----------Bien
qu'elle n'ait pas trouvé en Algérie une structure physique
très favorable à son essor, la pêche maritime constitue
maintenant un secteur important de l'économie algérienne.
----------En
effet, si le littoral algérien, se développe sur une longueur
de 1.300 km., la côte est bordée presque partout d'une haute
muraille de falaises, coupée de quelques plages peu hospitalières
et laissant seulement place à quelques grandes baies connues par
le nom du port de commerce qui y a élu domicile.
----------D'autre
part, le plateau continental est étroit et souvent à quelques
milles au large, la profondeur atteint plusieurs centaines de mètres.
Enfin, la nier Méditerranée est, de longue date, classée
dans la catégorie des mers pauvres, car si la variété
et la finesse des espèces qu'elle contient est grande, leur :abondance
est sensiblement inférieure à celle qui existe dans certaines
autres mers. Néanmoins, les genres de pêche traditionnels
sont tous pratiqués en Algérie : la pêche au chalut
est centralisée principalement à Béni-Saf, Alger,
Bône et Philippeville ; la pêche des espèces migratrices
et la pêche aux palangres s'exercent dans tous les ports de la côte.
DEVELOPPEMENT DE
LA PECHE EN ALGERIE
----------Avant
1830, la pêche était restée peu développée
sur les côtes de l'Afrique du Nord. L'Administration d'alors considérait
cette industrie uniquement comme source de revenu fiscal, chaque opération
ou formalité autorisant la pêche donnant lieu à la
perception d'une taxe. L'exigence des agents du fisc et l'insécurité
résultant de la piraterie, avaient éloigné de l'activité
maritime les populations locales.
----------En
1836, on comptait déjà 238 navires de pêche dans les
ports algérier Trois années après on en comptait
5oo.
----------Depuis
lors, la pêche s'est développée régulièrement.
On compte maintenant près de 6.000 marins montant plus de 1.000
navires jaugeant 4.800 tonneaux et en 1945, les produits débarqués
se sont élevés à 29.900 tonnes (voir tableaux).
LES PECHEURS DE
LA COTE ALGERIENNE
----------Les
nombreux essais d'implantation en Algérie de pêcheurs métropolitains,
tentés au cours du .siècle dernier, ont tous abouti à
une faillite : 1845 : Guyotville ; 1846 : Fouka ;-1848 : Sidi-Ferruch
; 1872 : L'Herbillion ; 189o : Philippeville, Stora ; 1893-1897 : région
du cap Matifou, village de JeanBart, Surcouf et La Pérouse.
----------Tour
à tour : Bretons, Languedociens, Catalans, Corses, arrivés
plein d'espoir, durent être rapatriés, découragés
et déçus. Mal du pays, méconnaissance complète
pour les Bretons des conditions de navigation et de pêche dans les
eaux algériennes telles furent les raisons invoquées pour
expliquer ces échecs ; en réalité, il semble bien
qu'ils ne furent qu'une conséquence de la concurrence des étrangers
Espagnols en Oranie, Italiens et Maltais sur le reste du littoral.
----------En
effet, dès 1830, les éléments étrangers vinrent
pratiquer la pêche sur nos côtes. Ils arrivaient au moment
de la belle saison avec leurs embarcations, leurs engins, le sel nécessaire
à la conservation du poisson, nantis de provisions : riz, biscuits,
etc...
----------"
Cette population flottante, a écrit
Augustin Bernard, prenait sans rien donner en
échange " et rentrait dans son pays en fin de campagne
avec le produit intégral de sa pêche ( Cité par le
Docteur R. Dieuzède (Algérie Sahara, tome 2)
----------Petit
à petit, ces -pêcheurs saisonniers s'installèrent
sur la côte et ainsi furent créés de nouveaux points
de peuplement.
----------Suivant
son origine, chaque groupe de pêcheurs, gardant ses méthodes
natales, il se créa sur les différents points de la côte,
des centres de pêche essentiellement différents. Tandis que
les Espagnols. très accessibles au progrès et fondus dans
la masse de la population, étendaient leurs zones d'action et augmentaient
le rendement des pêches sur la côte oranaise, l'élément
italien, plus attaché à ses traditions, s'installait dans
la région Est et se bornait à exploiter les points facilement
accessibles.
----------Les
musulmans, qui s'étaient pendant assez longtemps tenu à
l'écart des choses de la mer, s'y intéressent maintenant
d'une façon active. A Collo, à Béni-Saf, à
Nemours, nombreux sont les musulmans patrons de pêche et les propriétaires
de bateaux. Etant donné leur malléabilité, la fréquentation
des écoles d'apprentissage maritime doit leur permettre d'acquérir
les connaissances techniques nécessaires au renouvellement et à
la modernisation des méthodes de pêche en ce pays.
LES ECOLES D'APPRENTISSAGE
MARITIME
----------Au
début de l'année 1947, quatre écoles étaient
en service en Algérie : Nemours, Mers-el-Kébir, Alger, Bougie.
Elles forment en principe, en un cours de neuf mois, des mousses qui sont
présentés au certificat d'aptitude professionnelle et qui
peuvent embarquer à l'issue de ce stage sur les bateaux de commerce
ou de pêche. En fait, chacune de ces écoles s'est spécialisée
et tandis qu'Alger et Bougie se consacrent presque uniquement à
la marine marchande, Mers-el-Kébir forme à la fois des marins
de commerce et des pêcheurs, et Nemours n'instruit que de jeunes
pêcheurs pour la plupart musulmans.
----------En
1947, sur les 52 élèves qui ont fréquenté
cette dernière école, 18 ont obtenu le certificat d'aptitude
professionnelle et 20 ont réuni le nombre de points suffisants
pour recevoir un certificat de scolarité.
----------Le
programme d'examen du certificat d'aptitude de marin pêcheur comprend
une partie théorique et une partie pratique. La,première
porte sur la langue française, l'arithmétique, les notions
civiques, l'histoire et la géographie, la navigation, la mécanique,
les pèches, l'hygiène et le sauvetage. La deuxième
comprend des exercices de manoeuvre, de matelotage, de charpenterie, de
travail du fer, de travail et de conservation du poisson.
----------D'une
manière générale, les programmes sont conçus
afin de donner à nos pêcheurs la possibilité de, s'adapter
aux besoins nouveaux de la pèche en Algérrie.
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DIFFERENTS GENRES
DE PECHE
Le chalutage
----------Le chalutage est une industrie
actuellement très prospère, le poisson blanc trouve facilement
preneur.. Aussi, a-t-on pu constater, malgré les difficultés
qui entravent la construction de nouvelles unités, un accroissement
sensible du nombre des chalutiers. Mais il est à craindre que cette
augmentation du tonnage ne soit pas suivie d'un accroissement proportionnel
des quantités mises à terre. En effet, l'étroitesse
des bandes chalutables conduit à une exploitation exagérée
des fonds engendrant le dépeuplement. ----------L'industrie
du chalutage en Algérie, si elle veut continuer à prospérer,
devra donc abandonner l'exploitation des navires de quelques tonnaux,
qui, en raison de leur rayon d'action limité, pèchent trop
près des côtes oet sont les principaux auteurs du dépeuplement.
Par contre, des navires d'une cinquantaine de tonnaux, munis de moteurs
puissants, de cales isolées et refroidies, permettent d'exploiter
des fonds jusqu'ici peu fréquentés en raison de leur éloignement
des ports de pêche. Des navires de ce type existent déjà.
C'est vers l'accroissement de leur nombre et l'amélioration de
leurs aménagements que doit s'orienter l'armement.
Les palangriers
----------Les
fonds rocheux, où par conséquent les chalutiers ne peuvent
draguer, échappent de ce seul fait à toute menace de destruction.
Lorsqu'ils sont éloignés des centres d'habitation, ils constituent
de véritables zones de repeuplement où les -poissons de
roche, mérots, dentus, pagres, pageots, dorades, rougets, se développent
au point' d'atteindre des proportions peu communes. Ces zones de repeuplement
alimentent les zones de pêche pour le grand bien des, petits pêcheurs
palangriers. Le beau poisson que débarquent ces artisans est, en
raison de sa finesse, d'un écoulement facile et d'une vente particulièrement
rémunératrice dans les grands ports de pêche tels
qu'Oran et Alger. Dans les centres de moindre importance où la
vente est moins aisée, les mareyeurs avaient été
amenés, avant guerre, à rechercher des marchés susceptibles
de recevoir ces poissons de choix et il existait un courant d'exportation.
vers la France, en particulier sur Marseille où 'le poisson méditerranéen
jouit d'une faveur toute spéciale.
----------Nul
doute qu'avec l'amélioration des relations avec la Métropole,
ce trafic puisse reprendre. Il est à souhaiter qu'alors, les ressources
que fournit la technique actuelle du froid industriel, soient mises en
oeuvre pour conserver à ce poisson de luxe toutes ses qualités
d'origine.
LE POISSON BLEU
----------Les
eaux algériennes sont particulièrement riches en poissons
migrateurs. Ce sont : sardines, allaches, anchois, maquereaux, thons et
bonites.
----------La
pêche de ces poissons peut être' pratiquée par des
navires de quelques tonneaux, car les bancs sont à proximité
de la côte, Les clupes sont généralement capturés
par les lamparos, bateaux non pontés d'une dizaine de mètres
environ, Rropulsés par des moteurs de 15 à 20 CV. Celle
des maquereaux et bonites est pratiquée par les lamparos et "
à la traîne ". Le thon rouge est capturé au filet
en Oranie par des Madragues.
----------La
pêche aux poissons bleus offre de sérieuses possibilités
de développement. En raison du caractère migrateur des espèces
et de leur énorme fécondité, point n'est à
craindre une diminution du stock. Une faible partie des quantités
débarquées est, consommée en frais, la majeure partie
est destinée à la conserverie : salaisons, friterie, saurissage,
conserve en boîtes hermétiques.
----------Le
sort de cette pêche est donc étroitement lié au développement
de l'industrie de la conserve. Or, cette industrie est considérablement
gênée dans son développement par l'irrégularité
des apports et la mauvaise qualité du poisson débarqué.
Les ateliers trop dispersés, souvent mal outillés réalisent
des prix de revient trop élevés. ----------Cette
situation serait sensiblement améliorée par l'utilisation
généralisée de navires pontés à io
tonneaux environ, tels que ceux qui sont déjà exploités
dans la région de BéniSaf et de Nemours. Ces bateaux seraient
susceptibles d'utiliser des filets du type " ring net " d'un
rendement, tant au point de' vue qualité que quantité, bien
supérieur au lamparo, engin péchant et qui écrase
le poisson capturé.
----------De
tels filets ont fait preuve, dans les grands centres de pêche des
Etats-Unis, du Portugal, du Maroc... Jusqu'ici leur introduction en Algérie
s'est heurtée à la routine des pêcheurs qui ne semblent
pas réaliser que l'adoption de procédés modernes
de pêche est indispensable au 'développement de leur profession.
Parallèlement, il serait souhaitable de voir les ateliers de transformation
se regrouper et moderniser leur outillage et leur technique afin de pouvoir
absorber la production ainsi accrue. L'amélioration de la qualité
des produits finis faciliterait leur écoulement dans la Métropole
ou dans les pays étrangers et contribuerait ainsi à l'amélioration
de la balance des comptes de l'Algérie.
----------Si
donc, en raison de la situation physique des fonds, le chalutage ne peut
être développé qu'avec prudence et dans certaines
conditions, et, si le poisson de roche est susceptible d'une vente plus
développée, mais ne peut que demeurer un produit de luxe,
il semble par contre que la capture du poisson bleu puisse être
considérablement accrue en même temps que seraient développées
et améliorées les industries de transformation. De gros
progrès sont assurément à réaliser dans ce
domaine. Il est souhaitable que pêcheurs et industriels accomplissent,
dès que possible, les transformations et améliorations,
l'Ai'gérie pouvant, grâce à la qualité de ses
huiles et à l'abondance de sa main-d'oeuvre, devenir un important
exportateur de conserves de poissons. 1
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