Alger, Algérie : documents algériens
Série économique, agriculture :
L'institut agricole d'Algérie
École Nationale d'Agriculture et Centre de recherches agronomiques
n°41 - 20 janvier 1918

-------C'est en 1935, sur un projet établi pat le Dr Trabut et Roger Mares, à la demande de M, de Peyerimhof, directeur de l'Agriculture et de la Colonisation, et proposé à l'adoption des Délégations financières, qu'un établissement dit "Ecole d'Agriculture algérienne " était créé sur le plateau de Belfort, à 12 kilomètres d'Alger, à l'emplacement de l'Institut actuel. Cette école, succédât à la ferme établie à Rouiba, en 1898, sur un domaine de 15 ha appartenant à M. Decaillet, et qui fut le premier établissement d'enseignement agricole qui ait fonctionné en Algérie.

mise sur site le 23-01-2005
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------C'est en 1935, sur un projet établi pat le Dr Trabut et Roger Mares, à la demande de M, de Peyerimhof, directeur de l'Agriculture et de la Colonisation, et proposé à l'adoption des Délégations financières, qu'un établissement dit "Ecole d'Agriculture algérienne " était créé sur le plateau de
Belfort, â 12 kilomètres d'Alger, à l'emplacement de l'Institut actuel. Cette école, succédât à la ferme etablie à Rouiba, en 1898, sur un domaine de 15 ha appartenant à M. Decaillet, et qui fut le premier établissement d'enseignement agricole qui ait fonctionné, en Algérie.

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Les débuts furent anodestes, mais le succès s'affirma peu à peu, et déjà, en 1914 lorsque par suite, de la mobilisation de ses professeurs l'école dut fermer ses portes, elle pouvait, s'enorgueillir d'avoir en 9 ans, dispensé son enseignement,à 180 élèves. 25 d'entre eux et un de leurs professeurs trouvèrent une mort glorieuse sur les Champs de bataille, pendant la grande guerre.

LES DIFFÉRENTES ETAPES DE L'ORGANISATION.

------Àl'origine, l'établissement de Maison-Carrée comportait en réalité deux écoles distinctes
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-------L'une, l'Ecole d'Agriculture proprement dite, était destinée aux jeunes gens pourvus d'une- nstruction générale suffisante pour recevoir' tin enseignement d'un niveau assez élevé ,
------L'autre, la ferme-école, donnait un enseignement surtout manuel, conçu pour la formation de bons ouvriers et de contremaîtres agricoles.

------La juxtaposition de ces deux établissements présenta des . inconvénients et la ferme-école fut transformée, en 1908, en section préparatoire à l'École d'Agriculture proprement dite,_ dans le but de faciliter le recrutement des élèves.
------En fait, on reconnut très vite que pour suivre avec profit des études agricoles d'ordre supérieur, des' connaissances générales assez développées étaient nécessaires et que l'enseignement universitaire ,constituait, en réalité, pour' -les candidats, la meilleure préparation. Aussi, en,1914, à 1a suite des travaux d'une commission nommée par le Gouverneur général Lutaud, pour mettre au point un programme de reeherehes, d'expérimentation et de vulgarisation agricoles, qui tint 'ses `assises sous' là- présidence du distingué directeur de' I' Agriculture d'alors, M. Brunel, une conception`nouvelle prévalait et la section préparatoire était supprimée.

------L'école rouvrit ses portes en 1919 et .cette réouverture. marqua ,pour elle le début d'une ère de grande prospérité, dont le mérite revient pour une large part à un homme dont il convient de rappelër, ici là mémoire : Pierre Chervin, ingénieur agricole de Grignon, ancien. directeur de''1'Ecole' coloniale de Tunis, que M. Brunel avait appelé à ses côtés comme sous-directeur de l'Agriculture et, dont il n'est pas excessif d'affirmer` qu'il est le véritable créateur de l'Institut.;. agricole sous sa forme actuelle.

------Sous son impulsion, l'enseignement fut entièrement réorganisé, le niveau du concours d'entrée fut relevé, de, nouvelles chaires- furent créées, les bàtiments d'internat, furent à grandis, des laboratoires modernes, bien outillés, furent construits et, à l'achèvement de, ce vaste programme, vers 1922, 1'établirsemen de Maison-Carrée, complètement transformé et devenu par arrêté du. 28 février 1921,
"Institut agricole d'Algérie ", pouvait supporter très avantageusement la comparaison avec les grands établissements d'enseignement supérieur agricole de la Métropole et de l'Étranger, La valeur, reconnue de son enseignement permettait d'attribuer aux élèves ayant satisfait aux examens de finn 'études un diplôme d'ingéliièur: En même temps, les professeurs, chefs, de 'laboratoires; prçnaient une part plus active aux travaux de recherches et d'expérimentation intéressant l'agriçultùre nord-africaine.

------Le recrutement répondit aux espérances. Dès 1919, 102 candidats, se présentèrent au concours d'entrée et ce nombre augmenta progressiveiment pour atteindre, en 1925, et se maintenir jusqu'en 1932, a un chiffre supérieur à 200.

------La, crise économique qui atteignit, en 1930 et 1935, l'agricûlture algérienne, eut sa répercussion à l'Institut agricole, comme, d'ailleurs dans les °établissements similaires de la Métropole, et le chiffre le plus bas fut atteint en 1936, où il ne présenta que 62 candidats.:

------C'est a ce moment que la direction de l'écolé fut confiée , à titre intérimaire à Emile Vivet, sous-directeur de l'agriculture au Gouvernement genéral , qui mit au service de l'institut, qu'il avait contribué à créer et où depuis l'origine il enseignait avec talent et autorité là viticulture dont il était le spécialistes indiscuté, ses grandes qualités et son prestige moral. Sous son impulsion , avec la collaboratior du secrétaire general actuel, un redressement rapide s'amorça, et appelé à lui succéder à la fin de J'année scolaire 1936-1937, je n'eus qu'à continuer dans l'a voie si bien tracée. A ce titré, Emile Vivet, que nous avons eu la douleur de perdre il y a quelques mois, mérite de voir son nom associé à ceux des Brunel et Chervin,' et. nous espérons que son souvenir sera bientôt matérialisé dans notre établissement par un monument digne de lui.

------Dès 1937, 107 candidats se présentaientt àu conc>urs d'entrée: En, 1938, ce nombre atteignait 134 et il ne fit que `croître clans les années suivantes : 184 en 1939, 202 en 1940, 219 en 1941. Le chiffre record, 317, fut atteint en 1942. Pourtant, par suite de là mobilisation de son personnel enseignant, l'Institut dut interrompre son fonctionrlement pendant l'année scolaire 1939-1940: Il, abrita cette annéelà les élèves des écoles pratiques d'agricul'ture, de l'Algérie.
Grâce à cette amélioration rapide et sensible du recrutement, il fut possible
------a) De supprimer en 1940 l'admission sans concours dont pouvaient bénéficier jusque-là les candidats possédant le baccalauréat ou le "brevet:: supérieur
------b) De refondre le programme des matières et des conditions du concours d'entrée, en vue d'une assimilation plus complète avec les Ecoies nationales d'Agriculture métropolitaines. En mémé temps, il fut procédé à des réformes intérieures : modifications des horaires des cours et
applications, aménagement des chaires de technologie, Chimie-Oenologie, Génie rural, par un groupement plus rationnel des disciplines, création d'un cours de comptabilité, réorganisation de la pratique agricole, des voyages d'études, création avec le concours de divers organismes profersionnels et notamment de la Chambre d'Agriculture d'Alger, de prix et de bourses de voyage et de stage; refonte du règlement des stagiaires-preparateurs, avec création de certificats de spécialisation, etc... Toutes ces mesures avaient pour, but essentiel d'àsurer une progression plus, judicieuse et, partant, une oefficacité plus gràrtde-de l'enseigneraient, tant pour les élèves en cours d'études que pour ceux qui, après obtention de leur diplôme, ;désiraient compléter leur formation en se, spécialisant.

------Il faut y ajoutes la création, par un arrêté gubernatorial, du 24 avril 1942, d'une troisième année d'études,. inspirée par les dispositions de l'article 12 de l'acte dit loi du 5 juillet 1941, portant organisation de I'ensëignem nt ,agronomique dans la Métropole. Conçue "suivant une formule otiginale,, mise au point au cours de' réunions nombreuses auxquelles participèrent, en dehors des membres du corps enseignant, des anciens élèves et des pessonnalites agricoles émérites, cette troisième année comportait des matières à option, dès stages pratiques et amorçàit une spécialisation 'des étudiants.

LES RECHERCHES ET L'EXPERIMENTATION AGRICOLES

------Parallèlement, pendant cette période; un effort très important, était fait dans le `domaine des Recherches et 'de l'Expérimentation
------*Orientation des exploitations annexes vers la production des semences selectionnées (centre de l'Oued Smar).
------*Acquisitions et locations ayant permis de porter de 120 à 300 hectares l'étendue de ces exploitations
------*Création d une porcherie de géniteurs Large-White
et d'une station d'exiiérimen'tation maraîchère ;
------*Agrandissement des champs d'essais du laboratoire d' agriculture et de génétique appliquée
------*Participation accrue des divers laboratoires, aux recherches et aux travaux intéressant 1'économie agricole algérienne (industrialisation,, lutte -antiparasitaire, etud agrologiques diverses, étude méthodique des produits agricoles nord-africains, contribution aux retîherches relatives aux énergies de remplacement, etc...).

------Ces travaux, rendus possibles par une augmentation sensible, quoiqu'encore très insuifis'ainte, du personnel, dé chefs de travaux preparatéurs et assistants, permirent la publication d'annales dé l'Institut agricole et des Services de recherches et d'expérimentation agricoles de l'Algérie dont le premier numéro parut en 1941)

------L'Institut agticole d'Algérie devenait, pëu à peu un véritable " Centre de recherches agronomiques"

 

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ACTIVITE ENTRE 1942 et 1945.

------Telle était' la situation de l'établissement en novembre 1942,, lorsque son fonctionnement et son essor furent interrompus par la reprise des hostilités.

------ Pendant' ces, trois années qui suivirent, privé par la mobilisation d'une partie de son personnel enseignant et de la presque'' totalité de ses étudiants, qui, appelés ou- engagés, rejoignirent dès le début les forces armées, françàlses, il n'eut auct#rie' activité d'enseignement.

------Par -contre, ans le- domaine scientifique et technique; ,les, divers 'laboratoires prirent une par aussi active "que le" permettaient le personnel et les. 'moyens réduits dont ils disposaient à, d'effort de guerre de l'Algérie, Citons. entre autres travaux poursuivis Pendant cette pêriode
------- La contribution très importante du Laboratoire d'agriculture, dont le professeur devint en 1943 le chef du 'Service de l'expérimentation nouvellement créé au développement des cultures nouv îles( oléagineux, textiles, alcooligènes) et à :la production locale' des plants et semences (céréales, pommes de terre; `plantes industrielles et fourragères) que l'importation ne pouvait plus nous fournir ;.
------- La participation très active du laboratoire de Zoologie aux campagnes antiacridiennes de 1943 a 1945 ;
-------Les études relatives' aux fermentations formeniques et au gaz de fumier
-------La collaboration du' labtlrato4re de Technologie aux études relatives à l'industrialisation de l'Algérie, à là chaine du froid et ses travaux originaux sur la déshydratation des légumes et des fruits, notamment par 'utilisation de la chaleur solaire ;
-------La recherche, par le laboratoire de Viticulture, des moyens d'économiser le cuivre et le soufre clans la lutte contre les 'parasites ' de la vigne
-------L'étude, au laboratoire de Zootechnie, d'aliments dé remplacement `pour' le..-bétail.

------Sur l'initiative. du Recteur Laugier, alors directeur du Centre -national .de la recherche scientifique, un Comité de la' recherche agrünomique ftît créé en 1943, dont la présidence fut assurée par le directeur' de l'Institut agricole, déjà chargé, depuis 1939,,de la direction, de; la Production agricole en Algérie, et aux- travaux duquel les professeurs et chefs de travaux non mobilisés apportèrent une contribution importante et efficace.

------Dans le méme temps,, sur, les champs de bataille, maitres et élèves mobilisés rivalisaient d'héroïsme. et participaient. glorieusement', en Tunisie; en Italie,puis en France et en Allemagpe, aux combats de la libération : 27 morts au Champ 'd'honneur, dont 15 etéves en cours d'études ; 90 citations portant témoignage de leur patriotisme et de leur, esprit 'de' sacrifice. - Dans ce domaine' aussi, l'Institut - agricdle a fait largement son dévôir.

REORGANISATION.

------Le 14 novenibre '1945, n'ayant pas encore effacé toutes les traces d'une, occupation militaire de,'près' de trois années, l'Institut rouvrait 'ses portes pour recevoir, avec ses étudiants en, cours d'études en 1942, ceux que divers concours, organises en 1943, 944 et 1945,avaient permis recruter,

------51 élèves de seconde année, -63 de la, première- anfiée, àuxquels il faut ajouter une vingteaine d'auditeurs libres et de stagiaires divers, suivireùt lés cours d'e'l'année scolaire 1945- 1946;

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Pour tenir compte du retard apporté par là guerre- dans leurs études, ces élèves héneficterent encore du régime de deux années d'études, l'application du,, régime de trois années ayant été reportée à la rentrée scolaire de 1946.

------Entre temps est intervenue, d'ailleurs, la loi d'assimilation qui soumet desornais notre etablissement ,
devenu l'Ecole nationale d'agriculture d'Alger,, au régime dés Ècoies; nationales métropolitaines.:

------La fin des hostilités permit aussi, de reprendre le programme de constructions, èt d'aménagements interrompu par la guerre. Sont actuellement réàlisës ou en cours
------- La -construction commencee en 1942, d'un vaste . bütiment destiné à' abriter la Teebdologie, la Zoologie et le 'Laboratoire central de l'office antiacridien ;
------- La transformation des bâtiments d'internat en chambres a un ou deux lits qui amelioreront le confort de là vie " estudiantine'" à l'Innstitut
------- La construction, rendue nécessaire par la création de la troisième année d'études, d'atnphitheatres et le regroupement des locaux administratifs ;
------- Là sü'rélévatibti da laboratoire de Zootechnie
------- La construction, pour le laboratoire d'agrologie de nouvelles cases lysimetriques
------- Divers aménagements pour la station d'Horticulture qui a succédé à l' ancienne;' station botanique, complètement transformée ;
------- D'ivérs aménagements au bâtinffent dé l'Economat
-------La construction en -accord avec la, délégation générale au, plan, de prototypes d'habitations rurales pour les ouvriers musulmans .
-------- L'aménagement de divers logements pour le personnel
-------La construction de hangars à la ferme principale et aux ateliers.

------Sont en projet
-------L'agrandissement de la station ,de' Génie rural
-------La transformation de la fumière de la ferme principale et d'une cuverie désaffectée à El-Alia, en vue de la production industrielle de gaz de' fumier
-------La construction, sur le domaine d'El-Alia, d'une station de zootechnie qui permettra de développer les applications de cette discipline si importante ;
-------L'aménagement d'une nouvelle station de météorologie'
-------L'aménagement d'une autre cuverie en silos à grains.
-------L'équipement des puits, l'installation de réseaux de canaux de distribution dans les diverses exploitations et stations.

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Vacherie et porcherie, décimées par la fièvre, aphteuse et la peste porcine au cours de ces dernièress années ont été entièrement renouvelées avec des géniteurs de race pure Schwytz et Large-White importés de la_ Métropole.

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Les exploitations annexes sont condamnées à subir un nouveau et profond remaniement par,suite du projet d'urbanisme et d'industrialisation, de la' région de l'Oued-Smar, qui va les amputer d'une centaine d'hectares-; les transactions sont en bonne voie et des compensations très importantes permettront -de maintenir la consistance des propriétés à plus de 300 hectares.

RECHERCHES POURSUIVIES ACTUELLEMENT:

------Dans les domaine des recherches, de nouvelles créations d'emplois de maître de conférences, de chefs de travaux et d'assistants, vont, permettre aux divers laboratoires d'intensifier leurs travaux, chacun dans. sa spécialité, suivant les programmes arrêtés chaque année par, l'Inspecteur' général, après avis du Conseil de la recherche et 'de, l'expérimentation.
------Un cinquième fascicule des Annales de l'Institut va paraître prochainement. La bibliothèque générale est en voie de réorganisation'
------Ajoutons aussi que vient de commencer la construction, pour le Service de l'expérimentation dont le siège central est à l'Institut agricole, d'une Station centrale d'améliozations des plantes, qui le dotera d'un' instrument de travail de premier ordre, pour h' création de nouvelles variétés de plantes cultivées.
------Pour la, viticulture et l'arboriculture, un programme de vignoble et vergers de collection et d'expérimentation permettra la mise au point des techniques modernes à leur appliquer.

------En un mot; l'Institut agricole 'd'Algérie, et c'est son ambition, tend de plus en plus â devenir, tant par ses activités d'enseignement que de recherches,' le véritable cerveau technique de l'agriculture algérienne. Sa. liaison avec les autres services -techniques agricoles et les o stations régionales d'experimen-n tation est assurée; d'abord par sons directeur,' qui, 'en tant ?qu'Inspecteur; général, contrôle ces divers services sur l'ensemble du territoire algérien, et- aussi par le faitque la plupart des chefs de services du Gouvernement général sont chargés' de cours, à l'Institut.
------Ce n'est plus seulement l'établissement d'enseignement créé par ses fondateurs. C'est un ensemble complexe, comprenant essentiellement :
------* Une Ecole nationale d'agriculture
------*Un -centre, de recherches agronomiques
------*Des domaines jouant le rôle de stations expérimentales.

------La promotion de l'Institut agricole d'Algérie dans la hiérarchie des établissements d'enseignement agricole ne marque pas pour nous une fin, mais bien au contraire, le début d'une ère nouvelle de travail et d'activité, surtout si comme nous l'espérons, des moyens d'action accrus en, personnel et matériel sont mis à notre disposition. Les projets, constructions et programmes rappelés ci-dessus, peuvent paraître ambitieux à une époque, où les moindres réalisations se heurtent encore à tant de difficultés ! Ils repésentént avant tout un acte dé foi dans l'avenir des destinées françaises de ce pays.

M. BARBUT,
Inspecteur général de l'agriculture en Algérie, Directeur de l'Institut agricole d'Algérie.