Alger, Algérie : documents algériens
Série économique : rôle de la métropole
Rôle de la métropole dans le développement économique de l'Algérie

15 pages - n°124- 25 septembre 1957

On voit donc que la politique menée par la France en Algérie est aux antipodes de ce que l'on entend communément par colonialisme ou impérialisme. Loin d'exploiter les richesses du pays à son seul profit, sans souci des populations qui l'habitent, la France s'est efforcée, par une action essentielle-ment humaine, d'inscrire l'empreinte du progrès, non pas seulement sur la terre, sur les riches plaines du littoral méditerranéen ou sur les sables du désert, mais dans l'âme des hommes

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------A la France incombe la responsabilité du développement économique de l'Algérie. Il est utile, pour faire justice de certaines accusations sommaires, de dégager les principes qui ont dominé son action.

INVESTISSEMENTS ECONOMIQUES ET INVESTISSEMENTS SOCIAUX

------Le moteur de tout développement économique est constitué, on le sait, par les investissements. Selon le type des investissements engagés, on distingue communément deux politiques de développement :

------Les investissements économiques : la politique d'investissements fait porter tous les efforts sur l'économie moderne seule. Elle est assurée d'avantages certains, surtout au point de vue financier ; une telle politique n'exige pas, en effet, de sacrifices financiers considérables, puisque les investissements engagés sont directement et immédiatement rentables. C'est le cas de l'exploitation du pétrole, des mi­nes, des installations énergétiques et de certaines cultures industrielles. Une partie des masses déshé­ritées, celles qui viennent à bénéficier de l'essor économique, se trouvent jetées sans transition du sec­teur économique traditionnel au secteur moderne au prix d'un déracinemeit total, sans que le sort de la masse, dans sa grande majorité, se trouve notablement amélioré. En effet, les créations d'emplois et de revenus, si elles sont parfois importantes, ne constituent toutefois qu'une conséquence seconde, l'objec­tif premier que recherchent les bailleurs de fonds étant naturellement la rentabilité des fonds engagés.

------Ainsi cette politique est le fait par excellence de l'initiative et des capitaux privés et prend souvent la forme d'un « Impérialisme économique » par lequel la nation la plus avancée économique-ment tient en tutelle plus ou moins dissimulée les nations sous-développées dont elle exploite les ri­chesses sans que les populations autochtones en retirent un bénéfice direct.

------Les investissements sociaux, au contraire, qui ont pour but l'élévation du niveau de vie et l'amé­lioration des conditions d'existence des populations, sont réalisés à fonds perdus et ne présentent donc aucune rentabilité. Aussi comprend-on qu'ils soient le fait de la puissance publique seule.

------Les problèmes particuliers posés par l'Algérie

------Pour juger- justement la politique que la France a choisie, il convient d'examiner rapidement les réalités sur lesquelles elle avait à s'exercer. On rappellera seulement les problèmes essentiels que la France avait tâche de résoudre :
------
La coexistence en Algérie de deux systèmes économiques :
------D'une part, une économie moderne, d'initiative européenne, fondée sur la spécialisation du travail, employant des moyens modernes et impliquant des échanges monétaires intérieurs et extérieurs in­tenses, qui occupe près du quart de la population, dont 57 % de Musulmans, ce qui suffit à montrer que les schématisations rapides selon lesquelles les distinctions ethniques et les distinctions sociales seraient superposables, ne reposent sur aucun fondement, d'autant que le pourcentage des Musulmans qui en­trent dans le circuit économique moderne s'accroî t de façon régulière.

------D'autre part, une économie traditionnelle, s'exerçant en circuit à peu près fermé et ne donnant lieu qu'à un commerce de caractère artisanal. Ce circuit économique est dominé par les préceptes de la religion islamique, ce qui détermine par exemple une certaine répugnance à l'égard du principe de l'assurance (dans 1a pensée que l'avenir n'appartient qu'à Dieu et que l'homme doit s'abstenir d'en ,Modifier le déroulement) et la survivance de coutumes archaïques, héritées d'une tradition sociale ou religieuse qui opposent souvent un obstacle considérable à tout effort de modernisation et en particu­lier a l'application des lois sociales à une catégorie de Musulmans particulièrement défavorisés. Ainsi le khamessat, forme de contrat traditionnellement pratiqué entre Musulmans, qui laisse seulement un cinquième des produits de la terre au fermier contre quatre cinquièmes au propriétaire. Ce système de contrat a été interdit par décret du Gouvernement et remplacé par le métayage. Autre exemple, la cornplexite extrême du régime de la propriété foncière, en milieu musulman, qui constitue unè des difficultés majeures en ce qui concerne l'application de la réforme agraire.

------Economie moderne : Musulmans       1,3
------------------------Européens        1
------Économie traditionnelle : 7,7
soit
10 millions d'habitants.

-------Le rythme galopant de l'accroissement de la population musulmane.
-------
Le déséquilibre entre les ressources et la population et les obstacles naturels que rencontre l'effort pour accroître ces ressources.

------L'ensemble de ces difficultés a imposé une politique faisant intervenir de pair investissements éco­nomiques et investissements sociaux.

------Interférence des préoccupations économiques et sociales

------On a eu toujours souci de ne point développer exagérément l'équipement social aux dépens de l'équipement économique. En effet, tandis qu'un équipement économique bien conçu accroît le revenu du pays et indirectement les recettes publiques, l'équipement social, hôpital ou école, crée une dépense publique durable. Tout service public nouveau que la destination en soit économique (route, voie ferrée etc...) ou sociale (hôpital, école), entraîne des frais de fonctionnement et d'entretien. Ceux-ci peuvent être chiffrés d'une manière précise dans certains domaines : en matière d'enseignement par exemple, l'incidence d'un investissement sur le budget coi ant s'élève à 13 % : ainsi chaque fois qu'un milliard est consacré à construire des écoles, une charge supplémentaire de 180 millions doit être portée dans chacun des budgets de fonctionnement des années ultérieures. Il en va de même en ce qui concerne l'équipement hospitalier et sanitaire, ainsi que dans certains secteurs habituellement rentables, comme celui du réseau téléphonique ; en effet, en Algérie, l'effort ayant porté essentiellement sur le « bled > beaucoup de lignes demeurent peu utilisées. Pour toutes ces raisons, il était nécessaire de synchroniser le développement de l'équipement économique et le développement de l'équipement social, afin que l'expansion suscitée par le premier fournisse les ressources permettant de faire fonctionner le second.

------Mais il y a plus, et la distinction tranchée entre la politique des investissements économiques et la politique des investissements sociaux perd beaucoup de son sens en Algérie, en raison de l'urgence des problèmes qu'il faut résoudre et qui dominent toute action possible.

------En effet, pour ne prendre que quelques exemples, l'institution du plan d'industrialisation qui a pour but de développer l'équipement économique de l'Algérie, a été déterminée par des considérations es­sentiellement sociales, puisqu'on y a vu avant tout un moyen de fournir à tous de l'emploi et d'élever le niveau de vie de l'ensemble de la population.

------Inversement, certaines initiatives dans le domaine social se sont inspirées de considérations éco­nomiques et ont eu des incidences économiques considérables. Par exemple, les constructions scolaires qui sont habituellement classées dans l'équipement social ont en fait, dans le développement économi­que, un rôle qui, pour n'être pas chiffrable, n'en est pas moins certain : régression de l'analphabétisme, valorisation de la main-d'oeuvre locale employée sur place ou allant travailler en Métropole, création de cadres locaux par le développement d'un enseignement technique et professionnel orienté aussi pré­cisément que possible dans le sens des exigences concrètes de l'agriculture et de l'industrie.

------L'analyse de deux exemples parmi d'autres, montre a l'évidence que, en ce domaine aussi, la dis­tinction traditionnellement admise entre équipement économique et équipement social ne repose sur aucune base réelle.

------En effet, en Algérie, tous les investissements économiques s'inspirent de considérations sociales et ont des incidences dans le domaine social, et nombre d'investissements sociaux s'inspirent de considé­rations économiques et ont des incidences dans le domaine économique.

------Cela parce que la politique de la France en Algérie est dominée par des impératifs humains : améliorer les conditions de vie de tous les habitants en leur apportant le progrès, et faire progresser les hommes pour leur permettre de jouir de ce progrès. Rien ne sert en effet de doter les populations d'équipements économiques et sociaux si l'on ne les a pas préparés à s'en servir et à comprendre l'uti­lité qu'ils revêtent.

------Aussi, a été entreprise une action humaine, c'est-à-dire, une action pour les hommes en même temps que sur les hommes.

------Modalités de la politique suivie

------Elle se caractérise par son caractère humain à la fois dans sa nature même, dans ses buts et dans ses dimensions. Elle a pris différentes formes que nous rappelerons rapidement.

------Un important réseau médical et hospitalier a été mis en place. Depuis la guerre, par exemple, le nombre de lits d'hôpital a plus que doublé, passant de 14.000 à 32.000 tandis que le nombre des malades hospitalisés atteignait près de 300.000 en 1956 ; le nombre des équines sanitaires mobiles qui parcourent le pays et apportent dans les coins les plus reculés soins et hygiène, a été multiplié. De plus, on assiste actuellement  une déconcentration systématique du personnel et de l'équipement médico-social.

-------Un effort scolaire de grande envergure a été entrepris afin de hater la promotion humaine des masses et de développer la capacité d'emploi : 1.230 classes devraient etre construites en 1956, soit plus de 3 par jour ; 1.500 dans le cours de l'année 1957, soit 4 par jour. Mais les circontances n'ont permis de réaliser que partiellement ces programmes. Cet effort s'est exercé aussi dans le domaine de l'enseignement technique qui doit fournir à l'industrie et à l'agriculture les techniciens dont elle a besoin, dans le domaine de la formation professionnelle des adultes et de la lutte contre l'analphabétisme.

-------Les centres sociaux ont pour tâche d'élever le niveau culturel des masses en leur donnant, outre un enseignement de base (hygiène, soins médicaux, utilisation des ressources locales, orientation professionnelle, etc...) une formation sociale au sens le plus large.

------- Une action humaine, par sa nature même, a été exercée par l'intermédiaire des organismes chargés de dispenser l'assistance technique aux communautés villageoises, ce qui constitue un des investis­sement les plus généreux et les plus féconds. Le paysanat en donnant des conseils, en fournissant des moniteurs et du matériel lourd au fellah, en introduisant de nouvelles cultures et de nouvelles métho­des, a amélioré les procédés de production et les rendements de l'agriculture traditionnelle qui fait en­core vivre une grande partie de la population.

-------En outre, un effort considérable a été réalisé par les services chargés de la restauration des sols, pour conserver ou accroître le patrimoine de terres cultivables. C'est ainsi que 200.000 hectares ont été gagnés ou protégés.

-------On a travaillé aussi à développer le crédit agricole, à le disperser de manière à rapprocher les organismes de crédit de l'agriculteur qui en a besoin et à en assouplir les conditions pour permettre à la grande masse des fellahs d'en bénéficier.

-------Une action humaine par ses dimensions a été accomplie et a tendu à réaliser nombre de petits aménagements ruraux : multiplication de travaux d'apparence modeste, d'hydraulique agricole et pas­torale, aménagement des chemins ruraux, amélioration de l'habitat rural, installation de postes télépho­niques (dont le nombre s'est accru d'un tiers entre 1951 et 1955) tandis que le nombre des postes d'au­tomatique rural était multiplié par 4. L'ensemble de cet effort qui s'exerce « à ras du sol » avait pour fin essentielle d'inclure aussi rapidement que possible la majorité de la population dans le circuit des échanges économiques modernes. On trouvera plus loin (p. 5) une analyse plus approfondie de cet aspect de l'oeuvre de la France ; il enferme en effet tous les traits originaux de la politique suivie en Algérie.

-------L'artisanat traditionnel, grâce a une aide technique et matérielle fournie par les Pouvoirs Publics, a été rénové, protégé, soutenu.

-------La politique d'industrialisation a été dominée par des impératifs sociaux et humains (élévation du niveau de vie et création d'emploi). Aussi a-t-on très naturellement donné le pas sur la grande in­dustrie moderne à l'industrialisation « a ras de terre c'est-à-dire l'implantation de petites ou moyen­nes industries ayant un rapport direct soit avec les productions locales, soit avec le marché régional de consommation ; cette forme d'industrie est susceptible d'exercer une Influence plus profonde que la grande industrie moderne, du fait qu'elle est à la fois plus diffuse, plus proche des activités de base et plus prompte à améliorer le sort des populations. A ce type ressortissent la plupart des industries al­gériennes : industries alimentaires, industries textiles, briqueteries, petite industrie mécanique, etc...

------Les investissements exigés par une telle politique, à la différence des investissements économiques au sens strict, ne présentent qu'une rentabilite indirecte et très lente (souvent de l'ordre d'une généra­tion) et, par suite, ne sauraient être assumés que par la puissance publique.

------En outre, si l'on songe que les « investissements sociaux », au sens traditionnel du terme, consti­tuent le tiers des dépenses totales d'investissements, on voit qu'un tel effort excède largement les pos­sibilités du seul budget de l'Algérie et qu'il ne pourrait être soutenu sans le concours de la Métropole.

------La conséquence d'une telle politique d'investissement, dominée par les impératifs sociaux, est que l'élévation du niveau social est plus rapide que l'élévation du niveau économique. Elle a eu pour effet de transformer très rapidement une partie des besoins virtuels en besoins solvables, en déterminant une élévation artificielle du pouvoir d'achat ; il en est résulté un accroissement de la demande sen­siblement plus rapide que l'accroissement des ressources.

L'EQUIPEMENT DES REGIONS RURALES (T.I.C.)

------L'esprit de la politique suivie par la France en Algérie s'exprime parfaitement dans l'effort en­trepris pour équiper les régions rurales qui, à ce titre, mérite analyse.

------En 1946, année durant laquelle furent entreprises les études préparatoires à la mise en oeuvre du premier plan quadriennal de l'Algérie, un plan d'équipement rural fut lancé. Une circulaire fut adressée le 18 avril 1946 à tous les chefs de comm une pour leur prescrire de faire connaître les besoins de leur commune en vue de la réalisation, par ordre d'urgence, d'un ensemble de projets qui devaient contribuer à développer les possibilités économiques et améliorer les conditions de vie des populations.

------L'étude de ces propositions fit apparaître que bon nombre d'entre elles pouvaient difficilement être réalisées dans la première période quadriennale, du fait que les ressources des collectivités locales sus­ceptibles d'être affectées à leur financement étaient insuffisantes et que certains des projets présentés dépassaient le cadre communal.

------Aussi l'effort des communes aidées par l'Algérie porta-t-il d'abord sur les secteurs essentiels viabilité, hydraulique, scolarisation.

------C'est seulement au cours des années 1949 et 1950 que fut lancé, puis mis au point, le système des « Travaux d'initiative communale », grâce auquel de nombreux projets proposés dans les plans d'action communaux purent être entrepris.

------La formule T.I.C., comme le nom l'indique, tend à faire appel à la participation active des popula­tions des communes bénéficiaires des travaux et à laisser une grande liberté d'action aux Assemblées municipales et aux chefs de commune.

------Selon ce système et jusqu'à l'exercice qui vient de s'ouvrir, les projets T.I.C. étaient financés en ce qui concerne la viabilité de la petite hydraulique, au moyen de subventions de l'Algérie couvrant 70 % de la dépense et, en ce qui concerne les constructions scolaires, au moyen de dotations forfai­taires assurant en principe le financement intégral des travaux.

------Au cours des exercices 1955-56 et 1956-57, la formule T.I.C. fut assouplie afin de permettre un effort d'équipement massif dans certaines régions déshéritées et surpeuplées et la participation de l'Al­gérie au financement des projets de viabilité et d'hy draulique intéressant ces régions fut portée à 95 et même 100 % pour certains programmes spéciaux.

------Viabilité

------Dans le domaine de la viabilité, les objectifs, que l'on s'est assignés en établissant les programmes sont multiples. En effet, l'amélioration des chemins d'accès dans les douars conditionne leur dévelop­pement économique et la mise en oeuvre des réalisations sociales qui les intéressent. Si des chemins car­rossables sont indispensables pour permettre à l'entrepreneur chargé de construire des salles de con­sultations ou des écoles d'amener ses camions à pied d'oeuvre, ils ne le sont pas moins, pour donner aux agriculteurs du « bled » les moyens de substituer à l'économie familiale une économie d'échange en leur offrant la possibilité de transporter leurs produits.

------Le financement des projets de viabilité était jusqu'ici assuré à concurrence de 70 % par une sub­vention de l'Algérie et de 30 % par une participation de la commune qui en a demandé la réalisation.

------La diversité des travaux dotés ne permet pas d'évaluer avec précision le kilométrage des routes ainsi réalisées, mais on peut cependant estimer que de 1948 à 1956 le réseau rural de l'Algérie s'est en­richi d'environ 1.800 kilomètres de voies nouvelles, sans parler de pistes mises en état de viabilité per­manente afin que les ruraux puissent utiliser les moyens de locomotion modernes sur des itinéraires où ils ne pouvaient circuler jadis qu'en carriole ou à dos de mulet. Les chiffres suivants donnent une idée de l'effort accompli en ce domaine.

------En 1951-1952, le T.I.C. a doté 522 projets représentant un montant de travaux de près de 921 millions, les subventions de l'Algérie s'élevant à 643 millions ;

------En 1952-1953, le T.I.C. a doté 417 projets représentant un montant de travaux de plus de 1.026 millions. Subventions de l'Algérie : 712 millions ;

------En 1953-1954, le T.I.C. a doté 428 projets représentant un montant de travaux de près de 1.236 millions, subventionnés par l'Algérie à concurrencce de 873 millions ;

------En 1954-1955, 390 projets furent retenus, représentant un volume globale de travaux de 1.107 mil-lions, dont 766 à la charge de l'Algérie ;

------En 1956-1957, la participation de l'Algérie dans les travaux de viabilité T.I.C. a atteint la somme globale de 3.500 millions. Par ailleurs, et en raison de la situation exceptionnelle que traverse l'Algérie, un programme spécial de construction de chemins s'élevant à 2 milliards a été réalisé dans les régions rurales. Ce programme a été intégralement financé par le budget algérien.

------Hydraulique

------En ce qui concerne l'hydraulique, l'objectif des « Travaux d'initiative communale » est de parti­ciper à l'équipement hydraulique des régions rurales en multipliant les points d'eau et les petits ouvra­ges destinés à assurer l'alimentation en eau des hommes et des animaux. Ce n'est que depuis 1951-1952 qu'apparaît au budget extraordinaire de l'Algérie un crédit spécial pour les travaux T.I.C. d'hydraulique.

------Etant donné que les projets ne présentent pas de difficultés techniques, la réalisation en est entre-prise par les communes avec les moyens et la main-d'oeuvre dont elles disposent.

------Grâce à ce système, on a multiplié le nombre des captages-abreuvoirs, des fonçages de puits ; en outre, une place importante est réservée aux travaux d'alimentation en eau des écoles nouvellement construites. Enfin, depuis 1952, il a paru intéressant d'exécuter, suivant la formule T.I.C., certains tra­vaux d'hydraulique facilement réalisables avec la main-d'oeuvre rurale et intéressant le paysanat ou la lutte contre les eaux de ruissellement. Comme pour la viabilité, la participation locale devait atteindre au minimum 30 % du coût total des travaux.

------Les résultats enregistrés dans ce secteur sont particulièrement encourageants. Au cours des seules années 1951-52, 1952-53, 2.230 points d'eau ont été aménagés dans la campagne algérienne.

------La mise à exécution de ce programme a nécessité une dépense d'un montant total de plus de 920 millions, sur lesquels 640 ont été fournis par le budget algérien et 280 par les communes.

------Durant les exercices 1953-54 et 1954-55, une nouvelle tranche de 1.329 projets a été réalisée. Au cours de ces années, on ne s'est pas borné à de simples aménagements de points d'eau, mais les instal­lations d'eau potable ont été mises en place. Les dépenses se sont élevées à 834 millions, dont 580 four­nis par l'Algérie.

------Pour l'exercice 1956-57, les dotations du budget de l'Algérie effectuées aux travaux de petite hy­draulique entrepris par les communes ont atteint 450 millions pour les programmes normaux et 400 millions environ pour les programmes spéciaux.

------Scolarisation

------Le plan d'action communale élaboré en 1956, avait mis en lumière l'immense effort accompli dans le domaine de la scolarisation. Le problème apparaissait du reste comme particulièrement difficile pour les populations rurales car il fallait prévoir non seulement des constructions d'écoles, mais aussi des lo­gements destinés aux instituteurs. Aussi fut-il décidé, en fin 1949, pour intensifier les réalisations dans les régions rurales, d'appliquer pour les constructions scolaires la formule des « Travaux d'initiative communale ». ------On confia aux autorités administratives locales (administrateurs des Services civils, mai­res, président de centres municipaux) le soin de construire les petites écoles de douars (une ou deux classes et un logement) à l'aide d'une subvention de l'Algérie plafonnée au début à 70 % du montant de la dépense, le surplus étant couvert par des participations volontaires des intéressés.

------Dès le début de 1951, la subvention fut portée à 100 %, mais il fut décidé que cet sub­vention serait calculée d'après un coût maximum par élément (classe ou logement) qui serait fixé chaque année. On avait retenu, jusqu'à 1954, le chiffre de 2 millions avec possibilité de le porter à 2.200.000 francs dans le cas où les projets se heurteraient à des difficultés particulières d'exécution.

  -------La situation des constructions scolaires réalisées au titre des « Travaux d'initiative communale » s'établissait comme suit à la fin de 1955:
 

PROJETS DOTES

PROGRAMME
 
 

Classes

Logements

1950-51

164

131

1951-52

319

220

1952-53

147

105

1953-54

191

140

1954-55

202

147

------En 1955, la Commission d'équipement scolaire, universitaire et scientifique, dite « Commission Le Gorgeu », créée dans la Métropole, vit étendre sa mission à l'Algérie

-----Dès ses premiers travaux, il lui apparut nécessaire de faire une application de plus en plus large de la formule T.I.C. pour les constructions scolaires.

------Aussi un arrêté du 22 janvier 1955 décida que seraient réalisées, suivant ce système :

-------toutes les constructions scolaires édifiées dans les communes de plein exercice d'au moins 100.000 habitants ;

-------les constructions scolaires édifiées dans les autres communes pour tous les projets ne dépassant pas cinq éléments (classes ou logements).

------Le programme de scolarisation de l'exercice 1955-56 a porté sur 1.230 classes, dont 990 à réaliser selon la formule des « Travaux d'initiative communale ».

------En fait, les événements ont contraint certaines communes à différer leurs projets et le nombre des classes effectivement construites a été sensiblement inférieur aux prévisions.

------Pour l'exercice 1956-57 et conformément aux conclusions de la Commission Le Gorgeu, le nombre des classes à construire avait été fixé à 1.500, les deux tiers de ces projets devant être mis en oeuvre par les communes elles-mêmes. Comme durant l'année 1955-56 et pour les mêmes raisons ce programme n'a pu être que partiellement réalisé.

------Perspectives d'avenir

------La fin de 1956 et le début de 1957 ont vu la mise en place de la réforme communale. En application du décret du 28 juin 1956, 1.128 communes soumises à la loi du 5 avril 1884 ont été créées sur le terri­toire des anciennes communes mixtes.

------Ces nouvelles unités administratives ne disposent pour l'instant que de faibles ressources, aussi a-t-il été décidé de consentir en leur faveur un effort financier massif.

------A l'avenir, les projets intéressant l'équipement rural, qu'il s'agisse des travaux de construction de chemins ou de la petite hydraulique, seront financés à 100 % au moyen de subventions accordées sur le budget de l'Algérie, lui-même alimenté en quasi-totalité par des ressources provenant de la Métropole.

------Le montant des crédits affectés pour l'exercice 1957-58 à des travaux de viabilité réalisés dans l'intérêt des communes dépassera 7 milliards. Quant aux dotations consacrées aux projets de petite hydraulique entrepris par ces petites collectivités locales, elles atteindront, pour la même période, 700 millions de francs.

------En ce qui concerne les constructions scolaires, des dispositions ont été prises pour qu'à l'avenir la quasi-totalité des écoles soit construite en appliquant la formule T.I.C. Les communes seront donc asso­ciées plus étroitement encore que par le passé à l'oeuvre de scolarisation poursuivie en Algérie.

------La mise en route des services municipaux des nouvelles communes ne manque pas de soulever des problèmes délicats. En ce qui concerne leur installation matérielle, la difficulté sera levée grâce à l'aide financière massive du budget algérien.

------Il a en effet été décidé que l'Algérie fournirait aux' communes les dotations qui leur sont néces­saires pour entreprendre la construction de leurs mairies. Le programme lancé au cours de l'exercice 1957-58 portera sur un volume de crédits supérieur à 2.600 millions, y compris les crédits d'engage­ment.

------Pour assurer le succès de la réforme communale, des moyens financiers très importants ont donc été prévus au budget de l'exercice actuel, tant pour accélérer l'équipement économique et social des territoires compris dans les circonscriptions des nouvelles communes que pour en assurer l'équipement administratif.

ELEVATION DU NIVEAU DE VIE

------L'élévation du niveau de vie et de la consommation s'est trouvée accélérée aussi du fait que, outre l'action proprement économique, différentes mesures ont été prises afin d'accroître la somme des revenus distribués à la masse de la population.

------ Les hausses de salaires minimum, décrétées par les Pouvoirs publics ont, de propos délibéré, suivi un rythme beaucoup plus rapide que les augmentations accordées dans la Métropole. De 1947 à 1956, le salaire minimum industriel a été accru en France de 140 %. En Algérie, de 200 % dans l'agri­culture, et 220 % dans l'industrie et le commerce.

------Le décalage entre le salaire minimum industriel en France et en Algérie, qui était de 50 % en 1947, n'est plus que de 25 % actuellement (95 fr. 50 à Alger au lieu de 126 fr. à Paris). L'écart a donc été réduit de moitié en dix ans.

------Une législation sociale nouvelle assure la couverture de la plupart des risques susceptibles de frapper les travailleurs et leur famille ; accidents du travail, maternité, invalidité, décès donnent lieu à indemnisation, tant pour les travailleurs agricoles que pour les travailleurs de l'industrie, du com­merce et des services publics. Ces derniers bénéficient en outre d'une assurance-maladie, en sus de l'assurance médicale gratuite accordée à la ville comme à la campagne à toutes les personnes sans ressources.

------De plus, en dehors de l'agriculture, des allocations familiales sont conférées dans les mêmes con­ditions aux Européens et aux Musulmans ; le taux élevé des naissances en milieu musulman donne à ces allocations une justification exclusivement sociale et non démographique comme en France.

------En outre, il vient d'être créé un Fonds de solidarite qui attribuera une allocation à toute per-sonne âgée de plus de 65 ans dont les ressources sont inférieures au minimum vital calculé sur la base des conditions de vie de la France métropolitaine.

------Des améliorations de détail ou des élévations du taux des indemnités sont envisagées, mais des à présent l'Algérie se place, dans le domaine social, en tête des pays sous-développés.

------ Enfin, les travailleurs musulmans peuvent, librement et sans limitation, exercer un emploi en France métropolitaine.

------Actuellement, 300.000 Musulmans, soit 10 % de la population active algérienne, travaillent en Mé­tropole ; ils font parvenir chaque année à „heur famille demeurée sur place des sommes s'élevant à plus de 30 milliards de francs. Ceci représente pour l'Algérie une aide comparable à celle que cons­tituerait l'emploi dans un pays développé de 800.000 Egyptiens ou de plusieurs millions d'Indiens.

------Cette action s'est traduite par une élévation notable du niveau de vie des populations.

LES DIFFERENTES FORMES D'AIDE

------L'aide financière et commerciale

------Dans un pays autonome, réduit à ses ressources propres, la réalisation d'une politique semblable se serait heurtée à une impossibilité absolue ; à la vérité, elle n'aurait même pas pu être sérieuse-ment envisagée. Il n'eût pas été possible à la fois de préparer l'avenir par des investissements im­portants et d'augmenter dans l'immédiat la consomrnation ; seule, l'appartenance à la communauté financière et économique française pouvait permettre d'éviter ce dilemme.

------Aide en matière de finances publiques

------Au début, les investissements ont pu être financés en grande partie par les ressources fiscales algé­riennes et, par la suite, les finances de la France métropolitaine ont dû participer, de plus en plus largement, à la couverture des dépenses d'investissement.

------Couverture des dépenses d'investissement par la France métropolitaine

1948

24%

1952

53 %

1955

85 %

1956

80 %

------De plus, pour combler le déficit croissant du budget algérien, la Métropole a dû, à partir de 1955, accorder à l'Algérie une subvention d'équilibre destinée à compenser le développement insuffisant des ressources fiscales.

------Solde du budget algérien de fonctionnement :

1949

+12

1953

+ 6

1955

— 2

1956

— 19

------Au total, pour 1956, le budget de la France métropolitaine accorde à l'Algérie, au titre des dépen­ses civiles de fonctionnement et d'équipement, plus de 88 milliards de francs, soit 9.000 francs pour chaque habitant de l'Algérie.

------Pour mieux estimer l'ordre de grandeur de l'aide de la France, on peut calculer ce que d'autres pays recevraient si une aide du même montant par habitant leur était accordée.

------Pour l'Egypte, ce serait chaque année 210 milliards de francs (0,6 milliard de dollars), alors que le coût approximatif du barrage de Saad-El-Aali, dont le financement devait s'étendre sur plusieurs années, ne s'élevait qu'à 1 milliard de dollars environ.

------Pour l'Inde, un concours du même ordre atteindrait 3.400 milliards de francs chaque année, soit 10 milliards de dollars. Or, ce pays n'a pu inscrire plus de 8 milliards de roupies, soit 2 milliards de dollars, au titre de l'aide extérieure, pour le financement de son deuxième plan quinquennal. L'aide qu'il escompte n'atteint donc que 0,4 milliard de dollars par an, soit 1 dollar par habitant. Elle est 25 fois moins importante que l'aide accordée en 1956 par la France à l'Algérie.

------Aide en matière de commerce extérieur

------Cette aide financière se double d'une aide en marchandises ; le déficit du commerce extérieur de l'Algérie, entièrement couvert par la France, est croissant.

------Solde du commerce extérieur de l'Algérie (en milliards de francs)

1948

40

1952

62

1955

80

1956

— 120

------Encore convient-il de préciser que la moitié des exportations algériennes ne sont effectuées en France qu'avec le soutien des Pouvoirs publics français ou dans le cadre de marchés organisés de manière à favoriser les produits algériens. Tel est le cas du vin. des a.2rumes, des céréales.

------Perspectives de cette politique

------Un groupe de techniciens, connu sous le nom de Commission Maspetiol, après un examen compa­ratif de la pression fiscale entre la Métropole et l'Algérie, a analysé les conditions financières d'un plan de modernisation et d'équipement échelonné sur une décade, dont le financement serait assuré par des fonds publics en attendant le relais souhaité des capitaux privés.

------Sur cette base, la France s'est engagée à porter son aide budgétaire par étapes jusqu'à 150 mil-liards chaque année, à partir de 1962. Cette somme représente une augmentation de 75 % par rapport aux crédits de 1956.

L'objectif recherché est d'assurer en Algérie une amélioration du niveau de vie plus rapide qu'en France, sur une longue période, et ceci malgré le taux d'accroissement accéléré de la population algé­rienne.

------Il est prévu (d'autres études corroborent les perspectives du rapport Maspetiol) que la consom­mation privée totale doit augmenter chaque année de 6,5 % en moyenne par rapport au niveau de l'année précédente, ce qui, compte tenu d'une augmentation de 2.5 % par an de la population, doit permettre d'assurer une amélioration de 4 % environ du pouvoir d'achat.

------Les efforts d'une telle entreprise visent à :

-------Résorber le chômage en élevant à la dignité de travailleur environ 1 million de Français-Mu­sulmans non employés ou sous-employés.

-------Faire entrer dans le circuit monétaire et dans un système économique moderne près de 7 mil-lions de cultivateurs musulmans qui demeurent attachés à des pratiques agricoles archaïques, dont le revenu en argent est très faible et qui, par suite, ne disposent pas d'un pouvoir d'achat de nature à leur permettre d'intervenir dans le mécanisme d'expansion économique.

------Cet effort se traduit par :

-------La mise en chantier d'un programme de grands travaux qui doit assurer l'équipement de l'in­frastructure, réduire les prix de revient et remonter le handicap du coût de l'énergie et des frais de transports.

-------Un programme de réforme agraire, qui tend à remplacer soit la grande propriété, soit les do­maines de l'Etat ou des communes, par des petites propriétés capables d'assurer un niveau de vie con­venable au fellah et à sa famille.

-------Des opérations d'expropriation et de remembrement qui portent déjà sur près de 100.000 hecta­res ; une deuxième étape portant sur plus de 250.000 hectares est prévu. Parallèlement, l'installation d'un réseau de moniteurs agricoles sera effectuée et les moyens de culture seront mis à la disposition des nouveaux propriétaires.

-------Par ailleurs, il existe actuellement en Algérie 80.000 kilomètres de routes et pistes ; la construc­tion de 20.000 kilomètres de routes carrossables dans les dix années à venir est prévue.

-------Le programme de lutte contre l'érosion doit couvrir en dix ans la totalité des zones où les travaux sont urgents, soit 1 million d'hectares.

-------Pour accélérer au maximum le développement industriel, des mesures spéciales doivent être pri­ses pour reculer les limites de la rentabilité, au moins temporairement, et ceci, en dépit du caractère provisoirement artificiel de l'industrie ainsi obtenue. Les capitaux publics joueront en quelque sorte le rôle de ^atalyseurs destinés à faire affluer les capitaux privés.

-------Enfin, il est prévu de construire « en dur », dans les dix années à venir, 700.000 maisons.

AMPLEUR DE L'EFFORT METROPOLITAIN

------La charge qu'entraîne pour chaque Français l'effort de développement économique et la couverture des dépenses civiles (dépenses de caractère militaire exclues) des pays de l'Union française est en 1956, légèrement supérieure à celle qui incombe aux habitants des Etats-Unis, du fait de l'aide accordée par ce pays dans le monde.

------Exprimé en pourcentage du revenu -1,ational, l'effort français atteint plus du triple de l'effort amé­ricain ; or, il est bien connu que la capacité contributive croit plus vite que le revenu, c'est-à-dire que le sacrifice d'une portion identique des ressources est d'autant plus lourd que celles-ci sont plus fai­bles.

 

TOTAL

 

1956

   
 

Revenu national

Aide non militaire

 

France

En milliards de francs   

13.000

240

 

En milliards de dollars  

37

0,7

 

U.S.A.

En milliards de dollars  

300

1,8

 

B.I.R.D.

En milliards de dollars  

 

0,5

 
   

PAR HABITANT

 
 

1956

   
   

Revenu national

Aide

non       militaire

En        francs

France

.................       .........

300.000

 

5.600

 

En dollars

............................

860

16

 

1,9%

En dollars

U.S.A.

...........................         .

1.800

11

   

0,6 %

------Par rapport aux autres pays européen.: qui sont à la fois ses concurrents les plus actifs et ses par­tenaires naturels dans le marché commun en voie de :onstitution, la France subit, du fait de l'assistance qu'elle accorde aux pays sous-développés, un handi cap qui n'est pas négligeable.

------Une comparaison entre les masses de fonds accordés depuis la guerre par certains Etats ou organi­sations internationales qualifiées, à d'autres pays appelle aussi quelques commentaires

PERIODE 
    PRETEUR (ou donateur)   
MONTANT(en milliards de dollars
10 ans . 1947-1956
  B. I. R. D 
  2,9
 
France
3,9
4 ans . 1948-1951  
  Etats-Unis .
 
 
(Plan Marshall)
12,6
 
Dons à la France  
  2,6
(1) Compte tenu des différentes parités franc-dollar depuis 1947.

------Il apparaît que la France a donné des sommes qui sont du même ordre de grandeur que celles qu elle e reçues (l'aide reçue en dehors du plan Marshall étant sensiblement inférieure à celle des années 1948 à 1951). A la différence de la plupart des pays européens, la France n'aurait donc pas eu à sollici­ter une aide des Etats-Unis, si elle n'avait eu la charge de pays sous-développés.

------Les dons de la France aux pays sous-développés pendant les dix dernières années sont sensirlem"nt superieurs aux prêts de la Banque Internationale pour la Reconstruction et le Développement. De la part de la France, en effet, il s'agit de dons, puisque, lors même que des conditions de remboursement sont stipulées, elles demeurent fort avantageuses (taux d'intérêt 1,5 % ; délai de remboursement : vingt-cinq ans) et les collectivités débitrices ne peuventassurer le service des emprunts que grâce à une aide nouvelle qui leur est accordée régulièrement au cours des années suivantes (l'opération de rembourse-ment s'analyse donc en un véritable jeu d'écritures).

------II n'en va pas de même pour les prêts de la Banque Internationale, qui sont accordés isolément, pour des projets déterminés ; le service des intérêts et le remboursement conduisent à une charge vé­ritable et relativement lourde.

------Le programme de relèvement européen exécuté dans le cadre du plan Marshall constituait un sou-tien temporaire ; l'oeuvre entreprise par la France en Union Française est au contraire de très longue haleine. Toutefois, Je plan Marshall, aussi bien que t'aide de la France aux pays de l'Union Française, subviennent sensiblement aux besoins qu'ils se proposent de couvrir, de sorte que, dans les deux cas, des résultats positifs ont pu être obtenus. Au contraire, les projets, même les plus récents, qui ont été élaborés sur le plan international, prévoient un effort bien plus réduit ; les 100 millions de dollars de la Société Financière Internationale (International Finance Corporation), les 25u millions de dollars du Fonds Spécial des Nations-Unies pour le Développement Economique (S.U.N.F.E.D.) ne semblent pas en mesure de répondre au défi que pose la moitié sous-développée du monde.

Conclusion

------On voit donc que la politique menée par la France en Algérie est aux antipodes de ce que l'on entend communément par colonialisme ou impérialisme. Loin d'exploiter les richesses du pays à son seul profit, sans souci des populations qui l'habitent, la France s'est efforcée, par une action essentielle-ment humaine, d'inscrire l'empreinte du progrès, non pas seulement sur la terre, sur les riches plaines du littoral méditerranéen ou sur les sables du désert, mais dans l'âme des hommes ; d'apporter à ceux-ci à la fois les conditions d'une vie meilleure, et aussi la possibilité d'accéder à cette vie. Aussi, rien ne se-rait plus faux que de croire que l'action de la France s'est exercée seulement par capitaux interposés et de mesurer cette oeuvre au seul critère des quantités de capitaux investis. Sans doute est-ce là chose d'importance et déterminante. Mais l'essentiel de l'oeuvre française en Algérie, c'est cette action exercée par des hommes, techniciens, moniteurs, professeurs, ingénieurs, médecins, sur d'autres hommes, cette ac­tion faute de laquelle toutes les révolutions, économiques ou politiques, ne sont de rien.