le plancher couvert de magnifiques tapis de Turquie."
---------Mais
pour les Bureaux arabes, la maison isolée n'était qu'un
pis-aller et ils préconisaient surtout le village dont la surveillance
est plus facile et sur lequel l'action réformatrice de l'autorité
peut s'exercer plus aisément. Certains de ces villages ne furent
que des agglomérations de tentes autour d'un grand bordj : ce
sont les smalas de spahis, réplique indigène des soldats-laboureurs
de Bugeaud, qui se perpétuèrent jusqu'à nos jours
puisque la dernière, celle d'Outaya (près de Biskra),
ne disparut qu'en 1923. Mais de nombreux villages de véritables
maisons furent également édifiés, enfermés
le plus souvent dans une enceinte et organisés le long d'une
large rue plantée d'arbres se terminant devant l'habitation d'un
notable, le caïd de préférence.
---------Restait
évidemment à faire des nombreux centres les cellules d'une
vie agricole rénovée. Pour les céréales,
il fut relativement facile d'étendre leur culture et même
de mieux l'assurer par la construction de quelques barrages dont le
plus célèbre est sans doute celui que Margueritte (alors
chef du Bureau arabe de Téniet-el-Haâd) fit édifier
sur le Nahr Ouassel. Par contre, le matériel et les méthodes
culturales ne pouvaient être modifiés du jour au lendemain.
La charrue française fut bien adoptée par quelques chefs
indigènes, mais pour la masse des fellahs, elle demeurait trop
coûteuse. Quant aux autres instruments agricoles, comme la herse
et le rouleau, ils avaient de plus contre eux leur trop grande nouveauté.
Seule la faux recueillit plus de suffrages et remplaça parfois
complètement la faucille.
---------Les Bureaux
arabes auraient voulu diversifier les ressources de l'agriculture indigène
afin d'améliorer la situation des fellahs et des khammès.
Leurs essais portèrent tour à tour ou simultanément
sur le blé tendre, le maïs, le sarrazin, le bechna (sorgho),
les légumes (et en particulier les fèves), l'arboriculture,
la vigne, le tabac, le coton... Ils enregistrèrent quelques succès,
dans la propagation de la pomme de terre par exemple, mais, dans l'ensemble,
les indigènes continuèrent à penser que la culture
de l'orge et du blé dur demeurait la plus avantageuse et la plus
facile.
|
|
--------Après
avoir tenté, sans grands résultats, d'amener les indigènes
à constituer des réserves de foin et à construire
des abris pour leurs troupeaux, les Bureaux arabes limitèrent
leurs ambitions en matière d'élevage à la sélection
des moutons et à l'amélioration des procédés
de la tonte. Ils créèrent, dès 1862, la première
bergerie modèle au point d'eau d'Aïn Tisemsil. (devenu depuis
le centre de Vialar) : expérience sans doute éphémère,
mais dans laquelle on est en droit de voir l'ancêtre des stations
de Tadmit ou du Kroubs, des bergeries de Khenchela, Chellala, El Ousseukh.
--------En
matière d'industrie, les difficultés étaient différentes,
mais peut-être plus considérables. L'industrie artisanale,
d'ailleurs assez peu développée, avait sombré devant
la concurrence européenne, et, en 1854, Pellissier de Reynaud
en dressait le tableau suivant
---------Les
indigènes font cependant encore des tissus de laine pour haïks
et burnous, dont quelques-uns sont d'une grande finesse ; les plus estimés
se fabriquent chez les Beni-Abbès. Les broderies d'or et d'argent
d'Alger étaient fort recherchées dans 1- Levant, mais
cette branche d'industrie a beaucoup souffert depuis la conquête
; elle n'existe presque plus à Mostaganem, où elle avait
pris une grande extension. Il en est de même de la fabrication
du maroquin, qui est considérablement réduite depuis 1830
sur tous les points où on s'y livrait autrefois. Les tissus de
soie, soie et or, soie et argent, les mousselines brodées d'or,
d'argent et de soie pour ceintures et écharpes, forment encore
une branche d'industrie bien appauvrie depuis notre entrée en
Algérie... J'en dirai autant de la sellerie indigène et
surtout de la fabrication des tapis de laine, industrie précieuse
qu'il convient d'encourager. On en faisait autrefois beaucoup à
Oran, à Mostaganem, à Calah ; maintenant la petite ville
de Calah est à peu près le seul point où on en
fabrique encore...
---------Les
Bureaux arabes auraient voulu enrayer cette décadence et on pourrait
même citer diverses tentatives de rénovation, mais le seul
résultat vraiment notable fut la construction, par des Européens
et par des Indigènes, de nombreux moulins à farine qui
permirent de délivrer les femmes des tribus du plus pénible
des travaux domestiques, la manoeuvre des petits moulins à bras
pour laquelle on a invoqué la nécessité de la polygamie
ou évoqué la tâche des 6.000 esclaves enfouis dans
les souterrains de Rome.
APRES UN QUART DE
SIÈCLE D'EFFORTS.
---------L'action
des Bureaux arabes s'exerça essentiellement sur les chefs avec
lesquels les contacts étaient fréquents et qui disposaient
de moyens matériels supérieurs. Et l'on pourrait citer
nombre d'exemples d'aghas ou de caïds se consacrant à la
culture de le vigne ou à celle du coton, cherchant à capter
des sources pour pratiquer les cultures maraîchères, employant
des charrues françaises et demandant même à faire
partie de la Société Impériale d'Agriculture d'Alger.
L'exemple le plus remarquable est sans doute " celui
du caïd Saoudi, dans le cercle de Philippeville. qui a créé
près des bords de la Safsaf, un petit hameau européen
composé de six maisons et dans lequel il a installé trois
familles allemandes ; il a avancé à ces colons les instruments
de culture, les semences et le cheptel dont ils avaient besoin, il leur
a donné un délai de cinq années pour rembourser
le montant de ces avances, sous la condition que, ce terme expiré
et ces avances remboursées, ils deviendraient propriétaires
chacun de 25 hectares, et cette spéculation du caïd n'a
d'autre but que d'initier ses propres fermiers aux procédés
agricoles des Européens. (Tableau des établissements
français en Algérie 1852-1854).
---------Mais
des succès individuels, même brillants, ne peuvent cacher
la médiocrité des résultats obtenus lorsque l'on
considère l'ensemble de l'Algérie.
---------Les
statistiques concernant la construction des maisons sont à cet
égard significatives. On sait que l'engouement pour la maison
de maçonnerie fut surtout vif jusqu'en 1858 environ et nous possédons
les chiffres de 1855 et des années antérieures. En voici
la récapitulation générale :
|
MAISONS CONSTRUITES
|
Valeur
|
|
Avant 1855
|
En 1855
|
Total
|
|
Province d'Alger .
|
1.784
|
241
|
2.025
|
1.867.000
|
Province d'Oran
|
1.422
|
256
|
1.678
|
2.450.000
|
Province de Constantine
|
3.654
|
586
|
4.240
|
3.003.060
|
Totaux
|
6.860
|
1.083
|
7.943
|
7.320.060
|
---------Comme
en 1850, le nombre de maisons construites était de 2.241, nous
voyons que pendant la période de plus grande activité
on édifia en Algérie moins de 1.200 maisons par an et
une autre statistique noua apprend qu'en 1854 on comptait sur le territoire
militaire 246.498 tentes et 102.986 gourbis
---------Nous
ne disposons pas de renseignements aussi précis pour les divers
domaines dans lesquels s'exerça l'activité des Bureaux
arabes, mais les témoignages sont concordants. C'est Marcel Lucet,
président du comité agricole de Constantine, qui affirme
en 1863, peut-être avec quelque exagération, que pas un
indigène du département n'utilise la charrue Dombasle
et qu'on n'enregistre aucun progrès dans les méthodes
culturales. C'est Leblanc de Prébois, chef d'état-major,
qui défend le régime militaire, mais reproche aux Bureaux
arabes d'avoir laissé e population indigène dans l' "
état de barbarie " où elle se trouvait sous les Turcs.
Ce sont surtout, à la fin du Second Empire et au début
de la Troisième République, les rapports mêmes des
cercles et des subdivisions qui signalent à maintes reprises
la stagnation de la société indigène. Plus symptomatique
encore : on voit attribuer à l'application du sénatus-consulte
de 1863 la création de certains villages dont il ne subsiste
que des ruines et qui furent jadis l'orgueil des Bureaux arabes. Ceux-ci
disparus, on ne reconnaît même plus la trace de leurs pas
et on fait gloire à d'autres d'une coeur péniblement réalisée.
Sic vos non vobis.
---------Les
raisons de l'échec des Bureaux arabes, il faut les chercher tout
d'abord dans l'insuffisance des moyens et on leur a reproché
de s'être laissé dépouiller, au profit du territoire
civil, de la partie des impôts qui aurait dû leur revenir.
Leblanc de Prébois parle même de " faute capitale
" et s'élève contre le " puritanisme exagéré
et inintelligent " qui faisait verser les impôts arabes
dans les caisses du fisc au lieu de les conserver pour le territoire
militaire. Théorie discutable qui eût abouti à l'isolement
du monde indigène, mais il est certain qu'en considérant
les Bureaux arabes, avant tout, comme une administration peu coûteuse,
on ne laissait pratiquement à leur disposition que l'appel aux
bonnes volontés ou le recours aux corvées, deux moyens
très insuffisants pour déterminer une profonde transformation
sociale.
---------Il
semble bien aussi que les Bureaux arabes ne mesurèrent pas exactement
l'importance de la révolution qu'ils prétendaient introduire
dans les tribus. Ils s'en tinrent le plus souvent à quelques
mutations toutes extérieures et c'est ce qu'exprime Bussière
lorsqu'il écrit en 1853 : " On a beaucoup excité
les indigènes et surtout les chefs à se construire des
maisons ; on leur en a même bâti un assez grand nombre...
Ils ont fait ou se sont laissé faire ; mois jusqu'à présent
ils ne paraissent guère avoir compris la maison et ils se bornent
à camper sous la pierre au lieu de camper sous la tente... "
quand ils n'abandonnent pas la maison au troupeau
comme re grand chef dont parle Hugonnet qui estimait qu'un homme comme
lui ne pouvait " habiter que la tente en poil de chameau
".
---------Pour
terminer, nous citerons le capitaine Javiry, qui avait saisi la complexité
du problème et qui écrivait en 1854
---------"
Faites bâtir des maisons ou planter des
jardins, introduisez des cultures nouvelles, faites construire des fontaines
ou percer des routes en pays arabes, élevez des barrages, reboisez
des montagnes ou. greffez des sauvageons : mais, dites-moi, qui s'intéressera
à ces travaux, qui veillera à leur entretien journalier
et songera à en tirer quelque utilité puisqu'ils supposent
des habitudes de vie toutes différentes. Presque tous ceux à
qui on les imposera les considéreront comme des saignées
faites à leur bourse dans notre intérêt, non dans
le leur. Iront-ils s'imaginer que nous voulons les ramener a la vie
sédentaire, mais dans quel but et en quoi cette existence leur
paraîtra-t-elle préférable à la vie nomade
? "
---------Là
se trouve sans doute une des causes essentielles de l'échec des
Bureaux arabes en matière économique et sociale : leur
politique ne reçut pas l'approbation des intéressés
qui ne pouvaient en saisir l'intérêt et concevoir l'idéal
d'un Pellissier de Reynaud pour lequel " Il
n'y a de conquêtes légitimes et durables que là
où le peuple vainqueur élève à lui le peuple
vaincu de manière à ce que l'avenir
amène une fusion complète. "
Xavier YACONO, Docteur ès lettres.
(voir
Xavier Yacono, universitaire pieds-noirs)
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