Alger, Algérie : documents algériens
Série culturelle :
L'ALGÉRIE EN 1830
vue à travers des témoignages de l'époque
35 pages - n°81 - 2 septembre 1957

 

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AUTEURS CITÉS

PEYSSONNEL et DESFONTAINES
" VOYAGES DANS LES RÉGIONS DE TUNIS ET D'ALGER "

-------Nous publions les relations, presque entièrement inédites, de voyages faits dans les régences de Tunis et d'Alger, par PEYSSONNEL, en 1724 et 1725, et par DESFONTAINES, de 1783 à 1786 ".

Docteur SHAW
" VOYAGE DANS LA RÉGIONS D'ALGER "

-------traduit de l'anglais avec de nombreuses augmentations par J. Mac Carthy.
-------Avertissement du traducteur :
-------" Quoique cette relation date déjà de plus d'un siècle, elle offre cependant le meilleur traité que nous possédions sur la géographie ancienne et même moderne des régences d'Alger et de Tunis. D'ailleurs en Barbarie comme dans presque tous les États ottomans, il n'y a rien de changé depuis Shaw, sinon les hommes ; ce sont toujours les mêmes institutions, le même culte, les mêmes préjugés, les mêmes moeurs, le même despotisme ". (1830, 2. 2).

G. T. RAYNAL
" HISTOIRE PHILOSOPHIQUE ET POLITIQUE
des établissements et du commerce des Européens
dans l'Afrique septentrionale "
(1826)

William SHALER
Consul général des États-Unis à Alger
" ESQUISSE DE L'ÉTAT D'ALGER " (Paris 1830)

Sidi Hawndan-Ben-Othman KHODJA
" APERÇU HISTORIQUE ET STATISTIQUE SUR LA RÉGENCE D'ALGER " (Paris 1833)

LAUGIER DE TASSY
" HISTOIRE DES ÉTATS BARBARESQUES QUI EXERCENT LA PIRATERIE "
traduit de l'anglais (Paris 1757)

VENTURE DE PARADIS
" ALGER AU XVllle SIÈCLE "
Publié à Paris en 1898, mais e,.rit en 1788 - 1789 (à plusieurs reprises, l'auteur date son livre de 1789 - P. 41 et 51).

PANANTI, littérateur italien
" RELATION D'UN SÉJOUR A ALGER "
" Contenant des observations sur l'état actuel de cette régence, les rapports des États barbaresques avec les puissances chrétiennes, et l'importance pour celles-ci de les subjuguer ".
(Publié à Paris en 1820)

WALSIN ESTERHAZY
" DE LA DOMINATION TURQUE DANS L'ANCIENNE RÉGENCE D'ALGER " (Paris 1840)

Alfred NETTEMENT
HISTOIRE DE LA CONQUÊTE D'ALGER " (Paris 1856)

H. de GRAMMONT
" HISTOIRE D'ALGER SOUS LA DOMINATION TURQUE "
(1387)

OPPRESSION ET TYRANNIE

" LE DESPOTISME SOUS SES FORMES LES MOINS DÉGUISÉES".
..." Le gouvernement d'Alger est une sorte de république militaire, dont le chef exerce le despotisme sous ses formes les moins déguisées "... PANANTI. (P. 411).
.
.." Une poignée de brigands recrutés au Levant, indignes de conserver la belle contrée qu'ils ont trouvé l'art affreux d'appauvrir, tiennent dans l'oppression la plus odieuse trois millions d'hommes dont la tête est sans cesse à prix. Ces pirates dictent insolemment des lois à tous les gouvernements qu'ils ont rendus tributaires, violent impunément les droits des gens les plus sa crée, abreuvent d'outrages leurs agents, les chargent de chaînes et condamnent leurs sujets au plus affreux esclavage "... (DUBOIS-THANVILLE - Consul à Alger en 1800).

..." Les Turcs qui sont tous soldats succèdent selon leur rang, aux emplois et aux dignités de ce Royaume Ils gouvernent cet Etat avec un despotisme assez semblables à celui des Nobles des républiques d'Italie, ou des Chevaliers de Malte. Ils sont tous regardés comme nobles, et hauts et puissants Seigneurs, quoique le plus souvent on ne découvre en eux que bassesse. Le titre de soldat renferme ici l'idée d'association au gouvernement, d'honneur, de noblesse, de courage, et fait tout plier devant soi. Ils traitent les naturels et les autres habitants du pays avec mépris et avec cruauté. Ils sont tout injustice envers les esclaves, et plus encore envers les sujets. Ce traitement a si fort intimidé ces derniers, que les Mores d'une ville entière trembleront à la vue d'un seul Turc. Ces Mores nous fournissent un exemple bien sensible de l'esprit de servitude où les hommes peuvent dégénérer. N'est-il pas étrange en effet que la disparité de plus de 200 Mores ou Arabes, contre un Turc, ne les anime point à secouer un joug aussi pesant ? "... LAUGIER DE TASSY. (P. 124-125).

..." Les soldats Turcs sont communément la lie du Levant. Vains de se voir maîtres d'un grand Royaume, et habiles à parvenir aux dignités, ils traitent les Mores et les Arabes avec tant d'insolence, que leur gouvernement n'est pas supportable "... LAUGIER DE TASSY. (P. 163).

..." La milice excède rarement dix ou douze mille hommes ; elle suffit pour tenir dans la crainte et la soumission une population de cinq millions d'âmes, qui déteste son joug en cédant à la nécessité d'obéir à de tels monstres "... PANANTI. (P. 244-245).

" UNE VIGILANCE QUI NE S'ENDORT JAMAIS UN INSTANT ".

..." Une vigilance qui ne s'endort jamais un Instant peut seule soutenir le gouvernement d'Alger, qui pèse si durement sur tous. Les Turcs ont pour ennemis les Couloglis qu'ils n'emploient que malgré eux, lorsque les sujets manquent et qui ont l'exclusion de toutes les charges principales ; les Maures qu'ils accablent ; les esclaves sur lesquels ils ne peuvent point compter. Les meilleurs amis qu'aient les Algériens sont les consuls européens qui résident chez eux et qui ne gagneraient rien à une révolution "... VENTURE DE PARADIS. (P. 122).

..." Un seul Turc fait trembler tout un douer et donne des coups de bâton à ces misérables, qui ne sont plus des hommes en la présence d'un Turc. On ne peut exercer une tyrannie plus affreuse et plus cruelle que celle des Turcs envers les Arabes de ce pays "... PEYSONNEL. (P. 291).

..." Ces 3.000 Turcs, au milieu de tant de peuples qui sont intérieurement leurs ennemis, suffisent pour maintenir o tout dans l'ordre et l'obéissance, mais ce n'est que par une extrême vigilance, qu'ils peuvent y parvenir, et ils ne doivent jamais l'oublier "... VENTURE DE PARADIS. (P. 3).


" CE N'EST QUE PAR LA PLUS GRANDE TYRANNIE... "

..." l'aga en a 700 (sipahis), qui forment la cavalerie d'Alger, sans compter celle des beys ; chaque sipahi donne ordinairement 30 ou 40 sequins pour être reçu. C et emploi affranchit leurs terres de tout impôt et procure à leur famille une protection nécessaire dans un pays où le Maure n'est qu'esclave. Cet aga sous le moindre petit prétexte renvoyait le 3 sipahis et en prenait d'aut res qui lui donnaient encore 15 à 20 sequins. En outre, il peut faire des avances aux gens de la campagne, qui sont entièrement sous sa juridiction. Lorsqu'il est hors de le ville, il a le sabre libre et il fait prévotalement pendre ou couper. Baba-Ali lorsqu'il était aga, s'amusait à essayer son fusil sur le premier Maure qui passait. Dans le temps des bombardements des Espagnols, il était défendu aux Maures de trop s'approcher de la ville ; l'aga aujourd'hui en place, lorsqu'il les rencontrait, leur faisait écraser la tête entre deux pierres. Ce n'est que par la plus grande tyrannie que les Turcs pensent qu'ils peuvent maintenir la tran )uilité dans un pays où ils sont au moins cent contre un "... VENTURE DE PARADIS, (P. 113),

UNE POPULATION OPPRIMÉE

" UN SILENCE ABSOLU ET UNE OBÉISSANCE SANS BORNE ".

..." Le fondement de la puissance des janissaires est dans leur vigilance et leur activité, et ils ont un grand appui dans le souvenir des exemples terribles fa its sur les Maures qui ont osé lever le bras pour secouer un joug de fer ou seulement exprimer leur mécontentement. Le père de famille maure est pénétré de l'idée que la moindre tentative de résistance, ou le plus léger murmure, suffit pour amener la perte de la vie et de la fortune de toute une famille ; il inculque à ses enfants, dès leur plus bas âge, la nécessité d'un silence absolu et d'une obéissance sans borne "... PANANTI. (P. 474).

..." La politique d'Alger est très cruelle envers les Maures et les Arabes ; pour la plus légère faute, on les fait mourir. Baba Ali étant aga essayait souvent son fusil sur les gens de la campagne par pure fantaisie. L'aga d'aujourd'hui dans le temps des bombardements faisait écraser entre deux pierres tout Maure ou campagnard qui se rencontrait dehors. On peut dire en général que le caractère des Algériens tient beaucoup de celui des enfants ; la moindre chose les irrite et leur ressentissement va toujours au-delà des bornes.Ils ne savent pas distinguer le particulier du gouvernement : si un Français quelconque fait quelque chose qui lui déplaît ,ce sont les Français en corps qui sont l'objet de leur mauvaise humeur, et comme des enfants sages, il leur faut aussi des bonbons pour les apaiser "

... " Le gouvernement algérien a pour principe de dépouiller les Maures et de leur faire toute sorte d'injustices et de vexations pour les tenir asservis, et cependant dans toutes les circonstances, et surtout les gens de la montagne, on les voit se soulever "... VENTURE DE PARADIS. (P. 129).
,
...." Il est à propos que je vous rapporte, monsieur, de quelle manière les Turcs se comportent avec les Maures pour le logement, et comment ceux-ci pratiquent l'hospitalité. Dès qu'un spahi arrive à un douar, il choisit le meilleure tente. En abordant, le maître le salue et lui dit qu'il est le bien arrivé ; le Turc ré-pend par des paroles injurieuses, le traite de cocu, de maq... et autres ordures, lui ordonne de vider la moitié de la 'ente et de porter à manger à ses chevaux. Après être descendu, il lui ordonne d'aller tuer un mouton. Le Maure le refuse ; le Turc lui dit des inj ures, et bien souvent lui donne des coups de bâton. Le Maure apporte le mouton et, s'il ne convient pas au Turc, il lui dit qu'il n'est pas assez beau, le renvoie et s'en fait apporter un autre. Pendant ce temps, la femme prépare le rafis, qui est une espèce de gâteau cuit dans une terrine de grès, ensuite coupé en morceaux et mêlés avec le miel et la mentèque, et quelquefois entremêlés de dattes. Le soir, il demande de l'orge pour les chevaux, et veut une double mesure. Dans ces quartiers, comme les sauterelles avaient tout dévoré, ces pauvres misérables étaient hors d'état d'en fournir et le refusaient ; mais, à grands coups de bâton et à force de mauvaises paroles, il les forçait d'en apporter. Le soir, on fait cuire le mouton avec les couscoussou, et ce qui reste le spahi le prend. Si l'hôtesse est jolie, souvent le Turc s'en accommode, et le matin tout est payé par un grand beselemen ou bon voyage, que le Maure souhaite au Turc sans autre paiement que le plaisir de ne l'avoir plus dans sa tente. Tout cela est suivant l'usage, et il n'y a rien à dire ; c'est la justice, l'équité et le droit du pays "... PEYSONNEL. (P. 365 et 366).

..." Telle est la politique de ce pays : les caïds et les chefs vendent à prix d'argent la tête des hommes et les font mourir sans forme de procès ni raison apparente. Les Arabes ne se poussent, ne deviennent chefs et ne se soutiennent que par des voleries, des rapines, des meurtres, des assassinats et des crimes semblables, et l'on est ensuite obligé de ménager et defeindre estimer de semblables coquins dignes des plus affreux supplices, qui sont cependant princes et maîtres absolus de leur pays "... PEYSONNEL. (P, 325).


" LES PEUPLES ASSERVIS OSENT A PEINE LEVER LES YEUX SUR CES ODIEUX TYRANS ".

..." Les peuples asservis osent à peine lever les yeux sur ces odieux tyrans. Les Maures, placés à une grande distance les uns des autres, dispersés dans quelques bourgades, réduits à un petit nombre, obligés de cacher le peu qu'ils possèdent, sacrifiés au moindre soupçon, généralement privés d'armes défensives et offensives, les Maures coulent des jours malheureux dans de mortelles inquiétudes "... RAYNAL. (P. 121)

..." On sait que les Mores et les Arabes ayant été conquis par les Chrétiens, et ensuite par les Turcs, ont été dépouillés de toute leur substance et réduits à la dernière misère. Cette dureté les a conduits à penser qu'ils peuvent, quand ils en ont l'occasion et la force, user équitablement de représailles "... LAUGIER DE TASSY. (P. 77-78).

.." Les peuples qui habitent la Barbarie, dit un écrivain judicieux, gémissent sous un joug qu'ils sont impatients de rompre. Esclaves de quinze ou vingt mille Turcs ramassés dans les boues de l'Empire Otto-man, ils sont de mille manières différentes les victimes de cette audacieuse soldatesque "... SHAW. (P.212).

..." Au reste, je crois qu'il est inutile de vous parler des Arabes ; ils sont à peu près les mêmes que dans les royaumes de Tunis, à la réserve qu'ils sont plus maltraités, plus tyrannisés dans ce royaume aussi sont-ils par force plus misérables, plus malheureux et plus méchants "... PEYSONNEL. (P. 367),

..." Le peuple à Alger est sous la main de fer d'un gouvernement militaire et de maîtres étrangers, qui mêlent une basse fourberie, et l'hypocrisie aux soupçons, à la cruauté ; il a perdu tout sentiment d'honneur et toute dignité "...PANANTL (Pages 410 et 411).

..." TOUS ESCLAVES "...


..." Des chefs sans principes, des tribunaux sans lumières, des prêtres sans moeurs, des marchands sans foi, des ouvriers sans émulation. Ce qu'il (cet état) produit ? L'abrutissement entier de Maures, des Arabes, des juifs, tous plongés dans la misère et dans l'opprobre, tous esclaves aussi rampants, aussi tremblants que s'ils avaient encore quelque chose à perdre. Pouvoir lire et écrire, c'est la plus grande ambition à laquelle aient jamais aspiré les habitants des villes, toujours opprimés, toujours avilis, toujours malheureux. Les peuples errants dans les déserts n'ont pas même assez de tranquilité ou de repos pour donner à leurs enfants cette première éducation. Les Turcs, d'un caractère naturellement inquiets, ne songent qu'à dominer et à s'enrichir. Tout ce qui est étranger à ces deux passions leur paraît digne du plus grand mépris "... RAYNAL. (Tome 1. P. 81).

DISTINCTIONS RACIALES

" LE DERNIER D'ENTRE EUX FAIT TREMBLER PAR UN REGARD..."

..." Tous les Turcs qui arrivent à Alger et se font incorporer dans la milice sont ordinairement des gens sans aveu, sans ressources et de moeurs dépravées, qui viennent du Levant, d'où ils ont été obligés de s'enfuir pour se soustraire au châtiment dû à leurs crimes. Ils n'ont besoin, pour être admis dans ce corps, que de prouver qu'ils sont Turcs. On y reçoit aussi les chrétie ns renégats, et les Cologlis, nom donné aux individus nés de Turcs et de femmes arabes ou maures. Mais les Maures et les Arabes en sont absolument exclus, parce qu'ils sont toujours suspects aux usurpateurs de leur patrie, qui les tiennent dans une sujétion qui ne diffère guère de l'esclavage.
---------Tous ceux qui composent cette milice jouissent de grands privilèges, et regardent avec le dernier mépris ceux qui n'en font pas partie. Ce sont les hauts et puissants seigneurs du pays. On leur donne le titre d'effendi ou seigneur, tandis que l'on ne qualifie les autres individus que de sidy ou monsieur. C'est parmi eux que l'on choisit les deys, les beys et autres principaux officiers de l'Etat. Ils sont exempts de toute espèce d'impôts et des droits de capitation. Ils ne peuvent p oint être punis en public, et le sont rarement à huis clos. lIs se soutiennent tous à tort ou à raison contre les Arabes et les Maures ; et le dernier d'entre eux fait trembler par un regard les plus puissants d'entre ces derniers, qui leur doivent partout la préséance, sous peine d'être maltraités à l'instant même "... SHAW. (P. 182-183).

..." Elle (la milice) avait des lois à part, une justice à part, car jamais un Turc n'était puni publique-ment ; elle s'élevait au-dessus de toute la population, habituée à respecter et à craindre tout membre de la milice comme un maître, à ne lui résister en rien, comme à ne lui rien refuser. Elle vivait sur le pied de l'égalité avec le dey lui-même, qui, premier soldat de la milice, recevait le jour de la paye sa solde avec les soldats, et seulement avant eux. Enfin, l'usage des armes à feu lui était exclusivement réservé ; elle ne lais-sait aux Maures pour armes que des lances, des sabres et des couteaux. Les cavaliers, à qui l'Etat fournis-sait des chevaux, n'hésitaient pas à changer leur cheval contre celui du premier Maure qu'ils trouvaient mieux monté qu'eux, sans que celui-ci osât faire la m oindre résistance.
---------Tout était donc combiné pour leur assurer la supériorité morale et physique. Afin de maintenir parmi eux l'esprit de famille, on diminuait les avantages du Turc qui épousait une femme du pays "... NETTE-MENT. 1P. 73-74).

..." Les officiers (des navires corsaires) sont tous Turcs ou Cologlis. Ils ne se mêlent jamais avec les Maures, qui, ainsi que les esclaves, ne peuvent jamais monter sur le gaillard d'arrière, ni entrer à la sainte-barbe, à moins d'y être appelés par le capitaine ou par quelque Turc "... SHAW. (P. 198).


" LES TURCS SONT NES POUR LE COMMANDEMENT ET LES ALGERIENS POUR L'OBEISSANCE "

..." Les Turcs qui composent la milice d'Alger sont exempts de droits de capitation et de toute imposition. Ils ne peuvent être châtiés en public, et le sont rarement en particulier. Ce n'est presque que lorsqu'ils sont accusés de haute trahison qu'on les fait étrangler secrètement chez l'aga ou général de la milice. Ils se soutiennent tous, soit qu'ils aient tort ou qu'ils soient fondés, surtout lorsqu'ils ont affaire aux Arabes et aux Juifs sur lesquels ils ont un pouvoir presque tyrannique. Le plus misérable Turc fait trembler les Arabes les plus riches et les plus puissants ; les Arabes et les Juifs sont obligés de leur céder partout, sans quoi ils seraient maltraités inpunément "... (page 422).

..." Un Turc serait puni s'il commettait la moindre lâcheté ou bassesse ; mais hors du combat, ils usent de leurs forces et de leurs pouvoirs tyranniques, surt out envers les Maures. Il est étonnant que tant de misérables et de malheureux portés par leur naissance et leur état à mille bassesses, deviennent honnêtes gens dès qu'ils sont soldats d'Alger ; ils n'oseraient commettre aucune bassesse, vol ou friponnerie ; les rudes et promptes punitions qui suivent les fautes qu'un soldat peut commettre, les retiennent et les rendent sages. Il est vrai qu'on compte aussi pour rien certaines coutumes tyranniques qu'on pratique envers les Maures ; mais c'est la politique qui le demande, et ce n'est que par ce moyen qu'ils tiennent les Maures soumis "... PEYSONNEL. (Page 424).

..." Le dernier des Ottomans rejette avec mépris toute espèce de comparaison entre lui et un naturel ; et la maxime enseignée pendant plusieurs générations que les Turcs sont nés pour le commandement et les Algériens pour l'obéissance, a perdu avec le temps son caractère odieux, et n'est ici qu'un simple axiome politique "... SHALER. (Page 42).

..."Les chaoux sont des espèces de sergents de la maison du dey. C'est un corps très considéré, et qui se compose de douze Turcs sous les ordres d'un bachaoux, chaoux-bachi ou grand-prévôt "... SHAW, (P. 170).

..." On ne les emploie que dans les arrestations des Turcs, parce qu'ils croiraient au-dessous d'eux de mettre la main sur un chrétien, sur un Maure ou un Juif. Il y a un pareil nombre de chaoux maures, qui sont chargés des mêmes fonctions envers les Maures, les chrétiens et les Juifs ; ruais il ne leur est pas permis de porter un ordre à un Turc "... SHAW. (P. 171).

" PARTOUT UN TURC A LA PRESEANCE SUR UN NATUREL "...
..." Partout un Turc a la préséance sur un naturel ; et, dans les rues, ce dernier lui laisse toujours le passage libre "... SHALER. (P. 43).

..." Si la passion qu'ont ces despotes de perpétuer une souveraineté collective avait besoin d'être ranimée, elle le serait par les avantages personnels dont on les fait jouir. Ils ont un vêtement qui leur est propre et qui les distingue de leurs sujets. Les premières places leur sont partout réservées. A leur approche tout se range pour leur laisser le passage libre. On demanderait inutilement justice des vexations ou des outrages qu'ils se permettent, et celui qui oserait repousser la violence par la violence serait condamné au dernier supplice. Quelque crime qu'ils aient commis, ils ne sont jamais punis en public, et ils ne le sont guère en secret que lorsqu'ils sont entrés dans quelque conspiration contre le chef de la République ou contre la Ré-publique même "... RAYNAL. (P. 121).

..." Dès qu'on voit venir un Turc, il faut lui faire place ; quiconque y manquerait, serait accablé d'in-jures "... LAUGIER DE TASSY. (P. 166).

..." La noble soldatesque Turque regarde son sang comme avili par le mélange de celui des Maures "... LAUGIER DE TASSY. (P. 126).

..." Les Turcs prennent des concubines parmi les femmes du pays ; mais leurs descendants sont mis au rang des Maures, et incapables d'entrer dans l'armée "... LAUGIER DE TASSY. (P. 128).

" UNE FUREUR DE RACE A RACE "

..." Les garçons nés de Turcs et de femmes arabes ou maures ne sont point considérés comme Turcs. Il est vrai qu'ils sont reçus dans la milice comme soldats ; mais il ne parvienent point aux différentes charges de l'Etat, et ne jouissent point, en un mot, des privilèges accordés aux soldats turcs. Le Gouvernement a eu recours à ces restrictions pour éviter que les soldats ne s'alliassent en trop grand nombre avec les femmes du pays, et ne se rendissent ainsi un jour redoutables à l'Etat, par l'augmentation de leurs familles. Les Maures et les Arabes sont également exclus du corps de la milice, par les mêmes motifs. Nous croyons devoir remarquer à ce sujet qu'il n'y a point ou peu de femmes turques a Alger. Elles ont en horreur ce pays, qu'elles regardent comme le réceptacle de tout ce qu'il y a de plus vil et de plus méprisable dans les Etats ottomans. Les véritables Turcs se contentent d'y avoir des concubines du pays ou des esclaves chrétiennes "... SHAW. (P. 185-186).

..." Les fils des Beys ont quelquefois succédé à leurs pères et des Coulogli ont été nommés Kaïd, ou gouverneurs de districts. Mais ils le devaient probablement à l'argent ; car on regarde ces exemples comme contraires à l'esprit de la constitution "... SHALER. (P. 39).

..." C'était la politique qui cherchait à imprimer la terreur ; mais c'était aussi une fureur véritable, une fureur de race à race, comme celle des nègres contre les mulâtres.
Depuis cette révolution, l'élément turc dominant la milice, maintint de sévères conditions contre les Coulouglis comme contre les Maures. On finit avec le temps par les admettre dans la milice, mais les hauts grades leur furent fermés. Ils purent déployer leur courage et leurs talents comme raïs dans la marine ; mais l'entrée du grand divan leur resta interdite, et ils ne purent occuper les premiers emplois de l'Etat, sauf ceux de bey et de caïd. On les craignait d'autant plus, qu'ils étaient d'intrépides soldats. Dès ce jour, la race turque, mélangée seulement d'un certain nombre de renégats chrétiens, alimenta la milice d'Alger. Il résulta de là que l'esprit militaire, conquérant, dominateur, ne fut point modifié par le patriotisme local. Les Maures n'eurent plus, dans la milice qui les gouvernait, des frères et des pères, ils n'eurent que des maîtres "... NETTEMENT. (P. 70-71).

" CETTE SORTE D'INQUISITION... "
..." Pour revenir à cette désunion qui existe entre les Turcs et les Kologhlas, je dirai que, depuis l'événement détaillé ci-dessus, il s'est établi une barrière entre ces deux castes ; de sorte que les Turcs ne profiteront pas des lumières de leurs descendants ni de l'influence de leurs parents dans le pays ; la méfiance des Turcs est si grande, que si même les Kologhlas leur donnaient des avis salutaires, ils les regarderaient comme des pièges tendus à leur bonne foi. Quand ils apprenaient qu'il y avait une réunion de Kologhlas en quel-que endroit, ils les faisaient espionner pour savoir s'ils s'occupaient de la politique, critiquaient quelques actes du gouvernement ou seulement la vie privée des Turcs. Ils étaient surveillés également dans la crainte qu'ils n'eussent quelque intelligence avec des notables de l'intérieur, dans l'intention de s'emparer du pouvoir. Quand les Turcs découvraient chez eux quelque mauvaise intention, et même de légers soupçons, ils lassaient exiler les chefs et dispersaient leur assemblée ;enfin, les vexations qu'on leur faisait supporter étaient telles que les habitants d'Alger, Kologhlas ou autres, ne s'occupaient plus de politique, ni dans leurs réunions, ni publiquement, ni dans leur société privée. Il arrivait quelquefois que des malveillants, quand ils voulaient Pe venger, dénonçaient la personne qu'ils voulaient perdre comme s'occupant de politique.
---------Cette sorte d'inquisition étouffa dans le coeur des hommes de ce pays. les germes de leurs facultés, et fit naître dans la société une méfiance générale qui a duré jusqu'à l'arrivée des Français "... KHODJA. (P. 139-140).

..." Les Couglolis sont encore plus leurs ennemis que les Maures, et il n'y a peut-être dans Alger que les consuls européens qui désirent leur prospérité a... VENTURE DE PARADIS. (P. 3).

" LES PLUS MALHEUREUX D'ISRAEL "...

..." Le nombre et la richesse des Juifs vont toujours en s'affaiblissant, et je crois qu'aujourd'hui les Juifs d'Alger sont peut-être les restes les plus malheureux d'Israël "... SHALER. (P. 89).

..." Un musulman ou un chrétien qui va dans les rues quand il est nuit, doit avoir une lanterne allumée ; mais un Juif doit porter une lumière sans lanterne ; car, dans toutes occasions les Juifs sont frappés de distinctions humiliantes "... SHALER. (P. 98).


..." Les malheureux enfants d'Israël, traités avec tant de rigueur dans les autres contrées, ne devaient attendre des Barbaresques que bien peu d'indulgence ; et, certes, il n'est aucune espèce d'outrage, aucune espèce de vexation auxquelles ils ne soient exposés. On leur défend d'écrire ou de parler l'arabe, dans la crainte qu'ils ne deviennent capables de lire le divin Coran. Ils ne peuvent monter à cheval, et sont obligés de se servir de mulets et d'ânes, le premier de ces animaux étant regardé comme d'une trop belle espèce pour eux. Quand ils passent devant une mosquée, il leur faut marcher pieds nus ; et ils n'osent point s'approcher d'un puits ou d'une fontaine pendant tout le temps qu'un Maure y boit : il leur est également interdit de s'as-seoir devant un mahométan. Leur habillement doit être noir, parce que cette couleur est méprisée par les Maures. Les femmes juives n'ont la permission de voiler qu'une partie de leur visage. L'indolent Maure, une pipe à la bouche et les jambes croisées, appelle tout Juif qui vient à passer, et lui ordonne de remplir auprès de lui les fonctions d'un domestique ; d'autres s'amu sent à barbouiller les mains, le visage, les cheveux et les habits des enfants juifs avec des couleurs ou de la boue ; et les soldats turcs entrent souvent dans les maisons, où ils insultent les femmes, sans que les chefs de familles aient le privilège de leur dire de se retirer.
---------C'est l'affaire des Juifs d'exécuter tous les crimi nels, et d'enterrer ensuite leurs corps. On les emploie encore à porter les Maures sur leurs épaules, quand ceux-ci débarquent dans des eaux basses. Ils nourrissent les animaux du sérail, et sont exposés sans cesse aux moqueries des jeunes Maures, se gardant bien d'en montrer du ressentiment. Fréquemment battus par leurs persécuteurs, s'ils osaient lever la main dans une juste défense, cette main, d'après la loi du talion des Maures, serait coupée. Mais il est encore quelque chose de plus pénible pour les Juifs : les contributions qu'on impose sur eux n'ont aucun terme ; une somme de deux mille dollars est exigée chaque semaine, comme une ta xe générale sur toute la tribu, en outre de diverses taxes qu'on met sur les individus, surtout quand il y a quelques jours de fêtes parmi les Maures. Les Turcs emploient la force pour faire des emprunts ; et chez eux, par opposition avec la maxime de l'Europe, ce n'est pas celui qui manque de payer qui est incarcéré. mais bien celui qui refuse de prêter. Un Juif ne peut quitter la régence s'il ne donne une caution de son retour, et cette caution monte très haut. Quelqu'un de la secte fait-il banqueroute, et a-t-il un créancier turc, le Juif est constamment accusé de fraude et pendu. Mal-heur à ceux qui, dans de semblables occasions, seraient tentés de se plaindre ; on aggraverait beaucoup leurs souffrances. Il y a un impôt mis sur les fontaines ; ce qui a donné lieu à un poète hébreu de leur adresser ces mots : " Vous êtes comme nous chargées d'impôt' ; mais, plus heureuses, vous est permis de murmurer. "
---------Le courage stoïque avec lequel les descendants d' Abraham supportent tout cela, est étonnant "... PA-NANTI. (P. 229-231).

" CE QUE LE MEPRIS A DE PLUS HUMILIANT, CF QUE LA PERSECUTION A DE PLUS TERRIBLE "
..." Les Juifs indigènes, toujours en butte aux mauvais traitements des Turcs, s'occupant de petits commerces et de petits métiers, parqués dans un ghetto et châtiés avec la dernière rigueur toutes les fois qu'ils donnaient lieu à une plainte quelconque ; une simple banqueroute était punie du bûcher, tout aussi bien que le vol et le meurtre ; ils composaient l'immense majorité de la colonie israélite "... GRAMMONT (P. 233-234).

..." Les Juifs, quoique répandus sur tout le domaine de la République, ne sont pas plus redoutables que les chrétiens. Dégradés dans cette région encore plus que dans le reste de la terre, ils souffrent, sans mur-murer, sans presque s'en apercevoir, ce que le mépris a de plus humiliant, ce que la persécution a de plus terrible "... RAYNAL. (T. II - P. 123).

..." Les Juifs sont ici au nombre d'environ cinq mille. Ils jouissent du libre exercice de leur religion. Dans les affaires civiles, ils sont gouvernés par leurs propres lois, et soumis à un chef de leur nation nommé par le pacha. Comme sujets algériens, ils sont libres d'aller et de s'établir là où ils veulent, et d'exercer toute espèce d'emploi légal dans l'Etat. On ne peut pas les ré duire en esclavage. Ils payent une taxe par tête, et un double impôt sur toutes les marchandises qu'ils impor tent. Comme dans tous les pays, ils se livrent à toute sorte de commerce, et sont les seuls banquiers d'Alger. On trouve parmi eux beaucoup d'ouvriers pour les bijoux d'or et d'argent, et seuls ils sont employés par le gouvernement à la fabrication des monnaies.
---------Outre les qualités légales dont ils sont privés à Alger, les Juifs ont encore à y souffrir d'une affreuse oppression ; il leur est défendu d'opposer de la résistance quand ils sont maltraités par un musulman, n'importe la nature de la violence. Ils sont forcés de porter des vêtements noirs et blancs ; ils n'ont ni le droit de monter à cheval, ni de porter une arme quelconque, pas même de canne. Les mercredis et les samedis seulement ils peuvent sortir de la ville, sans en demander la permission. Mais y a-t-il des travaux pénibles et inattendus à exécuter, c'est sur les Juifs qu'ils retombent. Dans l'été de 1815, le pays fut couvert de troupes immenses de sauterelles, qui détruisaient la verdure sur leur passage. C'est alors que plusieurs centaines de Juifs reçurent ordre de protéger contre elles les jardins du pacha ; et nuit et jour il leur fallut veiller et souffrir aussi longtemps que le pays eut à nourrir ces insectes.
---------Plusieurs fois, quand les janissaires se sont révoltés, les Juifs ont été pillés indistinctement ; et ils sont toujours tourmentés par la crainte de voir se renouveler de pareilles scènes. Les enfants même les poursui-vent dans les rues, et le cours de leur vie n'est qu'un mélange affreux de bassesse, d'oppression et d'outrages. Les descendants de Jacob ne répondent à ces insultes que par une patience inconcevable. Dès leur enfance ils s'instruisent à cette patience, et passent leur vie à la pratiquer, sans même oser murmurer contre la rigueur de leur destinée "... SHALER. (P. 86 à 88).


"AUCUNE ESPECE DE VEXATION ET DE MEPRIS A LAQUELLE ILS NE SOIENT EXPOSES "
..." La douane d'entrée à Alger pour les marchandises du Levant et de la chrétienté est de 5 pour cent pour les Européens, de 5 pour cent pour les Maures et de 12 1/2 pour cent pour les Juifs. Il n'y a que fort peu de temps que les Maures sont au même taux que les Européens, pour la douane d'entrée ; ils payaient ci-devant comme les Juifs "... VENTURE DE PARADIS. (P. 29).

..." Il y a cette distinction entre les Turcs, les Mores, les Chrétiens et les Juifs, que si un de ces derniers est condamné à mort, son supplice est le feu. Le plus léger soupçon de quelque entreprise contre l'intérêt du Gouvernement suffit pour la punition de ces malheureux. On les brûle aussi sur la conviction d'une banqueroute frauduleuse. Elle est regardée comme telle, s'ils sont devenus insolvables pour avoir porté leur commerce au-delà de leurs propres fonds ; et le cas, où il y a moins de grâce pour eux à espérer, est lorsque leurs créanciers sont des mahométans. S'ils sont Juifs, l'affaire est renvoyée à leurs rabbins.
---------Il leur est défendu de porter toute autre couleur que le noir, et cela parce que cette couleur est la plus méprisée parmi les Turcs. Leur habillement consiste en une robe, qui leur descend jusqu'à mi-jambe, et en un turban noir ; ou tout au plus en un turban obscur rayé, passé autour d'un bonnet noir.
---------L'usage était autrefois de ne jamais admettre un Juif au Mahométisme, qu'il n'eût embrassé auparavant le Christianisme, conformément à la succession des trois religions. Mais on s'est si fort relâché sur cette coutume, qu'il suffit à présent que le nouveau prosély te mange publiquement de la chair de porc, ou qu'il exécute quelque cérémonie semblable pour être réputé Chrétien.
Il n'est point permis aux Juifs ''e sortir du Royaume d'Alger sans donner caution pécuniaire pour leur retour "... LAUGIER DE TASSY, P. 119-120).

..." Les Juifs, traités avec tant ce rigueur dans les autres contrées, ne devaient attendre des Barbaresques que bien peu d'indulgence ; aussi n'y a-t-il aucune espèce de vexation et de mépris à laquelle ils ne soient exposés. On leur défend de monter à cheval, ils sont obligés de se servir de mulets et d'ânes. Quand ils passent devant une mosquée il leur faut marcher nus-pieds ; ils n'osent point s'approcher d'un puits ou d'une fontaine pendant tout le temps qu'un Maure y boit ; il leur est également interdit de s'asseoir devant un mahométan. Leur habillement doit être noir. Les femmes juives n'ont la liberté que de voiler une partie de leur visage.

---------C'est parmi les Juifs qu'on prend ceux qui exécutent les criminels et enterrent leurs corps. Fréquemment maltraités par leurs persécuteurs, s'ils osaient lever la main, même dans une juste défense, cette main, d'après la loi du talion des Maures, serait coupée. Ils paient de très grosses contributions ; on évalue à une somme de deux mille dollars (le dollar valant cinq francs) la contribution qu'on exige de la tribu entière chaque semaine, indépendamment des taxes supportées par les individus et qu'on leur impose arbitrairement "... RAYNAL. (T. II - P. 145-146).

"IL Y A ALGER DES LOIS SOMPTUAIRES TRES SEVERES "
..." Les gens aisés parmi eux (Maures) sont toujours bien vêtus, mais il ne leur est pas permis de porter l'habillement Turc sans quelque distinction. Il y a de la différence dans le devant de leur veste, et dans leur turban, et même ils portent rarement ce dernier. Leur manteau est d'ailleurs de drap blanc, au lieu que celui des Turcs est généralement de soie noire "... LAUGIER DE TASSY. (P. 107-108),

..." Il y a à Alger des lois somptuaires très sévères. Les Maures ne peuvent porter de l'or sur leurs ha-bits ni aucune espèce d'armes. Les gens de paye ont seuls le privilège d'être armés et d'avoir des broderies sur leurs vêtements.
---------Les Juifs doivent être vêtus de noir depuis la tête jusqu'aux pieds, et il ne leur est pas mime permis d'avoir des ceintures de soie rouge ou d'une couleur voyante. Le 13 décembre 1788, on arrêta tous les Juifs qui avaient oublié cette défense et on leur fit donner 300 coups de bâton sur la plante des pieds, dans la maison du dey. Leur coiffure est un bonnet noir au tour duquel ils ceignent un mouchoir blanc ou noir, soit en fil, soit en soie "... VENTURE. (P. 155).

" LA VIE QU'UN EUROPEEN MENE A ALGER EST DES PLUS TRISTES "
..." Quelle est donc votre existence dans une ville, où il ne vous est pas possible d'échanger en sûreté une parole ; où vous êtes obligé de céder le haut du p avé aux bêtes de somme ; où les femmes en passant vous honorent du signe du capricorne ; où les marabouts insistent pour vous faire circoncire ? "... PANANTI. (P. 240).

..." La vie qu'un Européen mène à Alger est des plus tristes. La vue de ses frères dans les chaînes l'afflige continuellement ; et lui-même est sans cesse exposé à mille dangers qui tiennent au défaut de civilisation du gouvernement et à la chance probable qu'il peut offenser un fidèle. En général, cette prétendue injure est suivie d'une forte bastonnade qu'on administre au Nazaréen. On a souvent encore vu un marabout enthousiaste insister, d'après les motifs les plus insignifiants, pour faire circoncire un chrétien, et le forcer à prendre le turban. II est fort difficile d'échapper à un semblable appel ; et s'il arrive par hasard qu'un chrétien rencontre quelques processions religieuses des fidèles, il est à peu près sûr de subir le martyre. Qu'un chrétien se trouve à la porte d'un Maure, quand celui-ci sort de sa maison, la jalousie s'éveille aussitôt ; et il n'est pas besoin d'une forte excitation pour qu'un coup de poignard soit donné. Si vous êtes trouvé dans les rues un peu tard la nuit, vous êtes arrêté et conduit devant le cadi. Etes-vous avec de jeunes Turcs, ils s'a-musent à vous donner le nom de cornutos ou de chien sans foi, et vous entendez répéter que les vrais croyants seront sur des lits de rose avec de célestes houris, pendant qu'au contraire' les chrétiens et les Juifs seront étendus sur des charbons brûlants. Les femmes aussi ne veulent point perdre une occasion de s'égayer à vos dépens ; en passant devant vous, elles vous jettent un regard très signifiant, et ont bien soin de mettre leurs belles maires sur leurs fronts, de manière que vous ne doutiez pas qu'elles vous font les cornes "... PANANTI. (P. 237-238).

LE GOUVERNEMENT

" UNE EXCESSIVE RIGUEUR OU UNE EXTREME BIENVEILLANCE "
..." A dater de l'infructueuse expédition de Charles-Quint, la régence d'Alger resta longtemps sous la domination directe du grand seigneur, qui la gouvernait par un pacha ou vice-roi. Mais comme l'administration de ces fonctionnaires ne tarda pas à devenir très oppr essive, qu'ils s'emparèrent de tous les revenus de l'Etat, et même des fonds que la Porte envoyait pour payer 1a milice turque, dont la solde manquait souvent, et dont le nombre n'était jamais au complet; cette milice dépu ta au commencement du 17* siècle, un certain nombre de ses membres au sultan, pour lui exposer ses griefs, et lui représenter que si ces désordres continuaient d'a-voir lieu, le mal ne ferait qu'empirer, et que les Arabes et les Maures se trouveraient bientôt à même de secouer le joug des Ottomans, en appelant à leur secours les chrétiens, avec lesquels ils entretenaient toujours des intelligences secrètes ; après quoi ils proposèrent d'élire parmi la milice un homme doué des capacités nécessaires, et qui, sous le titre de dey, serait chargé du gouvernement du pays, de lever le tribut sur les Arabes et les Maures de la campagne, lequel serait employé à la solde des troupes, qui seraient toujours tenues sur le pied de guerre ; de pourvoir à tous les besoins de l'Etat ; en un mot, qui serait à même de se soutenir par ses propres forces, sans avoir recours à la Porte "... SHAW. (P. 149-150).

..." La milice nomma aussitôt un dey, et établit de nouvelles lois, qu'on lui fit jurer d'observer et de main-tenir, sous peine de mort. Les pachas se contentèrent d'abord de leur pouvoir négatif ; mais ils finirent par se former un parti assez puissant dans la milice pour faire étrangler les deys qui les offusquaient, et en mettre d'autres à leur place qui leur étaient plus dévoués. Mais Baba Ali ayant été élu dey en 1710, malgré le pacha alors en fonction, il le fit arrêter et embarquer pour Constantinople, en le menaçant de le faire mettre à mort, s'il osait remettre le pied à Alger "... SHAW. (P. 151).

..." Depuis cette époque, le dey se regarde comm e souverain indépendant, allié seulement de la Porte-Ottomane, dont il ne reçoit aucun ordre, mais seulement des capigi-bachis ou envoyés extraordinaires, qu'il ne voit jamais de bon oeil. Il est maître absolu, commande les forces de terre et de mer, dispose des emplois et des grâces, récompense et punit à son gré, et ne rend compte de sa conduite à personne. Toutefois, sa sûreté exige qu'il agisse avec beaucoup de circonspection, afin d'éviter les fréquentes et dangereuses révolutions que suscite très souvent l'inconstance d'une milice féroce, difficile à contenir, et envers laquelle il faut en user avec une eXcessive rigueur, ou avec une extrême bienveillance. "... SHAW. (P. 152), d'après Laugier de Tassy.

" LE DEY EST L'ESCLAVE DES ESCLAVES "
..." D'après les lois du pays, l'élection d'un dey d oit se faire à la pluralité des voix de la milice. "... SHAW. (P. 153).

..." Mais il s'en faut bien que le choix d'un dey se fasse toujours paisiblement ; car tous les Turcs de la milice étant également aptes à être élevés à cette fonction, il y en a toujours quelques-uns de plus ambitieux que les autres, et qui fomentent des conspirations dans le but de s'emparer du pouvoir, en sacrifiant celui qui en est revêtu. Celui qui , dans ce cas, peut réunir le plus de partisans, et tenir la chose secrète jusqu'à ce qu'ils parviennent conjointement à s'introduire dans le palais du dey, est à peu près certain de le supplanter après l'avoir inhumainement massacré. Cela fait, il es t aussitôt revêtu, par ses partisans, du cafetan de la victime, et proclamé de la manière suivante : Prospérité à un tel, que Dieu a voulu élever au gouvernement de l'Etat et de la guerrière milice d'Alger ! sans que les membres du divan, qui sont présents, osent proférer un seul mot, parce qu'ils savent qu'ils paieraient de leur vie la moindre opposition. Ils s'empressent, au con-traire, de donner l'exemple de l'obéissance, en baisant les premiers, la main du nouveau dey. Il arrive assez ordinairement que celui-ci, afin de récompenser ses a dhérents, fasse étrangler tous ceux qui étaient attachés à l'administration de son prédecesseur, principalement quand ils ne se soumettent pas de bonne grâce.
------------Le dey est l'esclave des esclaves. Il vit dans une continuelle méfiance, toujours occupé à déjouer les trames qui menacent ses jours, méditant et exécutant de sinistres vengeances contre ceux qu'il soupçonne de nourrir des projets ambitieux. Mais ce sont les têtes de l'hydre qui renaissent à mesure qu'on les coupe. Souvent las d'une pareille existence, il en est qui cherchent à s'y soustraire par la fuite dans les montagnes du Couco. Toutefois, ce moyen ne leur réussit pas toujours, et souvent ils sont tués avant d'avoir pu mettre leur projet à exécution, surtout si on les soupçonne d'emporter de l'argent.
------------Lorsqu'un dey est massacré par le peuple, ses femmes sont dépouillées de tout ce qu'il a pu leur donner, et ses enfants sont réduits à la simple paye de soldats, et exclus de toutes les charges de l'Etat. Si au con-traire, il meurt de mort naturelle, e e qui est fort rare, il est révéré comme un saint ; on l'enterre avec cérémonie, et on n'inquiète point sa famille.
------------Quelquefois, l'élection d'un dey est suivie immédiatement de plusieurs autres. On a vu, par exemple, dans le même jour six deys massacrés et sept élus. On ne fait pas plus de difficulté de reconnaître un Turc qui s'est fait dey par un assassinat, que celui qui est légalement élu, parce que, disent les Mah, oétane, ce qui doit arriver est écrit de tout temps, et n'arrive que par la volonté éternelle et immuable de Dieu. "... SHAW. F. 154-155-156).

..." Le dey doit être choisi et pris parmi les soldats de la milice, et être ensuite reconnu et approuvé par la voix générale de tous les Turcs. Lorsque cette place est vacante par la mort ou la fuite de quelque dey, toute la milice s'assemble dans la maison du roi. L'aga ou le général de la milice demande à haute voix qui on veut élire pour dey ; alors chacun est maître de désigner qui bon lui semble. Lorsque celui qu'on a nommé agrée à la milice, on le revêt du caftan, et on le porte, bon gré mal gré, sur le siège royal, en disant : A la bonne heure ! Que Dieu donne à un tel félicité, prospérité ! Ainsi soit-il ". Après quoi tous lui baisent les mains, en lui promettant fidélité et soumission. L'on tire alors le canon de la ville, et ainsi se fait dans une heure de temps, l'élection, le sacre et le couronnement du roi ou gouverneur d'Alger, Après quoi, le cadi, en présence du divan où assistent le moufty et les gens de la loi, lui lit tout haut ses obligations, en lui faisant une courte récapitulation des lois de l'Etat, qui sont de conserver le royaume, de rendre bonne et prompte justice, de protéger l'innocent et d'exterminer les mé chants, de punir l'adultère, et de ne point laisser sor tir les grains et les denrées de manière que le peuple en puisse souffrir, de taxer même les grains selon l'abondance et la disette, d'empêcher l'usure sur les pauvres. Il est averti que s'il contrevient lui-même à tors ces articles, il sera puni de même qu'il doit punir les autres.
------------Quoique ce soit là des lois pour l'élection d'un dey, il est rare qu'il soit élu suivant ces formalités, car, comme la plupart des deys ont été assassinés, les soldats qui 'se sont trouvés à la maison du roi, ont élu les deys, sans aucune convocation et les ont installés. Ces deys ont été ensuite reconnus comme légitimement élus ; les soldats de leur parti les ayant proclamés, criant à haute voix : Prospérité à un tel que Dieu a voulu appeler au gouvernement du royaume de la milice guerrière d'Alger ! Quelquefois c'est par hasard que l'élection se fait, comme il arriva, en 1694, après la mort de Chaban-Dedja. On résolut d'élire le premier vieux officier que l'on rencontrerait en entrant dans la ville. Alacha-Amet se trouvait assis sur son tabouret de paille, faisant des souliers. On le prit et on le couronna roi malgré lui. Il régna trois ans et il mourut de maladie, aimé, craint et respecté des Turcs qu'il avait su dompter. D'autre fois, l'assassin même du roi s'est endossé le caftan du dey tout ensanglanté, s'est allé lui-même asseoir sur le trône ; ainsi fut reconnu Ibrahim-Dey, qui avait assassiné Bactat en 1710. "... PEYSONNEL. (P. 408-409).

..." LE CAS PARAISSAIT SI SIINGULIER ET SI BEAU QU'IL ETAT HONORE COMME UN SAINT "
..." Quand un dey mourait ainsi dans l'exercice de sa charge, le cas paraissait si singulier et si beau, qu'il était honoré comme un saint.
------------La milice nomma dès lors le dey d'une manière absolue, et le plus souvent la violence se mêlait. aux élections de cette soldatesque, qui, toujours armée, agissait plus qu'elle ne délibérait. "... NETTEMENT. (P. 67)

..." En droit, le dey eut dû être élu par l'assem blée générale ; en fait, les choses se passaient tout autrement. Lorsque le souverain abdiquait volontairement ou mourait dans son lit (ce qui n'arriva que onze fois pour vingt-huit o mutations), son successeur, désigné d'avance, avait pris les précautions nécessaires, et le changement s'opérait sans opposition. Mais, quand il succombait à la violence, les assassins se précipitaient à la .Tenina, dont il occupaient les abords, et proclamaient celui d'entre eux qu'ils avaient choisi ; souvent un combat terrible s'engageait sur l'estrade ensanglantée du trône, et durait jusqu'au moment où les vainqueurs pouvaient tirer le canon de signal et arborer la bannière verte sur le palais, dans lequel ils venaient d'installer leur candidat, qu'ils gardaient le sabre à la main, et qui recevait immédiatement le baise-mains de tous ceux qui l'entouraient, pendant que les esclaves traînaient dans la cour le cadavre encore chaud de son prédécesseur égorgé. Cette scène se répéta quatorze fois, de 1683 à 1817. Toutes les fois qu'elle se passait, la population d'Alger en attendait le dénouement dans une impatiente angoisse ; les rues devenaient désertes ; les portes se fermaient et se barricadaient ; car, aux premières nou velles, la milice s'était répandue en armes dans la ville, et profitait de l'interrègne pour se livrer au pillage e t à toutes les, violences imaginables. Aussitôt intrônisé, le nouveau dey lançait sa garde de tous côtés, et apaisait le tumulte 'ar quelqu, exécutions. "... GRAMMONT. (P. 228)

" LES INTRIGUES D'UNE FACTION DOMINANTE "
..." Quoique l'élection du dey, par le principe des institutions de la tegence appartienne au divan, elle est pour l'ordinaire le résultat des intrigues d'une faction dominante parmi les anisai e, et presque toujours une sanglante tragédie. Un dey est égorgé, pour fair e place à un nouvel ave_iturit. glus heureux que lui. Ses amis et ses partisans, sont tués, pillés ou bannis, et tout cela interrompt tout au plus pe niant vingt-quatre heures, le calme ordinaire des affaires publiques. Ces révolutions se succèdent avec une telle elpidité qu'on a peine à y croire, quand on ne connaît pas les moeurs et le caractère atroce des Turcs. Un dey d'Alger, est de son vivant, le monarque le plus absolu et le mieux obéi du monde ; mais son règne est toujours précaire, et pour lui une mort naturelle est un accident. Un Turc est-il une fois enrôlé dans le corps des janissaires, n'importe ce qu'il est, il peut prét ndre à la souveraineté, excepté qu'il ne soit natif de Bosnie ou de Crête. Il est janissaire : voilà ses titres et ses qualités ; et souvent la fortune s'est plue à tirer de bscurité les êtres les plus bas et les plus abjects, pour les placer sur le trone. On montre encore les tombeau; de sept aventuriers proclamés souverains et tués le même jour, Comme marque de mépris ils furent enterrés sur le grand chemin. Celui qui est élu ne peut ni refuser ni résigner l'honneur de gouverner Alger ; pour lui il n'est que deux places, le trône ou le tombeau. "... SHALER. (P. 30-31).

..." Ce chef est, pour l'ordinaire, élu à la suite du crime et de l'assassinat. Porté par une démocratie la plus hideusement furieuse, il trouve une insolente aristocratie toujours prête à soutenir ses actes les plus iniques ; et de ces éléments opposés, sort une domination militaire avec tous ses inévitables abus, sa violence sans bernes et sa brutale férocité. "... PANANTI. (P. 411).


" CETTE FAMEUSE REGENCE D'ALGER, QUI A ETE PENDANT TROIS CENTS ANS LA TERREUR DE LA CHRETIENTE ET LE FLEAU DU MONDE CIVILISE "...
..." Peu à peu, et autant qu'il leur fut possible de le faire, ces hommes simples réglèrent leur gouverne-ment sur l'unique modèle qui leur fût connu, celui de l'empire ottoman. Prenant le droit de conquête pour principe de leurs institutions, ils mirent à la disposition des janissaires, toutes les places auxquelles étaient attachées la considération. la confiance et l'argent. Les avantages de ce gouvernement se montrent dans sa continuité puisqu'après trois cents ans d'existence, il est encore, à quelques petites exceptions près, le même dans les formes de son administration. C'est par le fait une république militaire, gouvernée par un chef électif, nommé à vie, et ressemblant assez, sur une petite échelle, à l'empire romain après la mort de Commode. Ce gouvernement se compose ostensiblement d'un chef souverain, appelé dey, et d'un divan ou grand conseil. Le nombre des membres du divan n'est pas limité ; ils sont pris parmi les anciens militaires qui ont eu ou ont encore un commandement. Le divan élit le dey, et délibère sur toutes les affaires que celui-ci veut bien lui soumettre.
------------Telle est la théorie du gouvernement algérien. En vertu de ces pricipes, le crédit et l'importance du divan devraient s'élever ou s'abaisser selon le caractère et les les talents du souverain régnant : il n'en est pas ainsi. Autrefois, le divan était réellement un corps dans l'Etat, tenant régulièrement ses assemblées, ayant des fonds à gérer, et prétendant au droit de discuter toutes les mesures du igouvernement. De nos jours, ce n'est plus qu'un vain fantôme, dont l'existence serait m ême problématique, si, en 1816, Orner pacha n'avait pas convoqué un divan, pour délibérer sur les négociations entre la régence et la Grande-Bretagne. Depuis que les deys ont fait de la citadelle le lieu de leur résidence, le divan n'est plus, dans la constitution, qu'un mot sans valeur. Le dey nomme lui-même ses ministres. Ce sont : le Khaznadji, qui a dans ses attributions les finances et l'intérieur ; l'Agha ou Bach-agha qui commande en chef l'armée, et qu'on pourrait appeler ministre de la guerre ; le Vékil-Hardj, ou ministre de la marine et des affaires értangères ; le Khodgia de Cavallas, qu'on pourrait désigner sous le nom d'adjudant-général et de surintendant des domaines nationaux ; et le Beit-et-mâi, ou juge des successions. Ce dernier poste est devenu très important, à cause des revenus qui y sont attachés. Ces ministres forment le conseil privé du souverain, et sont avec lui le gouvernement de fait, où n'a rien à voir le prétendu divan. L'élection des deys d'Alger doit être confirmée par le grand-seigneur, qu'ils reconnaissent pour leur seigneur suzerain. Mais cette confirmation n'est jamais refusée, et toujours elle est 'accompagnée du titre de pacha à trois queues, sorte de dénomination que le souverain prend dans ses actes publics ; car le nom de dey est à peine connu à Alger. Les étrangers seuls s'en servent. Dans le principe, ce fut probablement un surnom, puisque, dans la langue turque, dey veut dire oncle.
------------Aussitôt après leur élection, les deys d'Alger jouissent de toutes les prérogatives attachées à l'autorité souveraine, mais leur installation solennelle n'a lieu que lorsqu'ils ont reçu le firman du grand-seigneur, qui approuve leur élection, et, avec le firman, le caftan et le sabre d'officier, qui leur sont apportés par capidjibe.chi ou messager d'Etat. "... SHALER. (P. 26 à 29).
..." La constitution d'Alger est essentiellement vicieuse. Le dey est assez absolu pour faire sa volonté dans les cas particuliers, mais il, ne peut sans risque, mécontenter la marine et les camps. Il est obligé de souffrir et d'autoriser lis injustices qui tendent au bien général. "... VENTURE DE PARADIS. (P. 109).

LES POUVOIRS DU DEY

" CE POUVOIR QUI FAISAIT TOUT TREMBLER AVAIT DONC A TREMBLER A SON TOUR "...
..." Il a la disposition et la nomination de certaines charges ; telles sont celles des beys et des caïds qui, suivant l'ancien usage, ne peuvent être remplies par des Turcs, crainte qu'ils ne deviennent trop puissants et cela n'est plus observé. Il nomme aussi les écrivains, le kazanadar, le mizoar, le bethmegi et autres charges qu'il donne et qu'il ôte à qui bon lui semble, et couve nt au plus offrant. Mais il ne saurait disposer des charges parmi les soldats, comme celles d'aga, de bolouk-bachi, aïa bachi et autres que l'ancienneté et le rang donnent, sans qu'on puisse faire la moindre injustice à qui que ce soit. "... PEYSONNEL. (P. 413-414).

..." Enfin, il a le droit de vie et de mort sur tous ses sujets, sans en rendre compte à qui que ce soit, mais il ne peut lui-même punir les soldats turcs qui, après leur condamnation, sont envoyés à la maison de l'aga pour y subir l'arrêt prononcé contre eux : c'était là, sans doute, un moyen qu'on avait trouvé pour borner le despotisme auquel les Turcs sont d'ailleurs accoutumés.
------------On voit par ce récit que le dey d'Alger a tous les droits de la royauté. Choisi par élection, il a la suprême justice sans appel, la disposition de l'argent et des troupes, la police, la nomination aux charges, les monnaies, l'autorité de déclarer la guerre ou de faire la paix et, qui plus est, l'autorité despotique de vie et de mort sur ses sujets. Tous ces pouvoirs lui ont été donnés pour contenir le peuple, maintenir les lois, gouverner et régir l'Etat. "... PEYSONNEL. (P. 415).

..." Ce pouvoir, si absolu en apparence, avait cependant des limites ; il était contrôlé par la révolte et l'assassinat. Le dey, entouré de conseillers de son choix, du kaznadji ou trésorier, du bath-chaous ou chef des chaous, du kodjdah ou écrivain, de l'aga ou chef de la milice, et ne prenant leur avis que selon son bon vouloir, savait qu'il exerçait ce pouvoir absolu, au risque de sa tête. La milice, qui l'avait élu, le dé-posait, et sa déposition était presque toujours sanglante. Ce pouvoir, qui faisait tout trembler, avait donc à trembler à son tour, et quand on étudie l'histoire des deys, on croit trouver la réalisation de cette dictature, votée dans nos assemblées révolutionnaires par un de leurs membres les plus violents qui demandait la nomination d'un dictateur condamné à gouverner, un boulet aux pieds et la tête sous le couperet. "... NETTEMENT. (P. 65).

"DESPOTE SANS LIBERTE, ROI D'ESCLAVES ET ESCLAVE DE SES SUJETS "
..." Somme toute, c'était une misérable existence, et c'est avec raison que l'évêque de Ségorbe, Juan Cano, l'a décrit en cette phrase : " Ainsi vit cet homme, riche sans être maître de ses trésors, père sans enfants, époux sans femme, despote sans liberté, roi d'eclaves et esclave de ses sujets. "... GRAMMONT. (P. 231).

..." Le dey a le gouvernement monarchique et même despotique ; il est maître absolu du pays et ne rend compte de sa conduite à personne ; il punit et r écompense qui ben lui semble, et rend la justice au peuple. Pour cela il est obligé de rester presque toujours assis sur son siège royal qui est un banc de pierre, garni de briques, couvert d'une natte, d'un tapis et, p ar-dessus, d'une peau de lion, au fond de la grande salle au rez-de-chaussée, qu'on appelle la salle du divan, où le divan s'assemble. Il s'y rend après la prière du ma-tin qui se fait à la pointe du jour, et il y reste jusqu'à midi. Dès qu'il a déjeuné, il y retourne jusqu'à l'assero qui est vers les trois u quatre heures du soir. Il reste avec les secrétaires, assis à sa droite devant un petit bureau où ils ont leurs registres pour écrire, examiner et v érifier ce que le dey ordonne. Le trésorier de l'Etat, le bachaoux, les chiaoux et le truchement, sont toujours auprès de lui tant qu'il reste sur son siège. Là, le dey règle, ordonne, décide généralement toutes les choses, excepté les affaires de religion et celles où il y a des écritures qui sont renvoyées au cadi. Chacun, depuis le plus grand jusqu'au plus petit, vient porter au dey les causes tant civiles que criminelles, les explique lui-même sans avocat, procureur ni solliciteur et elles sont décidées sur-le-champ, sans frais et sans appel. Vis-à-vis la maison du roi, il y a des boutiques où se tiennent assemblés les officiers, lorsque le dey est à son siège, et dès que le dey a besoin de quelqu'un on le trouve d'a-bord, et des chiaoux vont chercher et amènent sur-le-champ toutes les personnes qui sont appelées en juge-ment, pour répondre aux demandes ou accusations sur quoi elles sont absoutes eu condamnées. Cette espèce de justice qu'on pratique par toute la Turquie, a son pour et son contre : c'est aux législateurs à raisonner là-dessus. "... PEYSONNEL. (P. 408-41i1).

..." La seule perspective d'une augmentation de paye, quelque modique que soit cet intérêt, a occasionné le massacre de plus d'un dey. Baba Ali, placé sur un trône qui venait d'être ensanglanté trois fois dans la même matinée, s'occupa des moyens d'assurer sa vie. "... VENTURE DE PARADIS. (P. 59).

..." Baba Mohammed, qui lui a succédé, a été assailli au commencement de son règne deux ou trois fois. "... VENTURE DE PARADIS. (P. 79).

...Rien ne l'empêche aussi de devenir dey ; il n e faut qu'être né en Turquie pour y avoir des droits...
...Les Turcs n'ayant point de noblesse, il suffit d'être né en Turquie et d'être musulman pour être reçu dans le corps de milice d'Alger et pour parvenir aux premières places et à la dignité de dey. "... VENTURE DE PARADIS. (P. 138).

..." Le dey, malgré son autorité illimitée et son ex cessif pouvoir, est toujours environné d'innombrables perils. Une expédition manquée, une longue paix qui fatig ue ses rapaces courtisans, un doute de leur part que la plus scrupuleuse impartialité n'ait pas été observée dans la distribution du butin, enfin, le plus léger délai apporté au paiement de la solde, suffisent pour enflammer les turbulents janissaires, et produire un tumulte. qui souvent met fin, en peu d'heures, au pouvoir et à la vie du chef barbaresque "... PANANTI. (P. 420).

..." Les deys d'Alger ne maintiennent leur souveraineté que par des pratiques abominables. Ils font souvent périr des innocents, sur les soupçons les plus 1 égers, ou sur des accusations mendiées. On a vu même des deys assez sanguinaires pour couper de leur propre main la tête à leurs ennemis, ou pour les faire égorger en leur présence. "... LAUGIER. (P. 92).

LES INSTRUMENTS D'OPPRESSION

" TOUTE LA FORCE, LE SOUTIEN ET LA DEFENSE DE CE ROYAUME... "

..."Toute la force, le soutien et la défense de ce Royaume consistent en douze mille Turcs, qui, par distinction, sont appelés soldats, ou Turcs à lapaie. Ce corps comprend le Dey, les Beys ou Gouverneurs des Provinces, les Commandants des villes, les Secrétaires d'Etat, l'Amiral, les Capitaines de vaisseaux, et tels les Officiers tant civils que militaires.
------------Tous les Turcs qui 'passent à Alger pour entrer dans la Milice, sont des gens obscurs et sans aveu, des proscrits, ou des criminels qui ont échappé à la justice. Aussi le nom de Pirate algérien emporte-t-il avec lui une idée si exécrable, qu'il n'y a que ces malheureux qui voulussent porter ce titre "... LAUGIER DE TASSY. (P. 310-311)

... " Il faut savoir que ce corps redoutable qu'on appelle milice est composé de douze mille Turcs, soldats ou gens à la paie, parmi lesquels sont compris le Dey, les Beys, l'Amiral, tous les Officiers du Royaume, et les soldats vétérans et invalides dont le nombre est toujours considérable.
------------Tous ,ces Turcs sont ordinairement des gens sans aveu et sans ressources, tirés la plupart de la lie du peuple, ou des proscrits qui, fuyant la juste punition de leurs primes, viennent se réfugier dans ce pays; d'autre, misérables et pauvres, que l'espérance de parvenir aux emplois et de gagner à la course y attire. On reçoit (aussi dans ce pays les renégats et quelques kourouglis, qui sont des enfants, nés dans le pays, de pères turcs et de mères maures ou arabes; mais ,ils ne peuvent jamais posséder certaines charges de l'État, par la crainte qu'on a qu'ils envahissent la suprême autorité. Les Maures et les Arabes en sont entièrement ,exclus, étant regardés comme suspects; on les tient dans une dépendance qui diffère peu de la servitude. C'est cette milice ou ce corps redoutable qu'on qualifie d'illustres et magnifiques seigneurs; c'est elle qui possède tous les emplois et les charges du gouvernement. Ils y parviennent, aux unes par simple ancienneté, aux autres ,par choix et élection. Il semble qu'un corps qui a une telle origine ne peut avoir , qu'un gouvernement défectueux "... PEYSONNEL. (P. 403-405)

..." La plupart des Turcs Algériens n'ont de la religion que l'extérieur. Ils vivent dans l'ignorance la plus crasse, et dans la dernière dissolution. On ne doit point s'en étonner, puisque la milice, où réside l'autorité ,est un composé du rebut des Turcs Levantins, et de Renégats Juifs ou Chrétiens "... LAUGIER DE TASSY. (P. 149).

" LE PRINCIPE FONDAMENTAL DU GOUVERNEMENT ALGERIEN EST QUELQUE CHOSE DE BIEN SINGULIER. "

... " Le gouvernement entretient à Constantinople et à Smyrne des agents qui engagent des recrues et les envoient à Alger sur des navires marchands naulisés. A leur arrivée ils sont soldats de fait, sous la dénomination de janissaires. On les incorpore dans les différentes baraques de la ville auxquelles ils appartiennent le reste de leur vie, quel que soit par la suite le changement de leur fortune. C'est dans' les quartiers qu'ils s'élèvent par rang d'ancienneté au plus haut degré de 'paie, et deviennent membres du prétendu Divan, à moins que quelque heureux hasard ne les jette dans l'administration; et il faudrait qu'ils fussent d'une ineptie bien rare, pour ne pas parvenir à quelque emploi avantageux "... SHALER. (P. 40)
------------Le principe fondamental du gouvernement algérien est quelque chose de bien singulier. Hors l'établissement des Mameluks en Egypte, je ne crois pas que l'Ihistoire moderne nous en offre un autre exemple. Une petite troupe d'aventuriers étrangers se saisit de l'autorité souveraine, et, dans le gouvernernent qu'elle établit, réserve aux individus dont elle est composée, toutes les places auxquelles sont attachés les honneurs, l'argent et la confiance. Jusqu'ici rien d'étonnant. L'histoire est pleine de pareils traits; mais par le principe de cette institution, les enfants de ces étrangers, leurs propres enfants nés dans le pays, n'ont droit de prétendre ni aux profits ni aux honneurs de ce gouvernement. Seul, un corps d'étrangers, toujours recrutés au-dehors, en jouit au détriment des naturels; voilà ce qui est extraordinaire. Te] est cependant le principe fondamental de la régence d'Alger, à quelques exceptions près, ,que l'expérience a fait jufter indispensable "... SHALER. (P. 38)

" UNE REDOUTABLE ARISTOCRATIE DE RACE ET D'ARMES "

" L'institution 'de l'Odjack, formé de soldats d'élites recrutés dans la même race et dans une race conquérante, créait une force militaire redoutable, parce qu'elle était unie par la solidarité des intérêts et des périls, toujours menaçante, toujours menacée, contrainte à se faire redouter pour pouvoir subsister, aguerrie par des combats continuels, et par conséquent supérieure, dans le métier de's armes, aux populations dont elle était entourée, obligée de ne se permettre que de courtes anarchies, car, inférieure en nombre aux peuples qu'elle gouvernait, elle eût été bientôt exterminée, si elle ne s'était hâtée de se rallier autour d'un chef. Sans doute ce n'était point une aristocratie militaire, ce nom est trop beau pour ce ramas d'aventuriers sans passé, sans avenir ; mais c'était au moins une milice aristocratique, redoutable dans la main de son chef, redoutée par ce chef lui-même, qu'elle ,empêchait de s'endormir dans l'oisiveté fatale aux despotismes orientaux, car un dey endormi était un (dey appauvri, et paf -même condamné aux yeux de la milice, qu'il eût été incapable d'enrichir "... ,NETTEMENT (P. 63).

..." Cette milice était une redoutable aristocratie, de race et d'armes "... NETTEMENT (P 73).

..." Les soldats turcs et les soldats renégats, qui, à l'exception des cinq, premières dignités de l'état, réservées par l'usage ou par la loi aux seuls ottomans, jouissent des m'emes prérogatives ont tous un grand intérêt au maintien de la constitution établie. Les poses utiles ou honorables de l'empire leur sont tous dévolus. Chacun d'eux y a un droit plus ou moins prochain. Les moins heureux sont ceux qui, ayant passé le temps de leur service à parcourir tous les grades de la milice, finissent par celui d'aga, qui ne dure que cieux mois, et qu'on ne quitte que pour jouir d'une re traite honorable, douce et commode ".... RAYNAL. (P. 121).

..." Un Turc n'est estimé à Alger que s'il est ssidat, aussi le sont-ils tous, et ne respirent-ils que la guerre "... SHAW. (P. 186).

... " Cette milice excède rarement dix à douze mille hommes; elle suffit pour tenir dans la soumission et dans la crainte une population de cinq millions d'âmes, qui déteste son joug en cédant à la nécessité d'obéir à cette soldatesque barbare "... RAYNAL. - T. II (P. 148).

... " Ils obéissent au dey avec une profonde soumission tant qu'il maintient son autorité, soit par la douceur, 'par la force, ou par adresse; qu'il n'enfreint pas les lois établies, et surtout que leur solde est régulièrement payée; car, si elle vient à être, par hasard, différée d'un jour seulement, rien n'arrête les mur-mures de cette milice hautaine, et le dey, est souvent victime d'un aussi court retard "... SHAW. (P. 184).

..." Bientôt cette milice armée et sans o principes oest venue à commettre des exactions envers les Bédouins 'et les Kabaïls Énsuite ces misérables ont tramé, des révolutions, et renversé les chefs de l'Etat, selon leur caprice "... KHODJA. (P. 130).

... " A des époques plus reculées, le corps des Turcs qui occupent le royaume d'Alger, s'est rarement élevé au-dessus de cinq mille; dans ce moment des raisons particulières l'ont réduit à moins de quatre milles. Seuls ils peuvent prétendre aux premières dignités de l'État, ou aux charges lucratives et honorifiques "... SHALER. (P. 39).

" UNE TYRANNIE SANS EXEMPLE DANS L'HISTOIRE DES AUTRES PEUPLES "

" Les trois provinces sont gouvernées par des beys, que nomme le souverain, et qui, avec le titre de ses lieutenants, sont par le fait investis de toute 'son autorité despotique. Le même pouvoir leur adjoint un vakil ou intendant. Chaque province est imposée pour une somme déterminée, selon la capacité qu'on lui suppose pour la ,payer. Le fisc perçoit cette somme par dividende de six mois. C'est ce que j'explique-rai plus tard, en parlant des revenus de ce royaume. La situation de ces gouverneurs est nécessairement précaire, et leur tyrannie comme l'oppression qu'ils font peser sur les provinces soumises à leur autorité, afin de se créer des resssources pour conserver leurs places, sont certainement sans exemple dans l'histoire des autres peuples. Telle est la malheureuse condition 'des habitants de ce royaume, que la douceur et l'équité dans un gouverneur de province, seraient regardées comme une 'tendance à la popularité que con-damne le gouvernement central, et que les coupables, comme le prouve plus d'un exemple, payent de leur fortune et de leur vie.
------------Toutes les trois années lunaires, les beys sont obligés de venir en personne, rendre compte de leur administration au siège du gouvernement; leur entrée publique est très magnifique, mais la continuation de leur pouvoir, et leur vie même dépendent du talent qu'ils ont eu, de rassasier l'avarice des membres de la régence. Je sais, de voie sûre, que chaque visite des beys à Oran et à Constantine, ne leur coûte pas moins de trois cent mille dollars; il leur faut, dans ces occasions, acheter 'la faveur des officiers de la régence, dont le prix est plus ou moins élevé, selon que leur crédit est plus ou moins grand. Cependant il n'entre pas la moindre partie de ces contributions extraordinaires dans les coffres de l'État.
------------Les officiers de la régence d'Alger ne reçoivent pour leur salaire, que leur paie et leurs rations comme janissaires. Le pacha lui-même se soumet à cette loi, avec une apparence de simplicité primitive. Mais dans leurs rapports avec la société, ce's mêmes officiers se reposent sur les privilèges de leurs places et la licence qu'elles leur donnent pour toute sorte d'exactions "... SHALER. (P. 31, 32 et 33).

..." Le bey était le mandataire armé du dey. Collecteur militaire de l'impôt en argent et en nature, il représentait la puissance turque au milieu des tribus arabes ; il faisait sentir, quand il en était besoin, la pointe du glaive aux tribus insoumises, comme il étendait sa protection sur les tribus dociles "... NETTEMENT. (P. 76).

..." Le commandement et l'administration du reste de la Régence étaient confiés à des Beys, qu igouvernaient souverainement leurs circonscriptions. Ils dev aient apporter au Trésor public les impôts recueillis ; ces versements se faisaient deux fois par an, aux mois de mai et d'octobre, et les Beys étaient tenus d'effectuer personnellement le premier des deux "... GRAMMONT (P. 232).

..." Les beys exercèrent un pouvoir presque absolu ; leur devoir était de maintenir la paix intérieure et d'assurer le recouvrement de l'impôt "... GRAMMONT (P. 409).

..." Le Bey de Constantine payait 140.000 piastres fortes, et entretenaient 300 spahis turcs et 1.500 indigènes ; celui de Titery, 4.200 piastres et 500 cavaliers ; celui d'Oran, qui résida d'abord à Mazouna, puis à Mascara, 100.000 piastres, 2.000 colourlis et 1.500 indigènes ; le Caïd des Nègres fournissait 25.000 piastres et relit esclaves ; celui de Blidah, 14.000 pataques ; les revenus du Sebaou et de la Calle étaient fort aléatoires.
------------Aux sommes qui viennent d'être énoncées s'ajoutait une multitude d'impôts divers, sur le corail, les Juifs, las jardins, la cire, les marchandises étrangères, les patentes, les concessions, les tavernes, les filles de joie, les successions, les prises de mer, la vente des captifs, les rédemptions, les droits d'ancrage et de tonnage, et en général sur tout ce qui peut être taxé : car la fiscalité turque n'a rien laissé à inventer en matière d'impôts "... GRAMMONT (P. 232).

..." Par rapport au peuple et aux Arabes ils sont de véritables rois monarchiques et despotiques, commandant absolument tout ce qu'ils jugent à propos, et ont carte blanche pour faire ce que bon leur semble, ce qui les rend très souvent de véritables tyrans "... PEYSONNEL. (P. 430).

..." Ces petits tyrans, comme ils ne sont placés que pour s'enrichir et engraisser ceux qui les placent, font des concussions extraordinaires, volent, pillent et détruisent des nations, suivant leur volonté ou. leurs intérêts. Aussi leur poste est très fragile. Comme ils sont obligés d'aller à Alger rendre compte de leur conduite, ils y laissent très souvent leur tête, principalement lorsqu'ils sont bien engraissés du sang du peuple. Il y en a qui, plus habiles, s'enfuient après avoir fait leur coup, et vont dans d'autres royaumes jouir tranquillement de leurs rapines.
------------Les beys ont sous eux des Caïds, qui sont des intendants et exacteurs des deniers royaux ; et ces Caïds, qu'on met dans chaque ville et dans chaque nation, sont encore de petits tyrans qui ont un diminutif de l'autorité des beys, pillent, volent, font mourir les pauvres Arabes, suivant leur fantaisie ou leur autorité "... PEYSONNEL. (P. 430 - 431).

..." Les Caïds, ou gouverneurs des villes, achètent leurs places, et ils ont communément le noble dessein de se dédommager, même avec intérêt, aux dépens des habitants, de l'argent qu'elles leur ont coûté "... (PANANTI (P. 442).

...." Un des grands abus survenus dans le gouvernement turc à Alger, était d'élever à la charge de bey des personnes dépourvues de mérite et de capacité. KHODJA (P. 154).

,.." PRESSER UN JOUR L'EPONGE "...
..." Les Beys sont des officiers pourvus du gouvernement des provinces et du commandement des armées ; ils sont nommés par le dey, qui les révoque à volonté. C'est une des fonctions auxquelles on ne parvient pas par ancienneté.
------------Leur autorité est absolue là où ils commandent. Ils lèvent les impôts dans les villes, le tribut dans les campagnes, et perçoivent en un mot dans l'étendue de leur gouvernement tous les revenus publics dont ils sont tenus de rendre compte au dey une fois par an, et d'en verser le produit dans le trésor de l'Etat. Toute-fois leur pouvoir cesse dans Alger, où on les reçoit d'ailleurs toujours avec beaucoup de cérémonial dans cette circonstance. Le public juge de l'importance des revenus par le nombre des voitures chargées d'argent qu'amènent ces fonctionnaires ; et il en témoigne toujours sa joie par des cris bruyants. A leur arrivée au palais du dey, celui-ci les revêt aussitôt d'un cafetan. C'est un honneur dont ils cherchent néanmoins à se dispenser quand ils le peuvent, incertains qu'ils sont de savoir quel est le sort qui les attend ; s'ils seront traités gracieusement, ou s'ils laisseront leurs têtes, malheur qui leur arrive fréquemment pour les punir de leurs prévarications et de leurs concussions, mais surtout pour les dépouiller des biens immenses qu'ils acquièrent généralement par toutes sortes de moyens illicites "... SHAW (P. 163-164).

..." Quels que soient les dangers attachés à leurs fonctions, on peut cependant dire que les beys sont autant de rois dans leurs gouvernements, et beaucoup moins exposés que le dey aux caprices de la fortune. Ils ne visent qu'à s'enrichir et à amasser des sommes considérables ; ce qu'ils ne peuvent faire qu'aux dépens de l'Etat et au détriment des peuples. Il est difficile, au reste, de les déplacer s'ils ne viennent pas à Alger ; et il ne reste alors d'autre moyen de répression que de les faire assassiner par surprise, ce qui arrive quelquefois. Il en est qui, après avoir amassé de grosses sommes, s'enfuient secrètement en pays étrangers "... SHAW (P. 164-165).

..." Le dey laisse, avec la plus grande indifférence, les beys se conduire comme ils le font ; il semble même prendre plaisir à les voir s'imbiber du sang du peuple, parce qu'il se propose bien de presser un jour l'éponge "... PANANTI. (P. 441).

..." C'est à l'aide de cette organisation militaire puissante que la domination turque s'établit et se main-tint si longtemps sur l'Algérie, malgré les avanies et les exactions de toute espèce qu'elle fit peser sur le pays. L'institution des beys, leur influence, leur intérêt à soutenir la domination turque au service et avec le concours de laquelle ils s'enrichissaient, la création de maghzens, ces tribus puissantes, présentes sur les lieux, toujours prêtes à opérer de rapides et impétueuses razzias contre les tribus récalcitrantes, dont elles connaissaient les habitudes et les campements, et en outre intéressées à augmenter le nombre des tributaires, puisque leur profit s'accroissait proportionnellement à ce nombre ; l'institution des garnisons turques qui occupaient les points fortifiés ; les promenades militaires des trois corps d'armées turcs, qui se montraient sur tous les points des trois beyliks pendant la perception des impôts ; enfin, chaque fois que quelqu'un des marabouts, personnages réputés saints dans le pays, excitait un soulèvement parmi les Arabes ou les Kabyles, une répression prompte et terrible exercée par une armée composée d'un noyau d'infanterie turque et d'une nombreuse et agile cavalerie arabe ; tels furent les principaux moyens de domination turque "... NETTEMENT (P. 79).

..." L'état n'a d'appui solide que six mille Turcs et quelques centaines de chrétiens devenus musulmans. Encore beaucoup d'entre eux ont-ils été mis hors de service par l'âge, par les infirmités et par les blessures. Les plus jeunes, les plus audacieux cherchent sur les bâtiments corsaires l'aisance qui leur manque. Plusieurs exercent des professions qui les éloignent de leurs drapeaux. Huit ou neuf cents gardent les forteresses et les frontières ; un plus grand nombre parcourent les provinces pour arracher des tributs toujours payés avec répugnance. Par quelle magie est-on parvenu, avec des moyens si dispersés et si bornés, à retenir sous un joug oppresseur des mitions d'hommes toujours malheureux et toujours mécontents ? "... RAYNAL. (P. 120).

MÉTHODES DE GOUVERNEMENT

" LA CRÉATION DE MAGHZENS, CES TRIBUS PUISSANTES "...
.." Tous les ans, à la fin du printemps, trois petites armées sortaient d'Alger, pour ,prêter main-forte aux beys, qui 'commençaient à cette saison l'opération toujours difficile du recouvrement de l'impôt ; les tribus Makhezens apportaient. leur concours, et l'on profitait de ce rassemblement pour châtier les infractions qui avaient pu être commises, ou pour réprimer les velléités d'indépendance. Chaque caïd était tenu de réunir à l'avance les contributions dues par le groupe qu'il commandait ; l'expédition qui prenait le nom ,de Mahalla, durait environ quatre mois ; elle occasionnait de nombreuses exactions, tant de la part des chefs que de celle des simples soldats ; on arrivait ainsi à exaspérer les populations, et des ré-voltes éclataient fréquemment. Du reste, quelques tribus se faisaient un point d'honneur de ne jamais payer avant d'avoir fait parier la, poudre "... GRAMMONT. (P. 405).

..." C'est dans l'établissement des Makhezens, dans cette force tirée du .pays pour subjuguer le pays, que résidait la véritable 'puissance des Turcs. En arrivant dans la région du Mogrob, ils virent combien il y avait peu d'homogénéité, de liaison, de nationalité parmi ces différentes populations entraînées sur le sol d'Afrique par les diverses invasions, ou résidu des peuplades primitives. Il ne leur fut point nécessaire de diviser pour régner, ils n'eurent qu'à profiter des divisions existantes.
-------C'est cette institution qui permettait à quelques milliers de Turcs de régner en maîtres, en despotes "... WAALSIN-ESTERHAZY, (P. 257).

..." Cette levée des impôts était , la grande affaire de ces représentants locaux de la souveraineté turque. La crainte ou la force pouvaient seules les faire, payer, et, chaque année, la perception des contributions ressemblait à une campagne.
Il faut indiquer les moyens par lesquels les Turcs étaient parvenus, malgré leur petit ,nombre, à maintenir 'leur domination sur une vaste étendue du pays et à lever, chaque année, les impôts. Ils avaient profité des divisions continuelles des tribus, et ils les avaient distinguées, dans les trois , beyliks, en tribus magkzen et en tribus rayas. Les premières, qui étaient les plus influentes, les plus belliqueuses et les, plus fortes, se 'chargeaient de lever l'impôt sur les autres, à condition d'y avoir part, ;et d'être elles-mêmes exemptées de toute contribution, excepté de la contribution religieuse. Elles payaient leur cote-part par cette espèce de service, public, et toute la charge fiscale retombait sur les tribus rayas "... NETTEMENT. (P. 77).

" IL REGNE PAR LA DIVISION "...
..." Cependant comme les Cabaïlis de Felissa sont presque toujours en guerre entre eux, le caïd est sollicité tantôt par un cheikh, tantôt par un autre d'entrer dans leur querelle, et le caïd ,embrasse le parti qui convient le mieux à ses intérêts. La politique consiste à 'semer la division parmi eux ,pour les affaiblir et les ronger les uns après les autres ; c'est un art dans lequel les Turcs , excellent ".... VENTURE DE PARADIS (P. 127-128).

..." Le caïd de Sebouâ (Sebaou) ne donne point d'argent à cause, des dépenses qu'il doit faire pour avoir des troupes suffisantes pour en imposer aux Cabaïles de Felissa : il envoie au beylik de l'huile et des, figues sèches pour les corsaires. Ce caïd a la musique et le train des beys ; mais il n'est pas dispensé d'aaïds, c'est-à-dire de présents en argent, vis-à-vis du dey, des grands et tout ce qui tient au gouverne-ment. Ses moyens de gagner c'est de soutenir une nation de Cabaïles contre l'autre, les Maures qui se ,sou-mettent lui donnant aussi le prix du sang. Et cela ne laisse pas d'être considérable parmi des gens qui hérirent du droit de se venger, etc. "... VENTURE DE PARADIS. (P. 12).

..." Les Arabes errants, plus multipliés, moins avilis, plus courageux, moins exposés aux outrages que les habitants des villes, auraient des moyens suffisants pour secouer un joug détesté. Aussi le gouvernement ne compte-t-il pas autant sur ses forces que sur son adresse pour les maintenir dans l'obéissance. Dès qu'il aperçoit dans une des hordes le moindre penchant à la rébellion, il ne manque jamais d'animer contre elle une des hordes voisines. La guerre s'engage. Lorque les hostilités ont mutuellement affaibli les deux tri-bus, il vient au secours de celle dont les dispositions lui sont les plus favorables, et lui assure infailliblement la supériorité. Cette politique affermit sa puissance, et au défaut de meilleurs ressorts il règne par la division "... RAYNAL. (T. II, p. 123).

..." Leur division en un grand nombre de tribus, dont les intérêts sont opposés, est cause de cet asservissement, et perpétue leur sujétion. Les gouvernements qui les régissent, attentifs aux dissensions de ces sociétés particulières, ne cessent d'alimenter leurs discordes pour les mieux contenir. Ils ont surtout recours à cette politique machiavélique quand ils veulent détourner le mécontentement des peuples par des querelles intestines. C'est ainsi qu'ils soulèvent contre telle peuplade dont ils croient avoir quelque chose à redouter une peuplade voisine qu'ils font toujours triompher par les secours qu'ils lui prêtent. Mais un pou-voir assis sur une base aussi mobile ne peut avoir jeté des racines bien profondes, et rien ne serait plus aisé que de le renverser "... SHAW. (P. 212-213).

.." REBELLES PAR NATURE A TOUT SENTIMENT D'UNION ET DE NATIONALITE "...
..." Les Turcs ne semèrent pas la discorde dans le pays conquis ; elle y existait avant eux, et elle a régné de tout temps ; l'esprit de çof ou de faction est une des marques caractéristiques de la race ; il se fait sentir de tribu à tribu, dans la tribu même et dans la moindre fraction de tribu ; les conquérants n'eurent donc qu'à l'utiliser à leur profit, en favorisant tour à tour les partis opposés "... GRAMMONT. (P. 412)

..." Les Kabyles d'Alger sont, de tous les habitants de la Barbarie les plus mécontents et les plus portés à la rébellion ; aussi les Turcs, très soupçonneux à leur égard, les surveillent-ils avec une extrême jalousie "... PANANTE (P. 249).

..." Le pire des effets de l'état actuel de la société en Barbarie est le manque d'attachement entre les individus et leur défaut d'unanimité ; produits naturels du despotisme "... PANANTI. (P. 443).

..." Toutes ces peuplades se tenaient, armées et prêtes à une révolte générale, à laquelle il manqua seulement un chef assez habile pour donner un peu d'homogénéité aux éléments de lutte ; les Turcs ne durent la conservation de leur pouvoir qu'aux divisions incessantes de, leurs sujets, complètement rebelles par nature à tout sentiment d'union ou de nationalité "... GRAMMONT. (P. 410).

..." Les Maures n'étant ,point unis entre eux se trahissent volontiers les uns les autres ". SHAW. (P. 193).

.. ." En arrivant, dans la région, du Moghrob, ils (les Turcs) virent combien il y avait peu d'homogénéité, de liaison, de nationalité, parmi ces différentes populations entraînées sur le sol d'Afrique par les diverses invasions, ou résidus des peuplades primitives "... WALSIN-ESTERHASY. (P. 257).

..." Les montagnes inaccessibles dans lesquelles ils (les Zevawis) vivent les mettent à l'abri des vexations des Turcs, mais entre eux ils se font des guerres éternelles, et le plus faible se fait soutenir par le commandant turc le plus voisin, qui ,profite de ces divisions pour les dévorer. Leur haine est implacable et n'est assouvie que par le sang "... VENTURE DE PARADIS. (P. 14).

" MAINTENIR LES ARABES ET LES MAURES DANS L'OBEISSANCE ".
..." Comme les Maures se retirent à peu près, toujours dans l'intérieur du pays à l'approche des troupes, le bey a constamment soin de se .pourvoir de gros bétail, de moutons, de biscuit, d'huile et d'autres objets d'approvisionnement que les Maures sont obligés de fournir, ainsi que les chameaux, les chevaux et les mu-lets nécessaires pour remplacer ceux qui peuvent manquer pendant la campagne qui est ordinairement de six mois.
-------Les camps ont pour objet de maintenir les Arabes et les Maures dans 'l'obéissance ; de lever le carache ou tribut, que l'on fait double à ceux qui s'y font contraindre ; de mettre à contribution les districts qui ne .sont pas entièrement soumis ; et enfin d'acquérir de nouveaux sujets, ce que les beys font en pénétrant assez avant dans les déserts du Beled-ul-Djérid. Mais comme il y a un grand nombre de districts dans ces déserts qui, attendu leur stérilité, ne paient pas le tribut, les beys ne font guère de campagnes sans y enlever beaucoup d'esclaves ; genre de spoliation qui leur est d'autant plus facile, que les Maures, n'étant point unis entre eux, se trahissent volontiers les uns les autres "...SHAW. (P. 192-193).

..." Les Turcs élevèrent des fortifications dans les lieax les plus avantageux, et se, rendirent formidables par leurs armes à feu, inconnues à ces Arabes. D'ailleurs, ils augmentèrent encore leurs troupes, et tirèrent des secours et les 'lumières des Juifs et des Mores 'chassés d'Espagne. Enfin ils forcèrent avec le temps quelques-unes de ces nations arabes à leur payer un tribut annuel, et les autres à se renfermer dans leurs montagnes.
-------Vers le temps où les trois armées d'Alger se mettent en campagne, ces Arabes cachent leur grain et leurs autres effets non transportables, dans des souterrains, et errent eux-mêmes avec leurs troupeaux jusqu'à la retraite des Turcs. Ces précautions de la part des Arabes obligent ces derniers à porter de l'huile avec eux, et à mener des boeufs et des moutons pour la subsistance des armées. Comme les Mores et les Arabes devraient par les 'traités leur fournir ces provisions, s'il leur arrive d'être surpris par les troupes Turques, elles leur font bien payer tous les arrérages "... LAUGIER DE TASSY. (P. 110-111).

" LA DOMINATION ABSOLUE DU DEY S'ETEND A QUATRE JOURNEES DE LA CAPITALE "...
..." La ,plupart des ,montagnes, depuis le royaume de Sous jusqu'à la plaine du Kairoan, sont peuplées de nations indépendantes. Alger en a deux fameuses qu'il, n'a jamais pu soumettre : les Cabaïlis de Flissa et ceux de Zevawa. Les montagnes de Flissa règnent depuis Dellis jusqu'au Collo ; celles de Zevawa sont plus au midi., Les Zevawis ont près de 300 villages ; ils ne payent ni tribut, ni capitation, mais ils se font entre eux une guerre extrême i et ne se réunissent que contre l'ennemi commun "... VENTURE DE PARADIS. (P. 13).
..." La domination absolue du dey s'étend à quatre journées de la capitale ; au-delà, et, jusqu'à la ligne de Bilédulgérid, le pays est habité par des tribus errantes qui paient un tribut quand, l'armée fait son excursion annuelle "... PANANTI. (P. 152).

..." Anarchie perpétuelle dans l'intérieur du pays "... GRAMMONT., (P. XVI).

..." Les Mores de la campagne sont fort abandonnés au larcin, aussi est-il très dangereux de s'éloigner des villes sans une escorte. Portés au vol par une juste vengeance, ils ne s'en font point un crime. Dépossédés du pays par différentes nations qui les ont réduits ,à la dernière indigence, ils pillent tout ce qu'ils trouvent par voie de représailles "... LAUGIER DE TASSY. (P. 102)

..." Mais il , est nécessaire de redire encore une fois que ce pouvoir se bornait à l'hommage et à la perception du tribut ; de plus, il faut constater que les montagnards se soustrayaient à toute obligation. Pour ne citer que les exemples les plus connus, souvenons-nous que la Grande Kabylie vécut dans un état d'insurrection presque permanent ; que les tribus du Dahra, loin de payer l'impôt, harcelaient tous les ans l'escorte du Denouoh d'Oran ; que, dans l'Aurès, la garnison de Biskra ne s'aventurait pas au-delà de la vallée de i'Ouer Abdi ; qu'aux portes d'Alger, à El-Affroun, la Mahalla était régulièrement attaquée comme on peut en juger par les appréciations de témoins occulaires tels que Peyssonnel et Desfontaines, et concluons en disant que les Turcs occupèrent la Régence, mais qu'ils ne la gouvernèrent pas "... GRAM-MONT. (P. 413).

" LA REGENCE AGONISAIT... "
..." Lorsque les traités de 1815 eurent ramené la paix, toutes les nations s'entendirent pour secouer un joug qui n'avait été porté que trop longtemps, et, dès ce jour, 'la chute de la Régence fut décidée et de-vint inévitable Au reste, elle s'effondrait d'elle-même. Lis tribus de l'intérieur du pays étaient en révolte permanente, et refusaient l'impôt, toutes les fois que les Beys ne pouvaient pas le leur arracher par la for-ce ; la milice, plus indocile et plus turbulente que jamais, s'insurgeait à chaque instant, et mettait au pillage les. habitations privées, et, de préférence, celles des juifs, qui émigraient en masse ; avec eux, dis-paraissait le seul commerce de la ville, et, par suite, le revenu des douanes.
-------Les derniers reïs étaient morts dans l'Archipel et à Navarin ; il ne restait dans le port d'Alger que quelques vieux vaisseaux à demi pourris ; on ne réparait ,plus le môle ni les fortifications ; car l'argent manquait de plus en plus, et chaque année creusait un nouveau vide dans les coffres de la Casbah. La régence agonisait, et l'arrivée victorieuse des Français ne fit que devancer de quelques années une dissolution inévitable "... GRAMMONT. (P. XIII-XIV).

L'OPPRESSION FINANCIÈRE

" UN SYSTEME D'EXACTION ET DE DEPREDATION ORGANISE "
-------" Beaucoup de gens enfouissent leurs trésors, et préfèrent passer pour pauvres, afin de n'être pas inquiétés par le dey, qui autrement pourrait leur demander de l'argent sous prétexte des besoins de l'Etat, les condamner à des amendes pécuniaires considérab les pour la plus légère faute, ou même confisquer leurs biens sur le moindre soupçon d'avoir conspiré contre sa personne "... SHAW. (P. 168-169).

..." Nous ne dirons rien du système d'exaction et de déprédation organisé qui faisait partie de la force des beys et desséchait dans leurs sources les richesses du pays. Soumis à un prélèvement régulier, établis sur une base fixe, au lieu d'être livrés presque entièrement aux capricses et aux malversations des agents chargés de les recouvrer, les impôts eussent, sans nul doute, rapporté beaucoup plus au trésor, et eussent été moins lourds à supporter pour les populations "... WALSIN-ESTERHAZY. (P. 254).

..." Les redevances exigées se divisaient en deux classes distinctes : l'Achour (dixième) auquel tout le monde était soumis, et la Moûna, qui ne frappait que les Raïas ; tous deux se percevaient en proportion directe de la production ; mais la Moûna revêtait un caractère des plus vexatoires, en raison de la variété et de la multiplicité des taxes individuelles, qui devaient se solder, partie en argent, partie en nature. La fiscalité turque n'avait laissé échapper aucune matière imposable ; toute chose se trouvait frappée d'un droit, les récoltes, les silos qui les conservaient, le marché où elles étaient vendues, les bêtes de somme qui les transportaient, la quittance même qui constatait le paiement ; le tout, sans parler des Aouaïds, ou impôts de coutume, variant d'un groupe à un autre Il est aisé de comprendre que ces charges, déjà si lourdes, se multipliaient par le mode de perception, en passant entre les mains des agents du caïd, puis entre celles de ce chef lui-même, avant d'être remises au trésorier du bey, sorte de fermier général, auquel il n'était demandé aucun compte des moyens employés, pourvu qu'il accomplit le versement annuel aux époques désignées.
-------Les Indigènes étaient donc extrêmement pressurés, plus encore par les vices du système employé, et par la rapacité des collecteurs de taxes, que par les exigences du Trésor public ; cependant, ces exigences augmentaient chaque jour, en même temps que celles de la milice et que l'abaissement des grande revenus dont la Régence avait jadis été enrichie par la course ou les tributs prélevés sur les petits Etats européens. Le mal devint de plus en plus grand ; des villes que Léon l'Africain et Marmol avaient vues commercantes et prospères se dépeuplèrent ; plus d'une disparut entièrement ; des régions jadis fertiles revinrent à l'état de déserts ; des peuplades fixées au sol redevinrent nomades, pour échapper plus facilement à l'oppression d.. vainqueur "... GRAMMONT. (P. 410-411).

" UNÉ OPPRESSION AUSSI INSUPPORTABLE A DEPEUPLE LE PAYS "
..." Ce sont les gouverneurs des provinces qui sont chargés de la perception des impôts. Aux soldats dont ces tyrans s'entourent ,habituellement pour leur sûreté, se joignent deux fois l'an des troupes envoyées d'Alger, pour arracher aux peuples des contribution qu'on n'obtiendrait pas sans -cet appareil de guerre. Le pays est si misérable et si ruiné que les extorsions réunies ne s'élèvent jamais au-dessus de deux millions de livres. Le fruit de ces brigandages est porté deux ans de suite à la capitale par des subalternes, et la troisième par les beys eux-mêmes "... RAYNAL. (T. II, p. 137).

..." Les impôts qui ne regardent que l'intérieur sont fixés d'après les préceptes du Coran. Si la même bonne foi présidait à leur perception, ce serait un far deau bien léger, et en même temps une grande source de revenus pour l'Etat. Mais, à Alger, l'administration turque a tous les vices d'une corporation privilégiée, sans aucun de ses avantages. Pour eux, la première co nsidération, c'est leur fortune privée ; sentiment qui se fortifie dans les coeurs, par le caractère factieux du gouvernement, et l'incertitude du titre en vertu duquel ils ont leurs places. Les beys et les gouverneurs des ,provinces sont responsables des impôts, et rien de ce qui peut être enlevé n'échappe o aux mains des agents militaires qui le savent. Une oppression aussi insupportable a dépeuplé le pays, en forçant les habitants à quitter des plaines fertiles, pour se retirer au sein des montagnes, dans des positions moins accessibles, et sur les limites du désert. Cet état de choses produira nécessairement l'abolition , de cette institution ; à moins que la Sainte-Alliance ne décide dans sa sages-se qu'elle leur doit son appui, ces hommes seront avant peu un fléau de plus pour la civilisation ".,. SHALER, (P. 47-48).

" DES CONFISCATIONS CHAQUE JOUR REPETEES "
..." Des confiscations, chaque jour répétées et souvent arbitraires, augmentent nécessairement le domaine national, qui doit finir par être immense. Les terres qui ne touchent pas aux principales villes sont de peu de valeur. Le commerce et l'agriculture sont réduits à l'état le plus déplorable, par suite du système de prohibition, qui défend d'exporter toute espèce de produits indigènes. L'importation n'existe que pour quelques articles, qui sont pour le gouvernement un objet de monopole.
-------Les Turcs qui sont à la tête du gouvernement ne suivent que des idées étroites d'égoïsme, et sont jaloux de toute prospérité qui n'est pas sujette à leur contrôle. On croirait. qu'ils ont par instinct une idée juste de l'état de la question. Car si on encourageait dans le pays musulman l'agriculture et le commerce, les avantages qui éen résulteraient naturellement, ne tarderaient pas à se manifester ; l'Etat s'enrichirait, la civilisation marcherait, la population s'accroîtrait, et alors cette poignée de féroces aventuriers trouverait de grands obstacles au maintien de l'autorité arbitraire qu'ils font peser sur le pays... " SHALER. ,(P. 37-38).
-------..." Le financier africain, toujours prêt à obtenir de l'argent par des violences et ,des extorsions, ignore ces calculs raffinés que possède un chancelier de l'Echiquier européen ; il lui serait ainsi édifficile de lever des taxes directes et régulières. Mais ce que quelques personnes appellent l'art de trouver,de l'argent, se pratique beaucoup plus aisément: à Alger qu'en beaucoup d'autres lieux. Que, ,par exemple, le dey soit pressé, il lui suffirait d'ordonner l'étranglement de deux ou trots gouverneurs, et de s'emparer de leurs trésors ; il fait décapiter quelques riches Maures, dont les biens se trouvent , confisqués ; il commande une irruption des Turcs chez les Bédouins ou les Kaïds indépendants, ou bien encore il déclare la guerre à quel-que, (puissance européenne faible ; et si on ne l'apaise pas par un .tribut ou présent fait fort à propos, ses croiseurs ne sont pas longtemps sans remplir son trésor ; enfin,, la dernière ressource de sa Hautesse est toujours une de ces intolérables oppressions appelées avarcas "... PANANTI. (P. 459-460).

" UN TEL MONOPOLE,, LE PLUS DESTRUCTEUR QUE L'ON CONNAISSE "...
..." Aucun des objets qui sortent du pays n'est assujetti à l'impôt, et par une ,raison fort simple, ce qui entre dans l'État peut être acheté indifféremment par tout le monde ; mais le gouvernement est ,le seul vendeur de ce qu'il est permis d'emporter. A l'exclusion des navigateurs et des , négociants; s'approprie les grains de toutes les espèces au prix commun de la place, et règle lui-même la valeur de, la laine, des cuirs, de la cire qu'on est forcé de livrer à ses magasins ; sans, avoir eu la liberté de les exposer au marché. Ce qu'il a obtenu pour peu de chose, il le fait m opter aussi haut qu'il veut, parce qu'il est .possesseur de marchandises de premier besoin, et qu'il n'est jamais pressé de s'en défaire. Un tel monopole, le plus destructeur que l'on connaisse, réduit à presque rien ce qu'une contrée si vaste et si fertile ,peut fournir aux besoins des nations. A peine les denrées qu'on en retire peuvent-elles occuper soixante ,à quatre-vingts petits , navires.
-------Une conduite moins oppressive aurait permis à toutes les facultés physiques et morales de se développer ; mais la tyrannie a craint ;que des peuples nombreux et riches ne devinssent trop impatients du joug sous lequel on les faisait gémir ; plutôt que de s'exposer à des révolutions qui doivent se faire plus tôt ou plus tard, une soldatesque insolente, avide et féroce, a consenti à voir le revenu public se réduire à très peu de chose "... RAYNAL. (T. II, P. 136-137).

..." Par ce même, système de monopole, et par la prohibition mise sur l'exportation de produits indigènes, le gouvernement a ruiné l6 .,ommerce, et presque anéanti l'agriculture dans ,le royaume "... SHALER. (P. 102).

..." L'exportation des huiles et des peaux préparées est expressément ,prohibée, excepté quand ces objets sont destinés aux ,provinces de l'empire Ottoman. Il faut encore une permission spéciale pour exporter des grains et des ,bestiaux. La conséquence de ces prohibitions absurdes a été de porter le produit de l'huile et des grains souvent au-dessous et jamais au-dessus des besoins des habitants, dans le pays du monde peut-être le plus fertile. En 1819, il y eu une si grande disette de grains, qu'on fut obligé d'importer de l'étranger plus, de 50.000 boisseaux de blé, seulement pour la consommation d'Alger "... SHALER. (P. 102-103) .

" VÉRITABLEEMBLÈME DÉ VÉNALITÉ ET DE CONCUSSION "...
..." La jouissance de quelque place quelconque à Alger est soumise à des avaids en sa faveur et contre elle. Il n'y oa pas jusqu'à la place d'un négociant qui ne, soit tenue à présenter tous les ans des pommes, des châtaignes, des anchois, des olives, etc., aux grands et petits qui sont employés dans le gouvernement. Les actes de bienséance, de ;cérémonie, de politesse sont toujours suivis à Alger d'une donation en argent et en effets. Toub est réglé ; on ne connaît, point les compliments qui ne sont pas accompagnés de présents.
Les places à Alger, comme dans !toute la Turquie, n'ont point d'appointements, mais il y a de nombreux moyens de les bonifier, et de s'enrichir "... VENTURE DE PARADIS. (P. 112).

..." Les ministres du dey n'ont point de traitement régulier ; mais, comme ils ne servent pas pour l'honneur, leur paraît tout simple de prendre d'autres moyens de lever des contributions sur le public. Aussi peut-on dire que tous les officiers du dey dont de véritables emblèmes de, vénalité et de concussion "... PANANTI. (P. 433).

UN GOUVERNEMENT SANS CONSCIENCE
DE SA MISSION

..." TOUT L'ARGENT QUI PROVIENT DU ROYAUME EST PORTE AU DEY "...
..." Les revenus qui proviennent en grande partie des tributs, des présens levés sur les puissances européennes, de la rançon des esclaves, du monopole des grains, des taxes arbitraires imposées . sur les étrangers, et des droits insignifiants que paient les marchands maures, juifs et chrétiens, s'élèvent, d'après Rehbinder, à .environ 4.000.000 de francs ; le même auteur n'évalue les dépenses qu'à 2.300.000 francs. Si le dey éprouve un besoin pressant d'argent, il y remédie quelquefois en donnant l'ordre ,d'étrangler un ou deux beys ou quelques Maures opulents dont les richesses deviennent alors sa proie ; de faire une excursion chez les .Bédouins, ou bien de déclarer la guerre à quelque nation européenne ",.. SHAW (P. 209).

..." Tout l'argent qui provient du royaume est porté au dey qui .le conserve pour la paie des soldats et les dépenses de l'Etat Le dey n'a légitimement en propre que sa paie comme soldat, le surplus devant être .porté au trésor royal ou bourse commune de la république, où l'on ne touche que pour de grandes nécessités. Cela doit être ainsi ; mais comme le dey ne tient aucun compte, . il peut disposer de l'argent indirectement et en cachette, comme il le juge à propos, ,prenant pourtant garde de ne rien laisser péricliter, surtout , de ne .point retarder la paie des soldats et d être secret s'il fait sortir de l'argent du royaume, car il serait d'abord accusé de concussion et de vol. Il doit taxer le .prix de toutes les denrées et tenir 1.1 main à la punition de ceux qui vendent plus cher, ou fraudent les mesures, et les punir sans rémission "... PEYSONNEL (P. 408 - 413).

..." On doit observer aussi que les Beys, toujours occupés de leur fortune, ,ne remettent bien sou-vent à la Trésorerie d'Alger qu'une petite partie de leur recette. Ils font même quelquefois passer clandestine-ment toutes .leurs richesses dans quelque pays éloigné, où ils fuient bientôt eux-mêmes "... LAUGIER DE TASSY (P. 60).

" LA COURSE ÉTANT LE PRINCIPAL REVENU, IL NE POUVAIT PAS ÉTRE QUESTION D'Y RENONCER "...
..." Le commerce étranger de cette ville se réduit principalement aux cargaisons des prises ".,. LAUGIER DE TASSY (1-'. 47).

" TABLEAU RES RECETTES POUR L'ANNEE 1822
(Extrait). Tribut payé par
-------- le roi de Naples 24.000 dollars espagnols
-------- le roi de Suède 24.000 -
-------- le roi de Danemark 24.000 -
-------- le roi de Portugal 24.000 -
-------Soit 96,000 sur 434,800 dol. esp.
SHALER (P. 49).

,.." La politique extérieure des Deys se trouvait, comme leur ,politique intérieure, dominée par la questien financière. La Course étant le principal revenu, il ne pouvait pas être question d'y renoncer, est les premiers qui, sons l'influence de la terreur causée par les bombardements, essayèrent de le faire, tombèrent sous les coups de la Milice, qu'ils ne "purent pas solder régulièrement. Ils avaient cependant essayé d'ouvrir une nouvelle source de richesses, en soumettant par la force ,des armes le Maroc et Tunis à leur payer un tribUwt annuel ; mais les Chérifs se dérobèrent rapidement au joug, et, à l'Est, il fallut multiplier les expéditions pour faire respecter les engagements pris par les vaincus ; il en résulta que les frais absorbèrent et dépassèrent quelquefois le produit ; les territoires indigènes, ravagés par le passage des troupes, refusèrent l'impôt ". GRAMMONT' (P. 236),

" CETTE VENTE EST TRES AVANTAGEUSE POUR L'ETAT ".,..

..." Les rais, ou capitaines de corsaires, forment un corps respecté et très considéré à cause des richesses que leurs courses procurent au pays dont ils sont les plus fermes appuis "..SHAW (P. 174).

..." Après avoir mouillé dans le 'port, le capitaine conduit tous les esclaves au palais du Dey, où les consuls des puissances étrangères sont aussitôt appelés, et qui, en présence du Dey, demandent à ces infortunés s'il s'en trouve parmi eux de leurs nations respectives. S'il s'en présente, les consuls s'informent d'eux-mêmes s'ils étaient passagers ou s'ils fusaient partie de l'équipage du bâtiment pris. Dan's le premier cas, ils sont remis à leurs consuls ; mais s'ils ont été pris les armes à la main, ils sont de droit esclaves. Le Dey fait alors ranger tous ceux qui sont dans ce cas, et en prend huit à son choix, lequel tombe ordinairement sur le capitaine, les officiers-mariniers, les ouvriers surtout les charpentiers, qu'il envoie conjointement au bagne du gouvernement ; les autres sont conduits au bati°tan ou marché aux esclaves où il s'en fait une première vente, et où les delets ou courtiers les promènent l'un après l'autre, en faisant connaître à haute voix leurs bonnes qualités, leurs professions, et le prix que l'on en offre. Mais ces ventes ne s'élèvent jamais bien haut, parce qu'il s'en fait une seconde au palais du Dey, où l'esclave et remis entre les mains du plus offrant et dernier enchérisseur. L'Etat retire un bénéfice considérable tant de la vente des esclaves que de leur rachat, qui est de dix pour cent du prix d'enchère. Le Dey emploie à la construction des bâtiments de guerre tous les esclaves qui y sont propres, comme les charpentiers, les calfats, les forgerons, etc. ; il prélève les deux tiers sur les journées que leur paient les armateurs de ces bâtiments, et leur Iaisse l'autre tiers.

..." Les esclaves des particuliers peuvent être divisés en deux classes : ceux qui sont achetés pour le service personnel des acquéreurs, et ceux qui le sent par des marchands dans le but d'en obtenir de fortes rançons. Les premiers sont plus ou moins heureux ou malheureux, suivant les qualités mutuelles des mai-ires et des captifs. Mais, de quelque manière qu'il en soit, les maîtres sont naturellement intéressés à ménager leurs esclaves, de peur qu'ils ne tombent malades et meurent.
-------Quant aux autres, ils sont réellement à plaindre, parce qu'ils se trouvent au pouvoir d'hommes insensibles qui cherchent à tirer d'eux tout le parti possible, et à en venir à leurs fins à force de mauvais traitement.

..." Les esclaves de l'Etat paraissent avoir été beaucoup moins malheureux à l'époque où écrivait M. L,augier de Tassy, qu'ils ne le sont aujourd'hui. Voici la description que le capitaine anglais Croker, envoyé à Alger en 1815, fait de la prison des chrétiens.

..." Cet affreux séjour se trouve dans une des rues les plus étroites d'Alger. Une petite cour carrée qui est à l'entrée sert aux captifs à prendre l'air. Leur nourriture journalière consiste en deux pains noirs d'une demi-livre chacun ; ceux qui travaillent ont de plus dix olives. Mais comme les travaux cessent le vendredi, qui est le jour de repos des Turcs, ces infortunés restent enfermés toute la journée, et ne reçoivent autre chose du gouvernement algérien que de l'eau. Heureusement que la charité d'un aga turc y supplée. Cet homme humain, qui avait éprouvé dans sa jeunesse le malheur d'être esclave, a fait une fondation destinée
à fournir le vendredi une livre de pain à chaque prisonnier. I'1 est digne die remarque que c'est un Mahométan, un Algérien, qui a le premier contribué au soulagement des malheureux esclaves ; et que le pouvoir qui les retient dans les fers, quelque tyrannique qu'il soit, veille néanmoins à la fidèle exécution de cette disposition bienfaisante. De cette cour, dit le capitaine Croker, je montai 'par un escalier de pierre dans une galerie autour de laquelle régnait un certain nombre de chambres humides et dont le plancher était en terre ; de fortes grilles de fer assuraient l'inviolabilité des portes et des fenêtres. Deux de ces pièces contenaient vingt-quatre espèces de cadres suspendus les uns au-dessus des autres et formés uniquement de quelques branches d'arbres entrelacées. Quelques pitoyables que fussent ces lits, il fallait encore payer pour être admis à s'y reposer ! L'odeur en était si infecte, qu'une des personnes qui m'accompagnaient fut sur le point de se trouver mal "... SHAW (P. 200 - 204).

..." Quand le capitaine a mis son vaisseau en sûreté dans le port, il fait conduire tous les esclaves au palais du Dey. On mande ensuite les Consuls étrangers pour reconnaître s'il y a des captifs de leur nation : s'il s'y en trouve, ces Ministres s'informent s'ils étaient passagers, ou s'ils faisaient partie de l'équipage. S'ils peuvent prouver le premier, ils sont délivrés au Consul ; mais s'ils appartiennent au vaisseau, ou qu'ils aient été pris les armes à la main, ils sont retenus en servitude "... LAUGIER DE TASSY (P. 16-17).

..." Cette vente est très avantageuse pour l'Etat.. Il perçoit dix pour cent sur le prix du rachat de chaque esclave. Il impose aussi un droit sur l'importation et l'exportation de ces malheureux ".., LAUGIER DE TASSY (P. 20).

..." Les nègres ne font qu'une très faible partie de 'la population ; ce sont pour la plupart des esclaves achetés dans l'intérieur de l'Afrique ou à Tripoli, et auxquels on accorde facilement la liberté, quand ils veulent embrasser l'islamisme ; ce qu'ils n'oublient jamais de faire L'esclavage domestique a toujours été très doux dans ce pays. C'est moins un état de servitude qu'un échange de services et de protection. Par le petit nombre de mulâtres qu'on trouve à Alger, on serait ;tenté de croire qu'ici comme aux Etats-Unis, il existe un préjugé contre la couleur, préjugé qui est probablement le principe de l'esclavage "... SHALER (P. 91).

..." Le nombre des esclaves emprisonnés ne fut pas inférieur pendant la durée de la Régence, à trente mille.
-------Des soulèvements partiels furent impitoyablement réprimés en 1531, 1552, 1662, 1753, 1763.
-------Afin de venger les supplices infligés à l'un de leurs compatriotes par l'Inquisition, les Maures se cotisaient pour acheter un captif qu'ils destinaient au supplice. Le feu et la privation d'aliments délivraient de la vie de véritables martyrs "... M. MARTIN. " La vie et les conditions des esclaves chrétiens dans la Régence d'Alger ".

" UN TRESOR QUI PEUT LES SOUTENIR ENCORE BIEN DES ANNEES ".
-------Les Turcs, en établissant leur gouvernement à Alger, ont songé à faire de la piraterie, la source principale de leurs revenus. Les jalousies mutuelles, la faiblesse et la politique intéressée des puissances maritimes de la chrétienté, ont servi leurs calculs au-delà même de leurs espérances ; car, jusqu'à une époque assez rapprochée de nous, ils y ont trouvé non seulement des ressources pour tous leurs besoins, mais même l'avantage d'accumuler ua trésor, qui peut les soutenir encore bien des années. SHALER (P. 47).

..." Tandis que la milice était la force du gouvernement d'Alger au dedans, les corsaires étaient sa force au dehors, et lui apportaient un élément nécessaire, la richesse. Il lui devait les dépouilles du commerce européen, les esclaves chrétiens, esclaves non seulement du gouvernement, mais des indigènes eux-mêmes qui se réconciliaient ainsi avec la domination des Turcs, à laquelle ils devaient les marchandises à bon marché, le travail à prix réduit, et, par le rachat des esclaves que les chrétiens firent bientôt sur une grande échelle, une nouvelle source d'opulence "... NETTEMENT (P. 64).

..." Les Algériens avaient 'l'avantage de n'avoir pas 'de commerce, de sorte qu'on ne pouvait leur rendre le mal qu'ils faisaient. Leur commerce était la guerre.

..." Il résultait de ces prises continuelles, de grandes richesses à Alger, richesses acquises non par l'échange, comme dans une situation normale, mais par la violence. Ces richesses étaient de deux genres : les marchandises et les esclaves, qui étaient aussi au nombre des marchandises. Ce n'était pas la moins précieuse de toutes, tant par le travail qu'on en tirait que par leur rachat, que le zèle et la douleur des familles tentèrent dès le début "... NETTEMENT (P. 81).

..." La course devenait de jour en jour plus difficile et de moins en moins fructueuse Il n'était plus possible aux pirates de s'attaquer utilement aux navires de guerre de la France, de l'Angleterre et de l'Espagne ; les vaisseaux marchands du haut commerce avaient pris l'habitude de naviguer par caravanes, et de se faire escorter ; il restait donc pour tout butin quelques misérables barques, dont la cargaison ne payait pas les frais de l'armement, et l'on risquait de tomber à chaque instant sous le canon des croisières. Le nombre des corsaires diminua dès lors de jour en jour ; personne ne se présenta plus pour équiper de nouveaux navires ; les meilleurs des capitaines et des marins passèrent au service public, et le port d'Alger, jadis si animé, devint presque désert. Les bagnes des grands reïs, qui avaient contenu des milliers d'esclaves, se vidèrent et tombèrent en ruines ; ceux de l'Etat se dépeuplèrent peu à peu, et la ville qui avait vu, en une seule année exposer au Badestan près de vingt-cinq mille captifs, n'en contenait plus que trois ou quatre cents au moment de la conquête française "... GRAMMONT. (P. XII-XIII).

" IL N'A JAMAIS EXISTÉ D'ETAT PLUS ECONOME DES FONDS PUBLICS QUE LE GOUVERNEMENT D'ALGER "...

..." Il n'a jamais existé d'Etat plus économe des fonds publics que le gouvernement d'Alger. Le trésor de l'Etat est ménagé avec un scrupule inconcevalble. Il ne sort du trésor pour des dépenses courantes que les sommes fixées et arrêtées depuis un temps immémorial, et dans les occasions même les plus urgentes, quoi-nue le khrasné soit très riche, tout se fait par corvée. Lors de la guerre des Danois, en 1770, et en dernier lieu dans les divers bombardements qu'ont tentés si infructueusement les Espagnols, on décida d'augmenter les fortifications de la marine et celles de la rade. Tous les habitants furent obligés de travailler et d'aller cher-cher des pierres à une carrière qui est ouverte du côté de Bab-el-Wad "... VÉNTURÉ DÉ PARADIS. (P. 88).

" TABLEAU DES DÉPENSES DU GOUVERNEMENT EN 1822 "...
Dollars espagnols
---------Ouvriers, artistes, etc., qui travaillent dans les chantiers 24.000
---------Achat de bois de charpente, cordages, etc 60.000
---------Solde des officiers de mer et des marins 75.000
---------Solde des militaires de tous grades 700.000
---------Total 859.000
SHALÉR. (P. 49).

..." Beaucoup d'obstacles se présentent à celui qui veut voyager dans l'intérieur. Il n'y a point de ponts sur les rivières ; et, pour les grandes routes, elles choqueraient la politique du gouvernement. Il les regarde comme pouvant faciliter la marche d'un ennemi, et ouvrir des communications au peuple. Etrange paradoxe ! Le gouvernement pense qu'il est de son intérêt de prévenir ces communications "... PANANTI. (P. 155).

" LES RUES SONT MAL PAVÉES, SALES, OBSCURES, NON AÉRÉES"...

.." Excepté la principale rue d'Alger, toutes les autres sont étroites et d'une malpropreté extrême "... SHAW. (P. 292).

..." Les rues sont mal pavées, sales, obscures, non aérées...
... Nous n'aurions jamais pu avancer au milieu de ces masses, si des gardes qui marchaient devant nous ne nous eussent ouvert le passage en distribuant des coups à droite et à gauche avec une dextérité et une prodigalité toute particulière à ce pays "... BIANCHI. (Relation 1675).

..." Il n'y a ni places ni jardins dans la ville "... SHAW (P. 293).
---------..." Alger ne possède point non plus d'eau douce "... SHAW (P. 296).
---------..." Personne ne peut faire venir l'eau dans sa maison, et un grand, avec grand-peine et en payant, peut en obtenir la permission. Toutes les fontaines sont publiques, et la grâce que l'on accorde plus facilement est de faire une fontaine publique près de la maison d'un grand qui en sollicite l'établissement pour l'avoir à portée "... VENTURÉ DÉ PARADIS. (P. 163).

---------
..." L'eau qui se perd, soit en buvant, soit en la tirant dans les vases destinés à cet effet, se réunit, et est conduite par d'autres tuyaux dans des égouts et des cloaques où se rendent les ordures des maisons, et qui communiquent à une grande fosse située près de la Marine d'où toutes les immondices se jettent dans le port ; ce qui produit une grande puanteur à la porte du môle durant les chaleurs "... SHAW. (P. 297).

..." Il n'y a à Alger, ni dans le reste du Royaume, aucune hôtellerie où les étrangers puissent loger. Il est vrai qu'il en vient si peu dans le pays, que les aubergistes ne gagneraient pas de quoi subsister "... LAUGIÉR DÉ TASSY. (P. 264-265).

..." Mais il n'y a à Alger ni auberges ni hôtels pour les chrétiens, ils y seraient d'ailleurs à peu près inutiles, à cause du petit nombre d'étrangers libres qui y abordent. Les chrétiens qui sont appelés à Alger par un motif quelconque descendent, soit chez les personnes auxquelles ils peuvent être recommandés, ou chez les consuls de leurs nations, qui se font toujours un plaisir de les recevoir. Quant aux pauvres voyageurs du pays, il y a des espèces de tavernes tenues dans les bagnes par des esclaves du gouvernement, et où l'on trouve, en payant, à peu près ce qui est nécessaire à la vie "... SHAW. (P. 296)?

..." Alger peut avoir 5.000 maisons en comptant 180 maisons juives. Il n'y a dans la ville ni places publiques, ni jardins : les rues y sont extrêmement étroites. Mais on doit observer que les appartements sont toujours bâtis à l'entrée d'une cour plus ou moins vaste, selon la maison, et que ces cours mangent beaucoup de terrain. Alger a l'étendue qu'aurait en France une ville de vingt-cinq à trente mille âmes, et je pense que l'on approcherait de sa vraie population en l'évaluant à cinquante mille âmes, eu égard au nombre des femmes qui sont toujours enfermées et qui n'augmentent jamais la foule. Parmi ces 50.000 âmes, on peut compter 6.000 Couloglis, 3.000 Turcs levantins, 7.000 Juifs, 2.000 esclaves et autres chrétiens, et 32.000 Maures, parmi lesquels seront compris les gens de Biscara, qui font ici l'office que les Savoyards et les Auvergnats remplissent à Paris ; les Zevawis, les Mozabis, les Gerbavis, etc... Je ne compte que 3.000 Turcs à Alger, parce que la garni-son des places, les camps et les sipahis qui sont au service des beys enlèvent toujours une grande partie des 7 à 8.000 Turc levantins "... VÉNTURÉ DÉ PARADIS. (P. 3).

..." On pourrait peut-être juger de la population d'Alger par les moulins à farine qu'il y a dans la ville, moulins à meules tournées par des mules ou des chameaux ; il y en a vingt-cinq tenus par les Mozabis, qui font au plus trente mesures chacun par jour "... VÉNTURÉ DÉ PARADIS. (f. 97).

..." Il y a différentes opinions sur la population de ce royaume. Il ne s'agit pas ici d'un dénombrement exact ; on ne peut tout au plus qu'en juger approximativement et par comparaison avec d'autres pays, dont les statistiques sont bien connues. Ainsi, considérant le petit nombre des villes commerciales et manufacturières, le despotisme barbare qui pèse sur le pays, et la vie pastorale, qui est encore celle d'un grand nombre de ses habitants, je pense que, malgré les avantages d'un beau climat et d'un sol fertile, la population de ce royaume, pour une surface d'environ trente mille mètres carrés, est plutôt au-dessous qu'au-dessus d'un milion "... SHALÉR. (P. 22).

..." Tous ceux qui nous ont donné des descriptions de cette ville (Alger) me semblent avoir mis bien de l'exagération dans l'évaluation du nombre de ses habitants. Le docteur Shaw le porte à plus de cent mille ; pour moi, quand je compare Alger à d'autres villes, dont la population est bien connue, je la réduirais à environ cinquante mille âmes "... SHALÉR. (P. 65-66).

" LA PESTE DE 1787 LUI ENLEVA QUATORZE MILLE TROIS CENT TRENTE MUSULMANS "...

..." Pour donner une idée du point où en sont aujourd'hui les sciences et les arts en Barbarie, je ferai d'abord remarquer que pour ce qui concerne la médecine, on y manque absolument de bons médecins, puis-qu'il y a peu ou presque point de maladies dangereuses qui ne deviennent mortelles ou du moins ne soient d'une très longue durée. Il est vrai que beaucoup de Mahométans professent une ,telle soumission pour le dogme de la prédestination, qu'ils se refusent opiniâtrement à toute espèce de conseils ; et s'obstinent à ne prendre aucun genre de remède, tandis que d'autres se moquent des secours de la médecine et attendent leur guérison de la nature seule, ou bien ont recours à ce qu'ils appellent magar-eah, c'est-à-dire aux charmes et aux enchantements. On voit par là ce que peut être la médecine à peu près dans tous les Etats ottomans. En Barbarie elle se réduit à quelques opérations et prescriptions que je vais faire connaître, et à l'usage des bains, que l'on emploie dans tous les genres de maladies, sans distinction d'âge ni de tempérament "... SHAW. (P. 81-82).

..." On exagérait plus ou moins autrefois la population d'Alger. Elle est réduite à moins de cinquante mille habitants depuis que, suivant le relevé fait aux trois portes de la ville, la peste de 1787 lui enleva quatorze mille trois cent trente quatre musulmans, dix sept cent soixante quatorze juifs, six cent treize chrétiens libres ou esclaves, sans compter ce qui dut périr dans les jardins de son territoire "... RAYNAL. (T. II, P. 112).

..." Les A'gériens se sont toujours fait gloire de négliger toutes les précautions employées par les chrétiens pour prév; nir la communication de la peste. C'est, à leur avis, s'opposer aux décrets éternels de la Providence, et aux cours de la prédestination absolue, qui en est le résultat "... LAUGIÉR DÉ TASSY. (P. 198).

..." Un de ces appartements sert souvent au logement de toute une famille, surtout lorsque les parents permettent à leurs enfants mariés de demeurer chez eux, ou lorsque plusieurs familles louent une seule maison pour y loger ensemble. Telle est la raison pour laquelle les villes de Barbarie sont si peuplées, et que la peste y fait de si gr( nds ravages "... SHAW. (P. 96).

" TOUTE LEUR SCIENCE EST TIRÉE D'UNE TRADUCTION ESPAGNOLE DE DIOSCORIDE "...
..." On ne voit pas un seul médecin à Alger, ni dans le reste du Royaume. Les bigots Mahométans en censurent l'usage. Ils prétendent que c'est tenter Dieu, que de prendre dans les maladies internes des remèdes prescrits par l'art de l'homme. J'ai vu le Dey Baba Hall emporté par une fièvre violente, sans qu'on pût l'en-gager à prendre aucun remède ; quoiqu'un habile chirurgien François, qui était son esclave, lui promît guérison. Il rejetta tout secours, sous prétexte que le nombre de ses jours était fixé par les décrets éternels. Les seules applications externes sont employées parmi les Algériens. Chaque famille est pourvue de ces sortes de remèdes en cas d'accidents "... LAUGIÉR DE TASSY. (P. 199-200).

..." Il est facile de concevoir que la médecine n'est pas à Alger dans un état brillant. On donne aux docteurs le nom de thibid ; et toute leur sc'enee est tirée d'une traduction espagnole de Dioscoride. Leur étude favorite est celle de l'alchimie. Leur manière de traiter les malades paraîtrait assez singulière à un praticien d'Europe. Ils versent du beurre fondu sur les blessures nouvelles ; dans les cas de rhumatismes, ils font des piqûres avec la lancette sur les jointures les plus affectées ; ils appliquent le feu à un ulcère obstiné ; dans les inflammations, ils couvrent la tête du malade de feuilles de certaines plantes médicales ; et pour les morsures des scorpions ou des serpents, ils emploient de l'ail et de oignons mâchés. En Barbarie, un professeur de médecine n'a de confiance qu'aux remèdes extérieurs"... PANANTI. (P. 371-372).

..." Les médecins maures sont complètement de l'école de Sangrado, et, selon eux, la saignée est un remède infaillible contre toutes les maladies "... PANANTI. (P. 372).

" L'HUMANITÉ SOUFFRANTE N'OBTIENDRAIT AUCUN SECOURS "...

...." Il n'y a que la charité de l'Espagne qui ait consacré un fonds pour l'établissement d'un petit hôpital, où l'on reçoit les esclaves chrétiens. Si cet hôpital n'existait pas, en verrait périr dans les rues les esclaves affectés de maladies, et l'humanité souffrante n'obtiendrait aucun secours "... RAYNAL (T. II, p. 155-156).

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..." Cet hôpital (espagnol) était trop étroit encore, malgré tant d'agrandissements pour le nombre de ceux qu'on y présentait ; de sorte que les lits des malades arrivaient jusqu'à l'autel où l'in célébrait les saints mystères du Dieu leur hôte et leur protecteur. On y recevait les chrétiens libres, comme les chrétiens esclaves, de toutes les nations sans distinction.
---------Ainsi la charité avait tout créé à Alger, le rachat des esclaves, l'hôpital, l'église, le cimetière "... NETTE-MENT (P. 87).

..". Le capitaine Croker visita aussi l'hôpital espagnol, ainsi nommé parce qu'il est entretenu aux frais de l'Espagne. Il y vit, étendus sur la terre, des infortunés de tous les âges et de tous les sexes : des vieil-lards, des femmes, des enfants. Tous avaient les jambes tellement enflées et ulcérées, que leurs plaies parais-saint incu_e ;les. Il remarqua surtout, au milieu de plusieurs autres femmes, une pauvre Sicilienne qui fondit en larmes en lui disant qu'elle était mère de huit enfants, et en lui montrant six qui étaient esclaves avec elle depuis treize ans ! La plupart de ces femmes avaient été enlevées dans des descentes faites par les Barbaresques sur 1.s côtes de l'Italie. En quittant ce lieu d'horreur, le capitaine rencontra des esclaves mâles que l'on ramenait du travail au bagne, conduits par des infidèles armés d'énormes fouets ; plusieurs d'entre eux étaient pesamment chargés de chaînes "... SHAW (P. 204).

" LES TROIS-QUARTS DU TERRITOIRE NE SONT PAS CULTIVES

" L'industrie est et doit être nulle chez des peuples plongés dans des ténèbres aussi épaisses. On y connaît aucun art agréable, et ceux de nécessité première y sont très imparfaits. Le plus important de tous, l'agriculture, est encore dans l'enfance. Les trois-quarts du terrain sont en friche, et le peu qui est labouré l'est sans intelligence "... RAYNAL (T. I, p. 82).

" Avec le sol le plus beau de la terre, il est impossible de trouver une contrée qui soit plus négligée que l'Etat d'Alger. Il est à peine besoin de dire que là où les trois-quarts du territoire ne sont pas cultivés, l'agriculture doit être dans le dernier degré d'abandon. A peine le soc de la charrue laisse-t-il une trace sur les terres labourées ; les prairies et les champs réservés pour la pâture sont à la vérité assez bien arrosés ; mais les habitants ignorent absolument l'art d'élever et de nourrir les moutons et les bêtes à cernes. Les jardins sont remplis d'arbres à fruits, mais plantés sans goût et sans aucun ordre.

---------Dans l'Etat d'Alger il se fait une grande quantité d'huile d'olives qui en général n'est pas d'une bonne qualité, parce qu'on ne sait pas la bien préparer. On laisse croître l'olivier sans le jamais tailler, et son fruit en souffre beaucoup. Le vin qui est fait par des esclaves chrétiens est aussi bon que celui des Roses, en Espagne; mais il pert aisément son goût et se conserve peu. On fait le beurre en mettant le lait dans une peau de chèvre qui est suspendue et qu'en frappe de chaque côté avec des bâtons, jusqu'à ce que le beurre puisse être foulé par la main. Ces procédés donnent un mauvais goût au beurre, qui de plus se trouve rempli de poils. On mout le blé dans des moulins que trois chameaux font tourner. Les cultivateurs ne connaissent point les engrais des terres, et se bornent à mettre le feu au chaume et aux herbes sauvages, usage qui produit quelquefois de graves accidents ; les flammes s'étendent plus loin qu'on ne voudrait ; elles créent dans l'atmosphère une dhaleur étouffante qui se répand avec une affreuse rapidité. Las hommes ainsi que les animaux ont de la peine à se soustraire à ce torrent enflammé "... PANANTI (P. 357 sq).

" ELLE EST REMPLIE DE LACS ET DE TERRES EN FRICHES "...
...." Mais ce qu'il y a de plus dangereux, ce sont les mauvaises exhalaisons qui partent de la rivière de i'Harach ,et des étangs de la Métidgé : depuis le mois de Juillet jusqu'après les premières pluies d'automne, les vents de terre portent dans les bords des fièvres qui mettent un équipage sur le cadre. " VENTURE DE PARADIS (P. 5).

..." La plaine de la Métidgé est coupée par la rivière d'Elarach, qui a son embouchure dans la rade à une lieue d'Alger. C'est une superbe plaine de 10 lieues de 1:ng sur 2 lieues de large ; elle va aboutir aux montagnes de l'Atlas habitées par les Cabaïlis. Il s'en faut malheureusement beaucoup qu'elle soit toute cultivée ; elle est remplie de lacs et de terres en friche. Les gens d'Alger et le beilik y ont des métairies d'ici et de là, où on met une petite maison pour le maître et des cabanes de joncs pour les cultivateurs maures ; on appelle ces cabanes gourbis. Pour en défendre l'entrée au vent, on !applique sur les côtés des bouses de vache "... VÉNTURE DÉ PARADIS (P. 6).

..." La plaine de la Mitidja, dont la partie Est touche à la ville, est probablement une des plus belles étendues de terrain qui existent sur notre globe, à la considérer sous le rapport de sa température, de sa fertilité et de sa position "...

..." Si ce malheureux pays pouvait, par l'enchaînement des choses, jouir encore une fois des bienfaits de la civilisation, Alger, aidé des seules ressources de la plaine de Mitidja, deviendrait une des villes les plus opulentes des côtes de la Méditerranée. Mais l'action silencieuse du despotisme barbare de son gouvernement ne laisse à sa surface que le désert, la stérilité et la solitude ". SHALER (P. 108-109).

" ON CROIT POUVOIR ASSAINIR CETTE PLAINE "...
..." La Mitidja, dont ce général a voulu former uneîle au milieu de ce vaste continent, et qui lui a inspiré tant d'autres projets chimériques, est un pays marécageux et malsain ; une plaine dont le sol ne vaut pas les autres terrains de la régence, et où règne continuellement une fièvre intermittente avec laquelle vivent presque toujours les habitants qui déjà sont acclimatés.

---------L'illustre général et ses partisans sont donc entièrement dans l'erreur, et je me vois obligé de contrarier leur système qui me paraît impraticable. On croit pouvoir assainir cette plaine.

...Le blé de ce pays est inférieur à l'autre, d'une couleur noirâtre et contenant moins d'amidon que tout autre blé. On ne peut le conserver plus d'un an, car il est susceptible de se gâter, quand même la semence viendrait -l'un autre lieu. Ce vice tient à l'air atmosphérique du pays.

...Je visite chaque année cette plaine au printemps, je craindrais la fièvre dans toute autre saison ; et même à cette époque j'ai le soin de prendre avec moi de l'eau de Cologne et d'autres préservatifs contre le mauvais air ; je fais aussi une provision d'eau que j'apporte d'Alger pour ma boisson. Cette plaine est comme an marais durant l'hiver ; pendant l'été et l'automne la fièvre y séjourne continuellement, au point qu'il est fort difficile de s'en préserver ". HAMDAN-BÉN-OTHMAN KHODJA (P. 48-52).

" IL N'Y A POINT DE CONFIANCE ET DE CRÉDIT A ALGER "...
..." Il n'y a point de confiance et de crédit à Alger, .et cependant on y voit peu d'espèces en circulation. Souvent même on les amasse et on les cache en terre, par une suite de l'incertitude et de la violence des volontés d'un gouvernement arbitraire "... PANANTI (P. 364).

..." Le commerce étranger de cette ville se réduit principalement aux cargaisons des prises "... LAUGIER DE TASSY (P. 47).

" IL N'EST PAS DESI PETITE TENTE OU LES FEMMES NE FABRIQUENT DES ÉTOFFES"...
..." Les arts mécaniques sont divisés en corporations, comme dans plusieurs des anciens Etats de l'Europe. Chacune de ces corporations est soumise à la juridiction d'un amine, dont l'autorité est très étendue et très arbitraire. Les Algériens ont beaucoup d'aptitude pour les travaux en maçonnerie et en brique, et peu-vent prétendre à un certain mérite d'exécution. Leurs broderies sont délicates et pleines de goût, et on en fait beaucoup d'envois à l'étranger ; mais, comme charpentiers, serruriers, cordonniers, ils en sont encore aux iUéments. Les bijoutiers et les horlogers d'Alger sont des étrangers. Cette ville a des manufactures pour les objets en soie, en laine et en cuir. SHALÉR (P. 91-92).

...Il n'est pas si petite tente du royaume, où les femmes ne fabriquent des étoffes, dont elles font, comme dans les' temps anciens, des vêtements peur les membres de la famille. Dans les villes et dans les principaux villages, il y a des métiers avec lesquels on en fabrique pour la vente. Une grande quantité de laine est employée à la fabrication de bournousses, d'hyks, de chais et de tapis, qui ne sortent pas du pays. On y fait des nattes de toutes sortes ; quelques-unes sont très belles, et servent même de tapis dans les appartements. L'art de tanner et de préparer les peaux semble être très bien connu à Alger. Les peaux de maroquin sont certainement ce qu'il y a de plus narfait dans ce genre "... SHALER (P. 91-93).

" IL N'Y A RIEN DE SI MISÉRABLE"...
..." Il n'y a rien de si misérable que la vie des gens qui habitent les campagnes et les montagnes d'Alger. Ils n'ont pour toute nourriture que du pain d'orge ou du couscousssou fait avec de la mantague ; ils ne connaissent point la viande, ni les herbages, ni les fruits. Si tous les gens de la campagne mangeaient du pain de froment, peut-être la récolte de blé ne suffirait pas. Les hommes et les femmes ne portent point de chemise : la même haïque qui leur sert le jour leur sert la nuit pour se couvrir. Leur lit, et c'est encore les plus aisés, est une simple natte de jonc sur laquelle ils s'étendent. Pendant l'hiver, ils sont obligés de recevoir dans leur tente leurs moutons, leurs vaches et leurs chevaux.
La femme est occupée toute la journée à moudre son orge avec un petit moulin à bras. C'est elle qui a le soin d'aller chercher l'eau et le bois. Ils ne s'éclairent jamais pendant la nuit qu'à la lueur d'un peu de feu ; ils ne connaissent point l'huile "... VÉNTURÉ DE PARADIS. (P. 130-131).

" COUVRIR LES YEUX DU CHEVAL CONDAMNÉ A MOUDRE LE BLÉ "...

..." Ils montrent à leurs enfants à lire et à écrire en même temps, usage qui est établi dans tout le Levant. Les maîtres tracent d'abord les lettres avec un crayon, et les écoliers les forment ensuite avec la plume. On continue cette manoeuvre jusqu'à ce qu'elle donne aux lettres la proportion requise. On leur en apprend en même temps la prononciation et la lecture.
Le maître punit les fautes de ses écoliers de la bastonnade ; assis comme ils sont sur des nattes avec les jambes croisées, pieds nus ; il lui est aisé de leur lier ces derniers avec un instrument fait exprès, nommé Falaca, qui les tient collés ensemble. L les fait ensuite tenir par quelqu'un dans une situation presque perpendiculaire, et y applique avec une règle ou un bâton autant de coups qu'en mérite la faute "... LAUGIER DE TASSY. (P. 191-192).

..." Toute l'instruction qu'on donne aux enfants consiste à les envoyer à l'école, où ils apprennent à lire et à répéter cinquante ou soixante aphorismes du Coran. Quand un enfant est capable de ce gigantesque effort d'instruction et de science, son éducation est finie "... PANANTI. (P. 368).

.." On ne peut cependant douter qu'un mode raisonnable d'instruction publique ne fît des habitants du nord de l'Afrique un peuple éclairé, tel que l'ont été leurs ancêtres dans de meilleurs temps. Mais il n'est point à espérer que les sectateurs de Mahomet s'occupent de cette grande amélioration. Ils trouvent plus convenable à leur politique barbare de couvrir les yeux du cheval condamné à moudre le blé. Ce qui doit étonner, c'est que le peuple qu'on mène ainsi paraît content et servilement soumis "... PANANTI (P. 369).

..." Chaque élève a une planche sur laquelle les caractères peuvent facilement être écrits et effacés. Sur la planche de l'un des élèves on écrit d'une manière nette et lisible un verset du Coran ; les autres élèves le copient successivement, et chacun apprend à un autre le sens des mots et la manière de former les lettres qui les composent. La leçon est répétée à haute voix par l'élève au maître qui est assis dans un coin sur ses talons, tenant en main une longue baguette, dont l'effroi maintient l'ordre et l'attention parmi ses élèves. Ainsi on apprend en même temps à lire et à écrire, et c'est probablement à cette méthode de simultanéité qu'est due cette admirable uniformité de caractères dans l'écriture des Arabes. L'éducation d'un Algérien est complète lorsque, à la possibilité de lire et d'écrire le Coran, il joint la connaissance des prières que lui enseigne le même maître "... SHALÉR. (P. 77 et 78).

" UNE BARRIÈRE IMPÉNÉTRABLE CONTRE LES CONNAISSANCES "...
.." Il est inutile de parler de l'état des sciences à Alger ; ou elles n'existent pas, ou elles sont méprisées ; la médecine même y est sans prix. Leur science est toute dans des charmes et des amulettes "...

..." Le Coran est toute leur littérature "... SHALÉR. (P. 77).

..." L'imprimerie, cette grande source des progrès des Européens, n'a point encore été introduite en Barbarie. Les gouvernements ont craint que les lumières ne se répandissent, et que d'innombrables copistes ne fussent privés d'occupations et de moyens d'existence. Il n'y a donc point dans cetté contrée de libre communication d'idées, et l'on n'y a pas fait le moindre pas vers la perfection. Les gens de lettres, appelés alfa-gui et talbi, pour l'ordinaire des imposteurs qui font usage du peu de talents qu'ils possèdent, avec la seule vue de maintenir la plus profonde ignorance dans la populace. Les Imans et les Musulmans, exclusivement dé-voués à l'étude du Coran, forment une barrière impénétrable contre les connaissances. C'est, à leurs yeux, un crime d'apprendre l'arabe ou de recevoir d'un étranger la moindre instruction "... PANANTI. (P. 367).

..." Depuis plusieurs siècles les Mahométans ont singulièrement négligé les arts et les sciences, quoique à une époque ils aient été presque les seuls peuples qui s'appliquassent avec succès à l'étude de la philosophie, des mathématiques et de la médecine. La vie errante des Arabes et la tyrannie avec laquelle les Turcs traitent les Maures, ne permettent ni aux uns ni aux autres de s'occuper des sciences, que l'on ne peut cultiver qu'en repos et en liberté. Pour les Turcs, ils sont la plupart d'un esprit si inquiet et si turbulent, si attachés à leur commerce et aux soins de s'enrichir, qu'ils ne sauraient avoir de goût pour l'étude "... SHAW. (P. 77).

..." Le peu de gens qui ont le loisir de se livrer à l'étude ne lisent guère que le Coran, et quelques commentaires assez inintelligibles que l'on en a faits. Tout le savoir de ces peuples se réduit aujourd'hui à. un peu de géographie et à quelques traités incohérents et fort insipides sur l'histoire moderne ; car tout ce que leurs auteurs disent des temps qui ont précédé la venue de Mahomet n'est qu'un tissu de contes romanesques "SHAW. (P. 79).

..." Tout ce que l'on sait à Alger et à Tunis, en fait de navigation se réduit à connaître les huit principaux rumbs de vent, et à dresser grossièrement une carte marine. La chimie, jadis la science favorite de ces peuples, n'a plus aujourd'hui pour objet chez eux que la distillation de l'eau de rose. Je n'ai vu qu'un petit nombre de leurs tibibs ou médecins qui connussent de nom, Rasis, Averroès, et autres anciens médecins arabes. La traduction espagnole de Dioscoride est à peu près le seul livre qu'ils lisent, encore s'amusent-ils plus à en regarder les planches qu'à en méditer le texte "... SHAW. (P. 79-80).

..." D'après ce que je viens de dire de l'état des sciences et de l'instruction publique dans ce pays, on ne doit guère s'attendre à ce qu'aucun art ou aucune science y soit porté à un certain degré de perfection "... SHAW. (P. 80).

..." Leur ignorance en mathématiques est telle qu'ils n'ont pas les premières notions de l'arithmétique ni de l'algèbre "... SHAW. (P. 88).

..." Les Algériens n'ont ni concerts, ni jeux, ni aucun spectacle public ouparticulier. Ils passent la moitié de leur temps à boire du café, ou à fumer. Ils n'ont jamais d'autre compagnie que celle de leurs propres femmes, de leurs concubines ou de leurs esclaves, Tous les jeux sont défendus, à l'exception des Echecs et des Dames ". LAUGIER DE TASSY (P. 184).

..." Il n'y avait aucune librairie, aucun café où on lût les papiers nouvelles, aucune société, aucun individu même dont on put tirer une idée nouvelle. Comment en effet un peuple rempli de préjugés si barbares se livrerait-il à l'étude ? Et, avec son esclavage et son indolence, encouragerait-il des amélioration ? " PANANTI (P. 118).

..." Les Maures professent la Religion musulman: : mais ils l'ont si défigurée, qu'un vrai Musulman aurait de la peine à la reconnaître. Ils en ont fait un ramas de superstitions extravagantes qui n'ont d'autre autorité que la coûtume, et l'artifice des Mara bous. Ces prêtres .ignorants s'en tiennent aux traditions orales "... LAUGIER DE TASSY (P. 99).

..." Très peu de femmes ont ici quelque idée de religion On regarde comme tout-à-fait indifférent qu'elles prient, ou non ; qu'elles aillent à la Mosquée,, ou qu'elles restent odhez elles. Elles sont en conséquence élevées dans l'ignorance la plus grossière. Elles ne semblent faites eue pour être les dupes des hommes "... LAUGIER DE TASSY (P. 154).

" COMME LA PLACE DE CADI S'ACHETE ORDINAIREMENT, IL N'EST PAS SURPRENANT QU'IL VENDE LA JUSTICE "...
..." Le cadi ou juge est nommé et envoyé par la Porte Ottomane, approuvé du grand moufty ou patriarche ottoman de Constantinople. Il n'a aucun pouvoir dans le gouvernement. Il juge et décide toutes les affaires qui regardent la loi ; mais comme ce juge achète indirectement son emploi à Constantinople, et qu'il vient pour s'enrichir, il se laisse aisément corrompre "... PEYSONNEL (P. 431).

..." Le cadi est nommé et envoyé par la Porte Ottomane avec l'approbation du grand moufty. Il n'a rien de commun avec le gouvernement e; ne doit s'enmêler en aucune manière ; mais il juge et décide, en général, de tout ce qui est du ressort des tribunaux dans les autres pays, et est tenu à cet effet de rester toujours chez lui sans pouvoir en sortir que par la permission du dey : ses jugements sont gratuits et sans appel, Toutefois, comme un cadi ne vient à Alger que pour s'enrichir, et que sa ocharge lui coûte toujours cher, il se laisse assez aisément corrompre par les parties. Néanmoins, le dey fait souvent juger dans son divan des affaires litigieuses qui sont de la compétence du cadi, surtout lorsqu'elles sont de quelque importance. En pareil cas il convoque tous les gens de loi de la ville.
---------Il y a aussi un cadi maure qui rend la justice aux gens de sa nation, lorsque le dey les lui renvoie ; mais il ne reçoit aucun traitement et est entièrement subordonné au cadi turc "... SHAW (P. 166-167).

..." Comme la place de cadi s'achète ordinairement il n'est pas surprenant qu'il vende la justice Ses décisions sont sans pitié et sans appel "... PANANTI (P. 448).
..." On suppose que les juges ne sont point toujours inaccessibles à l'argent et à l'influence du pou-voir "... SHALER (P. 35).

..." LA JUSTICE SE REND ICI D'UNE MANIERE TRES SOMMAIRE, SANS ECRITURE, SANS FRAIS ET SANS APPEL "...
..." Il n'y a point de code civil en Barbarie ; il est suppléé .par le Coran, de manière que toute la doctrine de la jurisprudence algérienne repose sur l'interprétation du divin livre et de ses saints commentateurs ".., PANANTI (P. 445).

" Le mal pour Alger, et les autres gouvernements africains, est que leurs chefs et leurs docteurs expliquent souvent ces lois dans un sens qu'elles sont loin d'avoir "... PANANTI (P. 445-446).

..." En Barbarie la coutume fait loi ; et comme rien ne change, les abus s'accumulent sans le moindre pas vers aucune amélioration "... PANANTI (P. 446).

..." Ici, 'comme dans les autres pays musulmans, le code civil se compose du Coran, de ses commentaires, et de quelques coutumes auxquelles l'expérience a donné force de loi Car chez les Turcs, c'est un axiome dont on ne s'écarte jamais, ce qui s'est fait une fois devient force de loi.
---------Quant à l'administration de la justice, elle est, dans chaque gouvernement de la Régence, entre les mains de deux cadis, l'un Maure, l'autre Turc. Ces magistrats tiennent leurs séances tous les jours, les vendredis exceptés. Ils prononcent définitivement sur toutes les affaires qui sont du 'ressort de leur tribunal. Il n'y a point d'avocats. Chaque partie plaide sa cause ; et le jugement suit immédiatement. On suppose que les juges ne sont point toujours inaccessibles à l'argent et à l'influence du pouvoir "... SHALÉR. (P. 34-35).

..." La justice, tant civile que criminelle, se rend ici d'une manière très sommaire, sans écriture, sans frais et sans appel, soit par le dey, le cadi, ou le rais de la marine "... SHAW (P. 176).

" UN TURC EST ÉTRANGLÉ, MAIS EN SECRET ; UN NATUREL EST PENDU, DÉCAPITÉ, MUTILÉ OU PRÉCIPITÉ D'UN MUR ÉLEVÉ"...

..." Les Juifs qui ont mérité la mort sont brûlés. Le châtiment réservé pour eux est le feu, le décallement, la pendaison et les crocs, et le dernier supplice pour les femmes est d'être noyées. Les Juifs qui méritent la mort sont toujours brûlés, et c'est à Bab-el-Wad qu'on dresse le bûcher. C'est là aussi le lieu du supplice pour les chrétiens ; il est à Bab-Azoun pour les Maures. Ceux-ci, de même que les chrétiens, ont la tête coupée ou sont pendus ; les cr. cs ne sont que pour les Maures dans des cas très graves. Ils sont aux deux côtés de la porte de Bab-Azoun attachés aux remparts ; on y jette le coupable, qui y reste accroché par un membre, et il y expire dans des supplices affreux. Le dey actuel a peu souvent condamné à un pareil supplice. Les sbires du Mezouar sont chargés de pendre, de brûler, de jeter sur les crocs et de noyer. Quand il s'agit de couper la tête, l'exécution se fait devant la porte de l'hôtel du gouvernement, et c'est un des jaldachs neubetgis de la porte qui fait l'exécution. Nul Turc ne se fait une honte de couper la tête, mais il est honteux pour lui de pendre un homme, d'étrangler et de noyer. Les femmes musulmanes surprises avec des chrétiens sont condamnées à être noyées. Les esclaves sont pendus à la porte du bagne du beilik "... VÉNTURÉ DÉ PARADIS (P. 158-159).

..." L'administration de la justice criminelle n'appartient qu'au pacha et à ses ministres. Le meurtre, le vol simple, le vol par effraction, l'incendie, la trahison, l'adultère sont punis de mort. Quand il s'agit d'un crime politique un Turc est étranglé, mais en secret ; un naturel est pendu, décapité, mutilé ou précipité d'un mur élevé, garni de grosses pointes en fer, qui l'arrêtent dans 'sa chute et le font périr dans de longs tourments. Mais dans ces occasions le tchaouch, ou bourreau, a quelquef.;is l'humanité, si on le paye bien, d'étrangler sa victime, avant de la précipiter. Si c'est un Juif, on le pend, on le décapite, ou on le brûle vivant. Les fautes légères et les petits larcins sont punis par des fortes amendes, par la bastonnade ou par la peine des travaux forcés ; ce dernier châtiment est le plus en usage, depuis l'abolition de l'esclavage des chrétiens : par là, au lieu d'esclaves, le gouvernement a des ouvriers pour les travaux publics "... SHALER (P. 33).

..." Pour ce qui est de la justice criminelle, il est admis en principe qu'un Turc, quel que soit le crime qu'il ait commis, ne peut jamais être puni en public. Mais il est conduit à la maison de l'aga de la milice, où selon la gravité du délit, et d'après les ordres du dey il est étranglé, reçoit la bastonnade, ou est condamné à une amende pécuniaire. La sentence est prononcée par l'aga, et exécutée à l'instant même. Quant aux Maures, aux Juifs et aux chrétiens, aussitôt que le dey a prononcé la peine d mort contre quelqu'un d'entre eux, le coupable est canduit sur la muraille au-dessus de la porte de Babazon, d'où il est précipité avec une corde de laine au cou, dont l'une des extrémités est attachée à un pieu planté en terre. Il est des condamnés qu'on laisse tomber sur des crocs en f:r fixés aux murailles, et dont les corps y restent jusqu'à ce qui'ls tombent en lambeaux : ce sont ordinairement des voleurs de grand chemin qui sont condamnés à ce terrible supplice. De plus on brûle vif, hors de la porte de Babalouet, tout Juif qui est seulement soupçonné d'avoir agi ou mal parlé du dey ou du gouvernement "... (SHAW (P. 178el79).

..." La profession de bourreau n'est à Alger ni une professoin particulière, ni une profession infâme. Lors-qu'un Arabe est condamné à avoir la tête coupée, on le mène devant une très petite place qui est devant la maison du dey, et un des neubetgis de la porte lui coupe le cou. Lorsqu'il s'agit de le pendre, un des sbires du mezouar lui attache la corde au cou ou il le fait faire par le premier juif ou chrétien qui passe. Les Turcs levantins se font difficulté de pendre ou d'étrangler, mais chacun d'eux se mêle sans répugnance de donner des coups de bâton ou de trancher la tête '... VENTURÉ DE PARADIS (P. 160).

NÉCESSITÉ D'UNE INTERVENTION

" LA GRANDE-BRETAGNE, LA FRANCE, LES ETATS-UNIS, LA SARDAIGNE ET LA HOLLANDE ONT, À DIFFÉRENTES ÉPOQUES, RÉSISTÉ AUX INSOLENTES PRÉTENTIONS DE LA RÉGENCE"...
..." Telle est cette régence d'Alger au grand renom, l'objet des chants des poètes, mais véritable épouvantail des enfants et vieilles femmes, et féconde en dégradations nationales. Certes, le lecteur s'étonnera qu'à une puissance aussi insignifiante, aussi méprisable, ait été si longtemps abandonné le privilège de gêner le commerce du monde et d'imposer des rançons qu'on ne pouvait discuter ; il s'étonnera que les grandes puissances maritimes de l'Europe soient allées, au prix de sacrifices immenses d'hommes et d'argent, établir des colonies aux dernières limites du monde, tandis qu'une poignée de misérables pirates conservait, sous leurs yeux, la jouissance paisible de la plus belle portion du globe, et les soumettait à des conditions qui ressemblaient beaucoup à l'hemmage d'un vassal.
---------Les Algériens, dont le système politique a pour principe la piraterie, s'arrogent insolemment le droit de faire la guerre à tous les Etats chrétiens qui n'achètent pas leur bienveillance par des traités. Ce sujet sera examiné au long dans. un des chapitres suivants ; il suffit de dire en passant que la Grande-Bretagne, la France, les Etats-Unis, la Sardaigne et la Hollande, ont, à différentes époques, résisté aux insolentes prétentions de la régence, et qu'aujourd'hui leurs relations avec Alger sont réglées par des traités indépendants, sans qu'elles aient à lui payer aucune espèce de tribut. Longtemps, l'Espagne a été avec Alger sur le même pied ; mais ses rapp erts sont dans ce moment une espèce d'état de guerre. Les empires de Russie et d'Autriche regardent Alger comme une province de l'empire ottoman, et obligent la Porte à empêcher tout acte d'hostilité contre leurs pavillons. La Suède, le Danemarck, le Portugal et Naples lui payent un tribut annuel ; le grand-duc de Toscane a acheté leur paix pour une somme une fois donnée. Alger tire un grand avantage de ses rapports avec la Toscane : souvent elle y envoie radouber ses vaisseaux ; et c'est la raison pour laquelle le grand-duc a obtenu la paix à des conditions si peu onéreuses. Les Algériens affectent d'être en guerre avec tous les autres Etats chrétiens. Les puissances, qui ont des traités avec Alger, y entretiennent des agents diplomatiques, qui ont le titre de consuls-généraux, et jouissent des droits, privilèges et exemptions accordés, par la Porte ottomane, aux ministres étrangers qui résident à Constantinople. Seulement ils n'y ont pas le droit d'asile, qui a bien pu exister dans quelques occasions, mais que le gouvernement n'a jamais reconnu "... SHALÉR. (P. 53-55).

" LES TRAITÉS DE PAIX TOUJOURS PRECAIRES "...
..."Les Etats d'Europe, qui n'ont jamais pu se réunir pour mettre un terme aux pirateries des Barbaresques, ont pris le parti de conclure avec eux des traités de paix toujours précaires "... SHAW. (P. 210).

..." Toutes les grandes puissances, par une politique peu, généreuse ont longtemps cherché à se conserver la navigation libre de la Méditerranée aux dépens des petites. Cependant toutes consentent aujourd'hui à être honiteusement tributaires des forbans d'Alger, sous différentes dénominations. Par exemple, le royaume des Deux-Siciles leur paie un tribut annuel de 24.000 doubles piastres (240.000 francs), outre des présents de la valeur de 20.000 doubles piastres (200.000 francs). La Toscane, en vertu d'un traité conclu en 1823, n'est sujette! à aucun tribut ; mais son consul e'e obligé de faire en arrivant un présent de 25.000 doubles piastres (250.000 francs). La Sardaigne, par suite de la médiation de l'Angleterre, est aussi exempte de tribut ; mais elle paie une somme considérable à chaque changement de consul.
Le Portugal a conclu avec Alger un traité sur les mêmes bases que les Deux-Siciles. L'Espagne ne paie pas de tribut, mais fait des présents à chaque muta_ion consulaire. L'Angleterre est tenue à un présent de 600 livres sterling (150.000 francs) à la même occasion, malgré 'le traité conclu par lord Exmouth ! Les Pays Bas, qui coopérèrent à l'expédition de cet amiral, sont compris dans le traité en question, et ne paient pas de tribut dans ce moment ; mais le dey ne cherche que l'occasion de rompre ses stipulaitions avec eux. Par la ,protection de l'Angleterre, les villes de Hanôvre et de Brême ont obtenu les mêmes conditions mais, à leur arrivée à Alger, leurs consuls sont obligés de payer de très fortes sommes. L'Autriche, par la médiation de la Porte-Ottomane, est exempte de tribut et de présents consulaires. Quoique par ses traités avec Alger, la France ne lui doive aucun tribut, elle a cependant, jusqu'à ces derniers temps, consenti à lui envoyer des présents. L'Etat de l'Église doit à la protection de la France de ne pas payer de tribut. La Suède et le Danemark p-lent un tribu annuel, consistant en munitions navales, de la valeur de 4.000 doubles piastres (40.000 francs), outre un présent de 10.000 doubles piastres (100.000 francs) au renouvellement de leurs (traités, c'est-à-dire tous les dix ans, et ceux que font leurs consuls en entrant en fonctions. Les Etats-Unis d'Amérique, p'r suite d'un traité conclu peu après celui de lord Exmouth pour l'Angleterre, ont obtenu les mêmes conditions que cette dernière puissance." SHAW (P. 210-212).

..." On pourrait ici faire une observation très juste ; c'est que les traités faits avec des Algériens lient les puissante . européennes, mais ils ne les lient jamais eux-mêmes. Lorsqu'il y a quelque chose qui les embarrasse, is s'en affranchissent st lorsqu'on veut argumenter contre eux d'après les clauses du traité, ils répondent : " Celui qui a signé un pareil traité n'est pas un saint, et on peut légitimement revenir du tort qu'il a fait au beilik par une stipulation irréfléchie. D'ailleurs si cela vous déplaît, la porte est ouverte, et vous pouvez vous embarquer ". Ce raisonnement péremptoire ferme ordinairement la bouche des consuls et coupe court à leurs réclamations ". VENTURE DE PARADIS (P. 156).

" LE CARACTERE BARBARE ET L'IGNORANCE DES TURCS NE PERMETTENT PAS D'ESPERER UNE AMELIORATION "...

..." Le gouvernement algérien, tel qu'il existe aujourd'hui, n'est nullement susceptible de perfectionne-ment, et le caractère barbare et l'ignorance des Turcs ne permettent pas d'espérer la moindre amélioration. Ce gouvernement absurde périra le jour où on le forcera tout à fait de renoncer à la piraterie : et, suivant le cours des événements, cette époque n'est pas bien éloignée.

-------Alors l'état d'abaissement des naturels, et l'absence complète d'instruction politique, seraient cause que ce peuple se partagerait en plusieurs tribus indépendantes ; la guerre naîtrait de petites jalousies locales, et toute espèce d'esprit de perfectionnement périrait par suite du caractère naturellement inconstant et féroce des habitants qui rentreraient dans l'état sauvage et feraient un désert de ce beau pays "... SHALER. (P. 206-207).

" LA GUERRE AURA ETE, DU MOINS UNE FOIS, UTILE ET JUSTE "...
..." Ou nous nous trompons, ou nous croyons avoir dit ce qu'il fallait pour démontrer que le repos, que la fortune, que la dignité de l'Eure chrétienne exigeaient la fin des brigandages que s'est permis durant trois siècles, que se permet encore 1 ;frique septentrionale. Cette vérité frappe également l'aveugle multitude et les politiques raisonnables "... RAYNAL. (T. I, P. 98).

..." Il n'est pas donné à la prévision de l'homme de calculer les avantages immenses que retirerait le genre humain de l'établissement d'une colonie anglaise dans la Numidie, si cette colonie recevait les institutions de sa métropole, et une organisation qui lui laissât le privilège d'une certaine indépendance, sans autres obligations à remplir que celles résultant d'une affection naturelle, du souvenir d'anciens bienfaits, et d'une communauté d'intérêt "... SHALER. (P. 210).

..." Je le répète, le simple principe de représailles autorise une semblable entreprise ; et son chef serait justifié en indemnisant les puissances de l'Europe de ces sacrifices que nécessitent les longues et continuelles agressions des chefs barbaresques "... PANANTI (P. 579).

..." Une guerre semblable ayant le rare avantage d'être d'accord avec l'humanité et une saine politique, ne pourrait manquer d'être très populaire "... PANANTI(P. 580).

..." De petits intérêts de commerce ne peuvent plus balancer les grands intérêts de l'humanité : il est temps que les peuples civilisés s'affranchissent des honteux tributs qu'ils paient à une poignée de barbares "... Intervention de M. DE CHATEAUBRIAND à la Chambre des Pairs (Cité par RAYNAL T.I., P. 136-137).

..." Pendant que l'on s'occupe des moyens d'abolir la traite des noirs et que l'Europe civilisée s'efforce d'étendre les bienfaits du commerce sur la côte occidentale de l'Afrique, ceux de la sécurité des personnes et des propriétés dans l'intérieur de ce vaste continent, il est étonnant qu'on ne fasse aucune attention à la côte septentrionale de cette même contrée, habitée par des pirates turcs, qui non seulement oppriment les naturels de leur voisinage, mais les enlèvent et les achètent comme esclaves pour les employer dans les bâtiments armés en .course. Ce honteux brigandage ne révolte pas seulement l'humanité ; mais il entrave le commerce de la manière la ,plus nuisible, puisqu'un marin ne peut naviguer aujourd'hui dans la Méditerranée, ni même dans l'Atlantique sur un bâtiment marchand, sans éprouver la crainte d'être enlevé par ces pirates, et conduit esclave en Afrique.
-------Le gouvernement d'Alger se compose des officiers d'un orta ou régiment de janissaires, soldatesque révoltée, prétendant ne pas reconnaître, même en apparence, l'autorité de la Porte-Ottomane qui, cependant, n'avoue pas cette indépendance. Le dey est toujours celui des officiers de Porta qui s'est le plus distingué par sa cruauté "... (Mémoire sur la nécessité et les mesures à prendre pour détruire les pirateries par Sir SIDNEY SMITH, envoyé de l'Angleterre au Congrès de Vienne, daté de Londres, 30 août 1814). - (Cité par RAYNAL,, T.I., P. 13).

..." A quel peuple es' il réservé de dompter ces forbans qui glacent d'effroi nos paisibles navigateurs ? Aucune nation ne peut le tenter seule ; car si l'une d'elles Pesait, peut-être la jalousie de toutes les autres y mettrait-elle des obstacles secrets. Ce doit donc être l'ou vrage d'une ligue universelle. Il faut que toutes les puissanc. s maritimes concourent à l'exécution d'un dessein qui les intéresse toutes également. Ces Etats, que tout invite à s'allier, à s'aimer, à se défendre. doivent être fatigués des malheurs qu'ils se causent réciproquement. Qu'après s'être souvent unis pour leur destruction mutuelle, ils consentent donc à prendre les armres pour ïeur conservation : la guerre aura été du moins une fois utile et juste ".... SHAW (P. 213-214).

" LE BONHEUR DES VAINCUS EN SERAIT LA SUITE "...

..." C'est surtout aux ,euples subjugués que celle -:à, deviendrait utile ; ils recevraient de leurs vainqueurs des lois, les sciences, les arts et le commerce ; les moeurs de la civilisation remplaceraient la barbarie ; les terres ne seraient plus sans culture, et les preductions du sol un fardeau pour leurs propriétaires. La contrée de la terre. la mieux traitée par la nature se trouverait affranchie du joug de fer d'une milice féroce et étrangère "... PANANTI (P. 580).

..."Les peuples conquis, mis tout à coup hors d'ét at de se défendre, abandonneraient vraisemblablement è
leur fatale destinée des maîtres et des gouvernements dont ils n'ont jamais senti que l'oppression "... SHAW. (P. 214).

..." Les conquêtes seraient d'autant plus sûres qu e le bonheur des vaincus en serait la suite Ces pirates, ces écumeurs de mer, deviendraient bientôt, à l'aide de bonnes lais, des hommes nouveaux. Elevés insensible-ment jusqu'à nous par la communication de nos lumières ils abjureraient avec le temps un fanatisme que l'ignorance et la misère avaient seules jusque là nourri clans leurs âmes, et se souviendraient toujours avec attendrissement de l'époque mémorable de notre bienfaisante conquête, Puisse un semblable projet se réaliser un jour!" SHAW (P. 215
)