Alger, Algérie : documents algériens
Série économique, élevage :
station du Kroubs , la station expérimentale d'élevage d'Algérie
n°40 - 8 janvier 1948

L'Algérie qui tire de ses animaux une grande partie de sa richesse, ne pouvait rester etrangère à l'essor de la recherche zootechnique mondiale.

mise sur site le 23-01-2005
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-------La dernière guerre vient confirmer l'importance de la production animale dans l'économie générale d'un pays. Les difficultés des multiples problèmes posés au pouvoirs publics, toutes les fois que la viande, le cuir, la laine, la matière grasse se sont même momentanément raréfiés sur le marché, ont contribué à donner à l'élevage et aux industries qui s'y rattachent une place prépondérante dans l'échelle des activités d'une Nation.

-------En Afrique du Nord, la production, animale a pris rang aux côtés des productions les plus lucratives et rien, de ce qui la touche de prés out de loin ne doit plus être négligé. Or, dans tous les ,pays d'élevage "petits ", comme le, Danemark ôü "grands " comme la Russie, dés capitaux .immenses furent .affectés à la construction de laboratoires spécialisés et, notasnment,,des stations expérünentales zootechniques (En Afrique du Sud, la station d'élevage de Jonderstooport est devenue une ville desservie par chemin de fer spécial). Mesure-t-on, 'en effet, ce qu'apporterait; au revenu national, l'application d'une technique qui, ,par exemple, , augmenterait d'un litre seulement le rendement journalier moyen d'.une vache laitière' ?

-------L'Algérie qui tire de ses animaux une grande partie' de sa richesse, ne pouvait rester' etrangère à l'essor de ,là recherche zootechnique mondiale. Trouette, qui présida pendant plusieurs années aux destinées de l'élevage algérien, l'avait, mais en vain, maintes fois rappelé. -En 1942, les Délégations financières,_ reprenant un voeu formulé en 1 939, admirent le principe de la' création d'une Station expérimentale d'élevage. Celle-ci fùt installée, le 1er octobre 1945, sur le vaste domaine dit' " du Baraouia " situé entre le Khroubs et Constantine, au Nord-Ouest de la-ligne-de chemin de fer et de la route nationale n° 3. Etablie :en plein centre d'élevage, elle dispose, à sa porte, d'un marché fort important, elle est voisine d'une grande gare, d'une grande route et d'un aérodrome (Oued- Hamimine). D'une superficie totale de 1.500 Hectares, le -domaine -comporte 1.100 hectares de terres cultivables,120 hectares de prairies naturelles ou irrigables, 200 hectares de terraiiis de parcours.
C'est là que s'édifient, peu à; peu, les bâtiments du futur; centre ;des recherches consacrées à l'élevage algérien et.à ses industries annexes',

BUTS.

-------On peut t classer les différents problèmes qui intéressent en Algérie la production des animaux et les industries qui s'y rattachent de la façon suivante:

a). Problèmes scientifiques.
-------Quelles sont les réactions de nos animaux aux différents facteurs qui constituent le -milieu ? Comment pourquoi, dans quelles conditions se font-elles ? Peut-on et comment hypertrophier, les unes, si elles sont profitables, et. annuler les autres ? Quelles sont les réactions de nos a .ni-maux à l'égard des virus et des parasites, quels sont less moyens à mettre en œuvt pour les combattre , _Quelle série de réactiQns faut-il 'declencher pour obtenir un meilleur rendement de- la -machine animale etc... , et c...
-------Nous ne donnons ici qu'un -aperçu du questionnaire dont on devine l'ampleur et on admettra aussi qu'il ne' peut être répondu à tout. Travaillant en` liaison etroite avec tous les chercheurs spécialisés, ,et, notamment avec l'Institut Pasteur d'Algérie,-lés laboratoires de Physiologie (Faculté des' Sciences d'Alger)., et de l'expérimentation agricole (institut Agricole de Maison-Carrée), la- station passera au crible des épreuves multiples toute conclusion énoncée en raison dé l'importance du matériel de contrôle dont elle disposera. -

b) 'problèmes economiques.

-------C'esf l' importance et la constance du bénéfice qui incite l'eleveur a améliorer son troupeau. Il y a donc lieu d'établir, au regard de chaque opération zootechnique, le bilan- Financier, ce qui implique pour chaque espèce, pour chaque production et pour chaque mode d'exploitation, le calcul du prix de revient dont on suivra les fluctuations en fonction des méthodes appliquées.

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Il y a lieu aussi de rechercher, avec précision, le juste équilibre à réaliser dans une expoitation entre la production animale et la production végétale et montrer les avantages et les inconvénients, lés réussites possibles et les échecs probables' de toute entreprise orientée vers l'élevage, que celui-ci soit du mode extensif ou du mode intensif, familial ou industriel.

-------A l'expérimentation zootechnique devra donc être adjointe une comptabilité détaillée, qui établira la synthèse des renseignements-,chiffrés obtenus et donnera aux éleveurs-la_liste des .éléments_ indispensables au calcul de leurs opérations commerciales. _

MOYENS.

-------Différentes sections se partageront l'étude du programme ainsi posé ; ce sont :
-------1°/La section " expérimentale, " -;
-------2° Lâ, sëëtiôn "élevage " ;
-------3° La section "'production agricole -"
-------4° La section " comptable ".

La section expérimentale -
-------L'expérience s'étendra a tous les problèmes qui touchent la production et l'utilisation de nôs animaux domestiques ;_ hygiené, alimentation, croissance, acclimatement , génétique animale, modes de reproduction et modes d'exploitation (viande, lait, peau, lame, etc...). Riche des observations déjà relevées par les producteurs algériens, régulièrement informée des, travaux entrepris dans le monde entier, la section expérimentale-s'attachera à l'étude des 'problèmes plus particuliers posés par l'exploitation des animaux en Afrique du Nord- (parasites, alimentations, acclimatement, viande, etc...).

La section élevage.
-------Ses efforts porteront sur la production des géniteurs réclamés par la production -algérienne.
-------L'Algérie' mahque, en effet, de baudets, qu'il faute lmporter a grands frais des rares pays demeurés producteurs et l'on sait la valeur dé nos mulets sur tous les marchés d'Afrique et d'Europe. L'industrie mulassière serait appelée à devenir une source de bénéfices élevés pour l'Algérie si nous produisions, en nombre suffisant, les mulets que nous réclame l'étranger. Encore faut-il présenter aux acheteurs des animaux de qualité : d'où nécessité d'àccoupler des baudets de choix et des juments qualifiées. D'où finalemertt la nécessité de procréer les pères de l'une, et de l'autre espèce.
Le problème de a production laitière est complexe. L'un de ses multiples asPects touche 1 utilisation_de, taureaux d'élite, Ces taureaux doivent appartenir, soit à la race autochtone, soit à une race adaptée ou, adaptable au :pays, posséder une généalogie connue et être indemnes de toute .maladie contagieuse. Il appartient à la station de livrer aux éleveurs ou mieux , aux Centres d'insémination artificielle de tels sujets. Elle les produira sur son propre terrain, contrôlera leur état sanitaire, fournira tous les elements utiles concernant leur asçendance

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Grand pays moutonnier jadis; la France a vu fondre, pour des causes diverses,, sa population ovine en quelques années. Il y a vingt :ans, on,comptait encore 270.000 mérinos dans le Chàtillonnais. Ils ne f sont plus que 2.000 aujourd'hui et, ,malgré les efforts des-autorités françaises, on n'enregistre aucune tendance à une augmentation sensible des troupeaux. Par contre, l'Algérie qui, à 800 km de 'Marseille,, se trouve à la porte des grands -marchés métropolitains, peut se permettre d'envisager la concurrence sérieuse des pays lointains, producteurs de moutons : Australie; Afrique du Sud, Amérique du Sud.

-------Il lui faut, toutefois, améliorer là qualité de ses ovins. Aussi, partout où l'agronomie autorisee une telle conception, devient-il rationnel de pratiquer le croisement mérinos autochtone pour-obtenir' le metis à deux fïns viande, laine. Encore faut-il, là encore, posséder les béliers nécessaires. Ce sera' un des rôles essentiels de la station que de livrer aux éleveurs les mâles de souche métropolitaine mais adaptes au pays, ,et susceptibles de résister aux, dures, conditions qui leur sont paxfois imposées . dans les -fermes. Nous signalerons, dans ce même chapitre, l'ensemble des travaux à entreprendre relatifs aux races ovines :autochtones, si riches de promesses. N 'dus ne savons pas, en' effet, ce que- nous réserverait: la sélection -poussée dans un troupeau richement nourri et rationnellement conduit, comme nous ne savons rien des aptitudes de-la ou des' races bovines de l'Atlas placées dans les, mêmes conditions.

-------Les mêmes procédés de travail presideront à 1'obtention des géniteurs dans les espèces caprine et galline.

-------La section " élevage de la station s'attachera en résumé; à procurer à l'élevage algérien non seulgment lés producteurs de choix qu'il réclame et qu'il doit importer à grands frais des divers pays d'Europe, mais encore à' mettre entre les -mains des utilisateurs -tous les éléments . contrôlables - palpables, si l'on nous permet cette imagé qui assurent- la- réussite' en _pareille matière.

Section de la production agricole

-------On en reconnaîtra l'importance si nous nous bornons à signaler qu'elle a la charge de fournir tous les aliments de base nécessaires à la nourriture du cheptell de la station. Son organisation constitue l'objectif n°1 du programme d'aménagement.'
-------Le plan de cultures adopté comporte deux types d'assolement selon'la qualité des terres : quadriennal, pour les terres riches, triennal, pour les terres légères.

Section comptable
-------Administration et comptabilité sont actuellement fusionnées.-L'organisation de la comptabilité en section autonome, sur le plan, expérimental ou zoo-économique, ne pourra être envisagée qu'en dernier lieu, c'est-à-dire une fois mises en route les autres sections. Nous avons vu plus haut quels en étaient les buts.

-------En résumé, la Station expérimentale d'élevage d'Algérie; véritable laboratoire de physiologie animale appliquée, centre de recherches biologiques et épizootiques, est appelée à constituer le guide permanent de l'élevage nord-africain et des industries qui s'y rattachent.
-------Dès à présent, elle est à la- disposition -des éleVeurs. Elle est -leur maison, leur poste de pilotage, .leur œuvre aussi. Sa mise .en, place, son amépagemeut_ont demandé et demanderont_ encore de longs efforts, beaucoup de compréhension, de patience et de ténacité. L'achèvement- d'un tel ouvrage n'est, cependant, pas encore . prochain. " Mais bien des esprits avertis en ont pressenti 1 importance et la-valeur. Et les encouragements n'ont pas manqué._ Lentement, pierre par pierre, tranche par tranche, la maison s'élève.
-------Elle sera digne de l'élevage algérien et des sciences expérimentales qui s'y rattachent, c'est-à-dire de la science française en Afrique du Nord.

Dr JORE D'ARCES,
Inspecteur-chef du Service de l'élevage en Algérie.