Alger, Algérie : documents algériens
Série économique : crédit agricole
Le crédit agricole mutuel en Algérie
14 pages, tableaux - n°105 - 30 janvier 1954

-------Le Crédit Agricole Mutuel est né en Algérie, comme d'ailleurs dans la Métropole, des difficultés que la petite et moyenne agriculture ont éprouvées à une certaine époque à trouver auprès des établissements bancaires, les capitaux nécessaires à l'exploitation, l'équipement et la mise en valeur de leurs propriétés.

mise sur site le 13-06-2005
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Feuille 1 : ressources
feuille 2 : ensemble des prêts
feuille 3 : credits à moyen et long terme
tableau 4 : évolution des prêts et des ressources
tableau 5 : renseignements concernant les prêts

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----------------Le Crédit Agricole Mutuel est né en Algérie, comme d'ailleurs dans la Métropole, des difficultés que la petite et moyenne agriculture ont éprouvées à une certaine époque à trouver auprès des établissements bancaires, les capitaux nécessaires à l'exploitation, l'équipement et la mise en valeur de leurs propriétés.
----------------C'est un fait que les banques privées, dont il n'est d'ailleurs pas question de méconnaître les éminents services rendus à l'Algérie, ont hésité à soutenir les petites et moyennes exploitations ne pré-sentant pas toute la surface désirable et plus exposées que les grandes aux aléas d'ordre naturel ou économique qui pèsent sur la production agricole.
Aussi bien, vers la fin du siècle dernier les pouvoirs publics, sollicités de façon pressante de venir en aide aux petits et moyens agriculteurs songèrent-ils en 1897 et en 1899 à demander à la Ban-que de l'Algérie, à l'occasion du renouvellement du privilège de l'émission, le versement d'une redevance destinée à faciliter l'organisation du crédit à la petite et moyenne agriculture.
----------------De longues discussions eurent lieu à l'époque sur le point de savoir si l'on devait recourir au système du crédit dit " par en haut " c'est-à-dire par l'intermédiaire d'une banque centrale de crédit agricole ou au système de crédit dit " par en bas ", c'est-à-dire avec comme organe essentiel de distribution des organismes au contact des utilisateurs.
----------------C'est ce dernier système qui prévalut en définitive, motif pris de ce que pour être accessible à tous, le crédit agricole doit pouvoir prendre en considération non seulement les garanties matérielles offertes par les emprunteurs et qui, par hypothèse, n'étaient pas toujours suffisantes, mais aussi les qualités professionnelles et la valeur morale. Seuls des organismes en contact permanent avec la clientèle pouvaient faire utilement les appréciations et discriminations nécessaires.
----------------Aussi bien les premières Caisses auxquelles fut confiée la gestion de la redevance exigée de la Banque de l'Algérie, furent-elles des Caisses " locales ", groupant les agriculteurs d'une même localité, désireux de faire appel au crédit et qui devaient au préalable souscrire une part de capital de la Société. L'assemblée générale des membres élisait un certain nombre de ces derniers pour administrer la Caisse et notamment assurer la distribution des prêts.
----------------Le caractère de crédit mutuel résulte du fait que les parts de capital restent engagées pour une certaine durée, généralement de cinq ans, à la couverture des pertes éventuelles et aussi, d'autre part, de ce que les emprunteurs étaient appelés à se donner mutuellement une seconde signature.
----------------Tel fut l'origine du crédit agricole mutuel algérien.
----------------Après quelques années d'expérience, les pouvoirs publics furent amenés à constater que l'organisation ainsi mise sur pied présentait quelques imperfections.
----------------Les agriculteurs désignés comme administrateurs et chargés, à ce titre, d'accorder les prêts étaient la plupart du temps eux-mêmes emprunteurs ; en toute hypothèse, des liens de voisinage ou d'amitié les unissaient aux demandeurs ; d'où une certaine gêne pour assurer une saine distribution.
----------------De là résultaient parfois des pertes absorbant le capital, c'est-à-dire le montant des parts souscrites, ce qui faisait, subir aux sociétaires les plus diligents des sacrifices particulièrement lourds.
----------------A un autre point de vue, les Caisses locales de3 régions pauvres parvenaient difficilement à équilibrer leurs opérations tandis que celles des régions riches faisaient apparaître des excédents.
----------------D'où l'idée, en 1901, de la création de Caisses " régionales " appelées à fédérer les Caisses locales d'une même région, à en contrôler les opérations et à jouer à leur égard le rôle de Caisse de compensation en faisant bénéficier les Caisses locales des régions pauvres des excédents de ressources provenant des Caisses locales des régions riches.
Cette première réorganisation donna une belle impulsion au crédit agricole mutuel qui parvint à soutenir efficacement la petite et la moyenne agriculture aussi bien dans son activité individuelle que dans son activité collective. C'est l'époque des premières réalisations coopératives qui n'ont pu voir le jour et prospérer qu'avec l'appui du crédit agricole mutuel.
Interrompu par la première guerre mondiale, le développement du crédit agricole mutuel reprit de plus belle quelques années après la fin des hostilités, à la faveur de l'extension à l'Algérie des mesures de réorganisation intervenue dans la Métropole et dont les principales caractéristiques sont l'institution en 1923 d'un fonds de dotation du crédit agricole alimenté par des avances et redevances de la Banque de l'Algérie, le nouveau statut des Caisses régionales et locales, les règles d'octroi des prêts à court, moyen et long terme, qui ont fait l'objet de l'important décret du 26 novembre 1925 et de l'arrêté gouvernemental d'application du 5 décembre suivant.

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----------------Il faut citer aussi la création en 1927 d'une Caisse Foncière Agricole d'Algérie chargée de con-sentir aux Caisses régionales et locales les avances nécessaires à l'octroi de prêts à moyen et à long terme. De 1925 à 1935 les opérations des Caisses de crédit agricole prirent un développement considérable : le portefeuille représentatif des crédits de campagne accusait fin 1935 un total de l'ordre de 600 millions de francs ; les avances à moyen et à long terme totalisaient 200 millions. Le capital versé par les sociétaires atteignait 78 millions, les réserves constituées sur les excédents bénéficiaires s'élevaient au même chiffre. Enfin, jouissant de la confiance unanime des agriculteurs, les Caisses régionales s'étaient vu confier près de 400 millions de dépôts.
----------------Mais à l'occasion de la crise qui, après bien d'autres pays, atteignit l'Algérie à partir de 1932, on s'aperçut que le fonctionnement des Caisses régionales appelaient à peu près les mêmes remarques qu'autrefois celui des Caisses locales : une distribution du crédit insuffisamment dégagée des contingences locales ; manque d'expérience d'un certai n nombre de Conseils d'Administration dépassés par l'importance des opérations ; contraste trop frappant entre les Caisses régionales des régions riches et celles des régions déshéritées.
----------------Aussi bien se décida-t-on en 1935 à compléter l'organisation algérienne à l'image de l'organisation métropolitaine, en créant sous le nom de " Caisse algérienne de crédit agricole mutuel ", une Caisse centrale à qui ont été confiées les attributions de soutien financier et de contrôle qu'exerçait depuis 1920 dans la Métropole la Caisse nationale de crédit agricole.
----------------Depuis cette date, l'organisation du crédit agricole mutuel se présente en Algérie comme en France sous la forme classique de la pyramide : à la base les Caisses locales, au milieu les Caisses régionales, au sommet la Caisse Algérienne de crédit agricole mutuel.

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----------------Dès sa création et en parfait accord avec les Caisses régionales et locales, la Caisse Algérienne s'est assigné pour but de mettre à la disposition des ressortissants du crédit agricole mutuel tous es crédits nécessaires non seulement à l'exploitation rationnelle des propriétés" mais aussi au rééquipement, aux améliorations foncières, aux reconstitutions ou créations de cultures, à l'acquisition de a petite propriété rurale, au soutien des prix agricoles, en un mot à tout ce qui peut aider l'eeuvre difficile de la production agricole, la développer, la soutenir au triple point de vue technique, économique, social.
----------------Cette mission suppose d'importantes ressources.
----------------Celles du crédit agricole mutuel comprennent : les ressources propres des Caisses (capital social et réserve) : des dotations de l'Etat ; enfin, les plus importantes, des capitaux d'emprunt, savoir : les dépôts de fonds confiés aux Caisses régionales et les fonds provenant du réescompte en banque.
----------------Certes ce tableau fait apparaître des chiffres nettement supérieurs dans la Métropole qu'en Algérie. Si l'on tient compte toutefois de ce que le nombre de caisses régionales algériennes représente seulement le quart du nombre de Caisses métropolitaines, on constatera qu'en importance relative, les pourcentages en lesquels s'exprime l'activité du crédit agricole mutuel algérien ne sont pas inférieurs dans l'ensemble à ceux de la Métropole.

----------------Il n'en est autrement que dans le compartiment des prêts à terme, mais cela tient au fait que les prêts de cette catégorie sont accordés sur des ressources spéciales et que les avances faites à ce titre par l'Etat dans la Métropole (106 milliards en chiffres ronds au 31 décembre 1952) sont bien supérieures à celles accordées en Algérie aux organismes de crédit agricole mutuel (2.355 millions à la même date).

----------------Quoi qu'il en soit, si l'on considère que le crédit agricole mutuel groupe 50.000 adhérents provenant à parties égales des deux éléments ethniques de la population (soit à peu près toute la petite et la moyenne agriculture européenne et la plupart des agriculteurs musulmans produisant pour l'échange) que, d'autre part, il est le soutien du mouvement coopératif et qu'enfin ses opérations accusent une régulière et importante progression (près de 64 milliards en 1952 contre 49 milliards en 1951) on peut conclure que cette institution qui compte maintenant un demi-siècle d'existence constitue un des axes essentiels de l'économie algérienne.

M. LEBEAU
Directeur de la Caisse algérienne
de crédit agricole mutuel