------C'est en 1935,
sur un projet établi pat le Dr Trabut et Roger Mares, à
la demande de M, de Peyerimhof, directeur de l'Agriculture et de la Colonisation,
et proposé à l'adoption des Délégations financières,
qu'un établissement dit "Ecole d'Agriculture
algérienne " était créé sur
le plateau de
Belfort, â 12 kilomètres d'Alger, à l'emplacement
de l'Institut actuel. Cette école, succédât à
la ferme etablie à Rouiba,
en 1898, sur un domaine de 15 ha appartenant à M. Decaillet, et
qui fut le premier établissement d'enseignement agricole qui ait
fonctionné, en Algérie.
------Les débuts furent anodestes, mais le
succès s'affirma peu à peu, et déjà, en 1914
lorsque par suite, de la mobilisation de ses professeurs l'école
dut fermer ses portes, elle pouvait, s'enorgueillir d'avoir en 9 ans,
dispensé son enseignement,à 180 élèves. 25
d'entre eux et un de leurs professeurs trouvèrent une mort glorieuse
sur les Champs de bataille, pendant la grande guerre.
LES DIFFÉRENTES
ETAPES DE L'ORGANISATION.
------Àl'origine,
l'établissement de Maison-Carrée comportait en réalité
deux écoles distinctes
.-------L'une,
l'Ecole d'Agriculture proprement dite, était destinée
aux jeunes gens pourvus d'une- nstruction générale suffisante
pour recevoir' tin enseignement d'un niveau assez élevé
,
------L'autre,
la ferme-école, donnait un enseignement surtout manuel,
conçu pour la formation de bons ouvriers et de contremaîtres
agricoles.
------La juxtaposition
de ces deux établissements présenta des . inconvénients
et la ferme-école fut transformée, en 1908, en section
préparatoire à l'École d'Agriculture proprement
dite,_ dans le but de faciliter le recrutement des élèves.
------En fait,
on reconnut très vite que pour suivre avec profit des études
agricoles d'ordre supérieur, des' connaissances générales
assez développées étaient nécessaires et que
l'enseignement universitaire ,constituait, en réalité, pour'
-les candidats, la meilleure préparation. Aussi, en,1914, à
1a suite des travaux d'une commission nommée par le Gouverneur
général Lutaud, pour mettre au point un programme de reeherehes,
d'expérimentation et de vulgarisation agricoles, qui tint 'ses
`assises sous' là- présidence du distingué directeur
de' I' Agriculture d'alors, M. Brunel, une conception`nouvelle
prévalait et la section préparatoire était supprimée.
------L'école
rouvrit ses portes en 1919 et .cette réouverture. marqua ,pour
elle le début d'une ère de grande prospérité,
dont le mérite revient pour une large part à un homme dont
il convient de rappelër, ici là mémoire : Pierre Chervin,
ingénieur agricole de Grignon, ancien. directeur de''1'Ecole' coloniale
de Tunis, que M. Brunel avait appelé à ses côtés
comme sous-directeur de l'Agriculture et, dont il n'est pas excessif d'affirmer`
qu'il est le véritable créateur de l'Institut.;. agricole
sous sa forme actuelle.
------Sous
son impulsion, l'enseignement fut entièrement réorganisé,
le niveau du concours d'entrée fut relevé, de, nouvelles
chaires- furent créées, les bàtiments d'internat,
furent à grandis, des laboratoires modernes, bien outillés,
furent construits et, à l'achèvement de, ce vaste programme,
vers 1922, 1'établirsemen de Maison-Carrée, complètement
transformé et devenu par arrêté du. 28 février
1921,
"Institut agricole d'Algérie
", pouvait supporter très avantageusement la comparaison avec
les grands établissements d'enseignement supérieur agricole
de la Métropole et de l'Étranger, La valeur, reconnue de
son enseignement permettait d'attribuer aux élèves ayant
satisfait aux examens de finn 'études un diplôme d'ingéliièur:
En même temps, les professeurs, chefs, de 'laboratoires; prçnaient
une part plus active aux travaux de recherches et d'expérimentation
intéressant l'agriçultùre nord-africaine.
------Le recrutement
répondit aux espérances. Dès 1919, 102 candidats,
se présentèrent au concours d'entrée et ce nombre
augmenta progressiveiment pour atteindre, en 1925, et se maintenir jusqu'en
1932, a un chiffre supérieur à 200.
------La,
crise économique qui atteignit, en 1930 et 1935, l'agricûlture
algérienne, eut sa répercussion à l'Institut agricole,
comme, d'ailleurs dans les °établissements similaires de la
Métropole, et le chiffre le plus bas fut atteint en 1936, où
il ne présenta que 62 candidats.:
------C'est
a ce moment que la direction de l'écolé fut confiée
, à titre intérimaire à Emile Vivet, sous-directeur
de l'agriculture au Gouvernement genéral , qui mit au service de
l'institut, qu'il avait contribué à créer et où
depuis l'origine il enseignait avec talent et autorité là
viticulture dont il était le spécialistes indiscuté,
ses grandes qualités et son prestige moral. Sous son impulsion
, avec la collaboratior du secrétaire general actuel, un redressement
rapide s'amorça, et appelé à lui succéder
à la fin de J'année scolaire 1936-1937, je n'eus qu'à
continuer dans l'a voie si bien tracée. A ce titré, Emile
Vivet, que nous avons eu la douleur de perdre il y a quelques mois, mérite
de voir son nom associé à ceux des Brunel et Chervin,' et.
nous espérons que son souvenir sera bientôt matérialisé
dans notre établissement par un monument digne de lui.
------Dès
1937, 107 candidats se présentaientt àu conc>urs d'entrée:
En, 1938, ce nombre atteignait 134 et il ne fit que `croître clans
les années suivantes : 184 en 1939, 202 en 1940, 219 en 1941. Le
chiffre record, 317, fut atteint en 1942. Pourtant, par suite de là
mobilisation de son personnel enseignant, l'Institut dut interrompre son
fonctionrlement pendant l'année scolaire 1939-1940: Il, abrita
cette annéelà les élèves des écoles
pratiques d'agricul'ture, de l'Algérie.
Grâce à cette amélioration rapide et sensible du recrutement,
il fut possible
------a) De
supprimer en 1940 l'admission sans concours dont pouvaient bénéficier
jusque-là les candidats possédant le baccalauréat
ou le "brevet:: supérieur
------b) De
refondre le programme des matières et des conditions du concours
d'entrée, en vue d'une assimilation plus complète avec les
Ecoies nationales d'Agriculture métropolitaines. En mémé
temps, il fut procédé à des réformes intérieures
: modifications des horaires des cours et
applications, aménagement des chaires de technologie, Chimie-Oenologie,
Génie rural, par un groupement plus rationnel des disciplines,
création d'un cours de comptabilité, réorganisation
de la pratique agricole, des voyages d'études, création
avec le concours de divers organismes profersionnels et notamment de la
Chambre d'Agriculture d'Alger, de prix et de bourses de voyage et de stage;
refonte du règlement des stagiaires-preparateurs, avec création
de certificats de spécialisation, etc... Toutes ces mesures avaient
pour, but essentiel d'àsurer une progression plus, judicieuse et,
partant, une oefficacité plus gràrtde-de l'enseigneraient,
tant pour les élèves en cours d'études que pour ceux
qui, après obtention de leur diplôme, ;désiraient
compléter leur formation en se, spécialisant.
------Il faut
y ajoutes la création, par un arrêté gubernatorial,
du 24 avril 1942, d'une troisième année d'études,.
inspirée par les dispositions de l'article 12 de l'acte dit loi
du 5 juillet 1941, portant organisation de I'ensëignem nt ,agronomique
dans la Métropole. Conçue "suivant une formule otiginale,,
mise au point au cours de' réunions nombreuses auxquelles participèrent,
en dehors des membres du corps enseignant, des anciens élèves
et des pessonnalites agricoles émérites, cette troisième
année comportait des matières à option, dès
stages pratiques et amorçàit une spécialisation 'des
étudiants.
LES RECHERCHES ET L'EXPERIMENTATION
AGRICOLES
------Parallèlement,
pendant cette période; un effort très important, était
fait dans le `domaine des Recherches et 'de l'Expérimentation
------*Orientation
des exploitations annexes vers la production des semences selectionnées
(centre de l'Oued Smar).
------*Acquisitions
et locations ayant permis de porter de 120 à 300 hectares l'étendue
de ces exploitations
------*Création
d une porcherie de géniteurs Large-White
et d'une station d'exiiérimen'tation maraîchère ;
------*Agrandissement
des champs d'essais du laboratoire d' agriculture et de génétique
appliquée
------*Participation
accrue des divers laboratoires, aux recherches et aux travaux intéressant
1'économie agricole algérienne (industrialisation,, lutte
-antiparasitaire, etud agrologiques diverses, étude méthodique
des produits agricoles nord-africains, contribution aux retîherches
relatives aux énergies de remplacement, etc...).
------Ces
travaux, rendus possibles par une augmentation sensible, quoiqu'encore
très insuifis'ainte, du personnel, dé chefs de travaux preparatéurs
et assistants, permirent la publication d'annales dé l'Institut
agricole et des Services de recherches et d'expérimentation agricoles
de l'Algérie dont le premier numéro parut en 1941)
------L'Institut
agticole d'Algérie devenait, pëu à peu un véritable
" Centre de recherches agronomiques"
|
------- |
ACTIVITE ENTRE 1942
et 1945.
------Telle était'
la situation de l'établissement en novembre 1942,, lorsque son
fonctionnement et son essor furent interrompus par la reprise des hostilités.
------ Pendant'
ces, trois années qui suivirent, privé par la mobilisation
d'une partie de son personnel enseignant et de la presque'' totalité
de ses étudiants, qui, appelés ou- engagés, rejoignirent
dès le début les forces armées, françàlses,
il n'eut auct#rie' activité d'enseignement.
------Par
-contre, ans le- domaine scientifique et technique; ,les, divers 'laboratoires
prirent une par aussi active "que le" permettaient le personnel
et les. 'moyens réduits dont ils disposaient à, d'effort
de guerre de l'Algérie, Citons. entre autres travaux poursuivis
Pendant cette pêriode
------- La
contribution très importante du Laboratoire d'agriculture, dont
le professeur devint en 1943 le chef du 'Service de l'expérimentation
nouvellement créé au développement des cultures nouv
îles( oléagineux, textiles, alcooligènes) et à
:la production locale' des plants et semences (céréales,
pommes de terre; `plantes industrielles et fourragères) que l'importation
ne pouvait plus nous fournir ;.
------- La
participation très active du laboratoire de Zoologie aux campagnes
antiacridiennes de 1943 a 1945 ;
-------Les
études relatives' aux fermentations formeniques et au gaz de fumier
-------La
collaboration du' labtlrato4re de Technologie aux études relatives
à l'industrialisation de l'Algérie, à là chaine
du froid et ses travaux originaux sur la déshydratation des légumes
et des fruits, notamment par 'utilisation de la chaleur solaire ;
-------La
recherche, par le laboratoire de Viticulture, des moyens d'économiser
le cuivre et le soufre clans la lutte contre les 'parasites ' de la vigne
-------L'étude,
au laboratoire de Zootechnie, d'aliments dé remplacement `pour'
le..-bétail.
------Sur
l'initiative. du Recteur Laugier, alors directeur du Centre -national
.de la recherche scientifique, un Comité de la' recherche agrünomique
ftît créé en 1943, dont la présidence fut assurée
par le directeur' de l'Institut agricole, déjà chargé,
depuis 1939,,de la direction, de; la Production agricole en Algérie,
et aux- travaux duquel les professeurs et chefs de travaux non mobilisés
apportèrent une contribution importante et efficace.
------Dans
le méme temps,, sur, les champs de bataille, maitres et élèves
mobilisés rivalisaient d'héroïsme. et participaient.
glorieusement', en Tunisie; en Italie,puis en France et en Allemagpe,
aux combats de la libération : 27 morts au Champ 'd'honneur, dont
15 etéves en cours d'études ; 90 citations portant témoignage
de leur patriotisme et de leur, esprit 'de' sacrifice. - Dans ce domaine'
aussi, l'Institut - agricdle a fait largement son dévôir.
REORGANISATION.
------Le 14 novenibre
'1945, n'ayant pas encore effacé toutes les traces d'une, occupation
militaire de,'près' de trois années, l'Institut rouvrait
'ses portes pour recevoir, avec ses étudiants en, cours d'études
en 1942, ceux que divers concours, organises en 1943, 944 et 1945,avaient
permis recruter,
------51 élèves
de seconde année, -63 de la, première- anfiée, àuxquels
il faut ajouter une vingteaine d'auditeurs libres et de stagiaires divers,
suivireùt lés cours d'e'l'année scolaire 1945- 1946;
------Pour tenir compte du retard apporté
par là guerre- dans leurs études, ces élèves
héneficterent encore du régime de deux années d'études,
l'application du,, régime de trois années ayant été
reportée à la rentrée scolaire de 1946.
------Entre
temps est intervenue, d'ailleurs, la loi d'assimilation qui soumet desornais
notre etablissement ,
devenu l'Ecole nationale d'agriculture d'Alger,,
au régime dés Ècoies; nationales métropolitaines.:
------La fin
des hostilités permit aussi, de reprendre le programme de constructions,
èt d'aménagements interrompu par la guerre. Sont actuellement
réàlisës ou en cours
------- La
-construction commencee en 1942, d'un vaste . bütiment destiné
à' abriter la Teebdologie, la Zoologie et le 'Laboratoire central
de l'office antiacridien ;
------- La
transformation des bâtiments d'internat en chambres a un ou deux
lits qui amelioreront le confort de là vie " estudiantine'"
à l'Innstitut
------- La
construction, rendue nécessaire par la création de la troisième
année d'études, d'atnphitheatres et le regroupement des
locaux administratifs ;
------- Là
sü'rélévatibti da laboratoire de Zootechnie
------- La
construction, pour le laboratoire d'agrologie de nouvelles cases lysimetriques
------- Divers
aménagements pour la station d'Horticulture qui a succédé
à l' ancienne;' station botanique, complètement transformée
;
------- D'ivérs
aménagements au bâtinffent dé l'Economat
-------La
construction en -accord avec la, délégation générale
au, plan, de prototypes d'habitations rurales pour les ouvriers musulmans
.
-------- L'aménagement
de divers logements pour le personnel
-------La
construction de hangars à la ferme principale et aux ateliers.
------Sont
en projet
-------L'agrandissement
de la station ,de' Génie rural
-------La
transformation de la fumière de la ferme principale et d'une cuverie
désaffectée à El-Alia, en vue de la production industrielle
de gaz de' fumier
-------La
construction, sur le domaine d'El-Alia, d'une station de zootechnie qui
permettra de développer les applications de cette discipline si
importante ;
-------L'aménagement
d'une nouvelle station de météorologie'
-------L'aménagement
d'une autre cuverie en silos à grains.
-------L'équipement
des puits, l'installation de réseaux de canaux de distribution
dans les diverses exploitations et stations.
------Vacherie et porcherie, décimées
par la fièvre, aphteuse et la peste porcine au cours de ces dernièress
années ont été entièrement renouvelées
avec des géniteurs de race pure Schwytz et Large-White importés
de la_ Métropole.
------Les exploitations annexes sont condamnées
à subir un nouveau et profond remaniement par,suite du projet d'urbanisme
et d'industrialisation, de la' région de l'Oued-Smar, qui va les
amputer d'une centaine d'hectares-; les transactions sont en bonne voie
et des compensations très importantes permettront -de maintenir
la consistance des propriétés à plus de 300 hectares.
RECHERCHES POURSUIVIES
ACTUELLEMENT:
------Dans les domaine
des recherches, de nouvelles créations d'emplois de maître
de conférences, de chefs de travaux et d'assistants, vont, permettre
aux divers laboratoires d'intensifier leurs travaux, chacun dans. sa spécialité,
suivant les programmes arrêtés chaque année par, l'Inspecteur'
général, après avis du Conseil de la recherche et
'de, l'expérimentation.
------Un cinquième
fascicule des Annales de l'Institut va paraître prochainement. La
bibliothèque générale est en voie de réorganisation'
------Ajoutons
aussi que vient de commencer la construction, pour le Service de l'expérimentation
dont le siège central est à l'Institut agricole, d'une Station
centrale d'améliozations des plantes, qui le dotera d'un' instrument
de travail de premier ordre, pour h' création de nouvelles variétés
de plantes cultivées.
------Pour
la, viticulture et l'arboriculture, un programme de vignoble et vergers
de collection et d'expérimentation permettra la mise au point des
techniques modernes à leur appliquer.
------En un
mot; l'Institut agricole 'd'Algérie, et c'est son ambition, tend
de plus en plus â devenir, tant par ses activités d'enseignement
que de recherches,' le véritable cerveau technique de l'agriculture
algérienne. Sa. liaison avec les autres services -techniques agricoles
et les o stations régionales d'experimen-n tation est assurée;
d'abord par sons directeur,' qui, 'en tant ?qu'Inspecteur; général,
contrôle ces divers services sur l'ensemble du territoire algérien,
et- aussi par le faitque la plupart des chefs de services du Gouvernement
général sont chargés' de cours, à l'Institut.
------Ce n'est
plus seulement l'établissement d'enseignement créé
par ses fondateurs. C'est un ensemble complexe, comprenant essentiellement
:
------*
Une Ecole nationale d'agriculture
------*Un
-centre, de recherches agronomiques
------*Des
domaines jouant le rôle de stations expérimentales.
------La promotion
de l'Institut agricole d'Algérie dans la hiérarchie des
établissements d'enseignement agricole ne marque pas pour nous
une fin, mais bien au contraire, le début d'une ère nouvelle
de travail et d'activité, surtout si comme nous l'espérons,
des moyens d'action accrus en, personnel et matériel sont mis à
notre disposition. Les projets, constructions et programmes rappelés
ci-dessus, peuvent paraître ambitieux à une époque,
où les moindres réalisations se heurtent encore à
tant de difficultés ! Ils repésentént avant tout
un acte dé foi dans l'avenir des destinées françaises
de ce pays.
M.
BARBUT,
Inspecteur général de l'agriculture en Algérie, Directeur
de l'Institut agricole d'Algérie.
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