-------Dès
1947, les chemins de fer algériens mettaient en uvre un vaste
programme d'investissements qui a permis de substituer la traction électrique
à la traction à vapeur sur la voie normale et de renouveler
une très notable partie du matériel roulant.
-------La
" diéselisation ", commencée en 1948, est actuellement
terminée sur les lignes à voie normale et commencée
sur celles à voie étroite.
-------C'est
ainsi que le premier réseau comprend actuellement 77 locomotives
Dieselélectriques, 4 fourgons automoteurs, 25 autorails et 41 locotracteurs
de gare. Le parc locomoteur du second est formé par 10 locomotives
Dieselélectriques, 91 locomotives à vapeur, 20 fourgons
automoteurs et 14 locotracteurs de gare.
-------Le
parcours moyen d'une locomotive Dieselélectrique pour voie normale
a été en 1953 de 103.949 kilomètres, celui d'une
locomotive à vapeur pour voie étroite de 20.511 km. On voit
ainsi l'avantage de la diéselisation.
-------Le
réseau électrifié (tout entier en voie normale) s'est
également développé. Dans la dernière période
quinquennale, sur la ligne minière, on a prolongé l'électrification
jusqu'à Tébessa, où une nouvelle sous-station de
transformation a été édifiée, et au Kouif,
à 259 kilomètres du port de Bône. Le développement
des voies électrifiées avec les antennes de Tarja, Ouenza
et Bou-Kadra, atteint maintenant 310 km le parc existant de 31 locomotives
électriques en service depuis plus de 20 ans, n'a cependant pas
eu besoin d'être augmenté.
Les voyageurs ont été l'objet, ces dernières années,
d'une particulière attention.
-------L'apparition
des voitures Inox a fait bonne impression dès leur mise en service.
Leur poids n'est que de 30 tonnes, alors que les voitures métalliques
qu'elles remplacent sur les relations les plus rapides pesaient 41 tonnes.
A l'heure actuelle, 60 d'entre elles roulent sur les lignes algériennes.
Trente-trois autres voitures allégées, traitées dans
un style également très moderne, ont été affectées
aux voies étroites.
Le matériel marchandises a bénéficié de deux
améliorations principales, l'une quantitative, l'autre qualitative.
-------La
charge utile de tous les nouveaux véhicules s'établit autour
de 20 tonnes, au lieu de 10 tonnes précédemment. On pouvait
déjà dire en 1948 que la plus grosse fraction du tonnage
transporté par les C.F.A. en voie normale reposait sur les châssis
d'environ 1.500 wagons neufs ou en très bon état, l'ensemble
de tous les autres ne constituant qu'un appoint, sans compter un parc
très important de wagons miniers auto-déchargeurs.
-------Cette
masse d'excellents wagons s'est accrue depuis de 1.300 unités,
toutes fabriquées en Algérie par la Société
Nord-africaine de matériel des chemins de fer (à l'Allelick,
près de Bône).
(1) Voir Document Algérien - n° 76 - Série
Économique - du 20 mars 1951 : " Les Chemins de Fer Algériens
".
-------Pour
répondre à des besoins qui se font jour, les C.F.A. ont
acquis et mettent à la disposition des usagers environ 250 containers
de toutes capacités dont certains sont spécialisés
pour le transport des liquides, et ils en attendent une centaine d'autres.
-------Bien
entendu; les grands ateliers de matériel roulant de Sidi-Bel-Abbès,
Perrégaux et Bône ont dû être réorganisés
en vue de l'entretien et de la réparation des voitures en métal
inoxydable et des wagons modernes ou modernisés ; les 314 de l'effectif
du parc total, marchandises du réseau, sont munis du frein continu.
-------Les
voyageurs ont pu assister, des fenêtres largement dégagées
vers l'avant ou vers l'arrière des toitures et des autorails à
d'autres transformations dans le domaine de la signalisation. Dès
1948, le feu vert, signal de voie libre, était généralisé
; les passages en vitesse et les croisements sans arrêts dans les
gares à voie unique ont été étendus à
la ligne de Sainte-Barbe-du-Tlélat à la frontière
marocaine ; les curieuses cibles noires, servant de toile de fond à
des feux colorés que de longues visières rendent perceptibles
à distance, de jour comme de nuit, même par grand soleil,
équipent toutes les entrées de gare jusqu'au delà
de Sidi-Bel-Abbès et progressent de mois en mois vers Oujda. Une
grande quantité de portiques légers sont destinés
à la manutention des containers ; de hauts pylônes supportent
des batteries de projecteurs éclairant les faisceaux de triage
; de petits véhicules sur pneus, rapides et adroits, sont utilisés
à pousser des wagons ou à manipuler des gerbes de colis
; on peut remarquer également le foisonnement des embranchements
industriels au voisinage de toutes les grandes villes, particulièrement
d'Alger, ainsi que la multiplication des haut-parleur, dont aucune gare
d'une certaine importance n'est plus dépourvue.
-------Ce
que les voyageurs ne peuvent que soupçonner en constatant la douceur
du roulement sur toutes les voies malgré des vitesses qui atteignent
souvent le 120 à l'heure, c'est que la totalité de la grande
rocade est maintenant armée en rails lourds ; que les rails de
calibre moyens passent progressivement sur les lignes secondaires et les
voies étroites ; que les chocs aux joints disparaissent, soit que
le nombre de ceux-ci se raréfie par la généralisation
de la soudure des barres en longueurs de 30 à 36 mètres
et même davantage, soit que la tenue de ceux qui restent soit maintenue
excellente tout au long de l'année même après de longues
périodes d'intempéries, par les méthodes industrielles
d'entretien telles que le soufflage mécanique.
-------On
peut voir, pendant le trajet, les cantonniers manier le long des voies
cette multitude de petits appareils en gris, en rouge ou en jaune, où
aboutissent des câbles électriques et des conduites d'air
comprimé, et grâce auxquels le dur et lent travail de bourrage
de ballast à la batte a pratiquement disparu presque partout. On
voit quelquefois ces énormes engins de terrassements, bulldozers,
rouleaux compresseur, mélangeurs de terre, défonceuses,
arroseuses, et toute la famille des niveleuses qui, avec une agilité
surprenante, enjambent les voies, les fossés, les talus et remplacent
sur des centaines de mètres, pendant le court intervalle qui sépare
le passage de deux terrains, des voies entières avec leurs rails
et leur travelage en bois par des rails plus lourds équipés
de traverses en acier ou en béton armé ; à moins
qu'ils ne rejettent totalement de côté la plate-forme elle-même
et construisent sur le vide ainsi creusé un remblai entièrement
neuf, fait en terres apportées, répandues, compactées,
revêtues d'un enduit bitumeux et enfin ballasté et armé
juste à temps pour laisser passer le premier train Inox.
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--------Tous les
moyens, auxquels il faut ajouter l'achèvement des circuits téléphoniques
à appels sélectifs sur presque toutes les lignes et l'installation
des derniers postes centraux de régulation et de commandement ainsi
qu'une simplification considérable du vieux Règlement général,
ont permis aux exploitants des Chemins de fer algériens de réaliser
des moyennes intéressantes pour un pays aussi accidenté,
tenues régulièrement avec un confort absolu pour les usagers,
et qui auraient paru impossibles il y a seulement cinq ans:
-------Alger-Oran
en cinq heures (420 kilomètres avec 10 arrêts).
-------Alger-Constantine
en sept heures (464 kilomètres).
-------Des
relations secondaires : d'Alger à Blida et à Djelfa, de
Philippeville à Batna et Touggourt, d'Oran à Mostaganem
et à Colomb-Béchar, et dernièrement Alger-Bougie,
ont été elles aussi notablement accélérées.
-------La
ligne anciennement à voie étroite de Bône à
Saint-Charles vient d'être mise à voie normale. Le profit
et le tracé très défectueux, qui avaient des caractéristiques
de " tortillard ", ont été mis au niveau de ceux
d'une grande ligne. Ils ont donné lieu à la construction
d'un grand nombre d'ouvrages importants, pour la plupart en béton
armé dont les plus remarquables sont : un pont de 40 mètres
sur l'Oued Saf-Saf près de Saint-Charles, un viaduc courbe de 220
mètres en 15 travées sur une vallée, et surtout à
Bône un grand carrefour surélevé composé de
rampes en Y de 465 mètres de longueur, dont le projet a été
établi par l'Administration des Ponts et Chaussées et la
réalisation confiée aux Chemins de Fer; cet ouvrage supprime
le nud inextricable de routes de bifurcations et de passages à
niveau qui faisait goulot pour toutes les voies de communication aboutissant
à la ville et venant de l'Est du Sud et de l'Ouest; il transformera
complètement et très heureusement l'entrée de la
ville de Bône; cette grande voie d'accès d'où une
vue admirable s'étendra sur la mer et les montagnes a déjà
reçu le nom de " Route Aérienne ".
-------Rappelons
enfin que le développement des chemins de fer algériens
s'élève à 2.366 kilomètres pour la voie normale
et 2.110 pour les voies étroites.
-------Le
prix du kilomètre-voyageur est de
-------Plein
tarif : 9 fr. en 1è cl. pour les grands parcours.
------- 7
fr. en 2è cl.
-------5 fr.
en 3è cl.
-------Le
tarif réduit dans certains trains et sur des parcours désignés
est de
-------lè
classe : 5,60 fr.
-------2è
classe : 4,50 fr.
-------3è
classe : 3,20 fr.
-------Les horaires
des principales relations au départ ou à l'arrivée
d'Alger sont publiés tous les jours dans les journaux quotidiens.
-------Malheureusement,
il n'est pas possible d'éluder la question financière, qui
se pose de façon aiguë. Le compte rendu de gestion de l'exercice
1953 révèle que, pour 11.134 millions de recettes, les dépenses
d'exploitation se sont élevées à 17.785 millions,
accusant un déficit de 6.651 millions. Encore n'est-il pas compté
dans ces chiffres le crédit de 3.000 millions alloué aux
C.F.A. sur le Fonds d'Expansion économique pour les renouvellements
de voie et de matériel roulant.
-------L'Assemblée
algérienne, qui finance l'insuffisance de recettes sur le budget
de l'Algérie, ainsi que le Pouvoir central, se sont émus
de cette situation, et ont demandé qu'il y soit remédié
d'urgence, car elle est déjà ancienne et s'aggrave d'année
en année.
-------L'étude
nécessaire est en cours mais il apparaît d'ores et déjà
que le déficit provient en majeure partie des lignes de pénétration
à voie étroite : Oran, Colomb-Béchar, La Macta, Burdeau,
Blida, Djelfa, Biskra, Touggourt, Ouled Rhamoun, Tébessa, Khenchela.
En effet, d'une longueur presque égale à celle des voies
normales, elles ont un trafic dix fois moindre, car elles desservent des
régions pauvres. Et, malgré leur modernisation récente,
la concurrence routière diminue encore ce trafic. Il semble impossible
d'entretenir sur ces lignes à la fois une route qui existe déjà
en presque totalité, et une voie ferrée parallèle.
Comme il ne peut être question de supprimer la route, l'étude
porte en particulier sur le point de savoir s'il ne serait pas avantageux
de fermer progressivement ces voies étroites.
-------L'une
des causes des difficultés financières du réseau
réside également dans la politique d'amélioration
des conditions de vie, suivie jusqu'ici en ce qui concerne le personnel.
Celui-ci par une assimilation avec les employés de la S.N.C.F.,
bénéficie de primes de toutes sortes. Cette situation qui
démontre une fois de plus la volonté d'assimilation des
travailleurs algériens à ceux de la Métropole crée
des charges qui malheureusement obèrent fortement le Budget.
-------L'Administration
algérienne a pensé également à appliquer aux
Chemins de Fer Algériens la politique tarifaire métropolitaine
consistant à rapprocher les tarifs des prix de revient, alors qu'actuellement
c'est la tarification ad valorem qui est en usage. Des comités
techniques départementaux seraient chargés dans chaque département,
d'assurer une coordination efficace entre le rail et la joute, aides par
un service de contrôle routier et ferroviaire suffisamment étoffé
qui pourrait suivre de près tous les problèmes d'horaires
et de tarifs communs aux deux modes de locomotion.
-------La
réorganisation administrative et financière des C.F.A. est
également prévue, remplaçant le Comité de
direction actuel, réduit à quatre membres, par un Conseil
d'administration plus large, améliorant l'alimentation du fonds
de renouvellement, et mettant à la charge de l'Algérie-une
partie des dépenses d'infrastructure, tout en laissant la tutelle
au Gouverneur général de l'Algérie.
-------L'ensemble
de ces mesures permettra sans doute à l'Algérie de gérer
plus sainement ses lignes ferroviaires et d'en améliorer la situation
financière.
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